COUR D'APPEL DE LYON
SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2005
Décision déférée : Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON du 04 décembre 2001 - (R.G. : 200001689) No R.G. : 02/00491
Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en réparation des dommages causés par une nuisance de l'environnement APPELANTE : GAN EUROCOURTAGE IARD, venant aux droits de CGU COURTAGE, elle-même venant aux droits de la GENERAL ACCIDENT Siège social : 4/6 Avenue d'Alsace 92033 LA DEFENSE CEDEX représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, Avoués assistée par Maître VINCENT, Avocat, (TOQUE 638) INTIMES : Monsieur Jean-Jacques X...
Y... : Lotissement Bel Azur La Rua GRENAY 38540 HEYRIEUX représenté par la SCP DUTRIEVOZ, Avoués assisté par Maître PEYCELON, Avocat, (TOQUE 699) COMMUNAUTE URBAINE DE LYON (COURLY) Siège social : 20 rue du Lac 69003 LYON représentée par la SCP DUTRIEVOZ, Avoués assistée par Maître PEYCELON, Avocat, (TOQUE 699) CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS
Siège social : 56 rue de Lille 75007 PARIS représentée par la SCP DUTRIEVOZ, Avoués assistée par Maître MATAGRIN, Avocat, (TOQUE 568) Instruction clôturée le 21 Octobre 2005 Audience de plaidoiries du 03 Novembre 2005 LA SIXIEME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, composée lors des débats et du délibéré de :
. Monsieur LECOMTE, Président
. Madame DUMAS, Conseiller
. Madame de la LANCE, Conseiller assistés lors des débats tenus en audience publique par Madame Z..., Greffier, a rendu le 15 DECEMBRE 2005, l'arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour d'Appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile, signé par Monsieur LECOMTE, Président, et par Madame Z..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Le 13 mai 1985 Monsieur X..., agent de la Communauté Urbaine de Lyon, a été victime d'un accident de la circulation et son préjudice a été liquidé par jugement du tribunal correctionnel du 30 mai 1991 sur la base des conclusions du Docteur A... dans son second rapport du 18 octobre 1988.
Faisant état d'une aggravation, Monsieur X... et la COURLY ont saisi le 30 mai 1997 le juge des référés aux fins d'une nouvelle expertise médicale.
Par ordonnance du 1er juillet 1997, le Docteur B... a été désigné.
Dans son rapport déposé le 1er octobre 1997, cet expert médical a
conclu à des périodes d'incapacités temporaires totales nombreuses à partir du 30 mai 1991, a fixé la date de consolidation au 1er octobre 1997, n'a pas retenu d'aggravation de l'IPP et fixé un nouveau pretium doloris de 2,5/7.
Sur la base de ce rapport, le tribunal de grande instance de Lyon, par jugement dont appel du 4 décembre 2001, a condamné la Société CGU COURTAGE à payer à Monsieur X... les sommes de 26 000 F en réparation de la gêne subie dans les actes de la vie courante pendant une ITT de 260 jours et 20 000 F en réparation du pretium doloris, et à payer à la COURLY le montant des frais médicaux, des salaires et des charges patronales engagés pour la période du 13 juin 1991 au 1er octobre 1997.
Contestant la recevabilité des demandes en l'absence d'aggravation de l'état de santé de Monsieur X... postérieurement à la fixation définitive du préjudice déjà indemnisé, la Société CGU COURTAGE a relevé appel de cette décision.
Par arrêt du 21 mai 2003, la Cour d'Appel de ce siège a ordonné une nouvelle expertise médicale afin essentiellement de savoir si postérieurement à la date de consolidation fixée par le Docteur A... le 6 octobre 1986, l'état de santé de Monsieur X... s'est aggravé ou bien si les manifestations algiques et dépressives postérieurement survenues ne traduisent qu'un état séquellaire pris en considération dans le taux d'IPP de 40 % retenu par le Docteur A...
L'expert désigné, le Docteur C..., a déposé son rapport le 5 février 2004 et conclu de la façon suivante :
"- date de l'accident : 13 mai 1985.
- lors de l'expertise judiciaire du 10 octobre 1989, le Docteur A... appréciait l'état séquellaire par une IPP de 40 %.
- depuis cette expertise, l'état séquellaire de Monsieur X... s'est progressivement aggravé, aggravation qui a été corrigée par l'intervention chirurgicale au niveau de l'avant pied droit du 4 décembre 1996.
- cette aggravation transitoire de l'état séquellaire de Monsieur X... a justifié : une ITT de trois mois et demi du 4 décembre 1996 au 17 mars 1997.
date de consolidation médico légale : 18 mars 1997.
pas d'IPP imputable à cette aggravation qui est restée temporaire.
pretium doloris modéré (3/7).
pas de préjudice esthétique.
pas de préjudice professionnel : la mise à la retraite anticipée de Monsieur X... à l'âge de 53 ans et 5 mois n'est pas directement et certainement imputable à cette aggravation temporaire de son état séquellaire".
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Au vu de ce rapport, le GAN EUROCOURTAGE IARD, aux droits de CGU
COURTAGE, appelant, évalue à la somme de 9 038,63 ç la réparation du préjudice corporel de Monsieur X... soumis à recours soit :
prestations en nature organisme social :
2 136,46 ç
ITT perte de revenus :
5 327,17 ç
ITT (atteinte aux conditions d'existence) :
1 575,00 ç
A déduire : - Créance de la COURLY : - 2 136,46 ç + 5 327,17 ç
SOLDE INDEMNITAIRE :
1 575,00 ç
Sur le préjudice personnel, l'appelant offre la somme de 3 500 ç au titre du pretium doloris.
Compte tenu des sommes versées en exécution du jugement du 4 décembre 2001, l'appelant réclame au titre du "trop-perçu" à :
Monsieur X... : la somme de 1 937,65 ç
la COURLY, en sa qualité d'organisme social : la somme de 3 566,75 ç la COURLY, en sa qualité d'employeur : la somme de 13 586,03 ç outre intérêts au taux légal à compter du 4 décembre 2001.
Enfin il conclut au rejet de la demande de la Caisse des Dépôts et Consignations en l'absence d'aggravation de l'IPP et sollicite la somme de 4 000 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
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La COURLY et Monsieur X... contestent les conclusions du Docteur C... et demandent à la Cour de prendre en considération tous les arrêts de travail de 1991 à 1999 au titre de l'aggravation. A titre principal, ils évaluent le préjudice de Monsieur X... comme suit :
Préjudice soumis à recours :
ITT
traitements nets réglés par la COURLY jusqu'au
30 septembre 1999
36 843,11 ç
Gêne physiologique
7 622,45 ç
Frais médicaux et pharmaceutiques réglés par
l'organisme social
8 705,61 ç
Préjudice non soumis à recours :
Pretium doloris
3 500,00 ç
Préjudice d'agrément
1 000,00 ç
A titre subsidiaire, ils évaluent le préjudice soumis à recours de Monsieur X... de la façon suivante :
ITT
traitements réglés du 4 décembre 1996 au 17 mars 1997
5 327,17 ç
Gêne physiologique
3 990,00 ç
Frais pharmaceutiques et médicaux réglés par l'organisme
social
8 705,61 ç
A titre infiniment subsidiaire, en retenant les conclusions du Docteur C... pour la période du 4 décembre 1996 au 17 mars 1997, il y a lieu de condamner le GAN EUROCOURTAGE à payer à :
Monsieur X... : la somme de 4 500 ç au titre du préjudice non soumis à recours, la somme de 3 990 ç au titre de la gêne physiologique dans les conditions d'existence constituant le solde du préjudice soumis à recours ;
La COURLY : la somme de 2 136,46 ç correspondant aux frais médicaux et pharmaceutiques, la somme de 5 327,17 correspondant aux
traitements et salaires et celle de 2 358,91 ç correspondant aux charges patronales afférentes aux traitements sus-visés outre la somme de 3 050 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
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La Caisse des Dépôts et Consignations conclut à l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il n'indemnise pas la Caisse des Dépôts et Consignations des sommes versées à Monsieur X... à titre d'allocation temporaire d'invalidité en raison de l'aggravation de son état de santé soit au minimum la somme de 123 635,27 ç. En application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, elle sollicite la somme de 2 500 ç.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que l'expertise du Docteur C..., désigné par la Cour, retrace de façon précise et complète l'état de Monsieur X... suite à l'accident du 13 mai 1985 et apporte une réponse claire et satisfaisante au problème médical posé sur l'aggravation ; que c'est en vain que la COURLY et Monsieur X... tentent de contrecarrer cette expertise en se prévalant des conclusions du précédent expert, le Docteur B..., qui avait fait un amalgame entre l'état séquellaire et l'aggravation au niveau du pied droit ;
Attendu que la Cour estime indemniser l'aggravation temporaire de l'état de Monsieur X... sur la base des conclusions du Docteur C..., ci-dessus détaillées :
I - Préjudice corporel soumis à recours -
Frais médicaux et pharmaceutiques
Créance de la COURLY, organisme social
(pour la période retenue par l'expert du 4
décembre 1996 au 17 mars 1997)
2 136,46 ç
ITT du 4 décembre 1996 au 17 mars 1997
soit trois mois et demi
traitements nets réglés par la COURLY
5 327,17 ç
gêne physiologique dans les actes de la vie
courante
2 100,00 ç ----------------
TOTAL :
9 563,63 ç
C'est cette somme qui constitue l'assiette du recours de la COURLY et le solde indemnitaire revenant à Monsieur X... s'élève à 2 100 ç.
II - Préjudice personnel non soumis à recours -
Pretium doloris 3/7
(sur accord des parties)
3 500,00 ç
Préjudice d'agrément
(non retenu
Préjudice d'agrément
(non retenu par les experts mais certain compte tenu du
handicap temporaire suite à les déformations progressives
des orteils gênant la promenade)
1 000,00 ç ----------------
TOTAL :
4 500,00 ç
Attendu qu'il est constant que les sommes versées à Monsieur X... et à la COURLY en vertu de l'exécution provisoire du jugement dont appel et qui est réformé, sont supérieures aux sommes ci-dessus fixées et donneront lieu à restitution au profit de GAN EUROCOURTAGE IARD dans les conditions ci-après indiquées ;
Attendu qu'en l'absence d'aggravation du taux de l'IPP et du préjudice professionnel qui restent identiques à ceux qui ont été retenus par le Docteur A..., la Caisse des Dépôts et Consignations n'est pas fondée à réclamer le remboursement de l'allocation temporaire d'invalidité versée à compter du 6 octobre 1991, puisque ces prestations ne sont pas liées à l'aggravation, étant relevé que le jugement correctionnel du 31 octobre 1991 mentionne bien la créance de la Caisse des Dépôts et Consignations pour un montant de 825 506,07 F devant s'imputer au marc le franc avec la créance de la COURLY sur l'indemnité soumise à recours de 1 115 040,19 F ;
Attendu que le point de départ des intérêts au taux légal concernant les demandes de la COURLY doit être fixé à compter du jour de la demande conformément aux dispositions de l'article 1153 du Code civil, s'agissant du recouvrement de dépenses auxquelles elle est légalement tenue, soit en l'espèce à compter du jour de l'assignation en justice ;
Attendu, par ailleurs, que la COURLY, en tant qu'employeur, est également fondée à réclamer directement à l'assureur du tiers responsable le montant des charges patronales pour la période retenue par le Docteur C... soit 2 358,91 ç ;
Attendu que l'équité conduit à maintenir à la somme de 1 219,59 ç (8
000 F) l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile fixée par le tribunal au profit de Monsieur X... et la COURLY ; que les autres demandes de ce chef doivent être écartées ;
Attendu que les entiers dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'expertise du Docteur C... seront supportés par l'assureur du tiers responsable de l'accident ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Vu l'arrêt avant dire droit de la Cour d'Appel de ce siège du 21 mai 2003,
Vu le rapport de l'expert judiciaire, le Docteur C...,
Réforme le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Condamne le GAN EUROCOURTAGE IARD à payer à :
1o/ - Monsieur X... : la somme de 2 100 ç en réparation de son préjudice corporel complémentaire (soumis à recours) et celle de 4 500 ç en réparation de son préjudice corporel personnel avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
2o/ - La COURLY : la somme de 2 136,46 ç au titre des frais médicaux, la somme de 5 327,17 ç au titre des traitements et la somme de 2 358,91 ç au titre des charges patronales, le tout avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 31 décembre 1999,
3o/ - Monsieur X... et la COURLY : la somme de 1 219,59 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Déboute la Caisse des Dépôts et Consignations de ses demandes et
chacune des parties de leurs demandes contraires ou plus amples,
Ordonne la restitution au profit de l'assureur, des sommes trop-perçues par Monsieur X... et la COURLY du fait de l'exécution provisoire du jugement, augmentées des intérêts au taux légal à compter de la date des divers règlements,
Condamne GAN EUROCOURTAGE IARD aux entiers dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'expertise du Docteur C..., les dépens d'appel étant distraits au profit de la SCP DUTRIEVOZ, Avoués des intimés et de la Caisse des Dépôts et Consignations, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER
LE PRESIDENT