COUR D'APPEL DE LYON
SIXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2007
Décision déférée :
Décision du Tribunal d'Instance de LYON du 21 novembre 2005-(R.G. : 2005 / 2191)
No R.G. : 06 / 01684
Nature du recours : APPEL
Affaire : Demande en paiement du solde du compte bancaire
APPELANTE :
Madame Marie-Françoise X..., épouse Y...
Demeurant : ...
33000 BORDEAUX
exerçant la profession d'avocat au : 102 Cours Alsace Lorraine
33000 BORDEAUX
représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, Avoués
assistée par Maître LASSERRE, Avocat, (BORDEAUX)
INTIMEE :
SA CREDIT LYONNAIS
Siège social : 18 rue de la République
69002 LYON
représentée par Maître DE FOURCROY, Avoué
assistée par Maître BUISSON, Avocat, (TOQUE 140)
Instruction clôturée le 15 Juin 2007
Audience de plaidoiries du 19 Juin 2007
LA SIXIEME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON,
composée lors des débats et du délibéré de :
. Monsieur LECOMTE, Président
. Madame DUMAS, Conseiller
. Madame de la LANCE, Conseiller, qui a fait le rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries,
assistés lors des débats tenus en audience publique par Madame CARRON, Greffier
a rendu le 20 SEPTEMBRE 2007, l'ARRET contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour d'Appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile, signé par Madame DUMAS, Conseiller, en remplacement du Président légitimement empêché, et par Madame CARRON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Le 28 novembre 2000, Madame Marie-Françoise X..., épouse Y..., son compte de dépôt ouvert auprès de la Société LE CREDIT LYONNAIS (LCL) présentant un solde débiteur, a souscrit auprès de cette banque un prêt personnel d'un montant de 75 000 F, remboursable en 36 mensualités, au taux de 8,50 %, prélevées sur son compte de dépôt.
Le compte demeurant débiteur, la Société LCL a prononcé la déchéance du terme du prêt le 24 juin 2002, puis, un accord de règlement n'étant plus respecté, a adressé une mise en demeure à Madame X... le 15 avril 2004.
Par acte du 27 mai 2004, la Société LCL a fait assigner Madame X... devant le tribunal d'instance de Libourne pour la voir condamner à lui payer le solde restant dû sur le prêt et sur le compte courant. Par jugement du 15 juin 2005, le tribunal d'instance de Libourne s'est dessaisi au profit du tribunal d'instance de Lyon en raison de la connexité avec un autre dossier pour lequel le tribunal d'instance de Paris s'était déclaré incompétent au profit de celui de Lyon.
Par jugement du 21 novembre 2005, le tribunal d'instance de Lyon a condamné Madame X... à payer à la Société LCL la somme de 6 115,71 € avec intérêts au taux de 8,5 % à compter du 24 juin 2002, au titre du prêt, celle de 5 001,95 € avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2004, au titre du solde débiteur du compte, et celle de 450 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, a ordonné la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil et a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Madame X... a interjeté appel de ce jugement et, ses moyens et prétentions étant développés dans ses conclusions récapitulatives déposées le 15 juin 2007, soutient que le tribunal n'ayant pas tenu compte de sa demande de report d'audience adressée par fax et par courrier le 6 octobre 2005 pour l'audience du 10 octobre suivant, le jugement a été rendu en méconnaissance de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile et doit être annulé, que, sur le fond, l'examen du contrat montre que la Société LCL a entendu soumettre le contrat de prêt aux articles L. 311-1 à L. 311-37 du Code de la consommation, que l'examen des relevés de compte fait apparaître qu'aucune mensualité du prêt n'a été réglée jusqu'au mois d'avril 2002, que la prescription était acquise au 15 janvier 2003, que les remboursements effectués après cette date devront lui être restitués, qu'à titre subsidiaire, il apparaît qu'il n'existait aucune convention de découvert sur le compte, qu'une large partie du découvert correspond à des prélèvements effectués indûment par la banque au titre d'agios, de frais et de commissions de tous ordres, non prévus contractuellement, que ces sommes devront lui être restituées et que ces prélèvements indus et le contentieux lourd en résultant ont entraîné un trouble important dans ses conditions d'existence justifiant l'octroi de dommages et intérêts.
Madame X... demande à la Cour d'annuler le jugement entrepris et évoquant, de déclarer forcloses les demandes de la Société LCL, et d'ordonner la restitution de toutes sommes réglées postérieurement au 15 janvier 2003 sur le compte avec production d'intérêts desdites sommes à compter du jour de leurs règlements, à titre subsidiaire, d'ordonner la compensation entre les sommes pouvant être dues et celles prélevées indûment sur le compte depuis le 8 mars 1984 jusqu'à sa clôture, ces sommes produisant intérêts au taux légal depuis leur prélèvement et, en tout état de cause, de lui allouer une indemnité de 7 500 € en réparation du trouble causé dans les conditions d'existence et une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La Société LCL, ses moyens et prétentions étant exposés dans ses conclusions no 2 déposées le 13 juin 2007, fait valoir que le jugement a été régulièrement rendu, le renvoi d'une affaire ne pouvant être demandé par correspondance sans comparaître et sans alléguer un empêchement légitime, que le prêt en cause avait un objet professionnel, que le Code de la consommation est sans application, qu'en outre, les échéances ont été prélevées sur le compte jusqu'en juin 2002, la déchéance du terme prononcée le 24 juin 2002, qu'il n'y a pas forclusion, l'assignation ayant été délivrée le 27 mai 2004, qu'en tout état de cause, il ne peut y avoir répétition de l'indu pour les sommes versées postérieurement, la créance n'étant pas éteinte, que le taux effectif global appliqué au solde débiteur du compte ainsi que les frais et commissions ont été portés à la connaissance de Madame X... par les décomptes trimestriels reçus sans protestation ni réserve, qu'il n'y a pas lieu à répétition ni à octroi d'indemnité, la Société LCL n'ayant commis aucune faute.
La Société LCL demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris, de condamner Madame X... à lui payer la somme de 6 115,71 € avec intérêts au taux de 8,5 % à compter du 24 juin 2002, et celle de 5 001,95 € avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2004, de dire que les intérêts seront capitalisés, de débouter Madame X... de toutes ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
-Sur la nullité du jugement :
Attendu que devant le tribunal d'instance, la procédure est orale en application de l'article 843 du nouveau Code de procédure civile ; que le juge n'a pas à tenir compte d'une demande de renvoi formulée par courrier ;
Que la demande de nullité du jugement n'est pas fondée ;
-Sur le fond :
Attendu qu'il résulte des conditions générales du crédit personnel du 28 novembre 2000, jointes à l'offre préalable, que les parties ont décidé de soumettre ce prêt au Code de la consommation ; que le paragraphe IV « CONTENTIEUX » indique expressément que les articles L. 311-1 à L. 311-37 du Code de la consommation s'appliquent et que les actions engagées devant le tribunal d'instance sont soumises au délai de forclusion de deux ans ;
Attendu que l'examen des relevés du compte bancaire fait apparaître que les échéances du prêt ont été prélevées de janvier 2001 à juin 2002 à l'exception de celle de décembre 2001 ; que ces prélèvements opèrent paiement même lorsque le compte fonctionne à découvert conformément à une convention expresse ou tacite entre le prêteur et l'emprunteur ; que le point de départ du délai de forclusion doit donc être fixé au 15 juin 2002 ; que l'action de la banque n'était donc pas prescrite lors de la délivrance de l'assignation le 27 mai 2004 ; que la demande en restitution des sommes réglées postérieurement au 15 janvier 2003 n'a pas de fondement et ne peut être que rejetée ;
Qu'il doit être retenu que le solde débiteur du compte est devenu exigible lors du prononcé de la déchéance du terme du prêt le 24 juin 2002 ; qu'à cette date, la banque a ainsi manifesté sa volonté de refuser toute augmentation du découvert ;
Attendu qu'au titre du prêt, Madame X... est donc débitrice du capital restant dû à hauteur de 6 115,71 € avec intérêts au taux contractuel de 8,50 % à compter de la mise en demeure du 15 avril 2004 ;
Attendu que le solde du compte courant de Madame X... a été remis à zéro au 1er janvier 2001, suite au versement du montant du prêt, selon l'accord intervenu entre les parties ; que la gestion du compte antérieurement à cette date ne peut être valablement remise en question par l'appelante qui ne justifie d'aucune contestation émise avant 2001 ;
Qu'au titre du solde débiteur du compte, il apparaît qu'aucune convention expresse de découvert n'a été souscrite entre les parties ; qu'il n'existe donc aucun écrit fixant un taux d'intérêt conventionnel en cas de découvert ; qu'à défaut de document écrit préalable à l'application d'agios, la seule mention indicative du taux effectif global sur les relevés périodiques ne vaut pas reconnaissance d'une stipulation d'agios conventionnels ; que les intérêts facturés sur le compte depuis janvier 2001 doivent donc être déduits ;
Qu'en ce qui concerne les frais facturés, Madame X... justifie les avoir contestés plusieurs fois, notamment dans ses courriers des 24 juillet et 30 septembre 2002 ; qu'ils ne peuvent ainsi être retenus comme acceptés par celle-ci ; que la Société LCL ne produit aucun document établissant l'existence d'un tarif des prestations de la banque et qui aurait été communiqué à Madame X... ; qu'en conséquence, il y a lieu également de déduire les frais portés au débit du compte depuis janvier 2001 ;
Que les relevés de compte permettent de chiffrer à 2 277,77 € les intérêts facturés et à 87,05 € les frais débités ; qu'il reste dû une somme de 2 637,13 € au titre du solde débiteur du compte avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 15 avril 2004 ;
Attendu que la demande de capitalisation des intérêts ne peut qu'être accordée ;
Attendu qu'à l'appui de sa demande d'indemnisation, Madame X... n'établit pas l'existence d'une faute de la Société LCL à l'origine du trouble dans les conditions d'existence allégué ; que, contrairement aux affirmations de l'appelante, le montant du débit du compte, même partiellement dû aux sommes prélevées à tort par la banque, et le non paiement des échéances du prêt justifiaient les relances et mises en demeure de la banque et les poursuites engagées ; que la demande de dommages et intérêts n'est pas fondée ;
Attendu qu'il paraît équitable de laisser à la charge de chacune des parties l'ensemble des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Dit n'y avoir lieu de prononcer la nullité du jugement entrepris,
Réforme le jugement déféré,
Condamne Madame Marie-Françoise X..., épouse Y..., à payer à la Société LE CREDIT LYONNAIS la somme de 6 115,71 €, au titre du prêt personnel, avec intérêts au taux de 8,50 % à compter du 15 avril 2004 et celle de 2 637,13 €, au titre du solde débiteur du compte, avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2004,
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l'article 1154 du Code civil,
Déboute la Société LCL du surplus de ses demandes,
Déboute Madame X... de ses autres demandes,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Condamne Madame X... aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de Maître DE FOURCROY, Avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT