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15/11/2007 | FRANCE | N°07/03361

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0113, 15 novembre 2007, 07/03361


COUR D'APPEL DE LYON
Troisième Chambre Civile
SECTION B

ARRÊT DU 15 Novembre 2007

Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 15 mai 2007-No rôle : 2006j3196

No R.G. : 07 / 03361

Nature du recours : Appel

APPELANTS :

Monsieur Didier Y..., commissaire aux comptes
Clos du Golf
...
42000 SAINT ETIENNE

représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour

assisté de la SCP BAVEREZ-RUBELLIN-BERTIN-PETITJEAN-DOMEC, avocats au barreau de LYON

Société ECOMEX, soci

été d'expertisecomptable et de commissariat aux comptes
Clos du Golf
69 rue Saint Simon
42000 SAINT ETIENNE

représentée par la SC...

COUR D'APPEL DE LYON
Troisième Chambre Civile
SECTION B

ARRÊT DU 15 Novembre 2007

Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 15 mai 2007-No rôle : 2006j3196

No R.G. : 07 / 03361

Nature du recours : Appel

APPELANTS :

Monsieur Didier Y..., commissaire aux comptes
Clos du Golf
...
42000 SAINT ETIENNE

représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour

assisté de la SCP BAVEREZ-RUBELLIN-BERTIN-PETITJEAN-DOMEC, avocats au barreau de LYON

Société ECOMEX, société d'expertisecomptable et de commissariat aux comptes
Clos du Golf
69 rue Saint Simon
42000 SAINT ETIENNE

représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour

assistée de la SCP BAVEREZ-RUBELLIN-BERTIN-PETITJEAN-DOMEC, avocats au barreau de LYON

INTIMES :

Monsieur Philippe X... agissant en qualité de président de la société B... EQUIPEMENTS et de " représentant du comité de direction " de cette société
123 avenue Barthélémy Buyer
69005 LYON

représenté par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à la Cour

assisté de la SCP RIBEYRE ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON, associé, Maître Valérie SPIGUELAIRE, avocat au barreau de LYON

SAS B... EQUIPEMENT, poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice
123 avenue Barthélémy Buyer
69005 LYON

représentée par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à la Cour

assistée de la SCP RIBEYRE ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON, associé, Maître Valérie SPIGUELAIRE, avocat au barreau de LYON

Instruction clôturée le 15 Octobre 2007

Audience publique du 15 Octobre 2007

LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION B DE LA COUR D'APPEL DE LYON,

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Madame Laurence FLISE, Président
Madame Christine DEVALETTE, Conseiller
Monsieur Alain MAUNIER, Conseiller

DEBATS : à l'audience publique du 15 Octobre 2007
sur le rapport de Madame Laurence FLISE, Président

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Madame Joëlle POITOUX, Greffier

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 15 Novembre 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Madame Laurence FLISE, Président, et par Madame Joëlle POITOUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****************

Le 14 novembre 2001 M. Claude B... a effectué au profit de la société COFATECH ENTREPRISE une cession-assortie d'une garantie d'actif et de passif expirant le 31 décembre 2005-des actions qu'il détenait dans le capital de la société B... EQUIPEMENTS.

M. Didier Y..., commissaire aux comptes de la société B... EQUIPEMENTS depuis 1991, a précisé en 2003, au moment de son renouvellement, qu'il démissionnerait à l'issue de l'assemblée générale qui statuerait sur les comptes de l'exercice de départ en retraite de M.Z..., directeur général.

Ce départ ainsi que celui du chef comptable ont eu lieu au cours du premier semestre de l'année 2005.

Au mois de novembre 2005 la société B... EQUIPEMENTS, qui suspectait une fraude par comptabilisation de revenus fictifs, a missionné le cabinet PWC.

Au mois de janvier 2006 M. Didier Y..., de concert avec la société Deloitte, co-commissaire aux comptes, a effectué la révélation au Procureur de la République prévue par l'article L 823-12 du code de commerce. Il indiquait notamment que " la nouvelle équipe avait mis à jour un ensemble d'écritures comptables visant à gonfler le chiffre d'affaires de manière fictive et de façon glissante au fil des mois ", " que ces manipulations avaient été confirmées par une investigation du cabinet PWC et que le montant de chiffre d'affaires ainsi généré fictivement s'élèverait à 1 150 K € représentant environ 5 % du chiffre d'affaires total de la société ", " qu'il avait pu lui-même la réalité de ces écritures fictives et les écarts avec les factures papier envoyées aux clients ".

Il a ensuite fait connaître aux dirigeants de la société B... EQUIPEMENTS qu'en raison de cette révélation il ne pouvait plus démissionner.

La société B... EQUIPEMENTS puis M. Philippe X... agissant en qualité de Président de la société B... EQUIPEMENTS et de représentant du comité de direction de la société ont introduit à la fin de l'année 2006 contre M. Didier Y... et contre la société ECOMEX, commissaire aux comptes suppléant, une procédure de relèvement fondée sur les dispositions de l'article L 823-7 du code de commerce.

La société B... EQUIPEMENTS a également été assignée en application des dispositions de l'article R 823-5 du code de commerce.

Par jugement en date du 15 mai 2007 assorti de l'exécution provisoire le commerce de Lyon a :

-relevé M. Didier Y... de ses fonctions de commissaire aux comptes titulaire de la société B... EQUIPEMENTS et la société ECOMEX de ses fonctions de commissaire aux comptes suppléant,

-débouté M. Didier Y..., et la société ECOMEX de leurs demandes reconventionnelles tendant notamment à l'octroi de dommages et intérêts,

-fait application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile en faveur de la société B... EQUIPEMENTS.

M. Didier Y... et la société ECOMEX ont interjeté appel de cette décision le 21 mai 2007.

Par ordonnance en date du 18 juin 2007 le Premier Président a refusé d'arrêter l'exécution provisoire.

Par ordonnance en date du 14 août 2007 le Président de la chambre commerciale a fait application des dispositions de l'article 910 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile.

Aux termes de leurs dernières écritures, qui ont été signifiées le 12 octobre 2007 et qui sont expressément visées par la Cour, M. Didier Y..., et la société ECOMEX concluent à l'annulation et, en toute hypothèse, à l'infirmation du jugement entrepris. Ils demandent que la requête en relèvement soit rejetée et que la société B... EQUIPEMENTS soit condamnée à payer à M. Didier Y..., une somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi qu'une somme de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Ils estiment tout d'abord que la double qualité de demanderesse et de défenderesse de la société B... EQUIPEMENTS n'a pas permis aux premiers juges de prendre en considération les intérêts de cette société qui aurait du être dans la présente instance représentée par un administrateur ad hoc ou un mandataire ad litem.

Ils contestent ensuite la pertinence des reproches adressés en soutenant d'une part que M. Didier Y..., a respecté le délai de 8 jours avant l'assemblée générale (prévu par les statuts de la société et seul applicable) pour déposer son rapport général à l'issue de l'examen des comptes 2005, d'autre part que M. Didier Y... s'est acquitté de la simple obligation de moyen pesant sur le commissaire aux comptes lorsqu'il exécute sa mission de contrôle.

Ils soulignent que les rapports du cabinet PWC, aux opérations duquel ils n'ont d'ailleurs jamais été appelés à participer, ne font allusion à aucune négligence du commissaire aux comptes.

Ils soutiennent que ces mêmes rapports (qui n'étaient pas des rapports d'audit) :

-n'ont pas mis en évidence, pour les exercices 2000,2001,2002 et 2003 les fausses facturations que le commissaire aux comptes a lui-même établies pour l'exercice 2004 à la suite d'un contrôle approfondi,

-ont seulement formulé des propositions d'ajustement dont la pertinence demeure douteuse.

Ils se prévalent du fait que, pour les exercices 2003,2004 et 2005 les contrôles relatifs aux cycles clients / facturation / trésorerie ont été confiés au co-commissaire aux comptes.

Ils font état des résultats tout à fait satisfaisants d'un contrôle de qualité dont M. Didier Y..., a fait l'objet en mars 2006 de la part de la compagnie régionale des commissaires aux comptes et qui a porté notamment sur le dossier de la société B... EQUIPEMENTS pour l'exercice 2004.

Ils soulignent que la démission de M. Didier Y... n'a été réclamée qu'au mois de juillet 2006.

Ils se plaignent du préjudice moral causé à M. Didier Y... par l'introduction d'une procédure de relèvement.

Aux termes de leurs dernières écritures, qui ont été signifiées le 15 octobre 2007 et qui sont expressément visées par la Cour, M. Philippe X..., ès qualités, et la société B... EQUIPEMENTS concluent à la confirmation du jugement entrepris ainsi qu'au rejet des demandes présentées par M. Didier Y... et sollicitent l'application en leur faveur des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Ils estiment qu'une faute simple suffit à justifier le relèvement d'un commissaire aux comptes.

Ils soutiennent qu'en l'espèce le comportement fautif de M. Didier Y... résulte de l'omission réitérée de signalement d'anomalies détectées par le cabinet PWC.
Ils se prévalent du contenu de la " synthèse audit au 6 mars 2006 " qui a été établie par le commissaire aux comptes et le co-commissaire aux comptes et qui, selon eux " retrace notamment les rectifications et les ajustements opérés sur 2005 pour tenir compte de l'impact des exercices antérieurs suite à la revue de données PWC ".

Ils prétendent que la révélation effectuée au mois de mars 2006 par M. Didier Y... ne portait pas seulement sur les fausses facturations de l'exercice 2004.

Ils soulignent l'importance du " gonflement du chiffre d'affaires fictif (1500 K €) ".

Ils tirent de l'ensemble de ces éléments la preuve de manquements graves et répétés du commissaire aux comptes.

Se fondant sur la norme applicable à l'exercice du commissariat aux comptes par plusieurs commissaires aux comptes ils soutiennent que le commissaire aux comptes ne peut se décharger de sa responsabilité en se prévalant d'une répartition des tâches qui laisse subsister une revue réciproque des travaux et des résultats.

Ils reprochent à M. Didier Y..., d'avoir délibérément jeté l'opprobre sur les dirigeants de la société B... EQUIPEMENTS en faisant état dans son rapport général d'un délai inexistant (dont il expliquait mensongèrement la violation par un retard des dirigeants dans la communication de documents) et d'avoir lui-même commis une faute en étant le seul responsable d'un retard dont il reconnu la réalité.

Ils reprochent également à M. Didier Y... d'avoir contesté en première instance la nomination de M.A... en remplacement de la société Deloitte, démissionnaire.

Ils se plaignent d'une perte de confiance incompatible avec la poursuite de la mission de M. Didier Y... et avec la poursuite de la mission de la société ECOMEX qui est étroitement liée à M. Didier Y....

La veille et le jour de l'audience les parties ont échangé des écritures tendant (de la part de M. Didier Y... et de la société ECOMEX) à ce que soient écartées les dernières conclusions des intimés et (de la part de M. Philippe X..., ès qualités, et de la société B... EQUIPEMENTS) à ce que ces conclusions soient au contraire retenues.

L'instruction a été clôturée le 15 octobre 2007 au seuil des débats.

SUR CE :

Attendu que les conclusions de dernière heure des intimés n'ont pas à être écartées ;

Qu'en effet M. Didier Y... et la société ECOMEX ne précisent pas en quoi ces conclusions, qui ne soulèvent ni moyens nouveaux ni prétentions nouvelles, nécessitaient une réponse ;

Attendu que les prescriptions de l'article R 823-5 du code de commerce, qui n'impose nullement la désignation d'un administrateur ad hoc ou d'un mandataire litem pour représenter la personne morale auprès de laquelle le commissaire aux comptes a été désigné, ont été respectées ;

Que le moyen tiré d'une prétendue nullité de la procédure doit, par conséquent, être rejeté ;

Attendu que l'article L 823-7 du code commerce prévoit que les commissaires aux comptes peuvent être relevés de leurs fonctions avant l'expiration normale de celles-ci en cas d'empêchement (non allégué en l'espèce) ou de faute ;

Attendu que le simple fait pour M. Didier Y... d'avoir mentionné un délai qui n'existait pas (pour le dépôt de son rapport général) n'est pas constitutif d'une faute de nature à justifier le relèvement de ses fonctions ;

Attendu ne se trouvent établis ni le caractère erroné de l'affirmation, contenue dans le rapport général, selon laquelle les dirigeants auraient tardé à communiquer certains documents ni la volonté de nuire prêtée au commissaire aux comptes ;

Attendu que le simple fait pour M. Didier Y... d'avoir, dans ses écritures de première instance, " prétendu que la société B... EQUIPEMENTS l'aurait déjà fait remplacer " (alors que le remplacement allégué concernait le co-commissaire aux comptes) n'est pas constitutif d'une faute de nature à justifier le relèvement de ses fonctions ;

Attendu que M. Philippe X..., ès qualités, et la société B... EQUIPEMENTS, qui versent aux débats des rapports du cabinet PWC dont le contenu et les conclusions sont dénués de clarté, ne récapitulent pas de manière précise les anomalies relevées pour les exercices antérieurs à l'exercice 2004 et n'indiquent, ni pour ces exercices ni pour l'exercice 2004, les raisons pour lesquelles M. Didier Y..., tenu d'une obligation de moyen, ne pouvait manquer de détecter ces anomalies ;

Attendu qu'en l'état des pièces versées aux débats il n'apparaît pas établi que des opérations de contrôle menées par un commissaire aux comptes normalement diligent devaient nécessairement conduire à la découverte des anomalies retenues par le cabinet PWC et notamment des fausses facturations affectant l'exercice 2004 ;

Que d'une part il n'est pas démontré ni même allégué qu'au moment où il a procédé à ses opérations (pour chacun des exercices concernés) le commissaire aux comptes disposait d'informations ou d'indices qui auraient du l'inciter à examiner plus particulièrement certaines écritures ;

Que d'autre part l'augmentation globale du chiffre d'affaires imputable aux fausses facturations (évaluée à 5 % pour l'année 2004) n'était pas suffisamment importante pour permettre d'éprouver de ce seul fait des doutes sérieux sur la sincérité de l'ensemble des comptes ;

Qu'enfin le nombre des écritures concernées (correspondant à une centaine de factures pour l'exercice 2004) était, dans une entreprise importante, proportionnellement trop faible pour que l'efficacité des sondages pratiqués au cours des opérations de contrôle soit certaine ;

Attendu que l'absence de contestation par M. Didier Y... de la pertinence des rectifications comptables opérées en tenant compte des conclusions du cabinet PWC ne constitue pas la reconnaissance d'une faute commise dans l'exécution de sa propre mission ;

Attendu qu'en l'absence de preuve d'une faute se rattachant à l'exercice des fonctions de M. Didier Y... et de nature à justifier le relèvement de ses fonctions le jugement entrepris doit être infirmé en toutes ses dispositions principales ;

Attendu que la preuve du caractère abusif de la procédure introduite par les intimés, dont les demandes ont prospéré en première instance, n'apparaît pas suffisamment rapportée ;

Que le jugement entrepris doit, par conséquent, être confirmé en ce qu'il a
débouté M. Didier Y... de sa demande de dommages et intérêts ;

Attendu que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Rejette la demande tendant à ce que soient écartées les conclusions no 3 signifiées le 15 octobre 2007 par les intimés ;

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. Didier Y..., de sa demande de dommages et intérêts ;

Infirme le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions et statuant à nouveau dans cette limite ;

Déboute M. Philippe X..., ès qualités, et la société B... EQUIPEMENTS de l'ensemble de leurs demandes ;

Dit qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne M Philippe X..., ès qualités, et la société B... EQUIPEMENTS aux dépens de première instance et aux dépens d'appel qui seront distraits au profit de la SCP Brondel et Tudela, avoué.

LE GREFFIER LE PRESIDENT
J. POITOUX L. FLISE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0113
Numéro d'arrêt : 07/03361
Date de la décision : 15/11/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 15 mai 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2007-11-15;07.03361 ?
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