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19/07/2007 | FRANCE | N°05/05404

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0355, 19 juillet 2007, 05/05404


R.G : 05 / 05404

décision du Tribunal de Grande Instance de MONTBRISON au fond du 15 juillet 2005

RG No2002 / 554

X...B...

C /
Y...D...Z...

COUR D'APPEL DE LYON
PREMIERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 19 JUILLET 2007
APPELANTS :
Monsieur Jean-Louis X... ...42110 SALT-EN-DONZY

représenté par la SCP BAUFUME-SOURBE avoués à la Cour

assisté de Me MEININGER-BOTHOREL avocat au barreau de PARIS

Madame Danièle B... épouse X... ...42110 SALT-EN-DONZY

représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE avoués à la Cour >
assistée de Me MEININGER-BOTHOREL avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

Monsieur Christophe Y... ...42580L'ETRAT

représenté ...

R.G : 05 / 05404

décision du Tribunal de Grande Instance de MONTBRISON au fond du 15 juillet 2005

RG No2002 / 554

X...B...

C /
Y...D...Z...

COUR D'APPEL DE LYON
PREMIERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 19 JUILLET 2007
APPELANTS :
Monsieur Jean-Louis X... ...42110 SALT-EN-DONZY

représenté par la SCP BAUFUME-SOURBE avoués à la Cour

assisté de Me MEININGER-BOTHOREL avocat au barreau de PARIS

Madame Danièle B... épouse X... ...42110 SALT-EN-DONZY

représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE avoués à la Cour

assistée de Me MEININGER-BOTHOREL avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

Monsieur Christophe Y... ...42580L'ETRAT

représenté par la SCP DUTRIEVOZ avoués à la Cour

assisté de Me LARCHER avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

Madame Anne D... épouse Y... ...42580L'ETRAT

représentée par la SCP DUTRIEVOZ avoués à la Cour

assistée de Me LARCHER avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

Maître Jacques Z... notaire associé de la SCP BALAY-VALANCOGNE-MICHAUDET 8 Place de l'Hôtel de Ville BP 128 42003 SAINT-ETIENNE CEDEX 1

représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA avoués à la Cour

assisté de Me RINCK avocat au barreau de LYON

L'instruction a été clôturée le 27 Octobre 2006

L'audience de plaidoiries a eu lieu le 05 Juin 2007
L'affaire a été mise en délibéré au 19 Juillet 2007

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :

Président : Monsieur BAIZET, Conseiller : Monsieur GOURD, Conseiller : Monsieur JICQUEL

Greffier : Madame WICKER pendant les débats uniquement.
A l'audience Monsieur BAIZET a fait le rapport conformément à l'article 785 du NCPC.
ARRET : contradictoire
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile,
signé par Monsieur BAIZET, président et par Madame JANKOV, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DE L'AFFAIRE
Par acte notarié reçu le 2 octobre 2000, par Maître Z..., notaire, les époux X...-B... ont vendu aux époux Y... un ensemble immobilier avec dépendances, situé à SALT-EN-DONZY (Loire), pour le prix de 457. 347,05 euros.L'acte contenait une clause de " réserve de réméré ", prévoyant notamment que la vente était consentie sous la condition résolutoire de l'exercice de la faculté de réméré par l'ancien propriétaire qui se réservait, pendant un délai de dix-huit mois à compter du 1er juillet 2000, soit jusqu'au 31 décembre 2001, la faculté de réméré sur le bien en remboursant au nouveau propriétaire le prix de la vente majoré de 4,5 % l'an.
Faisant valoir que les époux X... n'avaient pas exercé leur faculté de rachat et occupaient toujours les lieux, les époux Y... les ont assignés en expulsion devant le juge des référés du tribunal de grande instance de MONTBRISON, qui a dit n'y avoir lieu à référé et les a autorisés à assigner au fond à jour fixe, ce qu'ils ont fait par assignation du 12 août 2002, sollicitant notamment l'expulsion des époux X... et la fixation d'une indemnité provisionnelle d'occupation.
Les époux X... ont assigné Maître Z..., notaire, en responsabilité. Ils sont également engagé une action en rescision pour lésion.
Après avoir ordonné la jonction des procédures, le tribunal de grande instance de MONTBRISON a, par jugement du 15 juillet 2005 :
"-rejeté les fins de non recevoir opposées aux actions des époux X...-B...,
-dit n'y avoir lieu à ordonner une médiation en application de l'article 131-1 du nouveau Code de procédure civile,
-constaté le non exercice de la faculté de rachat par les époux X...-B...,
-constaté que les époux Y...-D... sont propriétaires du tènement immobilier, conformément à l'article 1162 du Code Civil,
-dit inopposable aux époux Y...-D... le bail commercial verbal conclu entre les époux X...-B...,
-débouté les époux X...-B... de tous leurs chefs de demande,
-ordonné l'expulsion de l'ensemble du tènement concerné, si besoin est, avec l'aide de la force publique, des époux X...-B... ainsi que de tout occupant de leur chef et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement,
-donné acte aux époux Y...-D... de leur offre de payer le solde du prix de vente soit la somme de 76. 224,51 euros sous réserve de déduire cette somme le montant de l'indemnité d'occupation des époux X...-B... à compter du 1er janvier 2002 ainsi que de tous dommages et intérêts,
-fixé à titre provisionnel l'indemnité d'occupation mensuelle du tènement immobilier par les époux X...-B... à la somme de 4. 373 euros à compter du 1er janvier 2002 et condamné in solidum les époux X...-B... à payer ladite indemnité outre intérêts de droit, lesdits intérêts étant capitalisés en application de l'article 1154 du Code Civil et ceci jusqu'à libération effective des lieux,
-condamné in solidum les époux X...-B... à payer aux époux Y...-D... la somme de 1. 000 euros à titre de dommages et intérêts outre intérêts de droit à compter du présent jugement,
-condamné in solidum les époux X...-B... à payer aux époux Y...-D... la somme de 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
-condamné in solidum les époux X...-B... à payer à Maître Z... la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts,
-condamné in solidum les époux X...-B... à payer à Maître Z... la somme de 1. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. "
Les époux X..., appelants, concluent à la nullité du jugement en application de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme, le magistrat ayant rendu l'ordonnance de référé ayant ensuite statué au fond en qualité de juge unique.
Ils sollicitent une médiation judiciaire en raison des conséquences manifestement excessives qu'aurait leur expulsion.
Ils soutiennent qu'ils ont bénéficié d'une faculté de rachat jusqu'au 1er avril 2002, et qu'ils ont utilisé cette faculté par une lettre adressée à Maître Z... le 28 février 2002. Ils offrent le règlement du solde du prix de vente, soit 381. 122,54 euros.
A titre subsidiaire, ils se prévalent de la nullité de la vente, en application des articles 2,13 et 23 du décret du 26 décembre 1971, le notaire, qui a instrumenté ayant un intérêt dans l'opération. Ils soutiennent que l'acte de vente a perdu son caractère authentique, et que la vente à réméré est nulle puisqu'elle ne peut résulter que d'un acte authentique.

Ils font valoir par ailleurs que la vente doit être requalifiée en contrat pignoratif, donc nul, dès lors qu'elle dissimule un prêt usuraire assorti d'une sûreté immobilière, puisque le bien vendu valait au moins 5 millions de francs.

Ils se prévalent également de la nullité de la vente pour contrainte morale et dépendance économique, ainsi que pour erreur sur les qualités substantielles, en l'espèce le délai de réméré de dix-huit mois.
Ils agissent en outre en rescision pour lésion des 7 / 12 èmes, soutenant qu'ils apportent un commencement de preuve de la lésion par les évaluations d'agents immobiliers et les éléments publiés aux hypothèques. Ils sollicitent une expertise afin de vérifier la lésion des 7 / 12 èmes.
Ils invoquent l'existence d'un bail commercial antérieur à la vente et opposable à l'acquéreur dont est titulaire Madame X... pour l'exercice d'une activité de chambres d'hôtes.
Ils contestent également le montant de l'indemnité d'occupation, qui devrait être réduite à 2. 000 euros par mois.
Ils se prévalent de la responsabilité de Maître Z..., notaire, qui a organisé la vente dans des conditions lésionnaires afin d'obtenir le remboursement de la somme pour laquelle il s'était porté caution en faveur de Monsieur X... et qu'il lui avait prêtée, alors qu'ayant un intérêt personnel dans l'opération, il ne pouvait instrumenter. Ils soutiennent en outre qu'il a manqué à son devoir de conseil, notamment quant aux risques d'un réméré aussi court et à l'absence d'indication du bail commercial, qu'il a exerce une contrainte économique sur Monsieur X... qui se trouvait dans un état de faiblesse et de dépression, et qu'il a accepté de mentionner dans l'acte un prix de vente dérisoire.
Ils sollicitent la condamnation in solidum de Maître Z... et des époux Y... à leur payer la somme de 150. 000 euros correspondant aux intérêts que la somme de 457. 347,05 euros leur aurait rapportés pendant plus de six ans à 5 %, dans l'hypothèse où la vente serait annulée, et, dans le cas contraire, la somme de 457. 347,05 euros correspondant à la différence entre le prix réel du bien et le prix vendu, ainsi que la condamnation du notaire à leur payer la somme de 152. 449 euros en réparation de leur préjudice moral.
Dans l'hypothèse où la responsabilité de Maître Z... serait retenue, ils sollicitent sa garantie de toute condamnation susceptible d'être prononcée à leur encontre.
Ils demandent la condamnation de Maître Z... et des époux Y... à leur payer la somme de 10. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Les époux Y..., intimés et appelants à titre incident, concluent au débouté de l'intégralité des prétentions des époux X... et sollicitent :
-l'expulsion de ces derniers, dans les huit jours de l'arrêt, sous astreinte de 300 euros par jour de retard,
-la fixation d'une indemnité provisionnelle d'occupation de 7. 622,45 euros par mois à compter du 1er janvier 2002, et la condamnation des époux X... à leur payer à ce titre une provision d'au moins 411. 612,30 euros, avec capitalisation des intérêts,
-la condamnation des époux X... à leur payer la somme de 15. 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice découlant de l'absence de jouissance de leur bien, des procédures abusives diligentées par les époux X..., et de leurs accusations injustifiées.
Ils offrent de payer l'indemnité de 76. 224,51 euros, solde du prix de vente, détenu par le notaire, sous réserve de la déduction de l'indemnité d'occupation.
A titre subsidiaire, en cas d'annulation de la vente, ils sollicitent la condamnation in solidum de Maître Z... et des époux X... à leur payer la somme de 457. 347,05 euros, outre les intérêts à compter du 2 octobre 2000, ainsi que 15. 000 euros à titre de dommages intérêts, le tout sous astreinte, et à leur rembourser les sommes mises à leur charge par l'acte du 2 octobre 2000, les frais d'assurances, les frais de l'acte et le montant de la facture.
Ils estiment irrecevable et infondée l'exception de nullité du jugement.
Ils s'opposent à la demande de médiation.
Ils estiment que l'acte de vente à réméré est régulier, que le délai pendant lequel pouvait s'exercer la faculté de rachat a été clairement prévu et accepté par les parties, que les vendeurs n'en n'ont pas usé, qu'aucun vice du consentement n'est établi, alors que les époux X... sont entourés de nombreux conseils depuis longtemps, que l'action en rescision pour lésion est irrecevable, le contrat de vente à réméré étant un contrat aléatoire, et qu'aucun élément n'établit l'existence d'une lésion.
Ils font valoir que la prétention nouvelle relative au contrat pignoratif est irrecevable, et que les éléments d'un contrat de cette nature ne sont pas caractérisés.
Ils considèrent que l'existence d'un bail verbal n'est pas démontrée, qu'en tout état de cause, il leur est inopposable et que Madame X... ne peut prétendre au bénéfice de la propriété commerciale.
Ils estiment insuffisante l'indemnité d'occupation fixée par le tribunal compte tenu de l'importance des bâtiments et terrains, les époux X... occupant un immeuble de plus de 700 m2, comportant quinze pièces principales, des dépendances, ainsi que des terrains de plus de 24 hectares.
Ils sollicitent la condamnation in solidum des époux X... et de Maître Z... à leur payer la somme de 5. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Maître Z..., intimé, conclut à la confirmation du jugement et sollicite la condamnation in solidum des époux X... à lui payer la somme d'un euro à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral, et celle de 4. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Il se prévaut de l'irrecevabilité de l'exception de nullité du jugement, aucune contestation n'ayant été soulevée lors des débats quant à la composition de la juridiction.
Il souligne qu'aucun obstacle ne l'empêchait de recevoir l'acte authentique, que s'il avait voulu être remboursé plus tôt, il disposait de la quittance subrogative de la BNP à son profit, et que le décret du 26 novembre 1971 ne vise pas la sanction de nullité dans l'hypothèse d'une participation ou d'un intéressement du notaire.
Il fait valoir que Monsieur X..., chef d'entreprise, était apte à donner son consentement.
Il estime que n'est pas établie l'existence d'un bail commercial verbal, qu'il appartenait aux époux X... d'indiquer lors de l'établissement de l'acte.
Il considère que le prix de vente correspond à la valeur de l'immeuble, que les conditions d'une action en rescision pour lésion ne sont pas réunies, qu'elles supposeraient une valeur de la propriété de 7. 200. 000 francs et que le contrat de venté à réméré, contrat aléatoire, échappe à une action de cette nature.
Il soutient que la forme de la vente a été longuement expliquée aux époux X... qui l'ont admis, que le délai de dix-huit mois a été fixé dans une clause claire, et que les appelants n'ont pas exercé leur faculté de rachat puisqu'ils ont au contraire sollicité un délai pour déménager.

MOTIFS

Attendu qu'il n'a pas été porté atteinte à l'exigence d'impartialité du juge, dès lors que le magistrat composant la juridiction de jugement n'avait préalablement, en qualité de juge des référés, porté aucune appréciation sur le fond du litige, puisqu'il avait considéré que le débat qui lui était soumis relevait des seuls pouvoirs de la juridiction du fond et qu'il n'y avait pas lieu à référé ; que l'exception de nullité du jugement doit être rejetée ;
Attendu qu'en application de l'article 131-1 du nouveau Code de procédure civile, la mise en oeuvre d'une mesure de médiation, qui constitue une faculté pour la juridiction de jugement, suppose l'accord des parties ; qu'en l'espèce, les époux Y... indiquent qu'ils s'opposent à une mesure de cette nature ; que si Maître Z... n'a pas fait part de son avis sur ce point, il n'apparaît pas utile de proposer une médiation sur les seuls points du litige l'opposant aux époux X..., dès lors que les différentes prétentions sont intimement liées et découlent des conditions d'établissement et d'exécution du même acte juridique ;
Attendu que l'acte notarié de vente du 2 octobre 2000 contient une clause de réserve de réméré ainsi libellée :
" la présente vente est consentie également sous la condition résolutoire de l'exercice de la faculté de réméré stipulé au profit de l'ancien propriétaire ; en effet, l'ancien propriétaire se réserve, expressément, pendant un délai de 18 mois à compter du 1er juillet 2000, soit jusqu'au 31 décembre 2001, la faculté de réméré sur ce bien, en remboursant au nouveau propriétaire le prix de cette vente majoré d'un intérêt de 4,5 % l'an, pour la période courue à compter de ce jour, payables en même temps que le capital, et en outre les frais et loyaux coûts de cet acte, ainsi que les réparations nécessaires et celles augmentant la valeur du bien jusqu'à hauteur de cette augmentation...A défaut d'effectuer ce remboursement, dans le délai et la manière ci-dessus indiqués, l'ancien propriétaire sera déchu de son droit de rachat et le nouveau propriétaire restera propriétaire irrévocable de ce bien. Cette faculté de rachat sera personnelle à Monsieur X..., à son épouse et à ses descendants, mais elle ne pourra être cédée à des tiers " ;
Attendu qu'il résulte clairement des stipulations de cet acte que le délai de dix-huit mois au cours duquel pouvait être exercée la faculté de rachat expirait le 31 décembre 2001, et non le 1er avril 2002 ; que les époux X... n'ayant pas usé de cette faculté pendant le délai contractuellement prévu, la condition résolutoire n'a pu jouer et les époux Y... sont restés propriétaires des biens vendus ; qu'il sera relevé au surplus que le lettre que les époux X... ont adressée au notaire le 28 février 2002 n'exprime pas leur volonté expresse d'exercer la faculté de rachat, avec offre de remboursement des sommes dues ; que le même jour, Monsieur X... a écrit aux époux Y... pour leur demander un délai jusqu'au 31 mars suivant pour libérer les lieux, ce qui confirme son absence d'intention d'utiliser la faculté de réméré ;
Attendu qu'en application des articles 2 et 23 du décret no 71-941 du 26 novembre 1971, les notaires ne peuvent recevoir des actes qui contiennent des dispositions en leur faveur, la violation de cette disposition ne pouvant entraîner la nullité de l'acte passé que s'il n'est pas revêtu de la signature de toutes les parties ; que l'acte ne vaut alors que comme acte sous seing privé ;
Attendu que si Maître Z... s'était engagé, à titre personnel, en qualité de caution de Monsieur X... envers la BNP à concurrence de la somme de 650. 000 francs et s'il avait réglé cette somme en exécution de son engagement, il disposait d'une quittance subrogative de la BNP depuis le 22 janvier 1998 et aurait pu, comme il le relève, exercer depuis cette date, toute action utile à l'encontre de Monsieur X... pour obtenir le remboursement de sa créance ; que si, à la suite de la vente, il a perçu la somme qui lui était due, l'acte de vente du 2 octobre 2000 ne contient aucune disposition en sa faveur ; qui'l n'a dès lors pas été établi en contravention avec le texte précité ; qu'en tout état de cause, si tel avait été le cas, l'acte, revêtu de la signature de toutes les parties, vaudrait néanmoins comme acte sous seing privé entre les parties, et ne serait pas affecté d'un cause de nullité, même pour une vente à réméré ;

Attendu que pour soutenir que l'acte de vente dissimulait en réalité un prêt usuraire, les époux X... font valoir que l'évaluation des biens était d'au moins 5 millions de francs et que le caractère usuraire du taux résulte de l'attribution d'un bien de cette valeur en contrepartie d'un prêt de 3 millions de francs ;

Attendu cependant, que les pièces qu'ils produisent ne permettent pas de retenir la valeur dont ils se prévalent ni la preuve d'une sous évaluation importante des biens vendus ; que l'attestation de l'agent immobilier Léonard faisant état d'une valeur de 731. 755 euros a été établie en avril 2002, soit dix-huit mois après la vente, à une époque de forte valorisation du prix de l'immobilier, et ne comporte pas d'argumentation détaillée du prix retenu ; que l'attestation établie par ESPACE DELTA IMMOBILIER retenant la valeur de 762. 245 euros n'est pas datée et ne comporte aucun descriptif ni justification du prix indiqué ; que l'évaluation K... n'a été réalisée qu'en septembre 2002, et celle de la régie " L'ADRESSE " qu'en octobre 2006 ; que les documents intitulés " transactions immobilières " visant l'évaluation de demeures de luxe ne permettent aucune comparaison fiable avec la propriété vendue par les époux X... ;
Attendu que ne sont démontrés ni l'existence d'un prêt à taux usuraire, ni la vileté du prix, ni la fréquence des achats à réméré par les parties ; que l'acte de vente, qui ne repose pas sur une cause illicite, ne peut être qualifié de contrat pignoratif ;
Attendu que le premier juge a rejeté à bon droit la demande de nullité de l'acte pour violence et contrainte, dès lors que si la situation économique de Monsieur X... était difficile à l'époque de l'acte et s'il pouvait présenter des signes de dépression, les appelants ne démontrent pas qu'au moment de l'acte, ils se trouvaient dans un état leur interdisant de donner un consentement éclairé, ni que leurs cocontractants ont usé de violence ou de contrainte et ont exploité un état de faiblesse ou de nécessité ; qu'ils soutiennent par ailleurs, au titre de leur action en responsabilité contre le notaire, qu'ils avaient la possibilité de rembourser leur dette sans vendre leur immeuble, ce qui contredit l'état de nécessité allégué ; que dès lors, les attestations qu'ils produisent sur ce point apparaissent sans portée ; qu'il doit être relevé que Monsieur X..., ancien dirigeant d'entreprise, avait l'expérience des affaires et que les attestations établies par des médecins ou des connaissances ne permettent pas de considérer qu'il avait perdu son discernement au moment de la signature de l'acte ni que son consentement a été vicié en raison d'une situation de violence ou de contrainte ;
Attendu que les époux X... n'établissent pas non plus d'erreur sur les qualité substantielles de la chose, en l'espèce le délai de réméré, dès lors que si, dans le cadre du projet d'acte avait été prévu un délai de trois ans, ils ont accepté de régulariser l'acte comportant une clause dénuée d'ambiguïté sur la date d'expiration du délai ; que les termes de la lettre qu'ils ont adressée aux époux Y... le 22 mai 2002 et du courrier de Monsieur X... à Maître Z... du 28 février 2002 confirment qu'ils ont accepté le délai de rachat en toute connaissance de cause ;

Attendu que si l'action en rescision pour lésion peut être exercée en matière de vente à réméré, la preuve de la lésion ne peut être admise, en application de l'article 1677 du Code Civil, que par jugement et dans le cas seulement où les faits articulés seraient assez vraisemblables et assez graves pour faire présumer la lésion ;

Attendu en l'espèce que les motifs retenus précédemment quant à la valeur de l'immeuble font apparaître que les estimations immobilières les plus élevées produites par les appelants ne permettent pas de présumer l'existence d'une lésion des 7 / 12 ème qui, compte tenu du prix de vente fixé dans l'acte, suppose que la valeur de l'immeuble était au moins égale à 7. 200. 000 francs ; qu'aucun autre élément ne permet de présumer une valeur de ce montant, alors que les époux X... eux-mêmes fixent celle-ci à 5. 000. 000 francs pour démontrer l'existence d'un prêt usuraire ;

Attendu que les époux X... ne rapportent pas la preuve de l'existence d'un bail commercial verbal antérieur à la vente ayant date certaine ; que l'attestation établie sur ce point par Monsieur X..., partie à l'instance, est dépourvue de valeur probante ; que même si Madame X... exerçait une activité de chambre d'hôte, cette situation n'implique pas nécessairement l'existence d'un bail, dont les appelants ne précisent aucune des conditions, notamment quant aux locaux exacts loués, au loyer prévu et à la durée de la location ; qu'ils n'ont pas déclaré l'existence de ce bail dans l'acte de vente, puisqu'ils ont au contraire affirmé que le bien était libre de " tout obstacle contractuel " ; que l'acte prévoit qu'au 1er janvier 2002, à défaut d'exercice du droit de réméré, l'entière propriété devait être libre de toute occupation ou de toute location, ainsi que s'y est obligé le vendeur, à l'exception de la parcelle 478 Objet d'un bail à ferme au profit de Monsieur J...;

Que dès lors ne peut être retenue l'existence d'un bail opposable aux époux Y..., de nature à faire obstacle à l'expulsion ; que celle-ci a été ordonnée à juste titre par le premier juge ; qu'il sera précisé que l'expulsion devra intervenir dans les deux mois de la signification de l'arrêt, sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé ce délai ;
Attendu que les époux Y... ne produisent pas d'éléments pertinents permettant de fixer le montant de l'indemnité d'occupation mensuelle due par les époux X... à un montant supérieur à celui que ces derniers proposent dans leur argumentation subsidiaire, soit 2. 000 euros ; que le simple descriptif de la propriété et le montant du prix de vente sont à cet égard insuffisants pour retenir l'évaluation qu'ils sollicitent ou celle fixée par le premier juge ; que l'indemnité d'occupation ainsi fixée est due depuis le 1er janvier 2002 jusqu'à la libération effective des lieux ; que le montant global dû jusqu'au 30 juin 2006, date visée par les époux Y..., s'établit à 108. 000 euros ;
Attendu que les époux Y... justifient qu'en raison du non respect, par les époux X..., de leur engagement contractuel de libérer les lieux au 1er janvier 2002, ils ont dû acquitter des impôts fonciers et des primes d'assurances sans pouvoir jouir des biens dont ils sont propriétaires ; qu'ils ont également subi un préjudice moral du fait des allégations infondées des époux X... relatives à l'exploitation de leur faiblesse physique et économique et à l'exercice de violences à leur égard ; que ces préjudices découlant de l'attitude fautive des appelants justifient une indemnisation à hauteur de 5. 000 euros ;
Attendu qu'au soutien de leur action en responsabilité contre Maître Z..., notaire, les époux X... se prévalent d'un préjudice matériel constitué, en cas d'absence d'annulation de la vente, par la différence entre le prix réel du bien et le prix de vente retenu dans l'acte du 2 octobre 2000 ; que cependant, les motifs retenus précédemment font apparaître l'absence d'un préjudice de cette nature, dès lors que les appelants ne démontrent pas que le valeur de leur immeuble était supérieure à celle contractuellement fixée ;
Attendu qu'ils n'établissent pas non plus l'existence d'un préjudice moral, dès lors qu'ils ne démontrent pas que leur consentement a été vicié, ni qu'ils ont été victimes d'un abus de faiblesse ou d'une situation de dépendance économique, et qu'ils ont accepté en connaissance de cause le délai de la faculté de rachat contractuellement fixé ;
Que leur action en responsabilité contre le notaire a été à bon droit rejetée par le premier juge ;
Attendu que Maître Z... ne justifie pas d'un préjudice particulier découlant de la procédure diligentée à son encontre, et indépendant des frais irrépétibles qu'il a supportés ;
Attendu qu'il doit être fait application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Rejette l'exception de nullité du jugement,
Dit n'y avoir lieu d'ordonner une médiation,
Réformant partiellement,
Dit que l'expulsion des époux X... devra intervenir dans les deux mois de la signification de l'arrêt, sous astreinte de TROIS CENTS EUROS (300 EUROS) par jour de retard,
Fixe à DEUX MILLE EUROS (2. 000 EUROS) l'indemnité d'occupation due par les époux X... depuis le 1er janvier 2002, jusqu'à la libération des lieux,
Condamne les époux X... à payer à ce titre aux époux Y..., pour la période courue jusqu'au 30 juin 2006, la somme de CENT HUIT MILLE EUROS (108. 000 EUROS), avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt,
Condamne les époux X... à payer aux époux Y... la somme de CINQ MILLE EUROS (5. 000 EUROS) à titre de dommages intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
Ordonne la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du Code Civil,
Déboute Maître Z... de sa demande de dommages intérêts,
Confirme le jugement entrepris pour le surplus,
Y ajoutant,
Condamne les époux X... à payer, en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, aux époux Y..., la somme de TROIS MILLE EUROS (3. 000 EUROS) et à Maître Z..., la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1. 500 EUROS),
Condamne les époux X... aux dépens, avec droit de recouvrement direct par la Société Civile Professionnelle (SCP) DUTRIEVOZ et la Société Civile Professionnelle (SCP) BRONDEL-TUDELA, avoués.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0355
Numéro d'arrêt : 05/05404
Date de la décision : 19/07/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Montbrison, 15 juillet 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2007-07-19;05.05404 ?
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