COUR D'APPEL DE LYON
SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 23 FEVRIER 2006
Décision déférée : Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON du 29 juin 2004 - (R.G. : 2002/11053) No R.G. : 04/06260
Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en réparation des dommages causés par des véhicules terrestres à moteur APPELANT :
Monsieur Hacène X... Demeurant : 7 Chemin du Gizard 69700 GIVORS représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA, Avoués assisté par Maître DUCRAY, Avocat, (TOQUE 799) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2004/027028 du 16/12/2004 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON) INTIMES : Monsieur Thierry FARGIER Demeurant : 22 rue Fernand Léger 42600 MONTBRISON représenté par la SCP BAUFUME-SOURBE, Avoués assisté par Maître DENARD, Avocat, (TOQUE 232) SAS GIRAUD RHONE ALPES, venant aux droits de la SOCIETE GIRAUD LOIRE AUVERGNE, venant aux droits de la SOCIETE TRANSPORTS PEILLON Siège social : ZAC Migalon 42160 ANDREZIEUX BOUTHEON représentée par
la SCP BAUFUME-SOURBE, Avoués assistée par Maître DENARD, Avocat, (TOQUE 232) MACIF Siège social : 224 Avenue de la Rochelle 79055 NIORT CEDEX 09 représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, Avoués assistée par Maître DENARD, Avocat, (TOQUE 232) CPAM DE LYON Siège social :
102 rue Masséna 69471 LYON CEDEX 06 Non comparante Instruction clôturée le 18 Octobre 2005 Audience de plaidoiries du 05 Janvier 2006 LA SIXIEME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, composée lors des débats et du délibéré de :
. Monsieur LECOMTE, Président
. Madame DUMAS, Conseiller
. Madame de la LANCE, Conseiller assistés lors des débats tenus en audience publique par Madame SENTIS, Greffier, a rendu le, l'arrêt réputé contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour d'Appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile, signé par Monsieur LECOMTE, Président, et par Madame SENTIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Le 28 février 1996, Monsieur Hacène X..., en qualité de piéton et alors qu'il était âgé de 15 ans, a été victime d'un accident de la circulation dans lequel était impliqué le véhicule conduit par Monsieur Thierry FARGIER, appartenant aux Transports PEILLON et assuré par la MACIF. Il a été indemnisé, sur la base d'un rapport conjoint de deux médecins du 23 avril 1999, dans le cadre d'une transaction signée le 22 septembre 1999 et a reçu une somme de 365 000 F, soit 55 643,89 ç.
En raison d'une importante cicatrice frontale, Monsieur X... a décidé de subir une intervention chirurgicale en février 2000 pour corriger cette séquelle de l'accident. Après nouvel examen médical le 22 septembre 2000 par le Docteur Y..., la MACIF a refusé toute indemnisation en l'absence d'aggravation de l'état de Monsieur X.... Par actes des 8, 9 et 23 juillet 2002, Monsieur X... a fait assigner Monsieur FARGIER, les Transports PEILLON, la MACIF et la CPAM de Lyon devant le tribunal de grande instance de Lyon pour obtenir la désignation d'un expert et l'indemnisation de son préjudice résultant de l'intervention chirurgicale.
Le Docteur Z..., désigné comme expert médical par ordonnance du juge de la mise en état du 12 novembre 2002, a déposé son rapport le 25 mars 2003. Sur la base de ce rapport, Monsieur X... a demandé la liquidation de son préjudice.
Par jugement du 29 juin 2004, le tribunal, au visa de la transaction d'octobre 1999, a débouté Monsieur X... de toutes ses demandes et a déclaré le jugement opposable à la CPAM de Lyon.
Monsieur X... a interjeté appel de ce jugement et soutient que la réparation intégrale des préjudices subis constitue un principe fondamental, que l'autorité de la chose jugée en matière de transaction ne couvre pas toute nouvelle demande relative à des prestations médicales non envisagées lors de la décision initiale, qu'aucune demande n'avait été présentée lors de la transaction au titre d'une intervention chirurgicale esthétique ou réparatrice, que le préjudice esthétique concernant une cicatrice frontale et une cicatrice à la lisière du cuir chevelu avait été quantifié à 3,5/7 et indemnisé sur cette base, que l'intervention chirurgicale du 15 février 2000 avait un but thérapeutique et a été motivée par l'impact psychologique du préjudice esthétique, que l'indemnité versée pour ce
préjudice extrapatrimonial ne peut être considérée comme servant à couvrir le coût de l'intervention chirurgicale destinée à le réparer et qui constitue un préjudice patrimonial, qu'en outre le préjudice esthétique n'a pas disparu avec l'intervention, et qu'il est donc bien fondé à solliciter la liquidation de ses préjudices tant soumis à recours que personnel et matériel sur la base de l'expertise judiciaire.
Monsieur X... demande à la Cour de réformer le jugement rendu en toutes ses dispositions, d'homologuer le rapport d'expertise du Docteur Z..., de fixer à 4 663,09 ç son préjudice soumis à recours, sous réserves de la créance définitive de la CPAM, à 1 300 ç son préjudice personnel et à 46,07 ç son préjudice matériel, de condamner in solidum Monsieur FARGIER, les Transports PEILLON et la MACIF à lui payer ces sommes outre intérêts de droit et la somme de 3 000 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La MACIF, Monsieur FARGIER et la Société GIRAUD RHONE ALPES (venant aux droits de la Société GIRAUD LOIRE AUVERGNE venant elle-même aux droits de la Société Transports PEILLON) font valoir que le préjudice esthétique a été indemnisé dans le cadre de la transaction, que la victime pouvait utiliser cette indemnité pour améliorer sa cicatrice, que si l'opération chirurgicale pratiquée est en relation certaine avec l'accident du 28 février 1999, elle ne constitue pas une aggravation, que l'impact psychologique a été pris en considération lors des premiers rapports d'expertise, et qu'en l'absence d'une aggravation constatée, aucune nouvelle indemnisation n'est due alors que la transaction signée a autorité de la chose jugée.
Les intimés demandent à la Cour de confirmer la décision entreprise. La CPAM de Lyon, n'ayant pas constitué avoué, a été régulièrement assignée à personne habilitée mais n'a pas fait connaître le montant
de ses débours.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que les constatations médicales initiales avaient conduit les experts à retenir un préjudice esthétique quantifié à 3,5/7 en raison de la présence au niveau du visage de deux cicatrices de craniotomie, une première arciforme partant de la région sourcilière gauche pour aller jusqu'à l'oreille et mesurant 16 cm, une deuxième à la lisière du cuir chevelu dans la région médio frontale de 6 cm, cicatrices restant visibles du fait d'une alopécie (chute des cheveux) ;
Attendu qu'aucune chirurgie réparatrice au niveau de ces cicatrices n'a été envisagée lors de l'indemnisation initiale ; que la gêne et l'impact psychologique invoqués par Monsieur Hacène X... en raison de cet aspect esthétique ne sont pas négligeables et justifient le désir qu'il a eu, alors âgé de 19 ans, d'améliorer la situation par une intervention chirurgicale ;
Qu'il ne peut être retenu, comme l'a fait le premier juge, que cette intervention constitue un emploi des sommes versées au titre du préjudice esthétique et qu'elle ne peut donc donner lieu à une nouvelle indemnisation ;
Attendu que l'opération chirurgicale du 15 février 2000 constitue bien un élément nouveau non pris en compte lors de la transaction signée le 22 septembre 1999 ; que l'importance des séquelles cicatricielles justifie la décision de Monsieur X... de recourir à une chirurgie réparatrice ; que les conséquences patrimoniales et les préjudices résultant d'une telle opération, ayant un lien direct avec l'accident subi, doivent faire l'objet d'une indemnisation complémentaire ;
Que le jugement sera donc réformé ;
Attendu que l'expert judiciaire a conclu que les conséquences médico-légales de l'intervention chirurgicale sont les suivantes : -
ITT du 15 février au 2 mars 2000 û date de consolidation au 2 septembre 2000 û pas d'IPP û souffrances endurées quantifiées à 1,5/7 ; qu'aucun autre préjudice n'a été retenu ; que ces conclusions ne sont pas contestées et doivent servir de base au calcul des indemnités dues ;
Attendu que les pièces produites permettent de chiffrer l'indemnisation due à Monsieur X... comme suit :
- Préjudice soumis à recours :
- Frais médicaux pris en charge par la CPAM Mémoire
Factures d'honoraires du chirurgien 390 + 23 500 F
3 642,01 ç
- Pharmacie
107,83 ç
- ITT du 15 février au 2 mars 2000
Il apparaît que, le 18 janvier 2000, lors de la fixation de la date de l'opération avec le chirurgien au 15 février suivant, Monsieur X... connaissait son embauche pour les vacances de février. L'absence d'urgence d'une telle intervention laissait le choix des dates à
Monsieur X... qui ne peut solliciter l'indemnisation d'une perte de revenus à ce titre.
- Honoraires du docteur BASMAD JIAN pour l'expertise amiable
394,83 ç
----------------
TOTAL
4 144,67 ç
A déduire la créance de la CPAM (non produite)
Mémoire
- Préjudice personnel :
- Souffrances endurées de 1,5/7
1 000,00 ç
- Préjudice matériel :
- Frais de déplacements justifiés pour les consultations
et expertises
46,07 ç
Attendu que Monsieur FARGIER, la Société GIRAUD RHONE ALPES et la MACIF doivent être condamnés in solidum à payer les sommes ainsi fixées à Monsieur X... ;
Attendu qu'il ne paraît pas équitable de laisser à la charge de Monsieur X... l'ensemble des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il lui sera alloué une somme de 1 300 ç en
application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Réforme le jugement déféré,
Condamne in solidum Monsieur Thierry FARGIER, la Société GIRAUD RHONE ALPES et la MACIF à payer à Monsieur Hacène X... la somme de 5 190,74 ç, à titre d'indemnisation complémentaire des préjudices résultant de l'intervention chirurgicale du 15 février 2000 en lien direct avec l'accident du 28 février 1996, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,
Condamne in solidum Monsieur FARGIER, la Société GIRAUD RHONE ALPES et la MACIF à payer à Monsieur X... la somme de 1 300 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Déclare le présent arrêt opposable à la CPAM de Lyon,
Condamne in solidum Monsieur FARGIER, la Société GIRAUD RHONE ALPES et la MACIF aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés selon les dispositions relatives à l'aide juridictionnelle. LE GREFFIER
LE PRESIDENT