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09/03/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949154

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre civile 3, 09 mars 2006, JURITEXT000006949154


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 09 Mars 2006

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de BOURG EN BRESSE du 27 février 2004 - No rôle : 2002/743 No R.G. :

04/03075

Nature du recours : Appel

APPELANTE : La Société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, SAS 24 rue de la Montat 42100 SAINT-ETIENNE représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour assistée de Me FERRET, avocat au barreau de MONTBRISON

INTIMEE : La SCP BELAT et DESPRAT, mandataire judiciaire, pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la

société TRANAFIS SA nommé à cette fonction suivant jugement du Tribunal de Commerce de BOURG E...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 09 Mars 2006

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de BOURG EN BRESSE du 27 février 2004 - No rôle : 2002/743 No R.G. :

04/03075

Nature du recours : Appel

APPELANTE : La Société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, SAS 24 rue de la Montat 42100 SAINT-ETIENNE représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour assistée de Me FERRET, avocat au barreau de MONTBRISON

INTIMEE : La SCP BELAT et DESPRAT, mandataire judiciaire, pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANAFIS SA nommé à cette fonction suivant jugement du Tribunal de Commerce de BOURG EN BRESSE du 24 septembre 2004 22, rue du Cordier BP 107 01003 BOURG-EN-BRESSE CEDEX représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assistée de Me VENUTTI, avocat au barreau de BOURG-EN-BRESSE Instruction clôturée le 04 Octobre 2005 Audience publique du 18 Janvier 2006 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Monsieur ROBERT, Président, Monsieur SANTELLI, Conseiller Madame CLOZEL-TRUCHE, Conseiller DEBATS : à l'audience publique du 18 janvier 2006 GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Mademoiselle X..., Greffier, ARRET :

CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 9 mars 2006, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile signé par Monsieur ROBERT, Président, et par

Mademoiselle X..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. EXPOSE DU LITIGE - PROCEDURE - PRETENTIONS DES PARTIES

La société TRANAFIS a été chargée entre mars et juillet 2000 par la société REZZOLI, à laquelle elle facture ses prestations, d'effectuer des transports de produits frais à destination des magasins CASINO.

Par jugement du 13 juillet 2000, le Tribunal de Commerce de MARSEILLE a prononcé le redressement judiciaire de la société REZZOLI.

La société TRANAFIS a déclaré le 20 juillet 2000 sa créance auprès du représentant des créanciers de la société REZZOLI pour un montant de 94.223,81 euros (618.067,05 francs), comprenant à concurrence de 12.355,03 euros (81.043,66 francs TTC) les livraisons précitées.

La créance de la société TRANAFIS a été définitivement admise au passif de la société REZZOLI le 14 novembre 2001 à hauteur de 19.789,88 euros (129.813,12 francs).

N'étant pas réglée de ses livraisons, la société TRANAFIS en application de l'article L.132-8 du Code de Commerce a réclamé à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE le règlement des sommes qui lui étaient dues.

Par acte du 1er février 2001, la société TRANAFIS a fait citer la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE en référé devant le Président du Tribunal de Commerce de BOURG-EN-BRESSE, lequel rendait une ordonnance le 19 juin 2001 la condamnant à payer à la demanderesse à titre de provision la somme de 12.355,03 euros (81.043,66 francs outre intérêts, dont elle s'acquittait, tout en relevant appel.

La Cour devait réduire la condamnation à la somme de 10.832,27 euros. Par ordonnance du 10 décembre 2001 le Juge de l'Exécution du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE a autorisé la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à pratiquer une saisie conservatoire entre

les mains de la société TRANAFIS.

Par acte du 15 janvier 2002, la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a assigné la société TRANAFIS devant le Tribunal de Commerce de BOURG-EN-BRESSE pour qu'elle soit condamnée à lui rembourser la somme de 12.355,03 euros, outre intérêts à compter du 2 juillet 2001 demande que le tribunal par jugement du 27 février 2004 a rejetée en la condamnant au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Appel a été relevé par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de cette décision le 7 mai 2004.

Le 24 septembre 2004, le Tribunal de Commerce de BOURG-EN-BRESSE a prononcé la liquidation judiciaire de la société TRANAFIS.

La SCP BELAT ET DESPRAT a été désignée comme mandataire liquidateur. Par exploit du 10 janvier 2005, la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a fait citer la SCP BELAT ET DESPRAT en cette qualité pour qu'il comparaisse devant la Cour par ministère d'Avoué constitué.

La SCP BELAT ET DESPRAT ès qualités a constitué la SCP JUNILLON etamp; WICKY, avoués, précédemment constituée pour la société TRANAFIS.

Dans ses conclusions du 24 août 2004, la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE soutient :

- que la production par la société TRANAFIS de sa créance à la procédure collective de la société REZZOLI au titre du transport est irrégulière en ce qu'elle n'a pas justifié de sa créance, qui correspondait à un solde résiduel du compte courant ayant existé entre la société TRANAFIS et la société REZZOLI

- qu'en outre la société TRANAFIS, n'ayant pas répondu au représentant des créanciers de la société REZZOLI qui contestait sa créance et qui proposait de la rejeter, n'était plus en droit de la

discuter devant le juge-commissaire, de sorte que cette créance a été écartée

- que la société TRANAFIS s'est reconnue débitrice envers la société REZZOLI à raison d'opérations postérieures à la procédure collective de la société REZZOLI, de sorte que le compte courant établi avec la société TRANAFIS ne peut établir une créance antérieure à l'ouverture de la procédure collective de la société REZZOLI

- que n'ayant pas de créance sur la société REZZOLI, la société TRANAFIS ne peut plus rien réclamer au destinataire des marchandises au titre de l'article L. 132-8

- que si elle paie le transporteur elle doit être subrogée dans les droits de la société TRANAFIS sur la société REZZOLI, ce qui revient à dire qu'elle doit bénéficier des versements promis par la société REZZOLI à ses créanciers en exécution de son plan de redressement

- que la société TRANAFIS, ayant laissé se perdre son droit de créance sur la société REZZOLI à raison d'une production irrégulière, a ainsi porté atteinte au droit de subrogation de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE - qu'elle se trouve donc, comme une caution, déchargée de ses obligations, à l'égard d'un créancier qui par son fait ne permet plus de faire jouer en sa faveur la subrogation

- que la société TRANAFIS, retirant les sommes qui lui étaient dues au titre de l'article L. 132-8 du montant de sa production définitive, a contribué à l'extinction des droits du destinataire.

Elle estime que c'est donc à tort qu'elle a acquitté, au vu d'une décision prise en référé, la somme de 12.567,95 euros.

Elle conteste la validité de la lettre de voiture, qui ne comportait pas l'énoncé d'un prix, ce qui lui interdit de vérifier le coût exact du transport. elle conclut que le contrat ne s'est pas formé.

Elle sollicite la réformation du jugement déféré par la condamnation de la société TRANAFIS à lui rembourser la somme de 12.567,95 euros. Dans ses conclusions du 29 avril 2005, la SCP BELAT ET DESPRAT, mandataire liquidateur de la société TRANAFIS, soutient :

- que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE est hors débat, lorsqu'elle prétend que la déclaration de créances qu'elle a faite auprès de la procédure collective de la société REZZOLI est irrégulière

- que de toute façon sa créance a été admise définitivement au passif de la société REZZOLI

- que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE n'a pas contesté par la voie de la tierce opposition cette créance dans le délai de 8 jours du dépôt de l'état des créances de la société REZZOLI

qu'elle est de par l'article L.132-8 du Code de Commerce créancière de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, le transporteur bénéficiant d'une action personnelle et directe à l'encontre du destinataire, sans qu'il soit obligé de déclarer sa créance à la procédure collective du donneur d'ordre, ce qu'elle a fait cependant

- que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE ne discute pas que le transport ait été effectué et que la somme réclamée corresponde au transport

Elle conclut à la confirmation du jugement déféré en y ajoutant la condamnation de la société intimée à lui payer la somme de 300 euros pour procédure abusive. MOTIFS DE LA DÉCISION

I/ Sur la demande de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE en remboursement de la somme qu'elle a réglée à la société TRANAFIS :

Attendu que si la lettre de voiture forme en vertu de l'article 132-8 du code de commerce un contrat entre l'expéditeur, le voiturier et le

destinataire ou entre l'expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier, l'absence sur l'écrit remis au voiturier par l'expéditeur de la mention du prix du transport, prévue par l'article L132-9 du code de commerce, ne lui fait pas perdre de ce seul fait ses effets de lettre de voiture, dès lors qu'elle n'est pas prescrite à peine de nullité et qu'en l'espèce l'expéditeur comme le transporteur ne contestent pas qu'un prix avait été convenu pour ce transport - que l'intimée ne peut donc prétendre que le contrat de transport ne serait pas intervenu - que le moyen soulevé par elle selon lequel le contrat ne lui serait ainsi pas opposable doit être écarté ;

Attendu que l'article L. 132-8 du Code de Commerce dispose que le voiturier a une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur ou du destinataire lesquels sont garants du prix du transport ;

Attendu que le transporteur n'est pas tenu d'avoir à déclarer sa créance au redressement judiciaire de l'expéditeur pour agir au titre de l'action directe contre le destinataire - que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE ne peut donc faire grief à la société TRANAFIS une prétendue irrégularité dans la procédure d'admission de sa créance au redressement judiciaire de l'expéditeur la société REZZOLI pour n'avoir pas répondu au représentant des créanciers qui contestait cette créance, ce qui la priverait de la possibilité d'être subrogée dans les droits de la société REZZOLI ;

Attendu en effet que l'action directe n'est pas conditionnée au droit à subrogation qu'aurait le destinataire contre l'expéditeur, mais s'exerce de manière autonome - que le paiement auquel ce destinataire est tenu ne lui donne en effet aucun droit à ce titre - que le débat instauré à cet égard par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE est par conséquent étranger au présent litige - que le fait que la

créance de la société TRANAFIS a été définitivement admise par ordonnance du juge-commissaire du 14 novembre 2001 au passif de la société REZZOLI pour un montant de 20.385,66 euros (133.721,18 francs) est pour l'appelante sans portée - qu'elle n'a aucun titre à contester la validité de cette admission ;

Attendu que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE ne peut se prévaloir de l'article 2037 du Code Civil que seul peut invoquer à son profit la caution et qui ne peut être étendue lors de son champ d'application ;

Attendu que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE ne discute pas que l'opération de transport effectuée par la société TRANAFIS a été faite à son bénéfice ni que la somme réclamée correspond à ce transport - que l'appelante n'est donc pas fondée à solliciter la restitution de la somme qu'elle a été condamnée à verser à la société TRANAFIS au titre de l'action directe de l'article L132-8 - que la société TRANAFIS étant en liquidation judiciaire, aucune demande en paiement ne pouvait être dirigée contre elle ;

Attendu qu'il convient de confirmer en conséquence le jugement déféré, qui a débouté la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de ses demandes ;

II/ Sur la demande de la SCP BELAT ET DESPRAT ès qualités de mandataire liquidateur de la société TRANAFIS en dommages et intérêts :

Attendu que la SCP BELAT ET DESPRAT ès qualités ne justifie pas d'un préjudice indemnisable qui résulterait de l'abus de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE d'agir en remboursement de ce qu'elle a versé à la société TRANAFIS - qu'en conséquence elle n'est pas fondée dans sa demande en dommages et intérêts et doit en être déboutée ;

III/ Sur les autres demandes :

Attendu qu'il serait inéquitable que la SCP BELAT ET DESPRAT ès qualités supporte la charge de ses frais irrépétibles d'appel et qu'il y a lieu ainsi de lui allouer une somme de 1800 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, qui s'ajoutera à celle accordée par le premier juge à la société TRANAFIS ;

Attendu que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE doit être condamnée aux dépens ; PAR CES MOTIFS LA COUR,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Y ajoutant,

Déclare la SCP BELAT ET DESPRAT ès qualités de mandataire liquidateur de la société TRANAFIS mal fondée dans sa demande en dommages et intérêts et l'en déboute,

Condamne la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer à la SCP BELAT ET DESPRAT la somme de 1800 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et à supporter les dépens qui seront recouvrés par la SCP JUNILLON etamp; WICKY, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,

M.P. X...

H. ROBERT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949154
Date de la décision : 09/03/2006
Type d'affaire : Civile

Analyses

TRANSPORTS TERRESTRES - Marchandises - Contrat de transport - Lettre de voiture

En application de l'article L. 132-8 du code de commerce, le transporteur n'est pas tenu de déclarer sa créance au redressement judiciaire de l'expéditeur pour agir au titre de l'action directe contre le destinataire. En conséquence, le destinataire ne peut lui reprocher une prétendue irrégularité dans la procédure d'admission de sa créance ni invoquer le bénéfice de l'article 2037 du code civil dont seule la caution peut se prévaloir


Références :

Code civil, article 2037
code de commerce, article L. 132-8

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2006-03-09;juritext000006949154 ?
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