La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/11/2005 | FRANCE | N°05/04133

France | France, Cour d'appel de Lyon, 08 novembre 2005, 05/04133


R.G : 05/04133 décision du Tribunal de Commerce de LYON Ord. référé 2005r675 du 07 juin 2005 SA FIDUCIAIRE NATIONALE D'EXPERTISE COMPTABLE SA FIDUCIAL INFORMATIQUE C/ SA CEGID SA CCMX VENANT AUX DROITS DE LA SA CCMX HOLDING COUR D'APPEL DE LYON 8ème Chambre Civile * ARRET du 8 Novembre 2005 APPELANTES :

SA FIDUCIAIRE NATIONALE D'EXPERTISE COMPTABLE

représentée par ses dirigeants légaux

20, place de l'Iris

92400 COURBEVOIE

Représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués

Assistée de Me COTTY, avocat et Me AUBERT, avocat

SA FIDUCIAL INFORMATIQUE

représentée par ses dirigeants légaux

20, place de l'Iris

92400 COU...

R.G : 05/04133 décision du Tribunal de Commerce de LYON Ord. référé 2005r675 du 07 juin 2005 SA FIDUCIAIRE NATIONALE D'EXPERTISE COMPTABLE SA FIDUCIAL INFORMATIQUE C/ SA CEGID SA CCMX VENANT AUX DROITS DE LA SA CCMX HOLDING COUR D'APPEL DE LYON 8ème Chambre Civile * ARRET du 8 Novembre 2005 APPELANTES :

SA FIDUCIAIRE NATIONALE D'EXPERTISE COMPTABLE

représentée par ses dirigeants légaux

20, place de l'Iris

92400 COURBEVOIE

Représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués

Assistée de Me COTTY, avocat et Me AUBERT, avocat

SA FIDUCIAL INFORMATIQUE

représentée par ses dirigeants légaux

20, place de l'Iris

92400 COURBEVOIE

Représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués

Assistée de Me COTTY, avocat et Me AUBERT, avocat INTIMEES :

SA CEGID

représentée par ses dirigeants légaux

52, Quai Paul Sédallian

69279 LYON CEDEX 09

Représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués

assistée de Me LAURENT, avocat et Me François BRUNET, avocat

SA CCMX

venant aux droits de la SA CCMX HOLDING

et de la SA CCMX

représentée par ses dirigeants légaux

52 Quai Paul Sédaillan

69279 LYON CEDEX 09

Représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués

assistée de Me LAURENT, avocat et Me François BRUNET, avocat INTERVENANT :

Monsieur le Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie

représenté par Monsieur le Directeur Régional de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes - département du Rhône

192 avenue Thiers - Immeuble Auréalys

69457 LYON CEDEX 06

Représenté à l'audience par Madame WISS X...,

Inspectrice principale Instruction clôturée le 05 Octobre 2005 Audience de plaidoiries du 05 Octobre 2005 La huitième chambre de la COUR d'APPEL de LYON, composée lors des débats et du délibéré de : * Martine Y..., conseiller, faisant fonction de Président, * Jean DENIZON, conseiller, * Mireille QUENTIN de GROMARD, Vice-présidente placée, désignée par ordonnance du premier Président en date du 1er Septembre 2005, assistés lors des débats tenus en audience publique par Nicole Z..., Greffier, a rendu l'ARRET contradictoire suivant :

FAITS-PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La SA FIDUCIAIRE NATIONALE D'EXPERTISE COMPTABLE (ci-après FIDEXPERTISE) filiale du groupe FIDUCIAL est actionnaire de la société CEGID qui fabrique et commercialise des progiciels de gestion à destination des PME et des experts comptables et assure des prestations informatiques. La SA FIDUCIAL INFORMATIQUE également filiale de FIDUCIAL est spécialisée dans l'informatique, le développement et la commercialisation de logiciels de gestion et de solutions informatiques "clés en mains" conçues spécifiquement par métier.

Suivant accord du 23 juin 2004, la société CEGID s'est engagée à acquérir par voie d'apport de 100 % des actions de la société CCMX HOLDING (dorénavant dénommée CCMX après absorption de la société CCMX) ; ce projet constituant une opération de concentration au sens de l'article L 430-1 du code de commerce a été notifié le 13 juillet 2004 aux services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (ci-après DGCCRF) en application de l'article L 430-3 du code de commerce ; le Ministre a

autorisé l'opération le 19 octobre 2004 et cette décision n'a été publiée au bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes que le 26 avril 2005.

Le 16 novembre 2004 une assemblée générale extraordinaire des actionnaires de la société CEGID a approuvé l'opération.

La société FIDEXPERTISE et la société FIDUCIAL INFORMATIQUE ont saisi le Conseil d'Etat au fond et en référé.

Le Conseil d'Etat :

- par ordonnance de référé en date du 19 mai 2005, a suspendu la décision d'autorisation ministérielle et par ordonnance du 30 juin 2005, saisi par le ministère, a refusé de mettre fin à sa mesure de suspension,

- au fond par arrêt avant dire droit en date du 20 juillet 2005, a sollicité l'avis du Conseil de la concurrence.

Reprochant à la société CEGID de continuer une politique de communication affirmant que la société CEGID et la société CCMX ne formaient qu'un seul groupe et de procéder à des actes rendant irréversible l'opération de concentration en cas d'annulation définitive de la décision ministérielle, les sociétés FIDEXPERTISE et FIDUCIAL INFORMATIQUE ont saisi le juge des référés du tribunal de

commerce de LYON pour obtenir diverses mesures :

[* l'ajournement de l'assemblée générale des actionnaires prévue pour le 8 juin 2005,

*] la désignation d'un mandataire ad hoc au sein de la société CEGID afin notamment de surveiller sa gestion et de gérer sa participation dans la société CCMX,

[* la désignation d'un administrateur provisoire au sein de la société CCMX en remplacement des dirigeants en fonction afin d'assurer sa gestion, et subsidiairement la désignation d'un observateur de gestion

*] et plus généralement qu'il soit fait injonction à la société CEGID et la société CCMX de ne rien faire qui soit de nature à renforcer le caractère irréversible de l'opération,

C'est dans ces conditions que par ordonnance de référé en date du 7 juin 2005, le président du tribunal de commerce de LYON a rejeté toutes les demandes des sociétés FIDEXPERTISE et FIDUCIAL INFORMATIQUE et les a condamnées solidairement à payer à chacune des sociétés CEGID, CCMX HOLDING et CCMX la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile et les a condamnées aux dépens.

Les sociétés FIDEXPERTISE et FIDUCIAL INFORMATIQUE ont relevé appel de cette décision le 14 juin 2005.

Elles concluent à l'infirmation de l'ordonnance du premier juge, reprennent leurs demandes initiales et réclament au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile la condamnation solidaire de leurs adversaires au paiement de la somme de 7.500 euros.

Elles font valoir :

- sur leur intérêt à agir, que FIDEXPERTISE est actionnaire de la société CEGID, que FIDUCIAL INFORMATIQUE est concurrente des

intimées, que leur volonté est de préserver la concurrence et la situation de chacune des intimées,

- sur la compétence du juge des référés judiciaire que leurs demandes ne posent pas une question d'exécution par l'administration de la mesure de suspension, qu'en réalité il convient de tirer les conséquences de la nouvelle situation juridique créée par la décision de suspension, qu'il s'agit de mettre fin à des actes qui tendent à réaliser la concentration, que le ministre est incompétent pour ordonner les mesures sollicitées - puisqu'il ne peut prendre que des sanctions pécuniaires - ainsi que le Conseil d'Etat qui ne peut pas enjoindre à l'administration de prendre des mesures qui ne relèvent pas de sa compétence, que le litige oppose deux personnes de droit privé sur des demandes n'ayant aucun caractère administratif et touchant de manière évidente à des questions purement privées de droit des affaires et de droit des sociétés et que le juge judiciaire est seul compétent pour ordonner les mesures sollicitées, d'origine prétorienne.

Sur le bien-fondé de leurs demandes, les appelantes soutiennent que les effets de l'assemblée générale du 8 juin 2005 - même si leur demande d'ajournement est désormais sans objet - doivent être suspendus jusqu'à la décision au fond du Conseil d'Etat et notamment que doit être interdite toute opération sur le capital social de la société CEGID, que la politique de communication de la société CEGID démontre qu'elle n'est pas décidée à respecter la décision de suspension, que la nomination d'un administrateur provisoire et d'un mandataire ad hoc permettrait de sauvegarder l'autonomie de la société CCMX et que doivent être interdites toutes mesures qui renforceraient la prise de contrôle de la société CCMX par la société CEGID et ce sous astreinte de 100.000 euros par infraction constatée.

Les sociétés CEGID et CCMX demandent, au visa des articles L 430-3 et 4 du code du commerce, L 521-3 et L 521-4, L 911-1 et suivants du code de justice administrative, la confirmation de l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions aux motifs que les demandes des appelantes s'analysent en une demande de mise en oeuvre de la décision de suspension du Conseil d'Etat qui relève de la compétence de cette juridiction et non de l'ordre judiciaire, que seul le ministre de l'économie a compétence pour mettre en oeuvre la décision du 19 mai 2005 et que les appelantes doivent être renvoyées à se pourvoir devant le Conseil d'Etat.

Après avoir rappelé que l'ensemble des mesures prises par CEGID depuis le 19 octobre 2004 et jusqu'à l'ordonnance de suspension sont régulières, les intimées font valoir que le juge des référés judiciaire est doublement incompétent.

Elles soutiennent en effet :

- que les demandes tendent à assurer l'application et le respect de l'ordonnance de suspension,

- qu'il appartient au ministre de l'économie de tirer les conséquences de l'ordonnance et de définir les modalités de son exécution tant en vertu de la formule exécutoire figurant sur l'ordonnance du 19 mai 2005 qu'en application de l'article L 430-8-II du Code de commerce pour sanctionner tout manquement au principe de l'effet suspensif de la notification puisque la décision d'autorisation a cessé de produire ses effets, que la DGCCRF s'acquitte de sa mission puisqu'elle a organisé deux réunions et leur a adressé deux courriers les 3 juin 2005 et 30 août 2005, qu'il appartient aux appelantes de saisir le ministre de toute difficulté et en cas de carence de ce dernier de saisir le juge administratif,

- que seul le juge administratif est compétent eu égard à la nature purement administrative du litige et s'agissant de l'exécution d'une

décision rendue par une juridiction administrative en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, que depuis les lois du 16 juillet 1980 et du 8 février 1995 les juridictions administratives ont été dotées du pouvoir d'injonction et de prononcé d'astreintes, procédure que les appelantes pouvaient mettre en oeuvre en application de l'article L 911-1 et L 911-5 et que le juge des référés administratifs dispose en cas d'urgence du pouvoir d'ordonner toutes mesures utiles (L 521-3 du code de justice administrative) et de modifier les mesures ordonnées (L 521-4 du code de justice administrative).

Subsidiairement, elles demandent qu'il soit jugé que les appelantes n'ont pas qualité à agir et qu'en tout état de cause leurs demandes sont non fondées et doivent être rejetées.

Elles ajoutent que les mesures sollicitées sont tardives puisque toutes les décisions prises en matière juridique, opérationnelle ou de communication sont antérieures à l'ordonnance du 19 mai 2005, et injustifiées, les quelques éléments de communication étant dérisoires et insuffisants ; puis procédant à l'examen des différentes mesures

sollicitées, elles en discutent l'opportunité.

Enfin, elles réclament en plus à chacune des appelantes la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Le directeur régional de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à LYON agissant en application de l'article L 470-5 du code de commerce a déposé des conclusions tendant à la confirmation de l'ordonnance aux motifs que seul le Conseil d'Etat est compétent au fond et en référé pour connaître de tous les recours portant sur des décisions de concentration, que les demandes des appelantes tendent à voir adopter des mesures de nature à assurer le respect de l'ordonnance de suspension et que la formule exécutoire de ladite ordonnance a donné mission au ministre de veiller au respect du principe de l'effet suspensif de l'opération avant que celle-ci ne soit autorisée.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Attendu que le litige ne se résume pas à un différend entre des sociétés commerciales concurrentes ;

qu'il s'agit de prendre des mesures accompagnant une action en annulation d'autorisation ministérielle dans le cadre d'opération de concentration ; qu'il relève par sa nature des juridictions administratives puisqu'en application de l'article R 311-1 (9o) du

Code de justice administrative, le Conseil d'Etat est compétent pour connaître des recours dirigés contre les décisions ministérielles prises en matière de contrôle des concentrations économiques ;

Attendu que si les appelantes estiment que le ministre, en se contentant d'adresser deux courriers et d'organiser deux réunions, a insuffisamment contrôlé les opérations menées par CEGID ensuite de l'ordonnance de suspension et qu'il existe un risque d'irréversibilité de l'opération - les intimées reconnaissant elles-mêmes que l'opération de rapprochement est pratiquement réalisée excepté la réorganisation des locaux, le regroupement des équipes et le système d'information en cours selon elles -, elles ne se trouvent pas sans moyens juridiques pour pallier à cette carence ; qu'en effet, elles disposent notamment du référé "mesures utiles" de l'article L 521-3 du Code de justice administrative ("en cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative") ;

Attendu que le juge de l'ordre judiciaire n'est pas compétent pour statuer sur les mesures sollicitées par les sociétés FIDEXPERTISE et FIDUCIAL INFORMATIQUE ; qu'il convient de les renvoyer à se pourvoir comme elles aviseront devant les juridictions administratives ;

Attendu que l'ordonnance déférée tout en constatant que "seul le juge administratif était compétent" a abordé néanmoins le bien-fondé des demandes et les a rejetées ; qu'elle sera confirmée quant à la compétence, au demeurant par substitution de motifs, à l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile et aux dépens mais infirmée en ce qu'elle a rejeté les demandes ;

Attendu que l'équité commande d'allouer aux intimées pour la procédure d'appel la somme de 2.000 euros chacune en application de

l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS La Cour,

Infirmant l'ordonnance déférée en ce qu'elle a rejeté les demandes présentées par la SA FIDUCIAIRE NATIONALE D'EXPERTISE COMPTABLE et la SA FIDUCIAL INFORMATIQUE et statuant à nouveau :

Déclare le juge des référés de l'ordre judiciaire incompétent "ratione materiae" pour connaître des demandes des sociétés FIDUCIAIRE NATIONALE D'EXPERTISE COMPTABLE et SA FIDUCIAL INFORMATIQUE et les renvoie à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront devant les juridictions de l'ordre administratif ;

Confirme l'ordonnance déférée quant à l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile et au sort des dépens ;

Y ajoutant :

Condamne la SA FIDUCIAIRE NATIONALE D'EXPERTISE COMPTABLE et la SA FIDUCIAL INFORMATIQUE à payer à la SA CEGID et à la SA CCMX la somme de 2.000 euros chacune en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ;

Condamne la SA FIDUCIAIRE NATIONALE D'EXPERTISE COMPTABLE et la SA FIDUCIAL INFORMATIQUE aux dépens d'appel qui seront recouvrés par l'avoué de leurs adversaires conformément à l'article 699 du Nouveau code de procédure civile.

Cet arrêt a été prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile, et signé par Martine Y..., Conseillère, faisant fonction de Présidente de la huitième chambre, en l'absence de la Présidente légitimement empêchée, et par Nicole Z..., Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par le Magistrat signataire.

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

Mme Z...

Mme Y...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 05/04133
Date de la décision : 08/11/2005
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2005-11-08;05.04133 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award