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21/07/2006 | FRANCE | N°05/00453

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre civile 3, 21 juillet 2006, 05/00453


COUR D'APPEL DE LYON
Troisième Chambre Civile

ARRÊT DU 21 Juillet 2006

Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 16 décembre 2004-No rôle : 2003f339

No R.G. : 05 / 00453

Nature du recours : Appel

APPELANTS :

Monsieur Gérard X...
...
69120 VAULX EN VELIN

représenté par Me GUILLAUME, avoué à la Cour
assisté de la SCP LEVY-ROCHE, avocats au barreau de LYON

Madame Nadège Y...
...
91460 MARCOUSSIS

représentée par Me Annick DE FOURCROY, avoué à la Cour


assistée de Me Fabrice Z..., avocat au barreau de l'ESSONNE

Madame Christiane J... épouse B...
...
93260 LES LILAS

représentée par Me Ala...

COUR D'APPEL DE LYON
Troisième Chambre Civile

ARRÊT DU 21 Juillet 2006

Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 16 décembre 2004-No rôle : 2003f339

No R.G. : 05 / 00453

Nature du recours : Appel

APPELANTS :

Monsieur Gérard X...
...
69120 VAULX EN VELIN

représenté par Me GUILLAUME, avoué à la Cour
assisté de la SCP LEVY-ROCHE, avocats au barreau de LYON

Madame Nadège Y...
...
91460 MARCOUSSIS

représentée par Me Annick DE FOURCROY, avoué à la Cour
assistée de Me Fabrice Z..., avocat au barreau de l'ESSONNE

Madame Christiane J... épouse B...
...
93260 LES LILAS

représentée par Me Alain RAHON, avoué à la Cour
assistée de Me Laure C..., avocat au barreau de PARIS

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 69123 / 2 / 2005 / 8453 du 08 / 09 / 2005 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIMES :

Maître Bruno D..., mandataire judiciaire, ès qualité de liquidateur de la société TROIS PRIVEE, SARL, désigné à cette fonction par jugement du Tribunal de commerce de LYON en date du 18 juin 2002
...
69456 LYON CEDEX 06

représenté par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assisté de la SCP DEYGAS PERRACHON BES COTTIN, avocats au barreau de LYON

Monsieur LE PROCUREUR GENERAL près la Cour d'appel
Place Paul Duquaire
69005 LYON

Instruction clôturée le 21 Avril 2006

Audience publique du 07 Juin 2006

LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON,

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Monsieur ROBERT, Président
Monsieur SANTELLI, Conseiller
Madame CLOZEL-TRUCHE, Conseiller

DEBATS : à l'audience publique du 7 juin 2006
sur le rapport de Monsieur SANTELLI, Conseiller

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Mademoiselle BASTIDE, Greffier

ARRET : CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 21 juillet 2006, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile

signé par Monsieur ROBERT, Président, et par Mademoiselle BASTIDE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE-PROCÉDURE-PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société TROIS PRIVEE avait pour activité la prévention, la surveillance et le gardiennage sur site.
Elle a été inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de Lyon le 17 décembre 1998. Elle faisait initialement partie d'un groupe dénommé ANSP SECURITE comprenant six filiales.
Le capital était porté par Madame Christiane B...et Monsieur Jacques E..., pour moitié chacun.
Le 1er août 2001, les associés ont cédé leurs parts à Monsieur Philippe F...et Madame Nadège Y..., cette dernière devenant gérante de la société.
Une nouvelle cession a eu lieu le 17 septembre 2001, le capital étant désormais porté à part égale par, d'une part, la société DELTA CORPORATION CONSULTANT NPD, dont le représentant permanent était Monsieur Patrick G..., et, d'autre part, par Monsieur Patrick G...détenant lui-même 20 % qui devenait gérant de la société TROIS PRIVEE.
Les sociétés soeurs TROIS A et TROIS société ont été reprises dans les mêmes conditions, la société TROIS N ayant fait l'objet d'une liquidation judiciaire le 13 novembre 2001

par jugement du tribunal de commerce de Rennes.
La société TROIS PRIVEE a été placée en liquidation judiciaire le 18 juin 2002 par jugement du tribunal de commerce de Lyon, désignant Me D...en qualité de mandataire liquidateur.A l'ouverture de la procédure, cette société ne comportait plus de salarié et aucune comptabilité n'a été présentée.

Par acte du 7 janvier 2003, Me D...ès qualités a fait assigner devant le tribunal de commerce de Lyon Monsieur Patrick G..., Monsieur H...MATIME, Monsieur Gérard X..., Madame Nadège Y... et Madame Christiane B...sur le fondement de l'article L. 624-3 du code de commerce, de voir :
-condamner Monsieur Patrick G..., Monsieur H...MATIME, Monsieur Gérard X..., Madame Nadège Y... et Madame Christiane B...solidairement à payer à Me D..., ès qualités le montant de l'insuffisance d'actif de la société TROIS PRIVEE telle qu'elle ressortira de la procédure et, à titre de provision, la somme de 948. 185,16 euros, sauf à parfaire
-dire que les sommes porteront intérêts à compter de l'assignation, et que les intérêts seront capitalisés par année entière
-condamner in solidum les défendeurs à payer à Me D...ès qualités la somme de 4000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Me D...ès qualités faisait valoir que Monsieur H...MATIME et Monsieur Gérard X... étaient dirigeants de fait en raison de leur comportement résultant des pièces versées aux débats.
Me D...ès qualités rappelait que Madame Christiane B..., Madame Nadège Y... et Monsieur Patrick G...étaient dirigeants de droit, étant gérants de la société.
Me D...ès qualités soutenait que les cités avaient commis les fautes de gestion suivantes :
-absence de déclaration de l'état de cessation de paiement dans les délais légaux et poursuite abusive d'une activité déficitaire
-absence de présentation et de production de toute comptabilité et pièces justificatives
-éloignement du dirigeant de droit
-disparition de l'actif de la société au profit d'une société nouvelle créée
-flux financiers anormaux entre la société TROIS P et la société TROIS PRIVEE DELTA SERVICE créée peu de temps avant l'achat par Monsieur Patrick G...des parts de la société TROIS PRIVEE

Par jugement du 16 décembre 2004, le tribunal de commerce de Lyon a dit recevable l'action de Me D...ès qualités et a condamné Monsieur Patrick G...à lui payer une somme égale à 80 % de l'insuffisance d'actif sans excéder 654. 000 euros, Monsieur Gérard X... 10 % sans excéder 81. 000 euros, Madame Nadège Y... et Madame Christiane B...5 % chacune sans excéder 40. 500 euros, outre tous solidairement 4000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Monsieur Gérard X..., Madame Nadège Y... et Madame Christiane B...ont relevé appel le 20 janvier 2005.

Dans ses conclusions du 23 mai 2005, Monsieur Gérard X... soutient qu'il a été engagé en 1981 comme agent de surveillance et que c'est grâce à son travail qu'il a pu obtenir le statut de cadre en 1989-qu'il était, à l'époque des faits, directeur d'exploitation auquel les instructions étaient données par Monsieur Patrick G..., qu'il n'était que rarement dans l'entreprise.
En conséquence, Monsieur Gérard X... demande de :
-constater qu'il ne peut être considéré comme dirigeant de fait
-qu'il n'a commis aucun acte de gestion dans le cadre des sociétés 3P ou 3P DELTA SERVICES
-débouter par conséquent Me D...ès qualités de l'ensemble des demandes en application des dispositions de l'article L. 624-3 du code de commerce
-condamner Me D...ès qualités aux entiers dépens ainsi qu'à la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Dans ses conclusions du 17 mai 2005, Madame Nadège Y... fonde essentiellement sa défense sur le fait qu'elle n'a été gérante que pendant un mois et demi (1er août 2001-17 septembre 2001). Elle considère qu'en raison de la brièveté de la durée de son mandat, elle ne peut être tenue d'avoir contribué de manière décisive à l'insuffisance d'actifs.
Elle considère également que le passif avancé par Me D..., ès qualités est surévalué.
Elle fait valoir que les comptes de 1998 et 1999 ont tous été déposés au greffe, ce qui justifie que la comptabilité était régulièrement tenue, en raison de la brièveté de son mandat.
Enfin, elle considère que les détournements de l'actif de la société TROIS PRIVEE au profit de la société TROIS PRIVEE DELTA SERVICES n'est que le fait du comportement de Monsieur Patrick G....
En conséquence, Madame Nadège Y... demande de :
-débouter Me D...ès qualités de liquidation judiciaire de la société TROIS PRIVEE de toutes ses demandes dirigées contre elle
-condamner Me D...ès qualités à lui payer une somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
-dire que les dépens seront à la charge de Me D...ès qualités

Dans ses conclusions du 26 septembre 2005, Madame Christiane B...fait valoir en premier lieu que l'action en comblement de passif ne concerne que le dirigeant en fonction à la date d'ouverture de la procédure collective.
Elle prétend avoir prévenu les autorités judiciaires des agissements délictueux de Monsieur Patrick G..., ce qui n'a eu aucune conséquence.
Elle soutient également que sa gestion qui, en réalité, était celle de son frère, elle-même étant femme de ménage, ne peut être critiquée, puisqu'au rachat de la société par Monsieur Patrick G...les comptes de la société TROIS PRIVEE étaient équilibrés.
En conséquence, Madame Christiane B...demande de :
-débouter Me D...ès qualités de liquidation judiciaire de la société TROIS PRIVEE de toutes ses demandes
-condamner Me D...ès qualités à payer à Madame Christiane B...la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Dans ses conclusions récapitulatives du 2 décembre 2005, Me D...expose :
-concernant la qualité des défendeurs cités
Monsieur Patrick G..., qui n'a jamais comparu et ne fait valoir aucun moyen, était dirigeant de droit en sa qualité de gérant
Il en est de même pour Madame Nadège Y..., la brièveté de son mandat ne l'exonérant pas de ses responsabilités.
Il en également de même pour Madame Christiane B..., les anciens dirigeants de droit pouvant être concernés par une action en comblement de passif.
Me D..., ès qualités, soutient qu'au vu des pièces versées aux débats que Monsieur Gérard X... était dirigeant de fait.
-concernant l'insuffisance d'actif
Me D...déclare que celui-ci est de 908. 743 euros représentant essentiellement des dettes fiscales et sociales (passif déclaré de 926. 829 euros dont 850. 000 euros à titre privilégié moins les actifs de 18. 086 euros)
-sur les fautes de gestion

Me D...maintient l'ensemble de ses demandes et sollicite la confirmation du jugement déféré, y ajoutant une condamnation solidaire des appelants à lui payer une somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le Procureur Général près cette Cour a visé la procédure le 29 mai 2006 et a conclu à la confirmation du jugement déféré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I / Sur la qualité de dirigeant des appelants :

Attendu qu'il résulte du dossier que Madame Christiane B...a été gérante de droit de la société TROIS PRIVEE depuis sa constitution le 17 décembre 1998, date de son immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés, jusqu'au 1er août 2001, date à laquelle lui a succédé dans ces fonctions Madame Nadège Y... jusqu'à ce qu'elle en démissionne le 17 septembre 2001, Monsieur Patrick G...prenant alors la gérance à compter de cette date jusqu'au prononcé de la liquidation judiciaire de la société le 18 juin 2002-qu'à ce titre ils relèvent tous des dispositions de l'article L. 624-3 du code de commerce, sans qu'ils puissent alléguer, comme le fait Madame Christiane B..., que seul le dirigeant en fonction lors de la déclaration de cessation de paiement peut être recherché sur le fondement de ce texte, le dirigeant retiré pouvant être poursuivi, dès lors que la situation ayant abouti à la cessation des paiement de la personne morale a été créée ou aggravée à l'époque où il était en fonction ;

Attendu que le statut de salarié directeur d'agence qu'avait Monsieur Gérard X... dans la société n'exclut pas qu'il puisse être reconnu comme dirigeant de fait, dès lors qu'il est établi qu'il exerçait des fonctions de direction dans la société en toute autonomie-qu'il ne peut à cet égard soutenir qu'il n'était qu'un simple exécutant dans l'entreprise des instructions qu'il recevait, soit par téléphone, soit par mail de Monsieur Patrick LAROCHE, alors gérant de droit de la société, alors qu'aucune des pièces qu'il produit n'en fait état-que ces pièces révèlent que Monsieur Gérard X... informait Monsieur Patrick G...des décisions qu'il prenait mais démontrent que Monsieur Gérard X... loin de se contenter de rendre des comptes au gérant de droit bénéficiait d'une large initiative pour engager la société, ce qui ne contredit pas le fait qu'il ait tenu Monsieur Patrick G...au courant de l'état de la société-qu'à raison de l'éloignement du gérant de droit, qui, selon les propres déclarations de Monsieur Gérard X..., n'était jamais présent dans l'entreprise, on voit mal comment la direction de la société aurait pu être autrement assurée-qu'il fallait nécessairement dans ce contexte qu'une personne présente prenne les décisions qu'imposait au quotidien la gestion de l'entreprise, ce que faisait Monsieur Gérard X... lorsqu'il intervenait auprès des interlocuteurs de la société, en se présentant comme étant le responsable-que dans le courrier adressé aux ASSEDIC, il est fait état de Monsieur Gérard X... comme gérant (pièce no 5)-que les anciens salariés de la société Messieurs I...et ROLAND attestent qu'ils traitaient qu'avec Monsieur Gérard X... la question de leur salaire et l'organisation de leur travail dans la société (pièce no 6 et 7) ;

Attendu qu'il résulte de ces éléments que le rôle joué par Monsieur Gérard X... dans la société TROIS PRIVEE allait au delà de celui qu'il revendique d'un simple directeur d'agence salarié-que ses interventions dans tous les domaines de la vie de la société prouvent qu'il en était bien, du fait de l'absence de Monsieur Patrick G..., le gérant de fait-que cette qualification doit en conséquence être retenue en considération des actes positifs qu'il a accomplis dans la société en toute indépendance ;

II / Sur l'insuffisance d'actifs :

Attendu qu'il résulte de l'état des créances de la société TROIS PRIVEE que le passif déclaré s'élève à la somme de 926. 829 euros, dont 850. 405 euros à titre privilégié constitué essentiellement de dettes sociales, notamment l'URSSAF et de dettes fiscales (impôt sur les sociétés, taxe professionnelle, TVA)-que le mandataire liquidateur n'a pu obtenir qu'une somme de 18. 086,46 euros de la réalisation des actifs-qu'il s'ensuit que l'insuffisance d'actifs s'établit à un montant de 908. 743 euros, sans qu'aucun élément contraire n'ait été fourni ;

III / Sur les fautes de gestion :

Attendu que la société TROIS PRIVEE était redevable des cotisations de l'URS-ARRCO d'un montant de 125. 210 euros depuis le troisième trimestre + 2000 euros ainsi que de la TVA des mois de novembre et décembre 2000 ainsi que de janvier 2001 pour 250. 000 euros auxquelles s'ajoutent les impositions au titre de l'impôt sur les sociétés et les contributions sociales se rapportant aux années 1999,2000 et 2001 pour 200. 000 euros ;

Attendu qu'il résulte de ces éléments qu'au moins depuis le 1er juillet 2001, la société TROIS PRIVEE était dans l'impossibilité de faire face à ses dettes fiscales et sociales au moyen de son actif disponible quasiment inexistant à cette date-que la société était donc manifestement en état de cessation des paiements ;

Attendu qu'il appartenait à Madame Christiane B..., qui exerçait la gérance de la société depuis le 17 décembre 1998 et qui ne l'a quittée que le 1er août 2001 de faire la déclaration de cessation des paiements-qu'en s'abstenant d'y procéder sous le prétexte inopérant qu'elle a accepté un mandat de complaisance, elle a commis une faute de gestion au même titre que Madame Nadège Y..., qui a pris sa suite comme gérante à compter de cette date et qui, malgré la brièveté de son mandat, qui s'est achevé le 17 septembre 2001, soit un mois et demi seulement après son entrée en fonction, ne pouvait ignorer la situation calamiteuse dans laquelle se trouvait la société-que le comportement de l'une comme de l'autre caractérise le désintérêt qu'elles ont eu à l'égard de la gestion de la société, désintérêt qui constitue une faute engageant la responsabilité de dirigeant de droit tenu de l'intérêt social qu'elle avait la charge de défendre ;

Attendu que Monsieur Patrick G..., qui a fait acquérir le 17 septembre 2001 par la société DELTA CORPORATION CONSULTANT NPD, dont il était le représentant permanent,80 % du capital de la société TROIS PRIVEE dans lequel lui-même entrait à titre personnel pour les 20 % restants, est devenu le gérant de droit de la société à compter de cette date-que Me D...ès qualités n'a pu établir s'il avait réellement exercé ces fonctions à raison de son éloignement de la société ;

Attendu qu'en revanche il a été démontré qu'il s'est servi de Monsieur Gérard X... pour gérer la société en ses lieu et place, de sorte qu'il en est devenu le gérant de fait et à ce titre responsable de la gestion de la société-que dès le mois de novembre 2001, soit deux mois après la reprise de la société par Monsieur Patrick G..., les comptes de la société se sont trouvés mouvementés de nombreux virements faits en faveur de la société TROIS PRIVEE DELTA SERVICE nouvellement créée avec le même objet, dont Monsieur Patrick G...était le dirigeant, et ce pour un montant de 145. 886,74 euros jusqu'en mai 2002, c'est à dire jusqu'à la veille du jugement prononçant le 18 juin 2002 la liquidation judiciaire de la société TROIS PRIVEE sur assignation de l'URSSAF du 25 avril 2002-que ces virements, qui constituent des détournements, ont eu pour effet d'appauvrir la société, alors même qu'à cette époque elle était déjà en situation de cessation des paiements-que Monsieur Gérard X... du fait de son immixtion dans la gestion de la société TROIS PRIVEE n'a pu ignorer l'existence de ces virements et leur absence de justification-que quoi qu'il en soit, il incombait, la société ne pouvant plus payer son passif exigible au moyen de son actif disponible, de faire une déclaration de cessation des paiements-que sa faute se trouve aggravée par le fait qu'il a été à toute le moins par son attitude passive le complice des détournements constatés ;

Attendu que c'est la raison pour laquelle Monsieur Gérard X... n'a pas jugé utile d'alerter Monsieur Patrick G...gérant de droit de la situation catastrophique conduisant la société à sa perte et qu'il a été dans l'incapacité de produire à Me D...ès qualités le moindre document comptable au jour de la liquidation judiciaire ;

Attendu que le juge qui entend faire application de l'article L. 624-3 du code de commerce n'est pas lié par la date de cessation des paiements fixée par le jugement d'ouverture-qu'il lui suffit d'établir que les fautes de gestion se rapportent pour chacune des personnes concernées à la période pendant laquelle elle exerçait des fonctions dirigeantes de droit ou de fait dans la société ;

Attendu qu'il convient de retenir que Madame Christiane B...et Madame Nadège Y... comme Monsieur Gérard X... ont tous trois commis des fautes gestion caractérisés ;

IV / Sur la contribution des fautes de gestion à l'insuffisance d'actifs :

Attendu qu'un dirigeant peut être déclaré responsable sur le fondement de l'article L. 624-3 du code de commerce et à ce titre être condamné à supporter la totalité des dettes sociales, alors même que sa défaillance ne serait à l'origine que d'une partie d'entre elles ;

Attendu que le fait pour chacun des dirigeants successifs de n'avoir pas tenu de comptabilité et d'avoir poursuivi une activité manifestement déficitaire sans prendre aucune mesure pour y remédier a contribué à l'insuffisance d'actif constatée, puisque, si la cessation d'activité avait été décidée dès la constatation de l'impossibilité de payer les dettes au moyen de l'actif disponible, le passif n'aurait pas atteint une telle proportion-que par conséquent le lien de causalité entre les fautes de gestion et l'insuffisance d'actif est établi ;

V / Sur la condamnation des dirigeants :

Attendu qu'il ressort toutefois de ce qui précède que le degré de responsabilité de chacun des dirigeants ayant formé appel du jugement dans la situation déficitaire de la société n'est pas le même-que chacun y a contribué à raison de l'importance des fautes de gestion qui lui sont reprochés et qui ont été établies à sa charge-que le premier juge en a fait une exacte appréciation que la Cour fait sienne en condamnant Monsieur Gérard X... à payer à Me D...ès qualités la somme correspondant à 10 % de l'insuffisance d'actif, sans que ce montant excède 81. 000 euros et Mesdames Christiane J...et Nadège Y... à lui payer chacune la somme correspondant à 5 % de l'insuffisance d'actifs, sans que ce montant excède pour chacune d'elles 40. 500 euros ;

Attendu que ces condamnations n'ont pas à être prononcées in solidum entre les personnes tenues envers Me D...ès qualités-qu'elles supporteront l'intérêt au taux légal à compter de l'assignation du 7 janvier 2003 ;

Attendu que Monsieur Patrick G...n'a pas fait appel du jugement-qu'il n'a pas non plus été intimé-qu'il n'est donc pas concerné par cette procédure ;

Attendu qu'il convient de confirmer en conséquence le jugement déféré de ces chefs à l'égard des seuls appelants ;

VI / Sur les autres demandes :

Attendu qu'il serait inéquitable que Me D...ès qualités supporte la charge de ses frais irrépétibles et qu'il y a lieu de lui allouer ainsi une somme de 2500 euros à la charge in solidum des appelants, qui s'ajoutera à celle accordée par le premier juge ;

Attendu que les appelants, qui succombent, doivent être condamnés in solidum aux dépens ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Vu les conclusions du Procureur Général près cette Cour du 29 mai 2006,

Confirme le jugement déféré sur les condamnations prononcées à l'encontre des appelants en faveur de Me D...ès qualités ainsi que sur l'indemnité judiciaire qui lui a été accordée au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Y ajoutant,

Condamne in solidum Monsieur Gérard X... ainsi que Mesdames Christiane J...et Nadège Y... à payer à Me D...ès qualités la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'à supporter les dépens qui seront recouvrés par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, Avoués, à l'encontre des parties qui succombent, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le Greffier, Le Président,
M.P. K...H. ROBERT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 05/00453
Date de la décision : 21/07/2006
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 16 décembre 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2006-07-21;05.00453 ?
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