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24/05/2006 | FRANCE | N°05/02210

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre civile 3, 24 mai 2006, 05/02210


COUR D'APPEL DE LYONTroisième Chambre Civile

ARRÊT DU 24 Mai 2006

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du juge commissaire du Tribunal de Commerce de VILLEFRANCHE- TARARE du 23 mars 2005 - No rôle : 2005jc01449

No R.G. : 05/02210
Nature du recours : Appel

APPELANTE :
La Société THEVENET SOBRHONE, SAS2 Chemin du Génie, BP 22069632 VENISSIEUX CEDEX
représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour
assistée de Me Bernard MAGES, avocat au barreau de BOURGOIN JALLIEU

INTIMES :
Maître Martine Y..., mandataire judiciaire, è

s qualités de représentant des créanciers de la société CA.OR, SARL...69400 LIMAS
représenté par Me Christian ...

COUR D'APPEL DE LYONTroisième Chambre Civile

ARRÊT DU 24 Mai 2006

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du juge commissaire du Tribunal de Commerce de VILLEFRANCHE- TARARE du 23 mars 2005 - No rôle : 2005jc01449

No R.G. : 05/02210
Nature du recours : Appel

APPELANTE :
La Société THEVENET SOBRHONE, SAS2 Chemin du Génie, BP 22069632 VENISSIEUX CEDEX
représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour
assistée de Me Bernard MAGES, avocat au barreau de BOURGOIN JALLIEU

INTIMES :
Maître Martine Y..., mandataire judiciaire, ès qualités de représentant des créanciers de la société CA.OR, SARL...69400 LIMAS
représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
assisté de Me MORTIMORE, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE
La Société CA.OR, SARLRue Charles Sève69400 VILLEFRANCHE SUR SAONE
représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
assistée de Me MORTIMORE, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE

Instruction clôturée le 03 Mars 2006
Audience publique du 06 Avril 2006

LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON,
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Monsieur ROBERT, PrésidentMadame MIRET, ConseillerMadame CLOZEL-TRUCHE, Conseiller
DEBATS : à l'audience publique du 6 avril 2006sur le rapport de Monsieur ROBERT, Président
GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Mademoiselle BASTIDE, Greffier
ARRET : CONTRADICTOIRE
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 24 mai 2006, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile
signé par Monsieur ROBERT, Président, et par Mademoiselle BASTIDE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SARL CA.OR, qui exploite à Villefranche-sur-Saône un fonds de commerce de bar, pub et discothèque sous l'enseigne La Storia a signé le 21 octobre 2002 avec la société THEVENET-SOBRHONE un contrat d'achat exclusif de boissons. Les mêmes parties ont convenu le 27 novembre 2002 de la mise à disposition de la société CA.OR de divers matériels d'une valeur de 27 101,96 €.Par acte du 8 décembre 2003, la société THEVENET-SOBRHONE, estimant que la SARL CA.OR ne respectait pas ses engagements contractuels, en restant notamment redevable d'un important compte de marchandises, l'a assignée devant le tribunal de commerce de Lyon pour voir constater que la rupture du contrat d'achat exclusif de boissons et de mise à disposition de matériels lui incombait, et pour la voir condamner en conséquence au paiement d'une somme totale de 154 178,81 €, dont 85 351,58 € au titre de la clause pénale prévue à l'article sept.
Alors que cette affaire était toujours pendante, le tribunal de commerce de Villefranche Tarare a prononcé le redressement judiciaire de la société CA.OR le 15 janvier 2004.La société THEVENET-SOBRHONE a déclaré sa créance à titre chirographaire pour un montant de 154 719,32 € le 29 janvier 2004. Elle a fait une déclaration rectificative le 9 février 2004 au titre du compte marchandises, pour le scinder en une créance chirographaire de 23 009,66 € et une créance privilégiée de 5 355,87 € au titre de droits sur les alcools ; à cette occasion elle a précisé toutefois que pour les autres postes, elle maintenait sa déclaration de créance initiale du 29 janvier.Toutefois, et malgré un échange de correspondance avec la société THEVENET-SOBRHONE en décembre 2004, le représentant des créanciers n'a pris en considération que la déclaration rectificative et, par une ordonnance du 23 mars 2005, le juge commissaire, suivant sa proposition, a admis la créance de la société THEVENET-SOBRHONE seulement à hauteur de 23 009,66 € à titre chirographaire et 5 355,87 € à titre privilégié.
La société THEVENET-SOBRHONE a relevé appel de cette décision le 31 mars 2005.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Par ses conclusions du 11 janvier 2006, la société THEVENET-SOBRHONE demande à la cour de l'admettre au passif de la procédure collective de la SARL CA.OR à concurrence de 149 323,71 € à titre chirographaire outre 49,24 € de frais d'huissier et de confirmer l'admission privilégiée pour 5 355,87 €.Elle soutient d'abord qu'il ne saurait y avoir de discussion sur le caractère rectificatif de sa déclaration de créance du 9 février 2004 alors qu'elle y avait bien précisé qu'elle maintenait sa déclaration initiale.La société THEVENET-SOBRHONE s'oppose à toute réduction de la clause pénale dont elle sollicite l'application en vertu de l'article 7 de la convention en soulignant qu'elle ne présente pas de caractère excessif, eu égard à son propre engagement financier, notamment pour l'avance de fourniture et de matériel. Elle considère qu'il est indifférent qu'elle -même se soit désistée de l'instance devant le tribunal de commerce après avoir appris le redressement judiciaire de la société CA.OR.Elle soutient encore que sa créance au titre du matériel mis à disposition est certaine, même si elle n'a pas revendiqué ce matériel, puisque l'article 8 du contrat lui laissait le choix entre la restitution du matériel ou son règlement pour le montant stipulé de 27 101,85 € ; elle rappelle que la société CA.OR continue d'utiliser ce matériel.À propos de l'avance sur contrat, elle conteste le droit à un amortissement de 6 705 € invoqué par la société CA.OR et son représentant des créanciers au motif que 6705 bouteilles auraient déjà été vendues, alors que, selon elle, il n'est pas justifié qu'elles lui aient été achetées, ni payées.
De leur côté, par des écritures récapitulatives du 13 février 2006, la SARL CA.OR et Me Martine Y..., mandataire judiciaire agissant en qualité de représentant des créanciers déclarent s'en rapporter à la sagesse de la cour quant à la recevabilité et au bien-fondé de l'appel mais contestent d'abord l'admission de la somme des 85 351,58 € à titre de clause pénale.Relevant que la société THEVENET-SOBRHONE s'est désistée de son instance devant le tribunal de commerce, elles soutiennent que l'indemnité contractuelle ne pouvait être réclamée qu'en cas de résiliation du contrat après envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée conformément à son article sept ; elles en déduisent qu'en l'état du désistement aucun effet ne peut être attaché à l'assignation du 8 décembre 2003. Subsidiairement elles estiment exorbitante la pénalité contractuelle et en sollicite la réduction à un euro symbolique par application de l'article 1152 du Code civil.Elles s'opposent ensuite à la réclamation formée au titre de la mise à disposition du matériel, en relevant que celui-ci n'a pas été revendiqué et qu'il est au surplus inutilisable.Enfin, à propos de l'avance sur contrat, les intimées considèrent que la société THEVENET-SOBRHONE ne justifie pas d'une créance certaine, exigible et liquide dès lors que l'avance de 13 320 € stipulée devait s'amortir à raison d'un euro par bouteille d'alcool jusqu'à remboursement total et que la société CA.OR justifie avoir vendu 6705 bouteilles ; elles en déduisent que la créance de la société THEVENET-SOBRHONE à ce titre ne saurait donc excéder 6 615 €.

SUR CE, LA COUR :

Attendu en premier lieu qu'il ressort des pièces produites que par sa déclaration de créance rectificative du 9 février 2004, la société THEVENET-SOBRHONE n'a nullement renoncé au bénéfice de sa déclaration initiale, mais a seulement sollicité l'admission à titre privilégié d'une partie de son compte marchandises; qu'elle a pris le soin de préciser qu'elle maintenait cette déclaration initiale ;Que c'est donc à tort que le mandataire judiciaire et à sa suite le juge commissaire n'ont pris en considération que la seconde déclaration de créance, sans d'ailleurs fournir de motifs à ce sujet;
Attendu en second lieu, sur le montant des sommes dues par la société CA.OR, qu'il n'existe aucune contestation sur le montant du compte de marchandises ni des droits d'accises, de régie ou de vignette ; qu'il convient donc à ce titre de retenir les sommes respectives de 23 009,66 € et 5 355,87 € ;
Attendu, quant à l'avance sur contrat, que la société THEVENET-SOBRHONE avait accordé à sa cliente une avance de 13 320 €, dont l'amortissement était prévu à raison de un euro par bouteille d'alcool jusqu'à remboursement total ainsi qu'il est stipulé à l'article 12 "Assistance Financière" du contrat du 21 octobre 2002 ; qu'il convient dès lors de prendre en considération le nombre de bouteilles d'alcool effectivement vendues par la société THEVENET-SOBRHONE à la société CA.OR, sans qu'il importe à cet égard qu'elles aient été ou non payées puisque le solde de leur prix éventuellement dû est inclus dans le compte de marchandises ci-dessus ; que les factures communiquées pour le compte de la société CA.OR révèlent effectivement des achats d'alcool correspondant à 6705 bouteilles ; qu'en conséquence un amortissement de 6 705 € sera retenu et la créance de la société THEVENET-SOBRHONE ramenée à la somme de 6 615 € ;
Attendu qu'aux termes de la convention de mise à disposition du 27 novembre 2002, la société CA.OR a reconnu avoir reçu de la société THEVENET-SOBRHONE divers matériels d'un coût total de 27 101,96 € mis à sa disposition pour les besoins de son commerce ; que selon les dispositions du paragraphe huit de cette convention, applicables en cas de cessation des approvisionnements auprès de la société THEVENET-SOBRHONE, cette dernière avait le choix d'obtenir la restitution de ce matériel d'en exiger le paiement pour le montant de 27 101,96 €; qu'ainsi l'appelante est fondée à revendiquer une créance de ce montant, puisqu'il est constant qu'elle n'a pas exercé l'option d'une reprise du matériel ;
Attendu sur le montant de l'indemnité conventionnelle prévue à l'article sept du contrat, que celui-ci prévoit que l'inexécution du contrat, la non réalisation de la totalité des achats prévus, le non respect de l'exclusivité d'approvisionnement par le revendeur entraînera en plus de remboursement intégral de l'avantage consenti, le paiement d'une indemnité forfaitaire de 20 % du chiffre d'affaires réalisé jusqu'au terme normal du contrat, compte tenu des quantités prévues et des quantités déjà livrées, le tout évalué aux prix pratiqués lors de la dernière livraison;Qu'en l'espèce la situation d'inexécution du contrat, qui conditionne l'application de cette clause pénale est suffisamment caractérisée par la constatation, nullement contestée, de l'existence d'impayés au titre des marchandises fournies pour un montant de l'ordre de 28 000 €, qui a conduit la société THEVENET-SOBRHONE à saisir le tribunal de commerce pour faire constater que la rupture du contrat était intervenue ; que celle-ci était effectivement acquise de plein droit, en vertu de l'article 7.1 de la convention, puisqu'aucune formalité n'était nécessaire, autre qu'une mise en demeure par lettre recommandée, adressée en dernier lieu le 26 août 2003 à la société CA.OR; que dès lors que les parties avaient convenu ainsi des conditions d'une résiliation automatique du contrat, sans intervention judiciaire, en cas de défaut de paiement après mise en demeure, il importe peu que la société THEVENET-SOBRHONE se soit désistée de son instance après le placement en redressement judiciaire de la société CA.OR ;
Attendu que l'appelante peut ainsi se prévaloir de l'application de la clause pénale ; que toutefois le montant de celle-ci apparaît manifestement excessif au sens de l'article 1152 du Code civil si l'on considère qu'il est déterminé sur la base d'un chiffre d'affaires prévisionnel hors taxes de 61 000 € par an alors que la société CA.OR n'a réalisé qu'un chiffre d'affaires de 70 179 € en 2002-2003 sans que la société THEVENET-SOBRHONE prétende qu'elle ait par ailleurs manqué à son obligation d'exclusivité ; qu'il l'est également l'on tient compte du montant de l'engagement financier de la société THEVENET-SOBRHONE, qu'il s'agisse de l'avance sur fourniture ou de la mise à disposition de matériel, pour un montant total de l'ordre de 40 000 €;Qu'il convient de ramener à 35 880 € TTC le montant de la peine conventionnelle ;
Attendu que la créance chirographaire de la société THEVENET-SOBRHONE sera donc ainsi arrêtée à 92 606,62 € en principale et à 336,42 € au titre des intérêts courus entre l'assignation et la date d'ouverture de la procédure collective ; qu'y seront ajoutés les frais d'assignation pour un montant de 49,24 € ; que la créance privilégiée sera confirmée pour le montant retenu de 5 355,87 € ;
Attendu que les dépens seront pris en frais privilégiés de redressement judiciaire ;

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Confirme l'ordonnance du juge commissaire du 23 mars 2005 en ce qu'elle a admis la société THEVENET-SOBRHONE au passif de la SARL CA.OR pour un montant de 5 355,87 € à titre privilégié ;
La réformant pour le surplus, fixe à 92 992,08 € la créance chirographaire de la société THEVENET-SOBRHONE à inscrire au passif de la SARL CA.OR ;
Dit que les dépens de la présente instance seront pris en frais privilégiés de redressement judiciaire et accorde à la SCP JUNILLON-WICKY , avoués, le droit de recouvrement direct prévu à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 05/02210
Date de la décision : 24/05/2006
Type d'affaire : Civile

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Période d'observation - Créanciers - Déclaration des créances - Forme - / JDF

La déclaration de créances effectuée par un préposé est régulière s'il justifie d'une délégation régulière de pouvoir concomitante ou antérieure à cette déclaration. La preuve de cette délégation peut être rapportée jusqu'à ce que le juge statue sur l'admission de la créance soit jusqu'au jour de l'ordonnance de clôture en appel. L'attestation fournie postérieurement au délai de déclaration de créance par laquelle le président du conseil d'administration atteste avoir délégué ses pouvoirs au préposé notamment pour procéder aux déclarations de créances est insuffisante à rapporter la preuve de la délégation


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Villefranche-Tarare, 23 mars 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2006-05-24;05.02210 ?
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