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22/03/2007 | FRANCE | N°06/03011

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre civile 3, 22 mars 2007, 06/03011


COUR D'APPEL DE LYON

Troisième Chambre Civile

SECTION A

ARRÊT DU 22 Mars 2007

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 14 avril 2006 - No rôle : 2004j2767

No R.G. : 06/03011

Nature du recours : Appel

APPELANTE :

Société TRANSMASTER SARL

52 route de Vienne

69007 LYON

représentée par Me André BARRIQUAND, avoué à la Cour

assistée de Me Sabah DEBBAH, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Société BARBIER SA

...

ZI du Bas Pontet>
69360 ST SYMPHORIEN D OZON

représentée par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour

assistée de Me France Y..., avocat au barreau de LYON

Instruction clôturée le 02 Févrie...

COUR D'APPEL DE LYON

Troisième Chambre Civile

SECTION A

ARRÊT DU 22 Mars 2007

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 14 avril 2006 - No rôle : 2004j2767

No R.G. : 06/03011

Nature du recours : Appel

APPELANTE :

Société TRANSMASTER SARL

52 route de Vienne

69007 LYON

représentée par Me André BARRIQUAND, avoué à la Cour

assistée de Me Sabah DEBBAH, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Société BARBIER SA

...

ZI du Bas Pontet

69360 ST SYMPHORIEN D OZON

représentée par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour

assistée de Me France Y..., avocat au barreau de LYON

Instruction clôturée le 02 Février 2007

Audience publique du 16 Février 2007

LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION A DE LA COUR D'APPEL DE LYON,

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Monsieur Henry ROBERT, Président

Monsieur Bernard SANTELLI, Conseiller

Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Conseiller

DÉBATS : à l'audience publique du 16 Février 2007

sur le rapport de Monsieur Bernard SANTELLI

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Mademoiselle Marie-Pierre BASTIDE, greffier

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 22 Mars 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Monsieur Henry ROBERT, Président, et par Mademoiselle Marie-Pierre BASTIDE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société BARBIER, dont le siège est à SAINT SYMPHORIEN D'OZON (69) était affrétée par la société CRTT, commissionnaire de transport.

Elle a ainsi effectué de décembre 2003 à avril 2004 des opérations de transport en provenance ou à destination de la société TRANSMASTER domiciliée à LYON (69).

Déclarée en liquidation judiciaire par jugement du 6 mai 2004, la société CRTT n'a pas payé les factures de transports de la société BARBIER d'un montant de 21.253,36 euros TTC.

Par courriers des 3 et 10 mai 2004, la société BARBIER a mis en demeure la société TRANSMASTER de les lui régler en sa qualité de destinataire ou d'expéditeur des transports effectués pour son compte.

La société TRANSMASTER ne s'est pas exécutée arguant qu'elle avait réglé la société FACTOREM, société d'affacturage de la société CRTT, et qu'elle s'était ainsi libérée.

N'obtenant pas satisfaction, la société BARBIER par acte du 1er octobre 2004 a assigné la société TRANSMASTER devant le Tribunal de Commerce de LYON, aux fins :

-de voir condamner la société TRANSMASTER à lui payer la somme de 21.253,36 euros outre intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2004 pour les factures no9693,9871,10049,10304 et à compter du 10 mai 2004 pour la facture no10494

-de la voir condamner à lui payer la somme de 2.100 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive

-et de la voir condamner à lui verser la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La société TRANSMASTER a demandé :

-de déclarer irrecevable l'action intentée par la société BARBIER pour défaut de qualité et d'intérêt à agir

-et à titre subsidiaire de débouter la société BARBIER de ses demandes en ce qu'elles sont infondées

-à titre infiniment subsidiaire de déduire la somme de 2.603,64 euros TTC des factures de la société BARBIER

-en outre de rejeter la demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice économique.

La société TRANSMASTER a sollicité que la société BARBIER soit condamnée à lui payer la somme de 21.253,36 euros à titre de dommages et intérêts si elle était condamnée sur le fondement de l'article 132-8 du Code de Commerce et de lui donner quittance subrogatoire dans les droits de la société BARBIER au passif de la société CRTT TRANSIT PHOCEEN.

Par jugement du 14 avril 2006, le tribunal de commerce de LYON a condamné la société TRANSMASTER à payer à la société BARBIER la somme de 21.253,36 euros, outre intérêts au taux légal à comter du 3 mai 2004 au titre des factures - a débouté la société TRANSMASTER de sa demande de dommages et intérêts ainsi que sur celle tendant à voir déduire la somme de 2.603,64 euros des factures BARBIER - a débouté la société BARBIER de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive - a donné quittance subrogatoire à la société TRANSMASTER dans les droits de la société BARBIER au passif de la société CRTT.

Par déclaration du 9 mai 2006, la société TRANSMASTER a relevé appel de ce jugement.

Dans ses conclusions récapitulatives du 1er février 2007, la société TRANSMASTER expose :

-que la société BARBIER n'a pas de qualité à agir -que la société FACTOREM a seule qualité pour agir en paiement des créances faisant l'objet du contrat d'affacturage ; qu'en effet, le contrat d'affacturage souscrit entre les sociétés BARBIER et FACTOREM disposait que le commissionnaire devait s'acquitter entre les mains du factor et qu'ainsi la société BARBIER n'est plus titulaire des créances litigieuses

-que l'article 2.1 du contrat d'affacturage dispose "...nous pourrons réclamer le remboursement immédiat des sommes que nous aurions versées en règlement de vos factures dans le cas où, à la date du transfert de la créance ou de la livraison, votre client se trouverait en état de cessation des paiements, de dépôt de bilan, de redressement ou de liquidation judiciaire..."

-que la société CRTT n'ayant été mise en liquidation judiciaire que par jugement du 6 mai 2004, soit à une date postérieure aux factures de la société BARBIER, celle-ci ne peut pas se prévaloir de la cession de la subrogation de créances entre ses mains

-que la société TRANSMASTER a déjà payé les factures entre les mains du factor subrogé dans les droits de la société CRTT

-que la société BARBIER ne démontre pas avoir déclaré sa créance au passif de la société CRTT ce qui interdit à la société TRANSMASTER d'être, en sa qualité de caution, subrogée dans les droits du débiteur

-que la société BARBIER a commis une faute en accordant un crédit trop important à la société CRTT

-que certaines factures pour un montant de 2.603,64 euros ne font pas mention de la société BARBIER en sa qualité de transporteur.

Elle demande la réformation du jugement déféré par le débouté des demandes de la société BARBIER et par la condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 21.253,36 euros à titre de dommages et intérêts si elle devait être condamnée.

Dans ses conclusions du 23 janvier 2007, la société BARBIER expose :

-que l'article L132-8 du Code de Commerce dispose que "la lettre de voiture forme un contrat entre l'expéditeur, le voiturier et le destinataire ou entre l'expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier, de sorte que le voiturier a une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport"

-qu'une telle disposition peut conduire à un double paiement de l'expéditeur ou du destinataire du transport au bénéfice du transporteur ; que le premier paiement auprès d'un factor ne peut exonérer l'expéditeur de son obligation de paiement auprès du transporteur qui n'a pas été payé;

-que le fait que la société BARBIER ait signé un contrat d'affacturage avec la société FACTOREM est sans portée, dès lors que le factor lui a demandé, en application des dispositions contractuelles, le remboursement des sommes versées en règlement des factures émises sur la société CRTT

-qu'ainsi la restitution des factures par la société FACTOREM et le remboursement des sommes avancées par le factor ayant fait cesser la subrogation, la société BARBIER est donc titulaire des droits et actions attachés à la créance qu'elle détient sur son client la société CRTT

-que la réalité des prestations effectuées par la société BARBIER est établie par les pièces produites

-que le fait que la société BARBIER se soit substituée d'autres transporteurs pour la réalisation des opérations de transport destinées à la société TRANSMASTER ne libère pas le bénéficiaire de l'opération, la société BARBIER étant subrogée dans les droits des voituriers qu'elle a réglés

-que la société BARBIER n'a commis aucune faute, dès lors que les délais de paiement accordés à la société CRTT étaient ceux habituels dans la profession et où elle a cessé toute relation avec la société CRTT dès le premier impayé

-que l'absence de déclaration de sa créance au passif de la société CRTT ne fait pas obstacle à l'action directe du transporteur à l'encontre du donneur d'ordres

-que la résistance abusive de la société TRANSMASTER lui a causé un préjudice économique.

Elle demande la confirmation du jugement déféré et l'octroi de dommages et intérêts.

MOTIFS ET DÉCISION

Attendu que l'article L 132-8 du Code de Commerce dispose que "le voiturier a une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix de transport. Toute clause contraire est réputée non écrite" ;

Attendu que ces dispositions font peser sur le destinataire du transport comme sur l'expéditeur une obligation de garantie de paiement qui imposent à l'un comme l'autre de désintéresser le transporteur impayé, même au prix d'un double paiement -qu'à cet égard ni le destinataire, ni l'expéditeur n'est admis à opposer au transporteur les paiements qu'il a pu faire entre les mains d'un factor ; que ce paiement ne le libérerait pas de ses obligations ;

Attendu que dans le cas présent la société TRANSMASTER ne peut en aucun cas prétendre que la société BARBIER, qui a cédé ses factures à une société d'affacturage, la société FACTOREM, n'a plus qualité pour agir à son encontre dès lors que les factures que la société FACTOREM détenait ont été restituées à la société BARBIER qui de ce fait a remboursé au factor les sommes avancées en les portant au débit de son compte courant, mettant ainsi fin à la subrogation ;

Attendu qu'il en résulte que la société BARBIER est titulaire des droits et actions attachés à la créance qu'elle détient sur son client, la société CRTT et qu'elle est ainsi recevable dans son action à l'encontre de la société TRANSMASTER, diligentée en application de l'article L 132-8 précité ;

Attendu que la société BARBIER établit par les pièces de son dossier qu'elle a effectué en tant que voiturier les opérations de transport pour lesquelles elle avait été affrétée par la société CRTT -qu'il n'y a eu aucune contestation sur l'exécution des prestations -que par conséquent la société BARBIER est bien créancière des sommes dont elle réclame le paiement ;

Attendu que c'est à la société TRANSMASTER qu'il appartient de prouver, comme elle le soutient, que la société BARBIER a été réglée de sa créance par la société CRTT qui était en tant que donneur d'ordre son débiteur -qu'elle ne rapporte pas cette preuve ;

Attendu que le fait que la société BARBIER n'ait pas déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société est sans portée -qu'en effet l'action directe du transporteur, telle qu'en dispose l'article L 132-8 du Code de Commerce, n'est pas subordonnée à la déclaration de créance au passif du donneur d'ordre -qu'elle ne l'est pas non plus à sa mise en demeure préalable -que ces moyens doivent donc être rejetés, comme dépourvus de fondement;

Attendu que l'argument selon lequel la société BARBIER aurait commis une faute en accordant de trop longs délais de paiement à la société CRTT n'est pas opérant, dès lors qu'il est d'usage dans le domaine du transport de consentir des règlements à 90 jours suivant la date à laquelle la facture a été émise et qu'il résulte du dossier au surplus que la société BARBIER qui entretenait des relations d'affaires depuis plus de dix ans avec la société CRTT les a interrompues dès le premier incident de paiement, soit au jour où elle en a eu connaissance à l'échéance de la traite émise au titre de la facture du 31 décembre 2003, le 31 mars 2004 ;

Attendu que la société BARBIER est donc fondée à demander le paiement de sa créance de 21.253,36 euros à la société TRANSMASTER, qui doit être condamnée en conséquence à lui payer ladite somme, majorée des intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2004 pour les factures no9693,9871,10049 et 10304 et du 10 mai 2004 pour la facture no10494;

Attendu que le jugement déféré doit être de la sorte confirmé de ce chef ;

II Sur la demande de la société BARBIER en dommages et intérêts.

Attendu que la société BARBIER ne justifie pas, quand bien même la société TRANSMASTER aurait-elle opposé une résistance abusive à sa demande en paiement, d'un préjudice indemnisable -que sa demande en dommages et intérêts n'est donc pas fondée ;

III Sur les demandes de la société TRANSMASTER.

Attendu que la société TRANSMASTER n'est pas fondée, en l'absence de faute établie que la société BARBIER aurait commise à son égard, dans sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts, faite à titre subsidiaire pour le cas où il serait fait droit à la demande principale de la société BARBIER ;

Attendu que la société TRANSMASTER ne peut réclamer à titre infiniment subsidiaire la déduction d'une somme de 2.603,64 euros TTC de la créance au motif que la société BARBIER est incapable de démontrer que les factures à concurrence de ce montant sont la contrepartie d'une opération de transport à laquelle elle a participé -que la société BARBIER était en effet en droit de se substituer d'autres transporteurs pour la réalisation des opérations de transport -qu'elle a dû en assumer la charge -que cette substitution ne libère pas pour autant la société TRANSMASTER de ses obligations de paiement du transporteur ;

IV Sur les autres demandes.

Attendu qu'il serait inéquitable que la société BARBIER supporte la charge de ses frais irrépétibles et qu'il convient ainsi de lui allouer une somme de 2.200 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, qui s'ajoutera à celle accordée par le premier juge ;

Attendu que la société TRANSMASTER, qui succombe, doit être condamnée aux dépens;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

Condamne la société TRANSMASTER à payer à la société BARBIER la somme de 2.200 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et à supporter les dépens qui seront recouvrés par la SCP DUTRIEVOZ, Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Marie-Pierre BASTIDE Henry ROBERT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 06/03011
Date de la décision : 22/03/2007
Type d'affaire : Civile

Analyses

TRANSPORTS TERRESTRES - Marchandises - Contrat de transport - Prix - Paiement - / JDF

L'article L132-8 du code de commerce dispose que le voiturier à une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix de transport. Toute clause contraire est réputée non écrite. Ces dispositions font peser sur le destinataire du transport comme sur l'expéditeur une obligation de garantie de paiement qui impose à l'un comme l'autre de désintéresser le transporteur impayé, même au prix d'un double paiement. A cet égard, ni le destinataire, ni l'expéditeur n'est admis à opposer au transporteur les paiements qu'il a pu faire entre les mains d'un factor. Ce paiement ne le libérerait pas de ces obligations. En l'espèce, la société appelante ne peut en aucun cas prétendre que la société de transport, qui a cédé ses factures à une société d'affacturage n'a plus qualité pour agir à son encontre dès lors que les factures que la société d'affacturage détenait ont été restituées à la société de transport qui de ce fait a remboursé au factor les sommes avancées en les portant au débit de son compte courant, mettant ainsi fin à la subrogation


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 14 avril 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2007-03-22;06.03011 ?
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