AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR R.G : 04/01971 ASSOCIATION RÉGIONALE RHÈNE-ALPES DES INFIRMES MOTEURS CÉRÉBRAUX (ARIMC) C/ X... APPEL D'UNE DÉCISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 05 Février 2004 RG : 02/05337 COUR D'APPEL DE LYON CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 28 MARS 2006 APPELANTE : ASSOCIATION RÉGIONALE RHÈNE-ALPES DES INFIRMES MOTEURS CÉRÉBRAUX (ARIMC) 20, bld Balmont 69009 LYON représentée par Maître Laurence JUNOD-FANGET, avocat au barreau de Lyon substituée par Maître ATTIA, avocat au barreau de Lyon INTIME : Monsieur Flavien X... 2 C chemin du Raimon 69280 STE CONSORCE comparant en personne, assisté de Maître SOREL, avocat au barreau de Lyon PARTIES CONVOQUÉES LE : 18 avril 2005 DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 10 novembre 2005 Présidée par Monsieur Dominique DEFRASNE, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Madame Yolène Y..., Greffier COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Didier JOLY, Président
M. Dominique DEFRASNE, Conseiller Madame Aude LEFEBVRE, Conseiller ARRÊT : CONTRADICTOIRE Prononcé publiquement le 28 mars 2006 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ; Signé par Monsieur Didier JOLY, Président et par Monsieur Julien Z..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Statuant sur l'appel formé par l'association ARIMC d'un jugement du Conseil de Prud'Hommes de Lyon (section encadrement ), en date du 5 février 2004, qui a : - condamné l'ARIMC à payer à Monsieur Flavien X... les sommes suivantes :
* 4 571,28 ç au titre de la restitution de l'avantage en nature logement pour la période du 1er janvier 2000 au 31 août 2001,
* 2 801,20 ç (congés payés afférents compris) au titre du paiement des semaines d'astreinte effectuées et des heures passées sur le lieu de travail lors des repos hebdomadaires,
* 3 064,74 ç (congés payés afférents compris) au titre du paiement des heures de délégation hors temps de travail sur convocation de l'employeur,
* 200 ç à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
* 500 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; - dit que les bulletins de salaire concernés devront être mis en conformité avant le 2 mai 2004, sous astreinte de 15 ç par jour de retard ; - dit que les intérêts légaux courront à compter de la date de la saisine ; - débouté Monsieur Flavien X... du surplus ; -
condamné l'ARIMC aux dépens ;
Vu les écritures et observations orales à la barre, le 10 novembre 2005, de L'ASSOCIATION RÉGIONALE RHÈNE-ALPES DES INFIRMES MOTEURS CÉRÉBRAUX (ARIMC), appelante, qui demande à la Cour : - d'infirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes et de débouter Monsieur Fabien X... de ses prétentions ; - de condamner Monsieur Flavien X... à lui rembourser la somme de 10 437,22 ç et à tout le moins celle de 9 510,42 ç ; - de condamner Monsieur X... au paiement de 1 000 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens ;
Vu les écritures et observations orales à la barre, le 10 novembre 2005, de Monsieur Flavien X..., intimé, qui demande de son côté à la Cour : - de confirmer le jugement entrepris sur l'avantage au logement, les astreintes et les heures de délégation ; - de dire que depuis mai 2001, il bénéficiait du statut de cadre classe 2 niveau I et non pas classe 2 niveau II ; - de condamner en conséquence l'ARIMC à lui payer :
* 6 673,92 ç à titre de rappel de salaire,
* 667,39 ç à titre de congés payés afférents,
* 208 ç à titre de rappel d'avantage en nature,
* 1 937,52 ç à titre de rappel d'indemnité de départ à la retraite ; - de condamner en outre l'ARIMC à lui payer :
* 866,13 ç à titre de solde de congés annuels supplémentaires de novembre 2000 à juin 2004,
* 332,00 ç à titre de solde d'avantage en nature au logement pour le mois de juin 2004,
* 1 080 ç au titre du solde sur indemnité de départ à la retraite,
* 1 033 ç à titre de trop payé d'impôt sur le revenu par la faute de l'employeur,
* 1 000 ç à titre de dommages et intérêts complémentaires,
* 3 000 ç en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, outre les dépens ;
MOTIFS DE LA COUR
Attendu que Monsieur Flavien X... a été embauché par l'ARIMC, suivant contrat à durée indéterminée à compter du 13 janvier 1975, en qualité d'éducateur spécialisé en internat, coefficient 332 de la Convention Collective des établissements des services pour personnes inadaptées et handicapées ;
Que par avenant du 1er septembre 1995, il a été promu aux fonctions de chef de service éducatif avec le statut cadre et le bénéfice d'un logement de fonction ;
Que le 1er décembre 1999, il a adhéré à une convention de pré-retraite progressive impliquant un travail à mi-temps ;
Que pendant plus d'une année, il a cessé d'occuper son logement de fonction ;
Qu'il s'est plaint alors que l'avantage en nature correspondant était toujours déduit en net sur ses bulletins de salaire et qu'il a réclamé à plusieurs reprises à l'employeur une contrepartie pour la privation du logement de fonction ;
Que le 15 décembre 2002, il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de plusieurs éléments de rémunération : avantage en nature logement et indemnité d'astreinte prévus par la Convention Collective ainsi que le paiement d'heures de délégation ;
Que devant la Cour, il réclame en outre le paiement de congés annuels supplémentaires conventionnels et revendique la qualification conventionnelle de cadre classe 1 niveau II avec toutes conséquences de droit sur les salaires, les avantages en nature et l'indemnité due à l'occasion de son départ à la retraite en 2004 ;
Qu'il sollicite également des dommages et intérêts motivés par le comportement fautif de son employeur ;
Que l'ARIMC s'oppose à l'intégralité de ces prétentions ;
1 - Sur le logement de fonction
Attendu que selon les dispositions de l'article 9 de la Convention Collective de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, les chefs de service éducatif en internat sont considérés comme devant être logé par l'employeur et bénéficient à ce titre de la gratuité du logement ;
Que s'il est constant que Monsieur X... a accepté en décembre 1999 à la demande de son employeur de quitter son logement de fonction pour permettre l'hébergement d'une famille avec enfants, il n'est pas démontré en revanche que le salarié a renoncé à cet avantage conventionnel compris dans sa rémunération ;
Que l'ARIMC, entre janvier 2000 et septembre 2001 a néanmoins continué de déduire la somme correspondante du salaire net comme si Monsieur X... avait effectivement bénéficié du logement de fonction ;
Que le Conseil de Prud'hommes a justement considéré ces retenues comme étant injustifiées et alloué au salarié le remboursement sur la période considérée de 20 mois de la somme totale de 4 571,28 ç ;
2 - Sur les astreintes
Attendu que l'article 16 de l'avenant conventionnel no265 du 21 avril 1999, dont l'application est requise, prévoit que le directeur ou le cadre ayant capacité à exercer cette responsabilité bénéficie d'une astreinte fixée à raison de 90 points par semaine complète d'astreinte y compris le dimanche, à 12 points par journée d'astreinte en cas de semaine incomplète et que cette indemnité peut en tout ou partie être rémunérée sous la forme d'un logement à titre gratuit ;
Que le même texte précise que les autres cadres logés à titre gratuit en application des dispositions conventionnelles avant la date
d'application de l'avenant en conserve le bénéfice à titre individuel et que le présent article ne peut remettre en cause les avantages acquis au titre individuel sous réserves de non cumul ;
Qu'il résulte de ces dispositions que Monsieur X... qui bénéficiait d'un logement de fonction depuis le 1er septembre 1995 ne peut se voir opposer une compensation entre cet avantage acquis et l'indemnisation des astreintes ;
Que le salarié produit un décompte détaillé des astreintes effectuées par lui entre le mois d'octobre 2001 et le mois d'octobre 2002, l'existence de ces astreintes n'étant pas formellement contestée par l'employeur ;
Que sur la base du point applicable pendant cette période, il convient comme les premiers juges de lui allouer la somme de 2 546,54 ç en rémunération des astreintes outre 254,66 ç au titre de l'indemnité de congés payés afférents ;
3 - Sur les heures de délégation
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L412-20 du Code du travail que les heures utilisées par le délégué syndical pour participer en dehors du temps de travail à des réunions qui ont lieu à l'initiative du chef d'entreprise ne sont pas imputables sur le crédit d'heures de délégation et doivent être rémunérées séparément ; Que Monsieur X... qui était délégué syndical dans l'entreprise réclame le paiement de 113 heures de cette nature en produisant un récapitulatif détaillé et deux courriers adressés à l'ARIMC les 5 mars et 18 juillet 2001 pour obtenir un règlement ;
Qu'il affirme avoir remis régulièrement des relevés d'heures à son supérieur hiérarchique qui ne les a pas contestés ;
Que l'ARIMC, aujourd'hui, sans contredire formellement cette
affirmation soutient que la preuve n'est pas rapportée que les heures ont été effectuées en dehors du temps de travail ;
Qu'en réalité, les pièces et les explications fournies par le salarié permettent de faire droit à sa demande en paiement des heures de travail non rémunérées à hauteur de 2 814,38 ç, outre 250,39 ç au titre des congés payés afférents ;
Que la décision du Conseil de Prud'hommes sera donc également confirmée de ce chef ;
4 - Sur les congés annuels supplémentaires
Attendu que Monsieur X... se prévaut de l'article 6 de la Convention Collective qui prévoit que les personnels éducatifs, en sus des congés payés annuels accordés selon les dispositions de l'article 22 de la Convention nationale ont droit au bénéfice de 6 jours de congés consécutifs, non compris dans les jours fériés et le repos hebdomadaire au cours de chacun des trois trimestres qui ne comprennent pas le congé annuel et pris au mieux des intérêts du service ;
Qu'il explique que lorsque l'établissement fermait une partie de la semaine au titre d'une prise de congés trimestriels pour le personnel il s'est trouvé à plusieurs reprises du fait de son emploi à temps partiel dans une situation où il lui était décompté des jours de congés supplémentaires alors qu'il avait déjà effectué son temps de travail hebdomadaire ;
Attendu que l'article 22 de la Convention Collective fixe les congés payés des salariés en jours ouvrables et non pas en jours ouvrés ;
Attendu que l'article 22 de la Convention Collective fixe les congés payés des salariés en jours ouvrables et non pas en jours ouvrés ;
Qu'il en résulte que le nombre de congés pris par le salarié à temps partiel doit être calculé sans avoir à retenir comme seuls jours de congés les jours où il aurait dû effectivement travailler ;
Que dans ces conditions, Monsieur X... ne peut faire grief à l'ARIMC de lui avoir décompté des jours de congés pendant la période où il se trouvait effectivement en congés avec l'ensemble du personnel et que sa demande en paiement de jours de congés supplémentaires doit être rejetée ;
5 - Sur la classification
Attendu que Monsieur X... qui était rémunéré depuis 1995 selon la qualification cadre de classe 2et de niveau II revendique celle de cadre classe 2 niveau I, avec toutes conséquences de droit, en application de l'avenant no265 du 21 avril 1999 applicable depuis mai 2001 ;
Que cet avenant, intégré dans l'annexe 6 de la Convention Collective, désigne les cadres de classe 2 par les chefs de service, directeurs adjoints, directeurs techniques etc... et prévoit qu'ils sont classés en trois catégories en fonction de leur niveau de qualification I, II, III, ces niveaux de qualification correspondant à ceux définis par la loi relative aux enseignements technologiques du 16 juillet 1971 et aux diplômes reconnus par la CPNE .
Que le niveau I se réfère aux formations grandes écoles, au troisième cycle universitaire, notamment, DESS de psychologie, de droit social etc... ;
Qu'il est constant en l'espèce que Monsieur X... a obtenu le diplôme qualifiant d'études supérieures spécialisées en psychologie pratique option clinique le 3 juin 1985 ;
Que l'ARIMC estime qu'elle n'avait pas à tenir compte de ce diplôme pour la classification du salarié dès lors qu'il n'était pas une condition d'exercice du métier et que sa détention n'était pas posée comme condition du recrutement ;
Que cette interprétation qui ajoute aux dispositions conventionnelles
des exigences qu'elle ne comporte pas ne peut être retenue ;
Qu'en conséquence, Monsieur X... est en droit de réclamer à compter du mois de mai 2001 le bénéfice du niveau de qualification I avec la rémunération correspondante en fonction de son ancienneté ;
Attendu que le salarié a calculé dans un décompte très détaillé l'incidence de sa requalification sur ses salaires entre mai 2001 et juin 2004, sur l'avantage en nature logement entre janvier 2003 et mai 2004 et sur le montant de l'indemnité de départ à la retraite en se référant aux dispositions de la Convention Collective et de l'arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale ;
Qu'il a aussi calculé un rappel d'avantage en nature pour le mois de juin 2004 en fonction des rémunérations perçues pendant cette période et un complément d'indemnité de départ à la retraite en fonction du montant réel des avantages en nature ;
Que ces calculs sont argumentés et justifiés, de sorte qu'il convient d'allouer à Monsieur X... :
[* 6 673,92 ç à titre de rappel de salaire,
*] 667,39 ç à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,
[* 531 ç à titre de rappel d'avantage en nature logement,
*] 3 017,52 ç à titre de rappel d'indemnité de départ à la retraite ; 6 - Sur les autres demandes du salarié
Attendu que Monsieur X... réclame le remboursement d'un trop payé d'impôt en raison du versement par l'ARIMC en exécution du jugement d'une somme importante ainsi que le paiement de dommages et intérêts
complémentaires motivés par la résistance abusive de l'employeur ;
Que la preuve n'est pas rapportée par l'intéressé de l'augmentation invoquée de sa charge d'impôts ni de problèmes de trésorerie ;
Que plus généralement il n'est pas démontré l'existence d'un préjudice distinct du retard dans le paiement des rémunérations dues et que ces demandes ne peuvent donc prospérer ;
Attendu que l'ARIMC qui succombe supportera les dépens ;
Qu'il convient d'allouer à Monsieur X... en cause d'appel la somme de 2 500 ç en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS
Dit l'appel recevable ;
Confirme le jugement entrepris sauf sur les dommages et intérêts en réparation du préjudice moral ;
Statuant à nouveau de ce chef :
Déboute Monsieur Flavien X... de sa demande en paiement de dommages et intérêts complémentaires ;
Y ajoutant :
Dit que Monsieur Flavien X... pouvait prétendre à compter du mois de mai 2001 au statut de cadre classe 2 niveau I de la Convention Collective des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées (annexe 6 relatif aux cadres) ;
Condamne l'ASSOCIATION RÉGIONALE RHÈNE-ALPES DES INFIRMES MOTEURS CÉRÉBRAUX (ARIMC) à payer à Monsieur Flavien X... : - six mille six cent soixante-treize euros quatre-vingt-douze centimes (6 673,92 ç) à titre de rappel de salaire ; - six cent soixante-sept euros trente-neuf centimes (667,39 ç) à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférente ; - sept cent quarante euros (740 ç) à titre de rappel d'avantage en nature ; - trois mille dix-sept euros cinquante-deux centimes (3 017,52 ç) à titre de rappel d'indemnité de
départ à la retraite ;
Déboute Monsieur Flavien X... du surplus ;
Condamne l'ARIMC à payer à Monsieur Flavien X... la somme de deux mille cinq cents euros (2 500 ç) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Condamne l'ARIMC aux dépens d'appel.
LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT
J. Z...
D. JOLY