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15/06/2006 | FRANCE | N°05/01223

France | France, Cour d'appel de Lyon, 15 juin 2006, 05/01223


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 15 Juin 2006

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 19 janvier 2005 - No rôle : 2003j3129 No R.G. : 05/01223

Nature du recours : Appel

APPELANT : Monsieur Henri X... 30 place Bellecour 69002 LYON représenté par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour assisté de Me RIEUSSEC, avocat au barreau de LYON

INTIMEE : La Société ESPACE VITTON, SARL (13 rue des Emeraudes - 69475 LYON CEDEX 06) représentée par son mandataire la Régie de l'Immobilier d'Entreprise, S

A 139, rue Vendôme 69477 LYON CEDEX 06 représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cou...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 15 Juin 2006

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 19 janvier 2005 - No rôle : 2003j3129 No R.G. : 05/01223

Nature du recours : Appel

APPELANT : Monsieur Henri X... 30 place Bellecour 69002 LYON représenté par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour assisté de Me RIEUSSEC, avocat au barreau de LYON

INTIMEE : La Société ESPACE VITTON, SARL (13 rue des Emeraudes - 69475 LYON CEDEX 06) représentée par son mandataire la Régie de l'Immobilier d'Entreprise, SA 139, rue Vendôme 69477 LYON CEDEX 06 représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour assistée de la SCP JAKUBOWICZ & Associés, avocats au barreau de LYON

Instruction clôturée le 06 Décembre 2005 Audience publique du 11 Mai 2006

LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Madame FLISE, Président Monsieur SANTELLI, Conseiller Madame MIRET, Conseiller DEBATS : à l'audience publique du 11 mai 2006 sur le rapport de Monsieur SANTELLI, Conseiller GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Mademoiselle Y..., Greffier ARRET : CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 15 juin 2006, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile signé par Madame FLISE,

Président, et par Mademoiselle Y..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par acte du 12 février 1992, la société X... TURC a acquis un fonds de commerce à la Cité des Antiquaires à Villeurbanne, assorti d'un bail commercial souscrit le 6 août 1990.

La société X... TURC a donné congé, par exploit d'huissier du 19 avril 1999 et a libéré les lieux, puis cessé son activité le 31 octobre 1999.

La société ESPACE VITTON, bailleur, qui reste créancière de loyers depuis août 1999, considère que le congé donné par la société X... TURC n'est pas régulier, et a formé un recours devant le Tribunal de Grande Instance de Lyon, qui par un jugement du 13 mars 2000 devenu définitif, lui a donné satisfaction et condamné la société X... TURC à payer la somme de 11.111,91 euros en principal.

La société X... TURC ayant été liquidée et radiée du Registre du Commerce et des Sociétés et devant l'impossibilité de recouvrer sa créance, la société ESPACE VITTON a par acte d'huissier régulièrement délivré, le 19 septembre 2003 assigné Monsieur Henri Z... en qualité de liquidateur amiable, devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins d'entendre :

- dire que la société ESPACE VITTON est recevable et fondée dans son action

- dire qu'en s'abstenant de faire droit au commandement de payer du 4 novembre 1999, Monsieur Henri Z... a commis une faute dans l'exercice de ses fonctions de liquidateur amiable de la société X... TURC

En conséquence,

- condamner Monsieur Henri X... à payer à la société ESPACE VITTON

la somme de 11.111,91 euros correspondant au montant de sa créance au jour du jugement définitif rendu par le Tribunal de Grande Instance de Lyon le 13 mars 2003, outre intérêts à compter de l'assignation

- le condamner en outre à payer la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

- condamner Monsieur Henri X... aux entiers dépens

Dans ses écritures, Monsieur Henri X... s'opposait à cette demande et sollicitait du tribunal :

- voir déclarer l'action de la société ESPACE VITTON irrecevable puisque prescrite

A titre infiniment subsidiaire,

- voir débouter la société ESPACE VITTON de l'intégralité de ses demandes, faute pour elle d'établir la réalité d'une faute commise par le liquidateur amiable et l'existence de son préjudice directement lié à ladite faute,

A titre reconventionnel,

- condamner la société ESPACE VITTON à payer à Monsieur Henri X... la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que les dépens

Par jugement du 18 janvier 2005, le tribunal de commerce de Lyon a dit que l'action engagée la société ESPACE VITTON était recevable et a condamné Monsieur Henri X... à lui payer la somme de 11.111,91

euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 19 septembre 2003 ainsi que celle de 800 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par déclaration du 18 février 2005, Monsieur Henri X... a relevé appel de ce jugement.

Vu l'article 455-1 du Nouveau Code de Procédure Civile dans sa rédaction issue du décret du 28 décembre 1998.

Dans ses conclusions du 17 novembre 2005 auxquelles il convient de se référer, Monsieur Henri X... expose :

- qu'il n'était pas caution de la société X... TURC

- qu'il est recherché pour des fautes prétendument commises en tant que mandataire amiable de cette société

- que les opérations de liquidation, ayant été publiées le 22 mars 2000, il convient d'apprécier l'existence d'une faute à cette date, puisque l'article L.237-12 du code de commerce n'envisage que les fautes dans l'exercice des fonctions, le préjudice qui a pu être causé et le lien de causalité avec la faute à cette date, la société ayant pris fin au jour de la publication

- que l'action en responsabilité contre les dirigeants tant sociale qu'individuelle se prescrit par trois à compter du fait dommageable, sauf dissimulation, que la victime en ait eu ou non connaissance

- que l'assignation a été délivrée le 19 septembre 2003

- que dans ces conditions l'action est tardive et donc prescrite

- que le délai n'a ainsi pas couru du jour du prononcé du jugement du Tribunal de Grande Instance le 13 mars 2003 comme le soutient la société ESPACE VITTON

- que la société ESPACE VITTON, qui dénie tout effet du congé donné par la société X... TURC et à son propre commandement de payer visant la clause résolutoire ne peut soutenir la dissimulation, et prétendre que c'est la révélation qui doit être retenue

- qu'aucun événement ne peut retarder cette prescription, ni les initiatives prises par la société ESPACE VITTON postérieures au 22 mars 2000, ni l'action que la société ESPACE VITTON a pu engager contre le locataire pour faire reconnaître sa créance contre lui.

Il demande donc la réformation du jugement déféré, l'action étant irrecevable.

Sur le fond, il expose à titre subsidiaire :

- que la faute du liquidateur amiable n'est pas établie, le jugement rendu le 13 mars 2003 par le Tribunal de Grande Instance de Lyon contre la société locataire n'établissant pas la faute du liquidateur - qu'il n'est pas le garant de la société locataire qu'il a pu penser le 22 mars 1999 que le congé donné par le locataire avait produit ses effets, de même que le commandement de payer avec clause résolutoire qui lui avait été délivré - qu'à cette date, compte tenu des comptes à établir entre les parties, il n'était pas évident que la société locataire était débitrice - qu'à supposer qu'elle l'ait été, les actifs de la société à l'époque in bonis pouvaient permettre le paiement des loyers arriérés

- qu'aucun préjudice n'est établi à la date du 22 mars 2003 - que ce n'est qu'après le jugement du Tribunal de Grande Instance qu'une telle créance a été révélée

- qu'il n'y a pas de lien de causalité, dès lors que c'est le bailleur qui a concouru à l'existence du préjudice et à son aggravation, puisqu'il aurait dû prendre acte de la remise des chefs et tenir compte des conséquences de son propre commandement pour considérer le bail comme résolu, au lien de poursuivre l'action contre le locataire et lui faire payer le prix de nouveaux loyers en s'abstenant de relever les locaux comme il aurait pu le faire

Il demande donc de dire que la société ESPACE VITTON n'est pas fondée

dans ses demandes et de l'en débouter.

Il réclame la condamnation de l'intimée à des dommages et intérêts de 3000 euros pour la procédure abusive engagée contre lui.

Il sollicite la réformation du jugement déféré du chef des demandes si l'action devait être retenue comme recevable.

Dans ses conclusions du 4 octobre 2005 auxquelles il convient de se référer, la société ESPACE VITTON expose :

- que le liquidateur amiable qui clôture les opérations de liquidation sans payer une créance dont il a connaissance, engage sa responsabilité

- qu'un commandement de payer a été délivré le 4 novembre 1999 à la société X... TURC, ce qui imposait au liquidateur d'attendre que le tribunal saisi se prononce

- qu'à cette date Monsieur Henri X... était en fonction et n'a pas tenu compte de la créance de la

- qu'ainsi lorsque les droits du créancier sont contestés, la prescription triennale ne commence à courir qu'à compter du jugement établissant ces droits

- que c'est donc du 13 mars 2003 que le délai de prescription a débouté

- qu'en clôturant les opérations de liquidation en mars 2000, Monsieur Henri X... lui a interdit de recouvrer sa créance de loyers à l'encontre du locataire, alors qu'à cette date le recouvrement était possible, la société étant toujours in bonis et les actifs sociaux pouvant répondre de la dette sociale

Elle considère que dans ces conditions son action est recevable et ses demandes bien fondées. Elle sollicite donc à la réformation du jugement déféré, qui a condamné Monsieur Henri X... à lui payer la somme de 11.111,91 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 1999, date du commandement de payer. MOTIFS DE LA DÉCISION

I/ Sur la prescription de l'action de la société ESPACE VITTON engagée à l'encontre de Monsieur Henri X..., liquidateur amiable : Attendu que Monsieur Henri X..., considérant que la société X... TURC, dont il était le liquidateur amiable, a pris fin au jour de la publication des opérations de liquidation de la société X... TURC précédant la radiation au Registre du Commerce et des Sociétés intervenue le 22 mars 2000, soulève la prescription de l'action en responsabilité engagée à son encontre par la société ESPACE VITTON selon acte du 19 septembre 2003, le délai de trois ans prévu par les articles L. 137-12 et L. 222-54 du code de commerce étant selon lui expiré depuis le 22 mars 2003 ;

Attendu que le point de départ de la prescription d'une telle action contre le liquidateur d'une société ne commence à courir qu'au jour où les droits de la victime du fait dommageable imputé à ce liquidateur ont été définitivement reconnus par une décision de justice ;

Attendu qu'en l'espèce la société ESPACE VITTON a obtenu le titre nécessaire au soutien de son action le 13 mars 2003, date à laquelle le Tribunal de Grande Instance de Lyon, saisi le 29 septembre 2000 par la société ESPACE VITTON, a constaté la cessation du bail conclu entre cette dernière, propriétaire, et la société X... TURC à compter du 11 juin 2001 à la suite du congé délivré par Maître NANTERME en sa qualité de mandataire ad'hoc de la société X... TURC et a condamné celle-ci à payer à la société ESPACE VITTON la somme de 11.111,91 euros correspondant aux loyers et charges dus pour la période d'août 1999 à juin 2001, déduction faite du dépôt de garantie ;

Attendu qu'en conséquence l'action engagée le 19 septembre 2003 par la société ESPACE VITTON contre Monsieur Henri X... pris en sa

qualité de liquidateur amiable de la société X... TURC n'est pas prescrite - que l'action est donc recevable ;

Attendu que le jugement déféré doit être de la sorte confirmé sur ce point ;

II/ Sur la responsabilité de Monsieur Henri X... ès qualités de liquidateur amiable de la société X... TURC :

Attendu que selon acte du 4 novembre 1999, la société ESPACE VITTON a fait délivrer à la société X... TURC un commandement de payer pour la somme de 17.010,98 francs (2593,31 euros) représentant le montant des loyers restant dus à cette date - que le fait que le 22 mars 2000, soit au jour où la société X... TURC a cessé d'exister, Monsieur Henri X..., qui était le gérant de la société X... TURC n'ait pas pu anticiper, comme il le prétend, les conséquences du congé qu'il avait donné ès qualités au propriétaire le 19 avril 1999 pour le 31 octobre 1999, à savoir son annulation prononcée aux termes d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de Lyon du 13 mars 2003, qui a eu pour effet que le bail s'est poursuivi à compter du 1er novembre 1999 et que de ce fait de nouveaux loyers soient devenus exigibles augmentant la dette est sans portée - qu'en effet, quand bien même admettrait-on l'ignorance de Monsieur Henri X... ès qualités sur le devenir du bail postérieurement au congé qu'il a donné le 19 avril 1999, la dette de la société X... TURC envers la société ESPACE VITTON au jour de la délivrance du commandement portant sur les loyers échus à cette date n'en serait pas pour autant affectée - que l'on voit mal en quoi le congé donné aurait pu dispenser la société X... TURC de s'acquitter des loyers restés impayés, au surplus antérieurs aux effets du congé - que Monsieur Henri X... ne s'explique pas sur les raisons pour lesquelles cette dette de loyers n'a pas été réglée au propriétaire dès le

commandement de payer du 4 novembre 1999 - qu'il se contente d'affirmer d'une manière particulièrement simpliste et fort peu convaincante, que "c'est en toute bonne foi que la liquidation avait eu lieu", alors qu'il ne pouvait ignorer que la clôture des opérations d'une liquidation amiable de société ne peut intervenir tant que toutes les dettes sociales n'ont pas été acquittées - que Monsieur Henri X... ne conteste pas que la société X... TURC bénéficiait, comme le soutient la société ESPACE VITTON, des disponibilités suffisantes pour payer les loyers avant la clôture - que c'est donc fautivement que Monsieur Henri X... a procédé dans ces conditions à la liquidation de la société ;

Attendu que la société ESPACE VITTON a subi un préjudice égal au montant des loyers dont elle n'a été payée - que ce préjudice est totalement imputable à Monsieur Henri X... qui doit en conséquence être condamné personnellement à payer à la société ESPACE VITTON la somme de 11.111,91 euros ;

Attendu que le jugement déféré doit être ainsi confirmé, sauf à dire que les intérêts au taux légal s'appliqueront sur la condamnation à compter du 4 novembre 1999, date du commandement de payer ;

III/ Sur la demande de Monsieur Henri X... en dommages et intérêts :

Attendu que Monsieur Henri X... est particulièrement mal venu, compte tenu de la faute manifeste qu'il a commise à l'égard de la société ESPACE VITTON, à lui réclamer des dommages et intérêts pour usage abusif d'action en justice - qu'en conséquence Monsieur Henri X..., dont la demande est dépourvue de tout fondement, doit en être déboutée ;

IV/ Sur les autres demandes :

Attendu qu'il serait inéquitable que la société ESPACE VITTON supporte la charge de ses frais irrépétibles et qu'il y a lieu de lui

allouer ainsi une somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Attendu que

Attendu que Monsieur Henri X..., qui succombe, doit être condamné aux dépens; PAR CES MOTIFS, LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf à dire que les intérêts au taux légal s'appliqueront sur le montant de la condamnation à compter du 4 novembre 1999,

Y ajoutant,

Déclare Monsieur Henri X... mal fondé dans sa demande en dommages et intérêts à l'encontre de la société ESPACE VITTON et l'en déboute, Condamne Monsieur Henri X... à payer à la société ESPACE VITTON la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que les dépens qui seront recouvrés pour ceux d'appel par Maître MOREL, Avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le Greffier,

Le Président,

M.P. Y...

L. FLISE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 05/01223
Date de la décision : 15/06/2006
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2006-06-15;05.01223 ?
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