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25/01/2007 | FRANCE | N°05/05849

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre civile 3, 25 janvier 2007, 05/05849


COUR D'APPEL DE LYON
Troisième Chambre Civile
SECTION B

ARRÊT DU 25 Janvier 2007

Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 12 juillet 2005-
No rôle : 2003J574

No R. G. : 05/ 05849

Nature du recours : Appel

APPELANTE :

Société PUIG CODINA, SA
Avenida Can Jofresa 69 APTDO
PO BOX 227
08223 TERRASSA-ESPAGNE

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour

assistée de Maître GARCIA, avocat au barreau de PARIS, substitué par Maître PICOTEIRO-BETTENCOURT,

avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

Maître Bernard X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société ILAN FP SARL
...
...

COUR D'APPEL DE LYON
Troisième Chambre Civile
SECTION B

ARRÊT DU 25 Janvier 2007

Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 12 juillet 2005-
No rôle : 2003J574

No R. G. : 05/ 05849

Nature du recours : Appel

APPELANTE :

Société PUIG CODINA, SA
Avenida Can Jofresa 69 APTDO
PO BOX 227
08223 TERRASSA-ESPAGNE

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour

assistée de Maître GARCIA, avocat au barreau de PARIS, substitué par Maître PICOTEIRO-BETTENCOURT, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

Maître Bernard X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société ILAN FP SARL
...
69003 LYON

représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour

assistée de Maître Gilles DUMONT LATOUR, avocat au barreau de LYON substitué par
Maître KAEMPF, avocat au barreau de LYON

Instruction clôturée le 05 Décembre 2006

Audience publique du 11 Décembre 2006

LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION B DE LA COUR D'APPEL DE LYON,

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Madame Laurence FLISE, Président
Madame Christine DEVALETTE, Conseiller
Monsieur Alain MAUNIER, Conseiller

DÉBATS : à l'audience publique du 11 Décembre 2006
sur le rapport de Madame Christine DEVALETTE, Conseiller

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Madame Joëlle POITOUX, Greffier

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 25 Janvier 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Madame Laurence FLISE, Président, et par Madame Joëlle POITOUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****************

Dans le cadre de son activité de confection et de vente en gros de vêtements, la société ILAN FP a passé commande le 29 octobre 2001 à la société PUIG CODINA, société de droit espagnol, de 8 703 mètres de tissus à 3, 20 ¿ le mètre soit pour un total de 27 849, 60 ¿.
Les marchandises ont été livrées à partir du 27 novembre 2001 jusqu'au 27 février 2002, date d'émission de la dernière facture.

Lors du façonnage, des défectuosités sont apparues et la société ILAN FP a adressé une réclamation à son fournisseur le 27 mars 2002 en lui indiquant qu'elle retournait les rouleaux de tissus défectueux.
Après analyse de ces tissus, la société PUIG CODINA a considéré qu'ils étaient confectionnables et a réclamé le règlement de ses factures impayées pour un montant de 24 840 ¿.

Le 22 mai 2002, la société ILAN FP a mis en demeure la société PUIG CODINA de réparer son préjudice et a ensuite saisi, par exploit du 29 janvier 2003, le Tribunal de Commerce de LYON-en résolution du contrat pour non conformité de la marchandise à sa destination :
- en indemnisation de son préjudice financier chiffré à 87 137, 90 ¿ HT,
- par compensation avec la créance de la société PUIG CODINA sur le stock utilisé, soit 12 718, 72 ¿, en condamnation de cette société à lui verser la somme de 74 419, 18 ¿ HT,
outre 10 000 ¿ de dommages-intérêts pour préjudice moral et 3 000 ¿ au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Elle indiquait qu'elle tenait à la disposition de la société PUIG CODINA les 4 728, 40 mètres de tissus défectueux.

Le Tribunal de Commerce de LYON, par jugement du 2 juin 2005, a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société ILAN FP.

Par jugement du 12 juillet 2005, le Tribunal de Commerce :
- s'est déclaré compétent et a dit que le droit français était applicable,
- a dit que la marchandise était en partie non conforme,
- a chiffré le préjudice financier de la société ILAN FP à 16 103, 77 ¿,
- a dit que la créance de la société PUIG CODINA s'élève à 12 718, 72 ¿ et condamné, après compensation, la société PUIG CODINA à payer à la société ILAN la somme de
3 385, 05 ¿ HT,
- a condamné la société PUIG CODINA à verser une somme de 3 000 ¿ de dommages-intérêts pour atteinte à la réputation commerciale de la société ILAN FP,
- a donné acte à cette dernière de ce qu'elle tenait à la disposition de la société PUIG CODINA les métrages non utilisés,
- a condamné la société PUIG CODINA à verser à la société ILAN FP la somme de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le 29 septembre 2005, la société ILAN FP a été placée en liquidation judiciaire et Maître X...a été nommé mandataire liquidateur.

Par déclaration du 25 août 2005, la société PUIG CODINA a interjeté appel du jugement.

Dans le cadre d'une action en revendication des marchandises non confectionnées par la société PUIG CODINA, le Tribunal de Commerce de LYON a confirmé par jugement du 16 octobre 2006, l'ordonnance du Juge Commissaire ayant fait droit à cette demande de revendication en supprimant toutefois la contre-partie financière.

****************
Aux termes de ses dernières écritures, déposées le 1er décembre 2006 et qui sont expressément visées par la Cour, la société PUIG CODINA demande :
- à titre principal, à la Cour d'appel de LYON de se déclarer incompétente au profit du Tribunal de Commerce de TERRASSA en Espagne,
- subsidiairement :
¿ d'infirmer le jugement et de débouter la société ILAN FP de toutes ses demandes,
¿ de fixer à 24 840, 41 ¿ sa créance au passif de la société ILAN FP,
¿ d'ordonner la capitalisation des intérêts,
¿ de condamner Maître X..., es qualités, à lui verser la somme de 5 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La société appelante maintient qu'en application de l'article 5 du règlement CE no 44/ 2001, la société ILAN aurait dû l'attraire au lieu de livraison des marchandises, soit, selon l'article 31 de la Convention de Vienne, au lieu de remise au 1er transporteur c'est à dire à Terrassa en Espagne, la mention CIP ou CIF sur les factures, signifiant en Incoterms qu'il s'agit d'une vente au départ.
A titre subsidiaire, si la Cour devait se déclarer compétente, la société PUIG CODINA considère qu'elle a bien exécuté son obligation de délivrance conforme, que les griefs de la société ILAN FP sont infondés et son préjudice non établi.

Au regard des dispositions de l'article 35 de la Convention de Vienne, seules applicables à l'espèce, en l'absence de clause contractuelle réglant les questions relatives à la qualité des marchandises livrées, la société appelante fait valoir :
- qu'à leur réception, la société ILAN FP n'a émis aucune réserve et qu'elle n'a fait état d'une prétendue non conformité que le 27 mars 2002, soit 4 mois après les premières livraisons,
- que le procès-verbal d'huissier comme les attestations que produit la société ILAN FP ne démontrent pas que les désordres sont antérieurs aux opérations de confection et que les vêtements ont été confectionnés avec des tissus livrés par elle,
- que les désordres sont consécutifs aux opérations de confection, selon les constatations opérées par le Centre Technique de Filatura de L'Université Polytechnique de Catalogne, qui exclut tout lien entre les désordres et la matière première, le filage et le tissage.
- que les tissus qu'elle a livrés sont de bonne qualité, contrôlés dans le cadre de la certification ISO 9002 et ont été vendus à d'autres clients sans réclamation de leur part.

Concernant enfin le préjudice financier et moral allégué par la société ILAN, la société appelante considère que celle-ci n'en apporte pas la preuve, faute d'éléments précis sur les invendus ou retournés qui seraient imputables à la qualité du tissu, de justificatifs comptables de la marge non perçue ou de perte de marge sur les produits bradés ou sur le stock non confectionné.
Elle conteste que la société ILAN FP puisse faire état d'une atteinte à sa réputation commerciale en l'absence de preuve d'une perte de marché ou invoquer une compensation en minorant sa dette au prétexte d'une restitution de marchandise non utilisée, actuellement stockée chez un tiers et non inventoriée ni contrôlée contradictoirement.

****************

Aux termes de ses dernières écritures, déposées le 23 novembre 2006 et qui sont expressément visées par la Cour, Maître X..., es qualités demande la confirmation du jugement sur la non conformité de la marchandise, la résolution de la vente et la fixation de la créance de la société PUIG CODINA à la somme de 12 718, 72 ¿.

Il forme en revanche appel incident sur le montant du préjudice subi par la société ILAN FP qu'il évalue à 87 137, 90 ¿ HT et qui laisse, après compensation, un solde de 74 418, 36 ¿ à la charge de la société PUIG CODINA au titre du préjudice financier.
Il demande que la condamnation de cette société soit portée, au titre du préjudice subi en terme d'image par la société ILAN FP, à la somme de 10 000 ¿, et que l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile soit élevée à 5 000 ¿.

Maître X..., es qualités, ne conclut pas sur la compétence et considère, sur le fond, qu'au regard des règles applicables en matière de conformité des marchandises, la société PUIG CODINA a bien manqué à son obligation de livraison conforme en raison de la défectuosité des tissus relevée par les clients et les façonniers, rendant la confection difficile voire irréalisable.

S'appuyant sur le constat d'huissier établi le 1er juillet 2002 et sur les attestations des clients et façonniers, et contestant la force probante et l'objectivité du résultat des tests réalisés en Espagne plus de 11 mois après le retour des échantillons, il demande qu'en application de l'article 45 de la Convention de Vienne soit prononcée la résolution de la vente pour manquement de la société PUIG CODINA à son obligation de résultat.

Sur le préjudice économique de la société ILAN FP, il fait valoir que celle-ci est débitrice d'avoirs et de frais de retour des marchandises renvoyées par les clients, de pertes de marge sur le stock confectionné comme sur les produits bradés et sur le stock non confectionné.

Il indique qu'une compensation doit s'opérer entre la valeur du stock de tissu utilisé et dont la société PUIG CODINA a été reconnue créancière aux termes du jugement ayant statué sur la revendication et le préjudice économique subi par la société ILAN FP.

Concernant enfin l'atteinte à la réputation commerciale, il indique que la société ILAN FP a perdu certains marchés ce qui l'a irrémédiablement conduite à une cessation des paiements.

La clôture des débats a été prononcée par ordonnance du 5 décembre 2006.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les contrats internationaux de vente de marchandises sont soumis, pour la détermination des règles de compétence judiciaire, aux dispositions de l'article 5 du règlement CE du 22 décembre 2000 qui désignent comme compétent le tribunal dans le ressort duquel la marchandise a été ou aurait du être livrée, ce lieu de livraison par le vendeur étant lui-même défini, en l'absence de dispositions contractuelles, par les articles 30 et 31 de la Convention de VIENNE comme étant celui du lieu de remise au premier transporteur pour acheminement à l'acheteur ou, en cas de marchandises devant être fabriquées ou produites, du lieu de fabrication.

En l'espèce, en l'absence de stipulations contractuelles contraires, ces règles internationales désignent les juridictions espagnoles comme compétentes au regard du lieu de livraison au premier transporteur ou de fabrication des tissus, soit TERRASSA, siège de la société PUIG CODINA, peu important, à cet égard, que celle-ci ait pris en charge les frais de transport des marchandises jusqu'au siège de la société ILAN FP à LYON, ainsi qu'il ressort des factures émises par la société SPAIN TIR, dans la mesure où sur les factures de vente et sur la confirmation de bon de commande, les mentions INCOTERMS : " CIP Terminal TIR " et " CIF ", qui ne sont pas contradictoires mais se complètent et sur lesquelles la société ILAN n'a émis en leur temps aucune contestation, confirment bien qu'il s'agit d'" une vente au départ ", par remise de la marchandise au premier transporteur.

Le jugement du Tribunal de Commerce de LYON qui a retenu sa compétence, doit être infirmé et Maître X..., es qualités, renvoyé à se mieux pourvoir en application de l'article 96 du Nouveau Code de procédure civile.

L'équité commande qu'il ne soit pas fait application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR ;

Infirme le jugement déféré ;

Et statuant à nouveau :

Se déclare incompétente pour statuer sur l'action engagée par la société ILAN FP,
désormais représentée par son mandataire liquidateur, Maître X..., contre la société PUIG CODINA SA ;

Renvoie Maître X...à se mieux pourvoir ;

Déboute la société PUIG CODINA de sa demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Dit que les dépens de 1ère instance et d'appel seront tirés en frais privilégiés de liquidation et distraits au profit de la SCP JUNILLON-WICKY, avoué.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT
J. POITOUXL. FLISE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 05/05849
Date de la décision : 25/01/2007
Type d'affaire : Civile

Analyses

COMMUNAUTE EUROPEENNE - Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 - / JDF

Les contrats internationaux de vente de marchandises sont soumis, pour la détermination des règles de compétence judiciaire, aux dispositions de l'article 5 du règlement CE du 22 décembre 2000 qui désignent comme compétent le tribunal dans le ressort duquel la marchandise a été ou aurait du être livrée, ce lieu de livraison par le vendeur étant lui-même défini, en l'absence de dispositions contractuelles, par les articles 30 et 31 de la convention de Vienne comme étant celui du lieu de remise au premier transporteur pour acheminement à l'acheteur ou, en cas de marchandises devant être fabriquées ou produites, du lieu de fabrication. En l'espèce, en l'absence de dispositions contractuelles contraires, ces règles internationales désignent les juridictions espagnoles comme compétentes au regard du lieu de livraison au premier transporteur ou de fabrication des tissus peu important à cet égard que celui-ci ait pris en charge les frais de transport des marchandises dans la mesure où sur les factures de vente et sur la confirmation de bon de commande, les mentions Incoterms : « CIP Terminal TIR » et « CIF » qui ne sont pas contradictoires mais qui se complètent confirment bien qu'il s'agit d'une vente au départ par remise de la marchandise au premier transporteur


Références :

Article 5 du règlement CE du 22 décembre 2000 Articles 30 et 31 de la convention de Vienne du 14 avril 1980 relatif aux contrats de vente internationale de marchandises

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 12 juillet 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2007-01-25;05.05849 ?
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