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30/03/2006 | FRANCE | N°04/06642

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre civile 3, 30 mars 2006, 04/06642


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile

ARRÊT DU 30 Mars 2006

Décision déférée à la Cour : Jugements du Tribunal de Grande Instance de MONTBRISON du 22 septembre 2004 et du 9 février 2005- No rôle : 2003 / 00009

No R. G. : 04 / 06642

Nature du recours : Appel

APPELANT :

Monsieur Marcel X..., né le 8 septembre 1951 à Toulouse (31) ......

représenté par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour
assisté de Me Charles RICHARD, avocat au barreau de SAINT ETIENNE
INTIMEE :
La BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS, SA 141

rue Garibaldi 69003 LYON

représentée par la SCP BAUFUME- SOURBE, avoués à la Cour
assistée de Me Serge EPITALO...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile

ARRÊT DU 30 Mars 2006

Décision déférée à la Cour : Jugements du Tribunal de Grande Instance de MONTBRISON du 22 septembre 2004 et du 9 février 2005- No rôle : 2003 / 00009

No R. G. : 04 / 06642

Nature du recours : Appel

APPELANT :

Monsieur Marcel X..., né le 8 septembre 1951 à Toulouse (31) ......

représenté par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour
assisté de Me Charles RICHARD, avocat au barreau de SAINT ETIENNE
INTIMEE :
La BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS, SA 141 rue Garibaldi 69003 LYON

représentée par la SCP BAUFUME- SOURBE, avoués à la Cour
assistée de Me Serge EPITALON, avocat au barreau de SAINT ETIENNE
Instruction clôturée le 08 Novembre 2005
Audience publique du 23 Février 2006
LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON,
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Madame FLISE, Président, Monsieur SANTELLI, Conseiller Madame MIRET, Conseiller

DEBATS : à l'audience publique du 23 février 2006
GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Mademoiselle BASTIDE, Greffier
ARRET : CONTRADICTOIRE
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 30 mars 2006, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile
signé par Madame FLISE, Président, et par Mademoiselle BASTIDE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE- PROCEDURE- PRETENTIONS DES PARTIES
Par jugement du 22 septembre 2004, le Tribunal de Grande Instance de Montbrison statuant en matière commerciale a condamné Monsieur Marcel X... à payer à la Banque Populaire Loire et Lyonnais la somme de 22. 867, 35 euros, majorée des intérêts au taux contractuel de 5, 90 % à compter du 11 juin 2001, date de la réception de la mise en demeure du 5 juin 2001 ainsi que celle de 10. 854, 36 euros, majorée des intérêts au taux contractuel à compter du 11 juin 2001- a sursis à statuer sur la demande en paiement de la créance Kawasaki, a invité la Banque Populaire Loire et Lyonnais à justifier de la somme réglée à Kawasaki et a renvoyé l'affaire au 24 novembre 2004.
Par déclaration du 18 octobre 2004, Monsieur Marcel X... a relevé appel de ce jugement.
Par jugement du 9 février 2005, le même tribunal a condamné Monsieur Marcel X... à verser à la Banque Populaire Loire et Lyonnais la somme de 19. 635, 44 euros, majorée des intérêts au taux contractuel à compter du 25 juillet 2002 et a débouté la Banque Populaire Loire et Lyonnais du surplus de sa demande.
Par déclaration du 8 mars 2005, Monsieur Marcel X... a relevé appel de ce jugement.
Vu l'article 455 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civile dans sa rédaction issue du décret du 28 décembre 1998 ;
Dans ses conclusions du 8 février 2005, Monsieur Marcel X... expose :- que la banque a consenti un prêt disproportionné dans son montant à la société MJM MOTOS, soit 350. 000 francs, à la date du 26 juin 1997, alors même qu'elle présentait des difficultés, ce que la banque ne pouvait ignorer- que les cautionnements mis à sa charge sont disproportionnés à ses ressources- qu'il y a donc eu faute de la banque qui a manqué à son devoir de prudence et de diligence ainsi qu'à son obligation de conseil- que la mise en liquidation judiciaire révèle cette faute- que la banque ne pouvait lui réclamer le paiement en tant que caution avant le prononcé de la liquidation judiciaire le 25 juillet 2001- qu'il y a lieu de débouter ainsi la banque de sa demande faite à son encontre d'une somme de 22. 867, 35 euros- qu'en outre la banque a soutenu abusivement la société MJM MOTOS en lui accordant des découverts considérables, alors que sa situation était à l'époque compromise- qu'il n'a, en tant que gérant, commis aucune faute- que la banque ne peut alors exercer un recours contre lui pour les sommes qu'elle a versées comme caution de la société MJM MOTOS Il conclut à la réformation du jugement déféré.

Dans ses conclusions du 7 juin 2005, la Banque Populaire Loire et Lyonnais expose :- que Monsieur Marcel X... gérant de la société MJM MOTOS par deux actes distincts s'est d'abord porté caution en garantie de tous les engagements de la société (20 août 1988) puis d'un prêt fait à la société pour l'acquisition d'un pas de porte (25 juin 1997)- qu'elle- même s'est portée caution de la société à l'égard de la société PINAGGIO et de la société Kawasaki, ce qui l'a amenée à régler pour la première la somme de 10. 953, 27 euros et pour la seconde celle de 21. 843, 87 euros, que Monsieur Marcel X... doit lui rembourser comme caution- que la banque n'avait pas à s'immiscer dans le prêt consenti à la société ni à se substituer au gérant dans l'opportunité du prêt, de sorte que le gérant ne peut se plaindre du caractère abusif du prêt qu'il a sollicité- que Monsieur Marcel X... ne prouve pas un manquement de la banque, alors même que le bilan de 1997 annonçait un bénéfice net supérieur à celui de 1996 et que le prêt devait permettre d'accroître l'activité de la société- qu'il n'y avait donc aucun péril à accorder ce prêt- que le cautionnement était limité à moins de la moitié du prêt- que pour se soustraire la caution doit prouver que la banque détenait des informations qu'elles- mêmes auraient ignorées, ce qu'elle ne fait pas- que la caution ne peut se plaindre 6 ans après avoir donné le cautionnement d'une disproportion par rapport à ses biens et à ses revenus, d'autant qu'il connaissait mieux que la banque sa situation financière- que si l'article L. 621- 48 du Code de Commerce ne permet pas d'agir contre la caution tant que la liquidation judiciaire n'est pas prononcée, il n'empêche pas de lui adresser une mise en demeure et à supposer l'action introduite, de suspendre l'action jusqu'à ce que la liquidation judiciaire ait eu lieu- qu'il n'y a pas eu de soutien abusif dans la mesure où les bilans produits étaient très favorables et où les découverts autorisés étaient justifiés par les résultats obtenus dans l'entreprise- qu'il n'est pas démontré qu'il y ait eu une situation irrémédiablement compromise- que les frais financiers ne dépassaient pas les capacités de la société et résultaient en tout cas des choix de gestion du gérant, dont il ne peut se plaindre- que s'agissant de ce que la banque a payé comme caution, elle les a déclarés régulièrement comme ses créances- que Monsieur Marcel X... est tenu de garantir la banque en sa qualité de caution- qu'elle a limité sa demande à 30. 489, 80 euros outre intérêts contractuels pour ne pas dépasser l'engagement pris Elle conclut à la confirmation des deux jugements et sollicite la condamnation de Monsieur Marcel X... à lui payer la somme de 2000 euros pour son appel abusif et dilatoire à titre de dommages et intérêts.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I / Sur la demande de la Banque Populaire Loire et Lyonnais formée à l'encontre de Monsieur Marcel X... en qualité de caution :

Attendu que pour s'opposer à la demande de la Banque Populaire Loire et Lyonnais qui lui réclame en sa qualité de caution le paiement d'une somme de 22. 867, 35 euros au titre d'un prêt consenti qu'elle a à la société MJM MOTOS ainsi que de celles de 10. 854, 36 euros et de 19. 635, 44 euros pour les sommes qu'elle- même a dû acquitter en exécution de l'engagement de caution qu'elle avait pris envers la société MJM MOTOS, Monsieur Marcel X... soulève les moyens suivants :
1o / Sur la disproportion du prêt accordé par la Banque Populaire Loire et Lyonnais à la société MJM MOTOS par acte du 26 juin 1997 d'un montant de 350. 000 francs (53. 353, 66 euros) et sur le soutien abusif de la banque :
Attendu qu'il n'appartient pas à la banque, qui accorde un crédit à une société de se substituer au dirigeant de la société pour apprécier l'opportunité de ce crédit ni la rentabilité qu'il en attend, ce qui reviendrait à ce qu'elle puisse s'immiscer dans les affaires de la société, ce qui n'est pas son rôle et pourrait la conduire à être tenue au titre de la gérance de fait ;
Attendu qu'en l'espèce, s'agissant de devoir de prudence et de diligence auquel elle devait se conformer, la banque, qui avait en sa possession, au jour où elle a consenti le prêt de 350. 000 francs à la société MJM MOTOS, le bilan de 1997, qui accusait un bénéfice net supérieur à celui de 1996, et qui constatait que ce bénéfice ne contredisait pas l'évolution favorable du chiffre d'affaires, qui passait de 20 millions à 21 millions de francs d'une année sur l'autre, n'avait aucune raison de ne pas accorder ce prêt, la société ne se trouvant manifestement pas dans une situation irrémédiablement compromise- qu'il n'est pas inutile de souligner à cet égard que la société ne s'est trouvée en état de cessation de ses paiements que le 14 février 2001, ce que la banque ne pouvait envisager à la date du crédit ;
Attendu que l'acquisition au moyen de ce prêt d'un pas de porte ne constituait pas un projet ruineux pour la société qui au contraire lui permettait d'accroître ses possibilités de développement et d'améliorer ses résultats ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'est pas démontré que la banque ait commis un quelconque manquement à son devoir de prudence et de diligence à l'égard de son client- qu'il n'y avait aucune disproportion entre la situation de la société et l'engagement financier qu'elle société prenait- que l'on en peut donc pas retenir le soutien abusif- que ce moyen dépourvu de tout fondement doit être ainsi écarté ;
2 / Sur la disproportion de l'engagement de caution :
Attendu que la caution, qui n'a jamais prétendu ni démontré, que la banque avait eu sur ses revenus, son patrimoine ainsi que sur ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles, en l'état escompté de l'opération entreprise par la société, à savoir l'ouverture d'un nouveau magasin des informations que elle- même en tant que caution auraient ignorées, n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de la banque- que quoi qu'il en soit, étant dirigeant de la société MJM MOTOS pour laquelle il s'est porté caution, Monsieur Marcel X... était particulièrement à même de connaître sa situation pécuniaire et patrimoniale et disposait des informations nécessaires sur les capacités de la société à rembourser le crédit au moment où il souscrivait cette garantie- qu'il est particulièrement malvenu à invoquer une disproportion entre ses facultés personnelles et l'étendue de son engagement six années après l'avoir pris, alors qu'il n'a jamais élevé la moindre critique avant qu'une réclamation ne lui soit faîte ;
Attendu que Monsieur Marcel X... n'apporte aux débats aucun élément caractérisant cette disproportion- qu'en conséquence le moyen qu'il soulève dépourvu de fondement doit être écarté ;
3 / Sur la suspension des actions contre la caution :
Attendu que si l'article L. 621- 48 du Code de Commerce prévoit que le jugement d'ouverture de redressement judiciaire suspend jusqu'au jugement prononçant la liquidation toute action contre les cautions personnelles, personnes physiques, il n'interdit pas pour autant de mettre en demeure la caution de payer- qu'en adressant le 5 juin 2001 un courrier en ce sens à Monsieur Marcel X..., alors que la liquidation judiciaire de la société MJM MOTOS n'intervenait que le 25 juillet 2001, la banque n'a pas violé ce texte- que l'assignation contre Monsieur Marcel X... en sa qualité de caution date du 6 décembre 2002 ;
Attendu que ce moyen soulevé sans fondement doit être écarté ;
4 / Sur le paiement par la banque des sommes dues par la société MJM MOTOS en sa qualité de caution de cette société :
Attendu que la Banque Populaire Loire et Lyonnais justifie avoir payé à la société PIAGGIO la somme de 10. 854, 36 euros et à la société KAWASAKI celle de 21. 843, 87 euros au titre de l'engagement de caution qu'elle avait pris de garantir la société MJM MOTOS à l'égard de ces deux fournisseurs- qu'il n'est pas contesté que la banque a régulièrement déclaré sa créance à la procédure collective de la société MJM MOTOS ;
En conclusion :
Attendu que la Banque Populaire Loire et Lyonnais est donc bien fondée à réclamer à Monsieur Marcel X... en exécution des engagements de caution qu'il a pris envers elle, d'une part le paiement de la somme de 22. 867, 35 euros correspondant au solde du prêt garanti par l'acte de cautionnement du 25 juin 1997 outre intérêts au taux contractuel de 5, 90 % à compter du 11 juin 2001, date de la réception du courrier de mise en demeure et d'autre part le paiement de la somme de 10. 854, 36 euros que la banque a réglé comme caution à la société PIAGGIO, majorée des intérêts au taux contractuel à compter du 11 juin 2001, ainsi que de celle de 19. 635, 44 euros que la banque a réglé comme caution le 25 juin 2002 à la société KAWASAKI, majorée des intérêts au taux contractuel depuis cette date ;
Attendu qu'en conséquence Monsieur Marcel X... doit être condamné à payer lesdites sommes assorties des intérêts au taux contractuel à la Banque Populaire Loire et Lyonnais, confirmant ainsi les jugements déférés des 22 septembre 2004 et 9 février 2005 qui ont prononcé ces condamnations ;

II / Sur la demande de la Banque Populaire Loire et Lyonnais en dommages et intérêts :

Attendu qu'à supposer abusif l'appel interjeté par Monsieur Marcel X... des jugements des 22 septembre 2004, et 9 février 2005 la Banque Populaire Loire et Lyonnais ne justifie pas pour autant qu'elle a subi du fait de ces appels un préjudice indemnisable, qui serait distinct des intérêts au taux conventionnel auquel elle a droit- que sa demande en dommages et intérêts n'est ainsi pas fondée- qu'elle doit donc en être déboutée ;

III / Sur les autres demandes :

Attendu qu'il serait inéquitable que la Banque Populaire Loire et Lyonnais supporte la charge de ses frais irrépétibles d'appel et qu'il y a lieu ainsi de lui allouer une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, qui s'ajoutera à celle accordée par le premier juge ;
Attendu que Monsieur Marcel X..., qui succombe, doit être condamné aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme les jugements déférés rendus les 22 septembre 2004 et 9 février 2005 en toutes leurs dispositions,

Y ajoutant,
Déclare la Banque Populaire Loire et Lyonnais mal fondée dans sa demande de dommages et intérêts et l'en déboute,
Condamne Monsieur Marcel X... à payer à la Banque Populaire Loire et Lyonnais la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que les dépens qui seront recouvrés par la SCP BAUFUME- SOURBE, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 04/06642
Date de la décision : 30/03/2006
Type d'affaire : Civile

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Période d'observation - Créanciers - Arrêt des poursuites individuelles - Action contre une caution personnelle personne physique - / JDF

L'article L. 621-48 du code de commerce, qui prévoit que le jugement d'ouverture du redressement judiciaire suspend jusqu'au jugement prononçant la liquidation toute action contre les cautions personnelles personnes physiques, n'interdit pas pour autant de mettre en demeure la caution de payer


Références :

Code de commerce, article L 621-48

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Montbrison, 22 septembre 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2006-03-30;04.06642 ?
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