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08/11/2007 | FRANCE | N°06/05467

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre civile 3, 08 novembre 2007, 06/05467


COUR D'APPEL DE LYON

Troisième Chambre Civile

SECTION B

ARRÊT DU 08 Novembre 2007

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 21 juin 2006 - No rôle : 2005j650

No R.G. : 06/05467

Nature du recours : Appel

APPELANTE :

Société TRAVAUX PUBLICS DE ROLLAND (TPR), SARL

Rue James Jackson

42500 LE CHAMBON FEUGEROLLES

représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour

assistée de la SCP BEAL - ASTOR, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMEE :
r>Société GUINTOLI, SA

... Mi-Plaines

69800 SAINT-PRIEST

représentée par Me BARRIQUAND, avoué à la Cour

assistée de la SELARL LEGITIMA, avocats au b...

COUR D'APPEL DE LYON

Troisième Chambre Civile

SECTION B

ARRÊT DU 08 Novembre 2007

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 21 juin 2006 - No rôle : 2005j650

No R.G. : 06/05467

Nature du recours : Appel

APPELANTE :

Société TRAVAUX PUBLICS DE ROLLAND (TPR), SARL

Rue James Jackson

42500 LE CHAMBON FEUGEROLLES

représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour

assistée de la SCP BEAL - ASTOR, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMEE :

Société GUINTOLI, SA

... Mi-Plaines

69800 SAINT-PRIEST

représentée par Me BARRIQUAND, avoué à la Cour

assistée de la SELARL LEGITIMA, avocats au barreau de LYON

associé Maître Walter SALAMAND, avocat au barreau de LYON

Instruction clôturée le 11 Septembre 2007

Audience publique du 04 Octobre 2007

LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION B DE LA COUR D'APPEL DE LYON,

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Madame Laurence FLISE, Président

Madame Christine DEVALETTE, Conseiller

Monsieur Alain MAUNIER, Conseiller

DEBATS : à l'audience publique du 04 Octobre 2007

sur le rapport de Monsieur Alain MAUNIER, Conseiller

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Madame Joëlle POITOUX, Greffier

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 08 Novembre 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Madame Laurence FLISE, Président, et par Madame Joëlle POITOUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****************

Suivant bon de location du 29 octobre 2003, la société TRAVAUX PUBLICS DE ROLLAND ( TPR) a mis à la disposition de l'agence RHÔNE-ALPES de la société GUINTOLI, qui réalisait un chantier routier sur la commune de SAINT-PRIVAS D'ALLIER, une pelle mécanique avec chauffeur.

Le 30 octobre 2003, à la reprise du travail après la pause de midi, au cours d'une manoeuvre l'engin a basculé dans un ravin et a été gravement endommagé. Le chauffeur a été grièvement blessé.

Une expertise a été instituée par ordonnance de référé du 7 janvier 2004 afin de déterminer les causes de l'accident et chiffrer les préjudices. Le rapport d'expertise, établi par Monsieur Y..., a été déposé le 15 novembre 2004.

Par assignation délivrée le 23 février 2005, la société TPR a poursuivi devant le tribunal de commerce de LYON à l'encontre de la société GUINTOLI l'indemnisation de son préjudice.

Par jugement du 21 juin 2006, le tribunal, jugeant que l'accident était imputable à la faute du conducteur, l'a déboutée de ses demandes et a débouté la société GUINTOLI de sa demande reconventionnelle en indemnisation de ses préjudices.

La société TPR a interjeté appel le 11 septembre 2006.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe le 29 mai 2007, et expressément visées par la Cour, elle sollicite l'infirmation du jugement du 21 juin 2006, la condamnation de la société GUINTOLI à lui payer la somme de 116 193,09 €, en réparation du préjudice résultant de l'accident du 30 octobre 2003, le rejet des prétentions de cette dernière, et l'allocation d'une indemnité pour frais d'instance hors dépens.

Elle expose que :

- le contrat de location est régi par les conditions générales interprofessionnelles de location de matériel établies par le FNTP-FNB, qui prévoit :

~ en son article 10-1 que dès que le locataire est responsable des conditions d'exécution du travail effectué par le conducteur,

~ en son article 11- 2, que le locataire est responsable du matériel loué et des dommages subis par ce matériel, sauf faute reconnue du conducteur,

- la seule certitude sur les causes de l'accident est qu'il a été provoqué par l'effondrement d'un mur situé au dessous d'une plate-forme sur laquelle circulait l'engin, sans fausse manoeuvre ni faute particulière démontrée du conducteur,

- le chauffeur, Monsieur Z..., dit qu'il est descendu sur la plate-forme à la demande du chef de chantier, pour ramasser des cailloux en vue de la réalisation d'une descente d'eau, ce qu'a confirmé le chef d'équipe de la société GUINTOLI, Monsieur A...,

- c'est bien dans l'exécution par le chauffeur des instructions du chef d'équipe que l'accident est survenu,

- le fait que l'accident s'est produit à quelques dizaines mètres de la zone où la descente d'eau était à réaliser n'est pas exonératoire, dès lors que le chauffeur se trouvait sur l'assiette du chantier,

- la démonstration d'une faute exclusive du chauffeur n'est pas faite.

Au reproche qui lui a été fait de ne pas avoir souscrit une police d'assurance "bris de machine", elle répond que cette circonstance est sans conséquences financières pour la société GUINTOLI, contre qui l'assureur ayant garanti le risque se serait retourné.

Dans ses conclusions déposées au greffe le 22 juin 2007, et expressément visées par la Cour, la société GUINTOLI soulève l'irrégularité de l'appel, et demande ensuite :

- la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il débouté la société TPR de ses prétentions et l'a condamnée à payer à la concluante une indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et aux dépens, y compris les frais d'expertise,

- la réformation du jugement en ce qu'il a débouté la société concluante de ses demandes d'indemnités et y faisant droit, la condamnation de la société TPR au paiement de la somme de 20 504,94 € HT en indemnisation de ses préjudices,

- l'allocation d'une indemnité supplémentaire sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Sur l'irrecevabilité de l'appel, elle se prévaut de ce que dans le dispositif des premières conclusions de la société TPR, il n'était nulle part fait référence au jugement rendu par le tribunal de commerce.

Sur les circonstances de l'accident, elle allègue que :

- le conducteur de sa propre initiative a déplacé l'engin sur le talus hors de toute demande d'exécution de travaux par la société GUINTOLI, ce qui ressort notamment du fait que l'accident est survenu à plus de cinquante mètres de l'endroit où il lui avait été demandé de réaliser la descente d'eau,

- il n'a jamais été demandé au chauffeur de descendre sur la terrasse inférieure, dont précisément la dangerosité avait été soulignée la veille en présence du conducteur de travaux de la D.D.E., maître de l'ouvrage,

- notamment, il n'a pas pu être demandé au chauffeur, comme celui-ci le prétend, d'enlever les blocs situés au bas du talus, alors que la veille il avait été décidé de les laisser en place ; de plus, on ne comprend pas que le chauffeur soit descendu avec son engin, alors qu'il a déclaré à l'expert avoir dans un premier temps refusé d'aller ramasser les pierres comme le chef d'équipe le lui demandait, car le mur risquait de s'écrouler,

- en outre, à supposer qu'il y ait eu un ordre, ce qui est formellement contesté, le chauffeur avait le devoir de ne pas exécuter cet ordre qu'il savait contraire à la sécurité, en raison de l'instabilité du talus qu'il connaissait.

Sur le préjudice qu'elle a subi, elle soutient que l'article 20 des conditions générales de location, selon lequel "pour quelque raison que ce soit, les pertes d'exploitation directes ou indirectes ne sont jamais prises en charge par le loueur", n'est pas de nature à lui interdire de demander des indemnités en réparation de son préjudice , qu'en tout cas ce préjudice ne constitue pas dans son intégralité une perte d'exploitation , et inclut notamment des frais d'extraction de la pelle mécanique. Enfin elle relève que la clause ainsi rédigée exclut toute indemnisation de manière abusive.

A titre subsidiaire, elle demande la réduction substantielle des sommes qui seraient allouées à la société TPR, du fait que cette dernière n'a pas souscrit d'assurance "bris de machine", et a ainsi participé à la réalisation de son préjudice, ou en tout cas à son accroissement.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 septembre 2007.

SUR CE :

Sur la recevabilité :

La société TPR a interjeté appel à l'encontre du jugement du 21 juin 2006 en toutes ses dispositions. L'appel tend donc nécessairement à l'infirmation du jugement.

L'exception d'irrecevabilité n'est pas fondée.

Au fond :

En application de l'article 10-1, des conditions générales de location de matériel avec chauffeur de la Fédération nationale des travaux publics, versées aux débats, applicables en l'espèce selon les mentions du bon de location :

"Dès que le matériel est arrivé sur le chantier, le locataire est responsable des conditions d'exécution du travail effectué par le conducteur. Il assure la coordination entre la mission du conducteur et les activités du chantier. Il assume la responsabilité des consignes et des directives qu'il donne au conducteur."

En application de l'article 10-7, alinéa 1 :

"En dehors de la faute du loueur ou de son préposé, le locataire ne pourra mettre en oeuvre la responsabilité du loueur ou celle de son préposé en cas de sinistre survenant sur le chantier pendant ou après le travail du matériel loué,...."

En application de l'article 11-2, alinéa 1 :

"Le locataire est responsable de l'utilisation du matériel loué et de tous les dommages subis par ce matériel sauf faute reconnue du conducteur."

Sur les circonstances de l'accident, en premier lieu il est constant que le chauffeur n'a pas été informé, à son arrivée sur le chantier le matin même, de la conclusion de la réunion de la veille en présence d'un représentant de la D.D.E. sur la dangerosité de la terrasse en bas du talus, et de la décision prise alors de laisser en bas de remblais les blocs qui s'y trouvaient.

Comme l'a relevé l'expert, les déclarations de Monsieur Z..., le chauffeur, relatives à la vérification de la solidité du talus, sont contradictoires ; d'abord il a déclaré qu'il était allé voir et que "c'était bon, il y avait 4m50 environ", et ensuite qu'il a refusé d'aller ramasser les pierres tombées en bas du mur (sous le talus), comme le chef de chantier chez GUINTOLI, ou chef d'équipe selon les actes de la procédure, Monsieur A..., le lui demandait, "car le mur risquait de s'écrouler". Cependant, le chauffeur a été grièvement blessé dans l'accident, ce qui a pu altérer son souvenir et expliquer ses contradictions. Ses déclarations sont donc difficilement exploitables.

Quant à Monsieur A..., dans sa déposition à la gendarmerie, il a seulement dit avoir laissé Monsieur Z... à l'endroit où le travail de mise en place d'une descente d'eau devait être fait, et être remonté.

Il en ressort en tout cas qu'aucun responsable de la société GUINTOLI ne soutient avoir informé Monsieur Z... de la fragilité du talus, pourtant soulignée la veille lors de la réunion avec le maître de l'ouvrage. Il est constant ensuite qu'une rampe de 4,50 m de large environ permettait de descendre avec l'engin sur la terrasse en contrebas et que l'accès n'en avait été ni interdit ni barré.

En s'écartant légèrement du lieu de réalisation de la conduite d'eau alors qu'il n'était pas informé des risques encourus, le conducteur de la pelle mécanique n'a commis aucune faute susceptible d'exonérer de sa responsabilité la société locataire.

Sur le préjudice :

Comme l'a relevé le tribunal, avant de débouter la société TPR de sa demande, une erreur de calcul affecte le montant du préjudice. D'un montant HT de 93 419,25 €, suivant l'expert, le préjudice s'élève à 111 729,42 € TTC.

Il n'y a pas lieu de réduire ce préjudice en raison de la non souscription par le loueur d'une police d'assurance "bris de machine", qui n'aurait pas dispensé la société GUINTOLI de son obligation de réparation.

Sur les demandes accessoires :

Il sera alloué une indemnité à la société TPR pour ses frais d'instance hors dépens.

La société GUINTOLI sera déboutée de sa demande à ce titre, comme de sa demande de dommages-intérêts.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Déclare l'appel recevable ;

Infirme le jugement déféré ;

Déclare la société GUINTOLI responsable des conséquences dommageables pour la société TRAVAUX PUBLICS DE ROLLAND du sinistre du 30 octobre 2003 ;

La condamne à payer à la société TRAVAUX PUBLICS DE ROLLAND la somme de 111729,42 € outre intérêts au taux légal à compter du 23 février 2005 ;

Déboute la société TRAVAUX PUBLICS DE ROLLAND de sa demande principale pour le surplus ;

Déboute la société GUINTOLI de l'ensemble de ses demandes ;

La condamne à payer à la société TRAVAUX PUBLICS DE ROLLAND la somme de 6000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

La condamne aux dépens de première instance, y compris les frais d'expertise, et aux dépens de l'instance d'appel, avec pour ces derniers distraction au profit de la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués, sur leur affirmation de droit.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

J. POITOUX L. FLISE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 06/05467
Date de la décision : 08/11/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 21 juin 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2007-11-08;06.05467 ?
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