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05/07/2007 | FRANCE | N°06/01064

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0466, 05 juillet 2007, 06/01064


COUR D'APPEL DE LYON
Troisième Chambre Civile
SECTION A

ARRÊT DU 05 Juillet 2007

Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 09 février 2006-No rôle : 2003j199

No R.G. : 06 / 01064

Nature du recours : Appel

APPELANTES :

Société ALIMATIQUE SA
108, boulevard du 69ème R.I
54270 ESSEY LES NANCY

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour

assistée de Me Thierry BRISSART, avocat au barreau de REIMS

Société ALIMATIQUE RHONE ALPES devenue ALIMATIQUE R.

A SASU
46, avenue Louis Aulagne
69600 OULLINS

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour

assistée de Me Thierry BRIS...

COUR D'APPEL DE LYON
Troisième Chambre Civile
SECTION A

ARRÊT DU 05 Juillet 2007

Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 09 février 2006-No rôle : 2003j199

No R.G. : 06 / 01064

Nature du recours : Appel

APPELANTES :

Société ALIMATIQUE SA
108, boulevard du 69ème R.I
54270 ESSEY LES NANCY

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour

assistée de Me Thierry BRISSART, avocat au barreau de REIMS

Société ALIMATIQUE RHONE ALPES devenue ALIMATIQUE R.A SASU
46, avenue Louis Aulagne
69600 OULLINS

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour

assistée de Me Thierry BRISSART, avocat au barreau de REIMS

Société SEKOYA SAS
allée Alberto Santos Dumont
Pôle Technologique H
51100 REIMS

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour

assistée de Me Thierry BRISSART, avocat au barreau de REIMS

Société CHACA SARL
15, rue de L'Escaut
51100 REIMS

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour

assistée de Me Thierry BRISSART, avocat au barreau de REIMS
INTIMEE :

Société SPACIO SARL anciennement dénommée COREDA
54 rue Paul Verlaine
69100 VILLEURBANNE

représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour

assistée de la SCP LAMY ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

Instruction clôturée le 22 Mai 2007

Audience publique du 01 Juin 2007

LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION A DE LA COUR D'APPEL DE LYON,

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Monsieur Henry ROBERT, Président
Monsieur Bernard SANTELLI, Conseiller
Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Conseiller

DEBATS : à l'audience publique du 01 Juin 2007
sur le rapport de Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Conseiller

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Mademoiselle Marie-Pierre BASTIDE, greffier

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 05 Juillet 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Monsieur Henry ROBERT, Président, et par Mademoiselle Marie-Pierre BASTIDE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA CESSION DU FONDS COREDA

Suivant protocole de cession de fonds de commerce en date du 26 octobre 2001 la SARL COMPAGNIE DE DISTRIBUTION AUTOMATIQUE dite COREDA, représentée par son gérant Michel Y..., s'est engagée à céder à la SARL CHACA, représentée par Eric E..., co-gérant, un fonds de commerce d'exploitation d'appareils de distribution automatiques et de vente de produits destinés à l'alimentation de distributeurs et de distributeurs.
Il était alors convenu d'un prix de 1. 067. 143 euros soit 7 millions de Francs s'appliquant pour moitié aux éléments incorporels et pour moitié au matériel, payable à hauteur de :
* 70 % le jour de la régularisation par acte authentique
* 10 % dans un délai d'un an de la régularisation par acte authentique
* 20 % dans un délai de deux ans de la régularisation par acte authentique.
Il était aussi stipulé :
-une clause de révision de prix affectant seulement la partie du prix payable à terme, " le paiement des 30 % " ne devant avoir lieu que s'il y avait maintien du périmètre du chiffre d'affaires
-une clause compromissoire dans l'hypothèse où l'acquéreur évoquerait une baisse du chiffre d'affaires ou de la marge.
Le cessionnaire CHACA qui, en raison de l'urgence invoquée par le cédant, a versé un acompte de 228. 673,53 euros sur le prix :
-était autorisé à se substituer toute personne de sa convenance lors de la réitération de l'acte de cession par acte authentique,
-devait rester solidairement obligé au paiement du prix et à l'exécution des conditions
-s'obligeait à établir au profit de Michel Y... un contrat de travail à durée indéterminée en tant que directeur commercial.

En novembre 2001 a été constituée la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES au capital de 76. 000 euros apporté par son associée unique la société ALIMATIQUE HOLDING, dont le siège social était fixé à OULLINS, avec pour nom commercial COREDA et pour objet la vente de matériel de distribution alimentaire et de produits de négoce et l'exploitation de distributeurs automatiques.
Franck X..., son Président, était expressément habilité à régulariser pour le compte de la société en formation l'acquisition du fonds de commerce appartenant à la SARL COREDA.

Par acte reçu le 29 novembre 2001 par Maître Z..., notaire associé à REIMS, la SARL COREDA a vendu à la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, alors en cours d'immatriculation, représentée par Franck X..., lui-même substitué par Eric E..., le fonds d'exploitation d'appareils de distribution automatiques et de vente de produits destinés à l'alimentation de distributeurs et de distributeurs, exploité à VILLEURBANNE et à RILLIEUX comprenant :
-les éléments incorporels, notamment la clientèle, et les marques COREDA et HAPPY C'NIC, le droit au bail
-les éléments corporels, le matériel servant à l'exploitation devant être décrit et estimé article par article dans un état dressé par les parties qui devait être annexé à l'acte de cession, ainsi que la liste des machines indiquant leur nombre et leur localisation, les parties déclarant faire leur affaire personnelle des marchandises se trouvant dans le fonds vendu.
Le cédant déclarait avoir réalisé pendant le dernier exercice du 1er septembre 1999 au 31 mars 2001 un chiffre d'affaires de 25. 391. 525 Francs HT et un bénéfice de 106. 406 Francs HT.
Les éléments corporels du fonds, identifiés sur une note qui devait être aussi annexée à l'acte, étaient évalués à 533. 571,56 euros.
Il était précisé que s'agissant du matériel se trouvant dans les locaux d'exploitation mais n'appartenant pas au cédant, l'acquéreur ferait son affaire personnelle avec le propriétaire de ce matériel non compris dans la vente, de la continuation ou de la résiliation des conventions y relatives, le vendeur ne devant jamais être inquiété à ce sujet.

Le prix de 1. 067. 143 euros, s'appliquant pour moitié aux éléments incorporels et pour moitié au matériel, était payable à hauteur de :
* 228. 673,53 euros avant l'acte et 518. 326,66 euros le jour de la régularisation par acte authentique
* 10 % soit 106. 714,31 euros dans un délai d'un an du 29 novembre 2001
* 20 % soit 213. 428,62 euros dans un délai de deux ans du 29 novembre 2001
ce solde de 30 % n'étant ni productif d'intérêt, ni soumis à indexation.

Il était aussi stipulé :

-une clause de révision de prix affectant seulement la partie du prix payable à terme, " le paiement des 30 % " ne devant avoir lieu que s'il y avait maintien du périmètre du chiffre d'affaires, en l'occurrence le chiffre d'affaires d'un exercice annuel complet arrêté d'un commun accord à 13. 394. 190 Francs HT (soit 2. 041. 931 euros) représentant l'activité " full service " telle que définie dans les documents comptables.
Sur ce point l'acte de cession précisait que :
* si le chiffre d'affaires de la période du 30 novembre 2001 au 29 novembre 2002 était inférieur à 13. 394. 190 Francs HT, le premier solde de 10 % ne serait pas exigible et son règlement éventuel reporté au 29 novembre 2003
* si le chiffre d'affaires d'affaires de la période du 30 novembre 2002 au 29 novembre 2003 était inférieur à 13. 394. 190 Francs HT, le dernier solde de 20 % ne serait pas exigible immédiatement
* pour chacune des deux échéances l'établissement des comptes intermédiaires, certifiés par l'expert comptable et le commissaire aux comptes de la société, devrait être fourni dans les deux mois de l'échéance, les soldes exigibles devant être acquittés dans les 8 jours de leur communication en cas de maintien ou d'augmentation du chiffre d'affaires convenu
* en cas de baisse de chiffre d'affaires le paiement des soldes de 10 % et de 20 % serait subordonné à la révision.

-une clause compromissoire dans l'hypothèse où l'acquéreur évoquerait une baisse du chiffre d'affaires ou de la marge, chacune des deux parties devait désigner son conseil pour entamer un processus d'arbitrage à charge pour ces conseils de se mettre d'accord sur un arbitre pour prendre la décision.
Les deux conseils et l'arbitre devaient se mettre d'accord sans faire appel aux tribunaux pour fixer l'amplitude de la baisse de prix dans la limite du solde de 30 %, compte tenu de l'amplitude de la baisse de chiffre d'affaires mais également de la variation de la marge brute et prendre en compte à périmètre constant la baisse de chiffre d'affaires et de la marge et établir une pondération

-une indemnité de 1 % par mois de retard en cas de non paiement d'une somme à son échéance, le solde du prix devenant immédiatement exigible à défaut de paiement à échéance exacte de toute somme due et quinze jours après un commandement resté infructueux.

L'acte authentique mentionnait aussi que l'acquéreur avait établi au profit de Michel Y... un contrat de travail à durée indéterminée en tant que directeur commercial. Son épouse née Patricia A..., secrétaire de direction, a continué à tenir le service administratif pour le compte du cessionnaire.

Enfin l'acte de cession prévoyait que la société cédante devrait dans les deux mois de la cession modifier sa dénomination. La SARL COREDA a donc ensuite pris la dénomination de SARL SPACIO.

LES FAITS

A partir de janvier 2002 le mode de comptage des recettes des distributeurs de la société ALIMATIQUE RHÔNE ALPES qui s'effectuait sur le site de VILLEURBANNE avec l'intervention de la société SOFIGEM a été modifié.

Des conventions de dépôt d'appareils automatiques ont été passées le 6 mars 2002 par la société BRAKE FRANCE et le 11 mars 2002 par le foyer CLAIREFONTAINE avec la SARL COREDA représentée par son gérant Michel Y....

Le 1er février 2002 le cédant a adressé à la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES une facture d'un montant de 145. 967,05 euros représentant un solde sur un principal de 206. 967,06 euros TTC dû au titre du stock de produits, matériels, pièces détachées et monnaie. Le cédant a aussi établi des factures proforma au titre du remboursement des mensualités de crédit-bail qui avaient encore été débitées de son compte après la cession.

Le 15 mars 2002 la SAS ALIMATIQUE a contesté ces factures en discutant la valorisation de matériel pour 45. 584 euros et en invoquant des encaissements reçus de L'EDF par SPACIO et qui devaient être déduits.

La SAS ALIMATIQUE a constitué courant 2002 avec 7 autres sociétés implantées sur le territoire national dont une société SGDA, une SAS DALLIANCE ayant notamment pour objet la prospection de la clientèle et la négociation de contrats dans le domaine de la distribution automatique de produits de consommation courante sur l'ensemble du territoire national et à l'étranger.

En avril 2002 les sociétés ALIMATIQUE RHÔNE ALPES et SGDA ont soumissionné ensemble à un appel d'offres EDF concernant les régions RHÔNE ALPES / PACA.
Le 23 septembre 2002 la SA ALIMATIQUE a adressé à la société ALIMATIQUE RHÔNE ALPES un courrier établi à l'attention de Michel Y... ainsi libellé :
" Après étude des dossiers concernant les appels d'offre HOSPICES CIVILS DE LYON la direction a décidé de prendre l'option d'une réponse DALLIANCE.
Nous vous prions de contacter rapidement Hervé F... afin de participer le plus activement possible à la construction du dossier ".

Dans un courrier du 3 septembre 2002 signé par Messieurs Eric B... et François C... et destiné à Michel Y..., la SAS SEKOYA a accusé réception d'un courrier du 26 juillet 2002 et dénoncé un certain nombre d'anomalies constatées après un audit réalisé sur le site COREDA de VILLEURBANNE. Il était notamment fait état de la dissimulation d'informations commerciales relatives à la décision de clients de mettre fin avant la cession aux contrats existants, à un litige sur la valorisation de machines en stock et de la perception indue de sommes devant revenir à COREDA.

Le 4 septembre 2002, en présence d'un huissier de justice et de Michel Y... les archives comptables de la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES ont été " remontées au siège social de la société ALIMATIQUE à ESSEY LES NANCY ".

Pendant l'année 2002 Michel Y... a adressé de nombreuses correspondances à la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES.
Le 27 novembre 2002 la société ALIMATIQUE RHÔNE ALPES a licencié les époux Y....

Marc D..., expert comptable de la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, a procédé en octobre 2002 et jusqu'au 6 novembre 2002 à un audit de la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES portant sur les cycles suivants et révélant selon l'auditeur :
-cycle clients, paiement et facturation : le paiement pour un montant total de 118. 660,74 euros à COREDA, en réalité SPACIO, de sommes dues à ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, dues selon lui à la confusion entretenue par Michel Y... auprès des clients jusqu'en juillet 2002
-cycle caisse : une insuffisance de comptage de recettes de 22. 723,76 euros en décembre 2001
-cycle stock matériel : une valorisation excessive de l'inventaire matériel dressé au moment de la cession, l'auditeur doutant de l'existence de certains matériels, se posant la question de savoir si le même matériel avait pu être valorisé 2 fois

-cycle leasings et refacturations : un montant de 10. 956,46 euros restant dû à SPACIO au lieu de 27. 931,53 euros réclamé, en raison d'erreurs de facturation notamment au titre de l'affranchissement et dans l'attente de justificatifs de confirmation de la SNVB.

Le 27 janvier 2003 Marc D... a notamment attesté que :
-la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES avait développé pendant la période du 1er décembre 2001 au 30 novembre 2002 un chiffre d'affaires de 1. 792. 353 euros
-il ne lui avait pas été possible d'établir une situation au 29 novembre 2002 ne correspondant pas à un arrêté mensuel
-il ne pouvait dresser un bilan et un compte de bilan fiable en raison de certaines incertitudes sur la position de certains comptes de bilan, et sur l'enregistrement des recettes de décembre 2001 et janvier 2002.
Cette attestation a été adressée par courrier recommandé à Michel Y... qui, par courrier du 29 janvier 2003, a demandé à l'expert comptable de lui faire parvenir un exemplaire de la situation comptable au 30 juin 2002 et les coordonnées du commissaire aux comptes de la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, a contesté l'exactitude du montant du chiffre d'affaires retenu, et demandé à l'expert comptable de lui adresser un tableau du chiffre d'affaires présenté selon le compte remis au moment de la cession.

Le 18 avril 2003 Marc D... a établi le bilan de l'exercice du 30 novembre 2001 au 31 décembre 2002 mentionnant un chiffre d'affaires de 2. 116. 828 euros et une perte de 535. 282 euros.

Le 24 janvier 2004 Marc D... a établi une seconde attestation mentionnant que le chiffre d'affaires développé par la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES pour la période du 1er décembre 2002 au 30 novembre 2003 s'élevait à 991. 599,29 euros, déduction faite du chiffre d'affaires du fonds de commerce à l'enseigne IGLOO dont la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES s'était portée acquéreur avec effet au 1er janvier 2003.

Dans des documents intitulés " analyse de l'évolution du chiffre d'affaires Full service du fonds de commerce COREDA " l'expert comptable a retenu sur une période de 12 mois les chiffres suivants :
-chiffre d'affaires enregistré par la SARL COREDA pour la période du 1er septembre 1999 au 31 mars 2001 : 1. 550. 187 euros soit sur 12 mois 1. 550. 187,27 euros
-chiffre d'affaires prévisionnel annoncé par Michel Y... pour la période du 1er décembre 2001 au 30 novembre 2002 : 1. 895. 516 euros
-chiffre d'affaires minimum à réaliser suivant la clause de révision du prix : 2. 041. 931 euros
-chiffre d'affaires enregistré du 1er décembre 2001 au 30 novembre 2002 : 1. 674. 793 euros
-chiffre d'affaires enregistré du 1er décembre 2002 au 30 novembre 2003 : 918. 626 euros.

Enfin la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES a cédé le 31 mars 2006 au prix de 1. 800. 000 euros le fonds constitué du fonds acquis en 2001 à la SARL COREDA et du fonds IGLOO acquis en mai 2003 de la SAS ALIMATIQUE au prix de 150. 000 euros. Il était précisé à l'acte que la clientèle et les contrats cédés à la société AUTOBAR exclurait les clients sous contrat avec le groupe DALLIANCE qui étaient conservés par le cédant.

LA PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE ET LE JUGEMENT ENTREPRIS

Par actes des 31 décembre 2002,2 et 6 janvier 2003 la SARL SPACIO a assigné devant le Tribunal de Commerce de LYON la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, mais aussi les sociétés CHACA, ALIMATIQUE et SEKOYA, ces trois dernières en raison de leur implication dans la gestion de la SARL ALIMATIQUE RHÔNE ALPES cessionnaire, pour obtenir leur condamnation solidaire au paiement de :
-la somme de 85. 967,05 euros représentant le solde du prix des stocks
-la somme de 37. 800,21 euros au titre de factures de redevances de crédit bail indûment supportées par le cédant
-la somme de 320. 142,93 euros représentant le solde de 30 % du prix de cession
-la somme de 100. 000 euros au titre des préjudices complémentaires occasionnés au regard des inexécutions par les cessionnaires de leurs obligations.

Dans leurs premières écritures du 23 avril 2003 les sociétés défenderesses se sont prévalu de la clause compromissoire stipulée à l'acte de cession et des dispositions de l'article 1458 du Code de Procédure Civile et ont demandé au Tribunal :
-à titre principal de se déclarer incompétent
-à titre subsidiaire de faire application de l'article 76 du Nouveau Code de Procédure Civile avant toute discussion au fond.

Dans ses conclusions du 5 juin 2003 la SARL SPACIO a sollicité du Tribunal qu'il enjoigne aux défendeurs de conclure au fond.
Le 3 juillet 2003 le magistrat qui présidait l'audience du Tribunal de Commerce a enjoint à la SA ALIMATIQUE défenderesse de conclure au fond dans un délai maximum de 15 jours.L'ordonnance notifiée au conseil de la SA ALIMATIQUE n'a pas précisé le nom du magistrat signataire ni celui du greffier.

Suite à la plainte avec constitution de partie civile déposée le 9 mai 2003 pour des faits de vols, abus de confiance et d'escroquerie par la SA ALIMATIQUE RHÔNE ALPES contre personne non dénommée mais visant les époux Y..., une information judiciaire a été ouverte le 18 juillet 2003 au cabinet du juge d'instruction de LYON.

Dans des conclusions déposées le 11 septembre 2003 les sociétés défenderesses ont sollicité le bénéfice de leurs précédentes écritures et y ajoutant ont demandé au Tribunal de :
-mettre hors de cause les sociétés ALIMATIQUE, SEKOYA et CHACA et se déclarer incompétent au profit des arbitres
-subsidiairement surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction répressive sur les faits commis par les consorts Y... au préjudice de la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES
-plus subsidiairement et au visa du rapport d'audit D... rejeter les demandes de la SARL SPACIO en raison de créances réciproques.

Lors de l'audience de plaidoiries du 9 juin 2005 le juge rapporteur a demandé aux parties de clarifier leurs explications.
Le 22 juillet 2005 la SARL SPACIO a alors transmis une note en délibéré à laquelle était annexée un décompte concluant à un solde de 91,30 euros dû par ALIMATIQUE RHÔNE ALPES sur le prix du stock et du matériel et de leasings.

Par jugement du 9 février 2006 assorti de l'exécution provisoire le Tribunal de Commerce de LYON a :
-rejeté l'exception d'incompétence et la demande de sursis à statuer
-dit que les sociétés ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, ALIMATIQUE, CHACA et SEKOYA avaient commis une faute dans la gestion et l'administration du fonds de commerce acquis auprès de la SARL SPACIO
-condamné solidairement les sociétés ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, ALIMATIQUE, CHACA et SEKOYA à payer à la SARL SPACIO
* la somme de 320. 142,93 euros au titre du solde du prix de cession, avec intérêts au taux de 1 % par mois à compter du 15 janvier 2003 à titre de dommages et intérêts, avec capitalisation à compter de la demande formée le 26 février 2004

* la somme de 91,30 euros pour solde du compte entre les parties et dommages et intérêts avec intérêts légaux à compter du jugement
* une indemnité de procédure de 10. 000 euros
et à supporter solidairement les dépens
-débouté la SARL SPACIO de sa demande de dommages et intérêts complémentaires.

LA PROCÉDURE D'APPEL

Par déclaration remise au greffe le 17 février 2006 les sociétés ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, ALIMATIQUE, CHACA et SEKOYA ont interjeté appel de ce jugement dans toutes ses dispositions.
La SARL SPACIO a fait procéder à une saisie attribution sur le compte de la SAS SEKOYA alors créditeur de 212. 515 euros.
Les sociétés ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, ALIMATIQUE, CHACA et SEKOYA ont alors saisi Monsieur le Premier Président qui par ordonnance de référé du 20 mars 2006 a :
-autorisé les appelantes pour éviter que l'exécution provisoire du jugement ne soit poursuivie à leur encontre, à consigner sur un compte CARPAL ouvert au nom de la SARL SPACIO les valeurs suffisantes pour garantir les condamnations mises à leur charge au-delà de la somme saisie
-dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
-laissé les dépens à la charge des sociétés ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, ALIMATIQUE, CHACA et SEKOYA.

LES PRÉTENTIONS ET LES MOYENS DES APPELANTES

Par conclusions en réponse et récapitulatives No3 signifiées le 11 mai 2007 les sociétés ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, ALIMATIQUE, CHACA et SEKOYA demandent à la Cour :
-à titre principal :
* d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclarée infondée la clause compromissoire stipulée dans les conventions des 26 octobre et 27 novembre 2001, de dire que le Tribunal de Commerce devait se déclarer incompétent, et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir devant l'arbitre qu'elles auront choisi
* d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a validité l'ordonnance rendue le 3 juillet 2003 alors qu'il appartenait au Tribunal seul de statuer sur l'exception d'incompétence et de statuer au fond sauf à mettre les parties en demeure de conclure au fond, de prononcer la nullité de l'ordonnance et par voie de conséquence du jugement intervenu
-subsidiairement d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a écarté la règle le criminel tient le civil en l'état, et de surseoir à statuer dans l'attente de la décision à intervenir de la juridiction répressive, et dans tous les cas mettre hors de cause les sociétés ALIMATIQUE, CHACA et SEKOYA
-très subsidiairement d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris
-plus subsidiairement encore de " débouter en l'état la SARL SPACIO de toutes ses demandes en raison de la connexité des créances détenues par la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES à l'encontre de la SARL SPACIO et de ses dettes éventuelles envers cette société "
-dans tous les cas de condamner la SARL SPACIO à payer à la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES une indemnité de procédure de 10. 000 euros.

D'abord les sociétés appelantes qui reprochent à Michel Y... d'avoir tenté de tromper ses interlocuteurs sur la faculté de réaliser le chiffre d'affaires annoncé et de spolier la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES et qui contestent avoir tronqué le chiffre d'affaires réalisé par le cessionnaire pour faire échec au paiement du solde du prix se prévalent de la clause de révision du prix et de la clause compromissoire convenues.
Elles observent que :
-l'assignation délivrée à leur encontre a pour objet le paiement du solde du prix de cession
-les parties ont convenu de recourir à un arbitre dans l'hypothèse où l'acquéreur évoquerait une baisse de chiffre d'affaires.
La SARL CHACA intervenue lors de la signature du protocole d'accord conteste être obligée envers le cédant alors que l'acte authentique dont les stipulations sont différentes ne fait aucune référence à une substitution.
Les sociétés ALIMATIQUE et SEKOYA ajoutent qu'elles ne sont pas partie à l'acte de cession. Elles contestent une implication de leurs dirigeants dans la gestion du fonds COREDA et font observer que François GUY et Eric E... se sont contentés le 26 juillet 2002 de répondre au courrier que Michel Y... leur avait adressé à titre personnel.
En toute hypothèse elles rappellent qu'elles constituent des personnes morales distinctes de la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES.

Sur la nullité de l'ordonnance du 3 juillet 2003 et du jugement subséquent les appelantes soulignent que :
-l'ordonnance est entachée d'une nullité absolue car n'y figurent ni le nom ni la signature du juge qui a statué, la nullité d'ordre public encourue ne permettant pas de régularisation
-seul le Tribunal peut inviter les parties à conclure au fond.

Sur le sursis à statuer les appelantes exposent que la SA ALIMATIQUE RHÔNE ALPES s'est rapidement rendue compte que les époux Y... devenus ses salariés avaient commis divers agissements à son préjudice, révélés par l'audit D... et objet de l'instruction en cours alors que :
-de nombreuses factures ont après la cession continué à être payées par virement sur le compte COREDA (devenue SPACIO), les époux Y... qui ne les ont pas rétrocédées s'étant ainsi rendus coupables d'abus de confiance, le total des encaissements ainsi reçus par le cédant s'élevant à 118. 660,74 euros, somme voisine des montants de 85. 967,05 et 37. 800,21 euros réclamés dans l'assignation
Sur ce point elles observent que la SARL SPACIO a elle-même reconnu le 22 juillet 2005 un encaissement total de 98. 404,85 euros.
-des irrégularités ont aussi été constatées au niveau de la caisse avec un écart de 22. 723,76 euros en décembre 2001, alors que Patricia Y... qui comptait les deniers en était responsable
-la SARL SPACIO a encore commis des détournements dans le cadre de l'encaissement de facture émise sur la DIRCAT
-les déclarations fournies par le cédant dans l'inventaire sont erronées.
Les appelantes évoquent enfin les menaces proférées par Michel Y... et les faux contrats passés en mars 2002 au nom de la SARL COREDA avec les clients CLAIRE FONTAINE et BRAKE. Elles estiment que le Tribunal de Commerce ne pouvait se prononcer sans attendre l'issue de l'instruction en cours.
La SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES ajoute qu'elle sera amenée à solliciter la réparation du préjudice occasionné et la restitution des sommes détournées.

Sur le fond les appelantes soutiennent que l'expert comptable de la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES a caractérisé la diminution du chiffre d'affaires FULL SERVICES en 2002 et 2003.
Elles contestent avoir volontairement diminué ce chiffre d'affaires et tout transfert aux associés de la SAS DALLIANCE. Elles ajoutent que certains marchés n'ont pas été retenus car ils n'étaient pas rentables.
Elles rappellent les difficultés rencontrées en raison de la non conformité du laboratoire vendu par la SARL COREDA et estiment ne pas rester devoir un quelconque solde de prix.
Elles contestent devoir acquitter des sommes :
-au titre du stock,
-des crédits baux en convenant toutefois que les vérifications permettent de retenir un solde de 10. 956,46 euros à ce titre, mais sous réserve de compensation. Elles se prévalent sur ce point d'un arrêt rendu le 12 janvier 2006 au profit de la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES par la Cour d'Appel D'AIX EN PROVENCE.

LES PRÉTENTIONS ET LES MOYENS DE LA SARL SPACIO EX COREDA

Par conclusions signifiées le 6 mars 2007 la SARL SPACIO sollicite :
-la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les exceptions des sociétés défenderesses et les a condamnées solidairement à lui payer une somme de 320. 234,23 euros après compensation, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation avec capitalisation
-l'infirmation du jugement mais seulement en ce qu'il a limité à 91,30 euros le montant de son préjudice et la condamnation solidaire des appelantes à lui payer la somme de 150. 000 euros à titre de dommages et intérêts et une indemnité de procédure de 10. 000 euros.

Sur les exceptions soulevées par les appelantes la SARL SPACIO soutient que :
-en ce qui concerne la clause compromissoire :
* les parties à l'acte de cession ont seulement convenu de confier à un arbitre l'amplitude de fixer une éventuelle baisse de prix, mais non de trancher un différent entre elles
* une telle clause ne peut pas être invoquée par les sociétés ALIMATIQUE SEKOYA et CHACA
* elle n'a pas limité sa demande au paiement du solde du prix du fonds
* la clause de révision de prix ne peut recevoir application alors que le chiffre d'affaires a été tronqué pour faire échec au paiement du solde du prix lui restant dû
-en ce qui concerne la nullité de l'ordonnance du 3 juillet 2003 :
* la nullité invoquée n'a occasionné aucun grief
* la nullité de cette ordonnance ne pouvait être obtenue que par l'exercice d'une voie de recours à l'encontre de cette décision
-en ce qui concerne le sursis à statuer :
* la plainte dirigée contre les époux Y... n'a été déposée qu'après la délivrance de l'assignation et pour des accusations infondées
* les sommes susceptibles d'avoir été perçues par SPACIO en dépit des informations dispensées aux clients ont été compensées avec les sommes dues par les sociétés appelantes ou remboursées
* Patricia Y... n'a jamais été en charge du comptage des espèces
* la liste des clients communiquée était sincère
* aucune menace n'a été proférée, ni aucun faux commis, les clients CLAIREFONTAINE et BRAKE ayant seulement retourné avec retard des contrats adressés en novembre 2001.

Sur le fond la SARL SPACIO indique d'abord qu'elle est fondée à obtenir condamnation solidaire :
-du cessionnaire ALIMATIQUE RHÔNE ALPES
-de la SARL CHACA obligée au paiement en vertu du protocole qu'elle a signé
-la SAS SEKOYA qui s'est impliquée dans la gestion du fonds ainsi que le démontre le courrier adressé par ses deux dirigeants le 3 septembre 2002
-la SAS ALIMATIQUE alors que la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES n'a aucune autonomie et que ces deux sociétés constituent en réalité une seule et même structure,
toutes ces sociétés étant dirigées par Messieurs E... et C....

Ensuite sur le stock la SARL SPACIO expose que :
-il a fait l'objet d'un inventaire détaillé le 30 novembre 2001, et a été évalué au dernier prix d'achat connu suivant les règles comptables appliquées dans la SARL et encore par la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES

-il a donné lieu à une facture du 1er février 2002 sur laquelle après versement de 2 acomptes de 61. 000 et de 60. 000 euros il lui reste dû un solde de 85. 967,05 euros.

Sur les avances faites aux organismes de crédit-bail elle rappelle que le cessionnaire s'était engagé à effectuer les transferts des contrats et qu'il lui reste dû 39. 945,12 euros.

Sur le solde du prix de cession, la SARL SPACIO soutient que les chiffres d'affaires retenus par le cessionnaire ne sont pas probants car ils n'ont pas été déterminés à périmètre constant, les documents produits ne permettant pas de déterminer si les chiffres ressortent des mêmes conditions d'exploitation, alors que l'intégralité des comptes clients, des livres de comptes n'a pas été produit.
Elle rappelle qu'en application de l'acte de cession il convenait aussi de prendre en compte les clients venant en remplacement ou en addition.
Elle reproche aux cessionnaires d'avoir empêché le développement du chiffre d'affaires, provoqué sa diminution substantielle et son détournement au profit de sociétés du groupe DALLIANCE.

La SARL SPACIO, qui s'est reconnue débitrice envers la SAS ALIMATIQUE de la somme de 27. 720,94 euros au titre des congés payés dus aux salariés au jour de la cession et de la somme de 98. 404,85 euros au titre de virements effectués par erreur par les clients sur son compte, a conclu qu'après compensation les appelantes restaient lui devoir un solde de 320. 234,91 euros.
Elle invoque le préjudice financier occasionné par l'attitude des appelantes, contraignant ses associés à un apport en compte courant de 90. 000 euros, générant des frais et un travail important.

Une ordonnance en date du 22 mai 2007 clôture la procédure.

SUR CE LA COUR

Attendu tout d'abord, sur la compétence, que l'acte de cession comporte sous les dispositions relatives au paiement du prix et aux modalités de sa révision, une clause compromissoire ainsi libellée :
" Lors du paiement des 10 % dans le délai d'un an et des 20 % dans le délai de deux ans, dans l'hypothèse où l'acquéreur évoquerait une baisse du chiffre d'affaires brut, chacune des parties désignera son conseil pour entamer un processus d'arbitrage à charge pour ces deux conseils de se mettre d'accord sur un arbitre pour prendre la décision.
Les deux conseils et l'arbitre devront se mettre d'accord de manière définitive et sans faire appel aux tribunaux pour fixer l'amplitude de la baisse de prix compte tenu de l'amplitude de la baisse du chiffre d'affaires mais également de la variation de la marge brute, sachant :
-qu'elle ne pourra excéder en tout 30 % soit 2. 100. 000 Francs
-qu'elle ne pourra être supérieure à 10 % la première année soit 700. 000 Francs, ni être supérieure à 20 % la deuxième année soit 1. 400. 000 Francs.
Les conseils et arbitre devront prendre en compte à périmètre constant la baisse de chiffre d'affaires et la baisse de la marge brute et établir une pondération. " ;

Que les parties ont ainsi choisi de recourir à un arbitre pour assurer l'équilibre de l'opération contractuelle et adapter la convention en prenant pour référence le chiffre d'affaires ; que la référence choisie pour la mise en oeuvre d'une clause d'adaptation du prix est nécessairement indépendante des parties ;
Qu'en l'espèce le cédant qui poursuit le paiement du solde du prix, mais aussi le paiement du prix des stocks, le remboursement de redevances, et le paiement de dommages et intérêts, invoque les agissements du cessionnaire destinés à diminuer le chiffre d'affaires enregistré par le cessionnaire au profit de sociétés du groupe DALLIANCE ;

Que dans conditions le litige opposant les parties n'entre pas dans l'objet de la clause compromissoire stipulée dans l'acte de cession ;

Que l'article 76 du Nouveau Code de Procédure Civile impose au juge qui entend rejeter une exception d'incompétence et statuer au fond du litige dans un même jugement, de mettre préalablement les parties en demeure de conclure au fond si elles ne l'ont déjà fait ;
Que si l'ordonnance rendue le 3 juillet 2003, qui ne mentionne ni le nom du juge ni celui du greffier est entachée de nullité, les sociétés appelantes ont conclu au fond devant le Tribunal de Commerce ;

Qu'ainsi le Tribunal a pu, sans méconnaître les dispositions de l'article 76 du Nouveau Code de Procédure Civile, se déclarer compétent et statuer au fond le 9 février 2006 ;

Attendu ensuite, sur le sursis à statuer, que pour qu'une demande de sursis à statuer puisse être satisfaite il est nécessaire que la décision à intervenir sur l'action publique soit susceptible d'influer sur celle de la juridiction civile ;
Qu'en l'espèce les sociétés appelantes produisent seulement relativement à l'action publique :
-la notification de l'ordonnance en date du 13 mai 2003 du Doyen des juges d'instruction de LYON visant une plainte avec constitution de partie civile de la société ALIMATIQUE RHÔNE ALPES contre personne non dénommée mais visant les époux Y... sous les qualifications de vols-abus de confiance-escroquerie (pièce 27)
-le courrier adressé le 18 juillet 2003 par le Doyen des juges d'instruction de LYON au conseil de la société ALIMATIQUE RHÔNE ALPES pour l'aviser que sa plainte avec constitution de partie civile avait donné lieu à l'ouverture d'une information judiciaire (pièce 28) ;
Que ces deux documents n'établissent pas l'existence d'une quelconque influence de l'action publique sur l'instance engagée par le cédant SPACIO aux fins d'obtenir paiement du solde du prix, des stocks, de redevances, et de dommages et intérêts ;
Que le jugement entrepris sera donc aussi confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de sursis à statuer ;

Attendu sur la recevabilité des demandes formées à l'encontre des sociétés SEKOYA et ALIMATIQUE, que le cessionnaire SPACIO se prévaut à l'égard de la première de son implication dans l'acquisition du fonds COREDA, manifestée par un courrier adressé par ses dirigeants le 3 septembre 2002 et à l'égard de la seconde d'une absence totale d'autonomie ;

Mais attendu qu'aucune conclusion ne peut être tirée de la lecture du courrier du 3 septembre 2002 (pièce 9) adressée sous l'en-tête SEKOYA par Messieurs E... et C..., en réponse à un courrier Y... du 26 juillet 2002, expressément visé et qui n'a pas été versé aux débats ;
Que si la SAS SEKOYA a été constituée le 17 août 2001 entre Messieurs C... et E... pour acquérir 51 % des parts de la société ALIMATIQUE HOLDING elle-même société mère de la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, le fait qu'une société soit la filiale d'une autre ne l'empêche pas d'avoir une personnalité juridique distincte ; que le contrôle détenu par la société mère ne permet pas en soi, de la condamner à exécuter les engagements que la filiale a contractés ;

Que les sociétés ALIMATIQUE et ALIMATIQUE RHÔNE ALPES sont des personnes morales distinctes ; que les dirigeants de la SARL SPACIO qui sont devenus à compter de novembre 2001 les salariés de la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES respectivement comme directeur commercial et comme secrétaire de direction n'ont pu commettre aucune confusion entre les deux sociétés ; que les engagements dont la société SPACIO se prévaut ont été souscrits par la société ALIMATIQUE RHÔNE ALPES ;

Que les demandes formées par la SARL SPACIO contre les sociétés SEKOYA et ALIMATIQUE sont donc irrecevables ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé condamnation à l'encontre de ces deux sociétés ;

Attendu s'agissant de la recevabilité des demandes dirigées contre la SAS CHACA, qu'aux termes du protocole de cession de commerce qu'elle a signé le 26 octobre 2001 en qualité de cessionnaire, cette société qui a versé un acompte sur le prix et était autorisée à se substituer toute personne de sa convenance lors de la réitération de l'acte de cession par acte authentique, devait rester solidairement obligée au paiement du prix et à l'exécution des conditions de la cession ;
Qu'ainsi et même si l'acte réitératif, qui a repris en les précisant les stipulations initiales, ne fait pas référence à une substitution, le cédant SPACIO est recevable à former des demandes à l'encontre de la SAS CHACA comme solidairement obligée avec le cessionnaire ;

Attendu s'agissant du solde du prix du fonds, que la SARL SPACIO démontre que des appels d'offres qu'il a transmis en 2002 à son employeur ALIMATIQUE RHÔNE ALPES ont été traités par des associés de la société DALLIANCE constituée courant 2002 par la société ALIMATIQUE avec 7 autres sociétés implantées sur le territoire national dont une société SGDA, avec pour objet la prospection de la clientèle et la négociation de contrats dans le domaine de la distribution automatique de produits de consommation courante sur l'ensemble du territoire national et à l'étranger ;

Que la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES a ainsi répondu le 20 septembre 2002 à Michel Y... (pièce 23) qu'après étude des différents dossiers concernant les appels d'offres " Hospices Civils de Lyon " la direction avait décidé de prendre l'option d'une réponse DALLIANCE ;

Que le 18 avril 2002 après avoir fait la synthèse du marché par zone géographique la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES a aussi décidé de répondre à l'appel d'offre EDF " parallèlement " avec la société SGDA, associée de DALLIANCE, à laquelle le compte d'exploitation des centrales de CRUAS et de TRICASTIN a été remis (pièces 25 et 26) ;

Que les divers établissements hospitaliers dépendant des Hospices de LYON ainsi que les centrales EDF de CRUAS et de TRICASTIN figuraient sur la liste de clients permettant de réaliser le chiffre d'affaires " Full service prévisionnel " retenu comme référence l'acte de cession ainsi qu'il résulte de la lecture de la pièce 44 des appelantes ; que la SARL COREDA enregistrait des chiffres significatifs avec ces entités qui sont devenues après la cession des clients d'associés de la société DALLIANCE ;

Que la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES qui convient dans ses écritures s'être aussi abstenue de répondre aux consultations de l'armée de terre et de la direction des sports de la VILLE DE LYON aux motifs que ces contrats ne dégageaient pas une marge suffisante, ne démontre pas que la baisse de chiffre d'affaires du " full service " soit imputable au cédant ;

Que la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES ne produit pas de comptes certifiés par son commissaire aux comptes ;

Qu'ainsi et nonobstant le fait que selon les appelantes le seuil de chiffre d'affaires de l'activité full service prévu à l'acte n'aurait pas été atteint au 29 novembre 2002 puis au 29 novembre 2003, la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, qui n'a pas exécuté le contrat de bonne foi, ne peut prétendre voir réduire le solde de 30 % soit 320. 142,93 euros restant dû sur le prix de cession dont elle reste débitrice ;

Attendu s'agissant de la facture d'un montant total de 206. 967,05 euros TTC (pièce 90. 1 appelantes) émise le 1er février 2002 par la SARL SPACIO au titre du prix des produits, fourniture, matériel, pièces détachées, monnaie, il convient d'abord d'observer que si le matériel d'exploitation qui devait être décrit et estimé, était compris dans le prix des éléments corporels fixé à 533. 571,56 euros, les parties ont précisé à l'acte qu'elles feraient leur affaire personnelle des marchandises se trouvant dans le fonds vendu ;
Que la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES qui a versé sur cette facture 2 acomptes de 61. 000 et de 60. 000 euros les 15 janvier et 18 février 2002, a émis le 22 avril 2002 (pièce 67 SPACIO), une réserve sur la valorisation du matériel de distribution mentionné dans la facture pour un montant total de 38. 114,29 euros HT soit 45. 584 euros TTC ; qu'elle a alors soutenu que : " soit les appareils étaient en exploitation et dans ce cas ils étaient inclus dans le prix du fonds, soit ils n'étaient pas en exploitation et ils ne pouvaient être valorisés à leur valeur d'achat " ;
Que les matériels stockés à VILLEURBANNE et " PISCINE " ont fait l'objet d'un inventaire paraphé par les parties et qui a été annexé à l'acte de vente (pièce 45 des appelantes) ; que la SARL SPACIO démontre ainsi que ce matériel a été délivré au cessionnaire ;
Que la SARL SPACIO qui avait notamment une activité de négoce de matériels a valorisé le stock de matériel de distribution à sa valeur comptable d'achat ; que le cycle stock matériel de l'audit D... est ainsi conclu :
" La valorisation paraît notoirement excessive.
Il n'est pas sûr que certain matériel existe exemple CERNY.
Il n'est pas prouvé que certain matériel soit installé sur site.
Il est possible que le même matériel soit deux fois valorisé : HERTA.
Il n'est nullement prouvé qu'à la revente Monsieur Y... obtiendra un prix égal à celui qu'il a payé. " ;
Qu'ainsi que les premiers juges l'ont pertinemment relevé, la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES n'a proposé aucune valorisation de ce stock ni fourni aucun document permettant d'apprécier la valeur vénale dudit stock ;
Qu'ainsi elle ne démontre pas que la valorisation du stock à son prix d'achat serait inadaptée ;
Que compte tenu des acomptes versés, il reste donc dû au cédant un solde de 85. 967,05 euros sur le prix du stock ;

Attendu qu'aux termes du décompte annexé à la note en délibéré adressée aux premiers juges (pièce 86 appelantes), la SARL SPACIO sollicite par ailleurs un complément de 40. 250,04 euros au titre de redevances et frais divers acquittés pour le compte de la SAS SPACIO ALIMATIQUE RHÔNE ALPES ;
Que cette somme a été obtenue en comptabilisant une facture du 30 mars 2002 pour un montant de 5. 597,31 euros comprenant pour 3. 840,84 euros TTC des factures acquittées entre décembre 2001 et février 2002 par le cédant à la POSTE qui ne s'élevaient en réalité qu'à 585,53 euros en raison d'une erreur de conversion (factures et grand livre en annexe 8 audit D... cycle leasings et refacturations), soit une différence de 3. 255,31 euros en faveur du cessionnaire ;
Que la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES qui ne discute pas que le cédant a continué à supporter les charges, notamment des loyers qui incombaient au cessionnaire, et a à ce titre versé diverses sommes notamment au titre de factures dont le paiement ne lui est d'ailleurs pas réclamé dans l'instance, et prétend ne rester débitrice que d'un solde de 10. 956,46 euros, se prévaut sans en justifier de :
-double facturation BNP LEASE
-demande de confirmation non satisfaite pas la SNVB, qui est sa propre banque
-d'incertitude NORBAIL, organisme avec lequel elle a traité ensuite de la cession
-facturations sans objet CAPITAL BANQUE pour 15,02 euros ;
Qu'il n'est rien réclamé à la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES au titre du contrat de crédit-bail du 2 août 1999 qui a donné lieu le 12 janvier 2006 à un arrêt de la Cour d'Appel D'AIX EN PROVENCE (pièce 84 appelantes) ;
Qu'ainsi il y a seulement lieu de retenir, au vu des justificatifs respectivement produits un montant total de 36. 994,73 euros au titre de redevances et frais divers acquittés par la SARL SPACIO pour le compte de la SAS SPACIO ALIMATIQUE RHÔNE ALPES ;

Attendu par ailleurs que dans son décompte transmis le 22 juillet 2005 la SARL SPACIO convient devoir rembourser au cessionnaire un montant de 27. 720,94 euros au titre des congés payés, et avoir perçu des clients après la cession un montant total de 98. 404,85 euros des produits destinés au cessionnaire ;
Que la SAS SPACIO ne justifie pas notamment par la production du cycle client de l'audit D..., de versements supplémentaires effectués par les clients entre les mains de la SARL SPACIO ;
Qu'ainsi, compte tenu des créances réciproques, la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES reste devoir à la SARL SPACIO un solde de 316. 978,92 euros sur le prix de cession ;

Attendu que la SARL SPACIO qui par son assignation s'est prévalu de la déchéance du terme pour le solde du prix, ne sollicite pas le bénéfice de l'indemnité de 1 % par mois de retard stipulée à son profit en cas de non paiement d'une annuité à son échéance ;
Qu'elle ne justifie pas d'un préjudice indépendant de celui issu du retard dans le paiement alors que notamment elle a procédé à une compensation entre les débours qu'elle a supportés et les produits reçus des clients et destinés à la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES ; que la demande de dommages et intérêts de la SARL SPACIO sera donc rejetée ;
Qu'ainsi infirmant le jugement entrepris il y a lieu de condamner solidairement les sociétés ALIMATIQUE RHÔNE ALPES et CHACA à payer à la SARL SPACIO la somme de 316. 978,92 euros avec intérêts légaux à compter du 31 décembre 2002 ;
Que les premiers juges ont à juste titre accordé à la SARL SPACIO le bénéfice de la capitalisation des intérêts à compter de la première demande formée le 26 février 2004 ;

Attendu enfin qu'en considération des circonstances de l'espèce il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles exposés dans l'instance ;
Que le jugement entrepris sera donc aussi infirmé en ce qu'il a fait application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit de la SARL SPACIO ;

Que les dépens de la procédure de première instance et d'appel seront mis à la charge solidairement de la SAS ALIMATIQUE RHÔNE ALPES et de la SAS CHACA ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement rendu le 9 février 2006 le Tribunal de Commerce de LYON en ce qu'il a :
-rejeté l'exception d'incompétence et la demande de sursis à statuer formées par les sociétés ALIMATIQUE RHÔNE ALPES, ALIMATIQUE, CHACA et SEKOYA
-ordonné la capitalisation des intérêts à compter du 26 février 2004
-débouté la SARL SPACIO de sa demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice complémentaire ;

L'infirme dans toutes ses autres dispositions et statuant à nouveau ;

Déclare irrecevables les demandes formées par la SARL SPACIO contre les sociétés ALIMATIQUE et SEKOYA ;

Condamne solidairement les sociétés ALIMATIQUE RHÔNE ALPES et CHACA à payer à la SARL SPACIO la somme de 316. 978,92 euros avec intérêts légaux à compter du 31 décembre 2002 ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne solidairement les sociétés ALIMATIQUE RHÔNE ALPES et CHACA aux dépens et autorise contre elles à la SCP AGUIRAUD NOUVELLET Avoués le droit de recouvrement direct prévu par l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Marie-Pierre BASTIDEHenry ROBERT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0466
Numéro d'arrêt : 06/01064
Date de la décision : 05/07/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 09 février 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2007-07-05;06.01064 ?
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