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10/11/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006947888

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre civile 3, 10 novembre 2005, JURITEXT000006947888


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 10 Novembre 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de VILLEFRANCHE-TARARE du 18 mars 2004 - No rôle : 2003j174 No R.G. :

04/02357

Nature du recours : Appel

APPELANTE : La Société JH INDUSTRIES, SA anciennement dénommée Société HUET. Lieudit "La Gazonnière" B.P. 559 85305 CHALLANS CEDEX représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assistée de Me Bernard RINEAU, avocat au barreau de NANTES

INTIMEE : La Société MALERBA, SA Rue de la Fargette B.P

. 32 69470 COURS LA VILLE représentée par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour assistée de Me Françoi...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 10 Novembre 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de VILLEFRANCHE-TARARE du 18 mars 2004 - No rôle : 2003j174 No R.G. :

04/02357

Nature du recours : Appel

APPELANTE : La Société JH INDUSTRIES, SA anciennement dénommée Société HUET. Lieudit "La Gazonnière" B.P. 559 85305 CHALLANS CEDEX représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assistée de Me Bernard RINEAU, avocat au barreau de NANTES

INTIMEE : La Société MALERBA, SA Rue de la Fargette B.P. 32 69470 COURS LA VILLE représentée par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour assistée de Me François VACCARO, avocat au barreau de TOURS Instruction clôturée le 24 Juin 2005 Audience publique du 28 Septembre 2005 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Monsieur ROBERT, Président, Monsieur SANTELLI, Conseiller Madame CLOZEL-TRUCHE, Conseiller DEBATS : à l'audience publique du 28 septembre 2005 GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Madame X..., Greffier, ARRET :

CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 10 novembre 2005, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile signé par Monsieur ROBERT, Président, et par Mademoiselle Y..., Greffier, auquel la minute de

la décision a été remise par le magistrat signataire. EXPOSE DU LITIGE - PROCEDURE - PRETENTIONS DES PARTIES

La société HUET a commandé le 1er février 2002 quarante neuf portes coupe-feu à la société MALERBA qui était depuis plusieurs années son fournisseur occasionnel. La société MALERBA établissait alors le 13 mars 2002 une facture correspondant à cette commande que la société HUET recevait le 18 mars 2002. Le 25 mars 2002 une nouvelle commande était passée pour une porte à la société MALERBA qui était facturée le 22 avril 2002.

Le 29 avril 2002, la société HUET a envoyé un courrier à la société MALERBA pour lui faire part des erreurs de tarifs commises au titre de ces deux commandes et, se référant aux prix pratiqués lors de commandes antérieures, notamment celle du 5 juillet 2001, lui rappelait la disproportion manifeste des tarifs indiqués au regard du prix du marché. En réponse la société MALERBA écrivait le 25 mai 2002 à la société HUET pour lui dire que les prix facturés étaient conformes aux prix stipulés dans les devis correspondants qu'elle avait acceptés. A l'issue de pourparlers qui n'ont pas permis aux parties de parvenir à un accord, la société MALERBA a, par un courrier recommandé avec accusé de réception du 4 juillet 2002, mis en demeure la société HUET de régler la somme de 102.618,67 euros, qui n'a pas été suivi d'effet.

Par acte du 23 juillet 2002, la société MALERBA faisait délivrer une assignation à la société HUET devant le Tribunal de Commerce de La Roche Sur Yon, lequel par un jugement du 2 septembre 2003 s'est déclaré territorialement incompétent au profit du Tribunal de Commerce de VILLEFRANCHE-TARARE. Ce tribunal a rendu sa décision le 18 mars 2004 aux termes de laquelle il condamnait la société JH INDUSTRIES, anciennement société HUET à payer la société MALERBA.

Par déclaration du 6 avril 2004, la société JH INDUSTRIES a relevé

appel de ce jugement.

Vu l'article 455 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civile dans sa rédaction issue du décret du 28 décembre 1998 ;

Vu les prétentions et les moyens développés par la société JH INDUSTRIES dans ses conclusions du 24 juin 2005 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé tendant à faire juger que sa demande visant à voir retenir l'existence d'une pratique de prix discriminatoires n'est pas une demande nouvelle, mais un moyen nouveau admissible en appel, la présente demande tendant à la même fin, c'est à dire à obtenir une réfaction du prix, à défaut que la Cour ne retienne l'erreur obstacle invoquée à titre principal - que l'erreur vicie le consentement empêchant qu'il y ait eu un accord valable entre les parties, malgré une apparence trompeuse - que la vente a pour motif déterminant la recherche d'un juste prix, lequel ne doit pas être disproportionné avec la valeur de la chose vendue - qu'en l'espèce les tarifs figurant sur les deux bons de commande litigieux des 1er février et 25 mars 2002 sont disproportionnés par rapport aux tarifs habituellement pratiqués par la société MALERBA lors d'autres ventes, soit de l'ordre de 133 % à 476 % - qu'il est possible de pratiquer alors une réfaction du prix, et non de prononcer la nullité de la vente, pour redonner à la transaction son prix réel et rétablir ainsi l'équilibre des contrats litigieux - qu'elle réclame ainsi à la société MALERBA la somme de 30.660,37 euros TTC - qu'à défaut, il doit être retenu une pratique discriminatoire caractérisée par des prix non justifiés par une contrepartie réelle, créant ainsi pour le co-contractant un désavantage manifeste dans la concurrence - que c'est de propos délibéré que la société MALERBA a agi, refusant de reconnaître son erreur et défiant les lois du marché - qu'elle sollicite la même somme sur le fondement de ce moyen - que la réformation s'impose et

que la société MALERBA doit lui payer en outre une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Vu les prétentions et les moyens développés par la société MALERBA dans ses conclusions récapitulatives du 23 juin 2005 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé tendant à faire juger que la société JH INDUSTRIES est irrecevable à former des demandes nouvelles en appel, lesquelles sont fondées sur la responsabilité civile en invoquant les dispositions de l'article L.442-6 du Code de Commerce aux fins d'obtenir des dommages et intérêts, alors que la demande initiale tendait à voir fixer un prix de vente, en invoquant l'erreur - que sur le fond, il faut retenir que les livraisons ont été effectuées sur la base de bons de commande comportant le prix des marchandises, lesquels comportant la mention de la société: "Bon pour accord, le ..." - qu'ainsi la société JH INDUSTRIES, qui ne règle pas les factures qu'elle ne conteste pas, entend échapper à ses obligations en avançant des arguments sans pertinence - que les prix sont libres et ont été acceptés - qu'il n'y a lieu en l'espèce aucune erreur matérielle établie et qu'il ne peut être allégué la précipitation d'un salarié de son entreprise, sans établir cette affirmation, alors même que c'est toujours ce même salarié de la société JH INDUSTRIES qui passe les commandes et appose son accord sur les bons correspondants - que la réfaction du prix ne peut résulter que d'une délivrance défectueuse de la chose vendue, ce qui n'est pas invoqué par l'appelante - que s'il devait être examiné les pratiques discriminatoires, il conviendrait d'écarter cet argument, alors même qu'une discrimination suppose la preuve d'une rupture de traitement entre concurrents au même moment sur les mêmes produits, alors qu'en l'espèce il n'y a aucun concurrent désigné - que la société FABRE, qui est un de ses partenaires, ne traite pas avec elle dans les mêmes conditions, notamment en termes de volume de

transactions, et pour les mêmes produits - que l'appelante doit rapporter la preuve d'une telle discrimination et d'un préjudice subi ainsi que d'une restriction de concurrence, ce qu'elle ne fait pas - que ce moyen doit donc être rejeté, comme dépourvu de fondement - que la société JH INDUSTRIES doit être déboutée de toutes ses prétentions et condamnée à lui payer la somme de 102.618,67 euros, confirmant ainsi le jugement déféré.

Par conclusions du 30 août 2005, la société MALERBA sollicite le rejet de quatre pièces no18 à 21 communiquées tardivement par la société JH INDUSTRIES après la clôture. MOTIFS DE LA DÉCISION

I/ Sur la demande de rejet des pièces communiquées le 24 août 2005 par la société JH INDUSTRIES :

Attendu que l'ordonnance de clôture est intervenue le 24 juin 2005 - qu'en conséquence les pièces no18 à 21, communiquées le 24 août 2005, postérieurement à la clôture, par la société JH INDUSTRIES, sont manifestement irrecevables - qu'il convient donc de les écarter des débats;

II/ Sur la recevabilité de la demande tendant à voir statuer sur des pratiques discriminatoires :

Attendu que l'article 564 du Nouveau Code de Procédure Civile pose le principe de l'irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d'appel, à moins que selon l'article 565 elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ;

Attendu que la société JH INDUSTRIES, qui, s'estimant victime de la part de la société MALERBA de pratiques discriminatoires, sollicite, pour la première fois en appel, en invoquant lesdites pratiques, que la somme dont elle est redevable envers la société MALERBA au titre des marchandises que celle-ci lui a vendues soit limitée à la somme de 30.660,37 euros TTC, fait une demande sur un fondement distinct de

celui dont elle fait état à titre principal, qui consiste à soutenir que son consentement a été vicié par l'erreur à raison des prix pratiqués lors des commandes faites à la société MALERBA, lesquels étaient totalement disproportionnés avec la valeur des marchandises qu'elle lui a vendues - que cette demande tend donc à la même fin, qui est d'obtenir une réduction du prix - que s'il s'agit d'un nouveau moyen, la demande ne peut être considérer comme nouvelle, ce qui conduit à la déclarer recevable ;

III/ Sur les demandes de la société JH INDUSTRIES :

1o/ Sur la demande formée sur l'erreur :

Attendu qu'il est constant au vu des pièces du dossier de la société MALERBA que les bons litigieux datés des 1er février et 25 mars 2002 qu'elle a émis puis adressés à la société HUET devenue la société JH INDUSTRIES, en vue de matérialiser les commandes que celle-ci lui a faits comportent la mention apposée par la société HUET "Bon pour accord" - qu'il en résulte que par son acceptation, la société JH INDUSTRIES ne peut remettre en cause les ventes qui sont intervenues aux conditions de prix qui étaient portées sur ces bons, alors que l'erreur n'est admise que lorsqu'elle porte sur la substance même de la chose qui en est l'objet - qu'elle ne peut se prévaloir d'une erreur obstacle à raison de la disproportion considérable entre le prix facturé et celui que le vendeur pratiquait habituellement pour les mêmes produits cette notion d'origine doctrinale ne pouvant être considérée au regard des textes comme une entité qui aurait une quelconque autonomie - que c'est donc les dispositions du Code Civil qui doivent s'appliquer - que l'appréciation erronée du prix ne constitue pas une erreur sur la substance de nature à vicier le consentement de l'acquéreur - qu'en tout état de cause, si elle devait être retenue, l'erreur devrait être excusable - que l'appelante, du fait même qu'en tant que professionnel, elle agit

dans le même domaine d'activité que le vendeur, ne peut y prétendre, ce qui reviendrait, si on l'admettait, à ce qu'elle puisse tirer parti de sa propre faute, qui a consisté, selon ses propres déclarations, à être négligente lors de la conclusion du contrat - que par conséquent, la société JH INDUSTRIES doit être déboutée de sa demande fondée sur l'erreur en ce qu'elle ne répond pas aux conditions de sa mise en oeuvre ;

Attendu que le jugement déféré doit être confirmé de ce chef ;

2o/ Sur la demande fondée sur des pratiques discriminatoires :

Attendu que la notion de pratiques discriminatoires telles qu'elle est définie à l'article L.442-6 du Code de Commerce prévoit que celui qu'on incrimine de tels faits doit, soit avoir obtenu ou tenté d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou disproportionné au regard du service rendu, soit avoir pratiqué, à l'égard d'un partenaire économique, ou avoir obtenu de lui des prix, des délais de paiement, des conditions de vente ou des modalités de vente ou d'achat discriminatoires et non justifiées par des contreparties réelles en créant, de ce fait, pour ce partenaire un désavantage ou un avantage dans la concurrence - que manifestement cet article ne vise pas les faits reprochés par la société JH INDUSTRIES à la société MALERBA, alors même qu'il implique qu'il y ait un concurrent qui s'est trouvé injustement favorisé par les pratiques commerciales de son co-contractant - que la société JH INDUSTRIES ne se plaint que de pratiques qui n'ont été exercées qu'en vers elle - que par conséquent ce texte est inapplicable et la demande inappropriée - que dans ces conditions il y a lieu de débouter la société JH INDUSTRIES de cette demande, en l'absence de fondement ;

IV/ Sur la demande en paiement de la société MALERBA faite à titre reconventionnel :

Attendu que la société MALERBA réclame reconventionnellement à la société JH INDUSTRIES le paiement de ses factures datées du 13 mars 2002 et du 22 avril 2002 se rapportant aux commandes de portes coupe-feu passées respectivement par la société JH INDUSTRIES les 1er février et 25 mars 2002 - que la société JH INDUSTRIES, qui a contesté le prix pratiqué sans que, la Cour ne retienne ce grief en sa faveur au titre des deux fondements qu'elle invoquait, n'a émis aucune réserve ni aucune critique sur la qualité des marchandises qui lui ont été livrées à l'occasion de ces commandes - que la société MALERBA est dans ces conditions bien fondée dans ses prétentions, de sorte que la société JH INDUSTRIES doit être condamnée à lui payer la somme de 102.618,67 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2002 ;

Attendu que le jugement déféré doit être confirmé de ce chef ;

V/ Sur la demande en dommages et intérêts de la société MALERBA :

Attendu qu'il ne suffit pas à la société MALERBA d'invoquer une procédure abusive faite à son encontre pour obtenir des dommages et intérêts, quand bien même le serait-elle - qu'elle doit justifier d'un préjudice résultant d'un tel abus et qui serait au surplus distinct des intérêts qui lui sont alloués pour l'indemnisation du retard de la société JH INDUSTRIES à s'acquitter de sa dette envers elle - que sa demande en dommages et intérêts n'est donc pas fondée et qu'il convient de l'en débouter ;

Attendu que le jugement déféré, qui a fait droit à cette demande, doit être ainsi réformé;

VI/ Sur les autres demandes :

Attendu qu'il serait inéquitable que la société MALERBA supporte ses

frais irrépétibles d'appel et qu'il y a lieu ainsi de lui allouer une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, qui s'ajoutera à celle accordée par le premier juge ;

Attendu que la société JH INDUSTRIES, qui succombe, doit être condamnée aux dépens;

PAR CES MOTIFS LA COUR,

Déclare irrecevables les pièces no 18 à 21 communiquées le 24 août 2005 par la société JH INDUSTRIES et les écarte en conséquence des débats,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celle se rapportant à la demande en dommages et intérêts faite par la société MALERBA,

Le réforme de ce seul chef,

Le réforme de ce seul chef,

Et statuant à nouveau,

Déclare la société MALERBA mal fondée dans sa demande en dommages et intérêts formée à l'encontre de la société JH INDUSTRIES et l'en déboute,

Y ajoutant,

Condamne la société JH INDUSTRIES à payer à la société MALERBA la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que les dépens qui seront recouvrés par la SCP DUTRIEVOZ, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,

M.P. Y...

H. ROBERT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006947888
Date de la décision : 10/11/2005
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Consentement - Erreur - Erreur sur la substance - Vente

Nul ne peut se prévaloir d'une erreur obstacle à raison de la disproportion considérable entre le prix facturé et celui que le vendeur pratiquait habituellement pour les mêmes produits ; cette notion d'origine doctrinale ne pouvant être considérée au regard des textes comme une entité qui aurait une quelconque autonomie. Il en résulte que l'appréciation erronée du prix ne constitue pas une erreur sur la substance de nature à vicier le consentement de l'acquéreur, d'autant plus lorsque ce dernier est un professionnel qui exerce dans le même domaine d'activité que le vendeur


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2005-11-10;juritext000006947888 ?
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