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09/03/2006 | FRANCE | N°2001/3439

France | France, Cour d'appel de Lyon, 09 mars 2006, 2001/3439


COUR D'APPEL DE LYON

SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 09 MARS 2006

Décision déférée : Décision du Tribunal de Grande Instance de SAINT ETIENNE du 18 mai 2004 - (R.G. : 2001/3439) No R.G. : 04/03931

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en réparation des dommages causés par des véhicules terrestres à moteur APPELANTE :

MACIF - Mutuelle Assurance des Commerçants et industriels de France Siège social : 79055 NIORT Centre de gestion : 42165 ANDREZIEUX BOUTHEON représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, Avoués assistée par Maître LARCHER, Avocat,

(SAINT-ETIENNE) INTIMES : Madame X...
Y..., veuve Z..., agissant tant en son nom personne...

COUR D'APPEL DE LYON

SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 09 MARS 2006

Décision déférée : Décision du Tribunal de Grande Instance de SAINT ETIENNE du 18 mai 2004 - (R.G. : 2001/3439) No R.G. : 04/03931

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en réparation des dommages causés par des véhicules terrestres à moteur APPELANTE :

MACIF - Mutuelle Assurance des Commerçants et industriels de France Siège social : 79055 NIORT Centre de gestion : 42165 ANDREZIEUX BOUTHEON représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, Avoués assistée par Maître LARCHER, Avocat, (SAINT-ETIENNE) INTIMES : Madame X...
Y..., veuve Z..., agissant tant en son nom personnel qu'ès qualité d'administratrice légale de la personne et des biens de son fils mineur Francis Z..., né le 10 mars 1997 A... : 10 Place Aristide Briand 42340 VEAUCHE représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, Avoués assistée par Maître PEYRET, Avocat, (SAINT-ETIENNE) Madame B...
C..., épouse Z...
A... : 4 rue des Mûriers 42160 SAINT

CYPRIEN représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, Avoués assistée par Maître PEYRET, Avocat, (SAINT-ETIENNE) Mademoiselle D... Julie Z...
A... : 21 rue du 11 Novembre 42100 SAINT-ETIENNE représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, Avoués assistée par Maître PEYRET, Avocat, (SAINT-ETIENNE) L'ETAT FRANCAIS, représenté par Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor Public Siège social : Service Juridique Bâtiment Condorcet 6 rue Louise Weiss 75703 PARIS CEDEX 13 représenté par Maître RAHON, Avoué assisté par Maître ROUSSET-BERT, Avocat, (TOQUE 572) SMPPN Siège social : 138 Avenue Jean Lolive 93507 PANTIN CEDEX Non comparante Instruction clôturée le 13 Décembre 2005 Audience de plaidoiries du 12 Janvier 2006 LA SIXIEME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, composée lors des débats et du délibéré de :

. Monsieur LECOMTE, Président

. Madame DUMAS, Conseiller

. Madame de la LANCE, Conseiller assistés lors des débats tenus en audience publique par Madame E..., Greffier, a rendu le 09 MARS 2006, l'arrêt réputé contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour d'Appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile, signé par Monsieur LECOMTE, Président, et par Madame E..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le 17 février 1999, vers 0 heure 20, à Saint-Chamond, le véhicule de police banalisé Renault Laguna utilisé par la brigade anti criminalité de Saint-Etienne conduit par le gardien de la paix Philippe F..., et dans lequel se trouvaient les gardiens Jean

G... et Benoît Z..., a pris en chasse un véhicule volé Subaru, assuré à la MACIF.

Dans ce cadre de cette poursuite, Monsieur F... a perdu le contrôle de son véhicule qui a heurté le muret de l'autoroute et s'est retourné sur le toit sur la voie de gauche.

Au cours de cet accident, Monsieur G... a été mortellement blessé et Messieurs F... et Z... gravement blessés. Ce dernier devait décéder des suites de ses blessures le 27 mars 2002.

La MACIF a refusé de payer les sommes demandées par l'Agent Judiciaire du Trésor Public. Les consorts Z... ont assigné ce dernier et la MACIF a été appelée en garantie.

Par jugement du 18 mai 2004, le tribunal de grande instance de Saint-Etienne a condamné l'Etat Français, représenté par l'Agent Judiciaire du Trésor Public à payer diverses indemnités aux ayants droit de Benoît Z... et condamné la MACIF à relever et garantir l'Agent Judiciaire du Trésor Public des sommes versées aux consorts Z... et à lui payer les dégradations subies par le véhicule Laguna ainsi que les débours exposés par Monsieur Z... pour 628 272,22 ç. * *

*

Appelante de cette décision dont elle requiert la réformation, la MACIF fait grief au tribunal d'avoir fait application de la loi du 5 juillet 1985 dans la mesure où l'accident en cause résulte d'une opération de police entrant dans le cadre d'une mission de service public ne constitue pas un accident de la circulation et qu'encore la preuve d'une implication du véhicule Subaru n'est pas rapportée.

Elle relève essentiellement que les services de police ont été victimes d'une agression délibérée et que le compte rendu de la conversation radio fait apparaître que les malfaiteurs cherchaient à

percuter la voiture des policiers de façon à les mettre hors d'état de circuler.

Subsidiairement, l'appelante invoque la faute de conduite commise par le conducteur du véhicule de police circulant sur autoroute à 190 km/h justifiant une indemnisation de l'administration.

Elle conclut au rejet de l'ensemble des prétentions adverses ou subsidiairement à la réduction des indemnisations, à sa mise hors de cause et à l'octroi de la somme de 2 000 ç HT en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

* *

*

L'Etat Français, représenté par l'Agent Judiciaire du Trésor Public, conclut à la confirmation du jugement déféré mais forme appel incident pour obtenir paiement par la MACIF d'une somme complémentaire de 530 633,89 ç dans la limite du montant des indemnités hors préjudices personnels alloués à Madame Veuve Z... et son fils Francis au titre de leur préjudice patrimonial. Elle sollicite la somme de 2 000 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Les consorts Z... sollicitent la confirmation du jugement pour partie utile et sa réformation pour le surplus s'agissant des demandes qui ont été réduites ou rejetées. Leurs prétentions sont les suivantes :

Préjudice patrimonial de feu Benoît Z... : mémoire

Préjudice personnel de feu Benoît Z... :

144 000 ç - 70 000 ç (provision) = 74 000 ç

Préjudice moral et sexuel de Madame Veuve X...
Z... :

20 000 ç + 40 000 ç - 30 000 ç de provision = 30 000 ç

Préjudice moral de l'enfant Francis Z... :

20 000 ç - 10 000 ç de provision = 10 000 ç

Préjudice économique de Madame Veuve Benoît Z... : 179 937,08 ç, sauf à déduire la créance de l'organisme payeur de la pension de réversion à elle servie de 26 685 ç annuellement ;

Préjudice économique de Francis Z... :

67 362,24 ç sauf à déduire la créance de l'organisme payeur de la rente d'orphelin qui lui est servie de 2 668,56 ç annuellement ;

Préjudices de Madame Z..., née B...
C... et Mademoiselle D...
Z..., respectivement mère et soeur de la victime : 15 000 ç et 7 500 ç conformément à la décision déférée.

Les consorts Z... indiquent avoir reçu les sommes suivantes au titre de l'exécution provisoire :

Madame Veuve Z...
X... :

69 500 ç

Madame Z...
B... :

15 000 ç

Mademoiselle Z...
D... :

7 500 ç

Ils demandent à la Cour de statuer ce que de droit sur la garantie due par la MACIF à Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor Public.

En application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Madame Veuve Z... sollicite la somme de 3 000 ç et Madame B...
Z... et Mademoiselle D...
Z... celle de 1 500 ç chacune.

* *

*

La SMPPN, n'ayant pas constitué avoué, a été assignée le 22 juin 2005.

MOTIFS DE LA DECISION

I - Sur l'appel principal de l'assureur :

Attendu que pour voir exclure l'application de la loi du 5 juillet 1985, la MACIF fait valoir que l'accident survenu dans le cadre d'une opération de police résulte d'une agression délibérée de la part des malfaiteurs cherchant à percuter la voiture des policiers ;

Mais attendu que la thèse d'un accident causé volontairement n'est pas étayée par les éléments du dossier ;

Qu'en effet, la procédure pénale ayant abouti à un non lieu n'a pas permis d'établir l'existence d'un choc entre le véhicule Laguna des policiers et le véhicule Subaru pris en chasse ;

Que précisément, les examens techniques et scientifiques se sont révélés négatifs, aucune trace du choc ou indice matériel n'ayant pu être prélevé ;

Que l'enregistrement des conversations radio du véhicule des

policiers faisant état de tentatives de heurts par le véhicule poursuivi peu avant à l'accident ne permet pas d'établir l'existence d'une telle action au moment de l'accident survenu à Saint-Chamond ; Que le contexte de la course poursuite depuis Saint-Etienne où les policiers ont fait usage de flash ball ne suffit pas à établir la réalité d'une manoeuvre délibérée des malfaiteurs lors de l'accident dont la cause exacte n'a pu être déterminée, les experts n'ayant pu privilégier l'une des trois hypothèses envisagées (accrochage ou percussion avec l'arrière ou encore seule perte de contrôle ä) ;

Qu'en définitive l'application de la loi du 5 juillet 1985, d'ordre général, ne peut être exclue ;

Et attendu qu'est impliqué au sens de cette loi tout véhicule qui est intervenu à un titre quelconque dans la survenance de l'accident ;

Attendu, en l'espèce, que la MACIF ne saurait valablement contester l'implication du véhicule Subaru dans l'accident dès lors que, nonobstant l'absence de contact, c'est bien dans le cadre d'une course poursuite du véhicule des malfaiteurs que le policier a perdu le contrôle du véhicule de service ;

Attendu, enfin, que les circonstances de la course poursuite certes risquée mais justifiée par la mission de sécurité publique des services de police ne permettent pas de caractériser une quelconque faute du conducteur de nature à justifier une action récursoire de la MACIF à l'encontre l'Agent Judiciaire du Trésor Public en tant qu'assureur du véhicule de police ;

Attendu que la Cour est ainsi conduite à confirmer le jugement entrepris ayant fait entièrement droit à l'appel en garantie formé par l'Agent Judiciaire du Trésor Public à l'encontre de la MACIF, assureur du véhicule impliqué en application de la loi du 5 juillet 1985 et qui doit sa garantie en vertu de l'article L 211-1 du Code

des assurances ;

II - Sur les débours de l'Agent Judiciaire du Trésor :

Attendu que le préjudice matériel de l'Etat suite aux dégradations du véhicule Laguna est justifié pour la somme de 7 632,40 ç ; que la décision déférée ayant condamné la MACIF au paiement de cette somme doit être confirmée ;

Attendu que s'agissant du recours subrogatoire, l'Agent Judiciaire du Trésor Public a établi le montant définitif de ses débours comprenant les capitaux décès versés et les capitaux représentatifs des pensions civiles concédées à Madame Z... et son enfant orphelin de père, Francis Z... ;

Attendu que l'appel incident de l'Agent Judiciaire du Trésor Public est recevable et fondé à due concurrence des indemnités allouées aux consorts Z... au titre des préjudices soumis à recours ci-après examinés ;

Attendu qu'en tant qu'employeur, l'Agent Judiciaire du Trésor Public est fondé à obtenir directement le remboursement des charges patronales afférentes aux traitements versés à Monsieur Z... soit la somme de 37 685,52 ç exactement retenue par le tribunal ;

III - Sur les préjudices des consorts Z... :

a - Sur le préjudice corporel de la victime, Benoît Z..., avant son décès -

Préjudice soumis à recours :

Préjudice soumis à recours :

Frais médicaux et assimilés

Créance Etat Français

481 891,73 ç

ITT (17 février 1999 au 27 mars 2002)

Traitements versés par l'Etat

81 654,82 ç

IPP 100 % prorata temporis jusqu'à la date du décès.

Ce poste de préjudice se confondant avec l'ITT, aucune

somme n'est réclamée.

Néant

Préjudice personnel :

Gêne dans les actes de la vie courante

(aspect agrément) (sur confirmation)

29 000,00 ç

Pretium doloris 7/7

(sur confirmation)

40 000,00 ç

Préjudice esthétique 7/7

(sur confirmation)

20 000,00 ç

Préjudice sexuel

(sur confirmation)

25 000,00 ç

Après déduction de la créance de l'Etat et de la provision allouée de

70 000 ç, il revient de ce chef à Madame Z... la somme de 44 000 ç, conformément à l'évaluation du tribunal.

b - Sur les préjudices de Madame Veuve Z... -

Préjudice moral

(non contesté)

20 000,00 ç

Préjudice sexuel

(exactement apprécié par le tribunal)

30 000,00 ç

Préjudice économique

Contrairement à l'appréciation du tribunal, il convient d'évaluer

ce chef de préjudice soumis au recours de l'Etat.

Le revenu annuel du défunt s'élève avant l'accident à 25 488,34 ç

et celui de l'épouse à 28 770,81 ç soit au total 54 259,15 ç.

Après déduction de la part d'auto-consommation du défunt (15 %)

et des revenus de l'épouse, il reste une somme de 17 349,47 ç re-

venant pour 2/3 à Madame Z... et pour 1/3 à l'enfant soit

pour le conjoint survivant :

11 566,31 ç x 13.654 (prix de l'euro de rente viagère à l'âge de la

victime - 29 ans - du barème issu du décret du 8 août 1986) = 157 926,39 ç

Compte tenu de la pension civile concédée à Madame Z...

(part services et part invalidité) dont le capital représentatif s'élève

aux sommes respectives de 379 326,53 ç et 138 764,12 ç, il ne re-

vient aucun solde à la victime sur ce chef de préjudice soumis à

recours.

Frais d'obsèques

(Créance de l'Etat)

1 956,73 ç

c - Sur les préjudices de l'enfant Francis Z..., né en 1997 -

Préjudice moral (non contesté)

20 000,00 ç

Préjudice économique

5 783,16 ç x 11.648 (prix de l'euro de rente jusqu'à l'âge de

25 ans) =

67 362,24 ç

Compte tenu de l'importance de la créance de l'Etat, cette

somme est absorbée par le recours du tiers payeur.

d - Sur les préjudices de la mère et de la soeur de la victime -

Les sommes allouées par le tribunal au titre du préjudice moral ne sont pas contestées soit 15 000 ç pour Madame B...
Z... et 7 5 000 ç pour Mademoiselle D...
Z...

e - Sur l'application de l'article700 du nouveau Code de procédure civile -

Toutes les sommes allouées en première instance seront maintenues sans majoration en cause d'appel.

Les entiers dépens seront supportés par la MACIF qui succombe pour l'essentiel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf à fixer

l'assiette du recours subrogatoire de l'Etat et à prononcer condamnation en deniers ou quittances pour tenir compte des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement,

Statuant à nouveau sur les préjudices économiques de Madame Veuve X...
Z... et de l'enfant Francis Z...,

Fixe ces préjudices à la somme de 157 926,39 ç et à la somme de 67 362,24 ç, ces montants étant intégrés dans l'assiette du recours de l'Agent Judiciaire du Trésor Public,

Condamne en conséquence la MACIF à payer à l'Agent Judiciaire du Trésor Public les sommes suivantes :

7 632,40 ç au titre du préjudice matériel du véhicule de police,

37 685,52 ç au titre des charges patronales sur les traitements versés à Monsieur Benoît Z...,

563 546,52 ç au titre des frais médicaux et traitements versés pour le compte de Monsieur Benoît Z... avant son décès,

1 926,77 ç au titre des frais d'obsèques,

à due concurrence de la somme de 225 288,63 ç, constituant l'assiette de son recours sur les préjudices économiques des consorts Z... à caractère patrimonial au titre des divers capitaux décès et pensions civiles versées aux consorts Z... du fait de l'accident en cause,

Condamne également la MACIF à relever et garantir l'Agent Judiciaire du Trésor Public de l'ensemble des condamnations prononcées au bénéfice des consorts Z... pour les sommes retenues par le tribunal et prononce condamnations en deniers ou quittances,

Maintient l'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile aux sommes fixées par le tribunal,

Déboute chacune des parties de leurs demandes contraires ou plus amples,

Déclare le présent arrêt commun à la SMPPN,

Condamne la MACIF aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de la SCP BRONDEL & TUDELA et de Maître RAHON, Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2001/3439
Date de la décision : 09/03/2006
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2006-03-09;2001.3439 ?
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