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03/11/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006947245

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0030, 03 novembre 2005, JURITEXT000006947245


COUR D'APPEL DE LYON

SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 03 NOVEMBRE 2005

Décision déférée : Décision du Tribunal d'Instance de LYON du 24 janvier 2005 - (R.G. : 2004/3467) No R.G. : 05/01051

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande tendant à la réparation et/ou à la cessation d'une atteinte au droit au respect de la vie privée APPELANT : Monsieur Robert X... Demeurant : 6 rue Gensoul 69110 SAINTE FOY LES LYON représenté par Maître DE FOURCROY, Avoué assisté par Maître JAUBERT-VEDRINES, Avocat, (TOQUE 352) INTIME : Monsieur Xavier Y... Demeurant : 8 Chemin

de la Croix Chevrot 69580 SATHONAY VILLAGE représenté par la SCP JUNILLON-WICKY, ...

COUR D'APPEL DE LYON

SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 03 NOVEMBRE 2005

Décision déférée : Décision du Tribunal d'Instance de LYON du 24 janvier 2005 - (R.G. : 2004/3467) No R.G. : 05/01051

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande tendant à la réparation et/ou à la cessation d'une atteinte au droit au respect de la vie privée APPELANT : Monsieur Robert X... Demeurant : 6 rue Gensoul 69110 SAINTE FOY LES LYON représenté par Maître DE FOURCROY, Avoué assisté par Maître JAUBERT-VEDRINES, Avocat, (TOQUE 352) INTIME : Monsieur Xavier Y... Demeurant : 8 Chemin de la Croix Chevrot 69580 SATHONAY VILLAGE représenté par la SCP JUNILLON-WICKY, Avoués assisté par Maître HOURSE, Avocat, (TOQUE 346) Instruction clôturée le 09 Septembre 2005 Audience de plaidoiries du 22 Septembre 2005 LA SIXIEME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, composée lors des débats et du délibéré de :

. Monsieur LECOMTE, Président

. Madame DUMAS, Conseiller

. Madame de la LANCE, Conseiller assistés lors des débats tenus en audience publique par Madame SENTIS, Greffier, a rendu le 03 NOVEMBRE 2005, l'arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour d'Appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile, signé par Monsieur LECOMTE, Président, et par Madame SENTIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Le dossier a été communiqué au Ministère Public, qui a été avisé de la date de l'audience.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

L'Association Escadron de Saumur , régie par la loi de 1901, est administrée par un comité de direction composé de 20 membres au plus qui élit pour deux ans son bureau comprenant au moins le président, deux vice-présidents, le secrétaire et le trésorier. Suite à la démission de sa présidente en juin 2003, Monsieur Xavier Y... est devenu président par intérim et a été confirmé dans son mandat par l'assemblée générale du 23 avril 2004. Monsieur Robert X... a été élu membre du bureau du comité directeur, chargé de la communication.

Les relations entre certains membres du comité directeur et le président se sont dégradées en raison de divergences concernant

l'administration et la gestion de l'association, et, à la suite d'une réunion du comité tenue dans une ambiance tendue le 28 juin 2004, trois de ses membres, dont Monsieur X..., ont démissionné, étant en total désaccord avec la décision prise par Monsieur Y..., ne figurant pas à l'ordre du jour, de licencier l'instructeur du club. Par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 juillet 2004, adressée aux membres du comité directeur de l'association et à la Préfecture de l'Ain, Monsieur X... a fait part de sa démission et des causes de celle-ci en critiquant les agissements de Monsieur Y... en sa qualité de président.

En septembre 2004, Monsieur Y... a fait assigner Monsieur X... devant le tribunal d'instance de Lyon, en fondant son action sur l'application des articles 29, alinéa 1, et 32, alinéa 1, de la loi du 29 juillet 1881, et exposant que les termes du courrier du 3 juillet 2004 sont diffamatoires, pour obtenir des dommages et intérêts et l'insertion dun extrait du jugement dans une revue consacrée aux sports hippiques. L'Association de l'Escadron de Saumur est intervenue volontairement à la procédure pour obtenir le paiement des frais engagés et de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Par jugement du 24 janvier 2005, le tribunal a déclaré irrecevable l'intervention volontaire de l'Association de l'Escadron de Saumur, a dit que le courrier diffusé le 3 juillet 2004 par Monsieur X... contient des propos diffamatoires à l'encontre de Monsieur Y..., a condamné Monsieur X... à payer à Monsieur Y... la somme de 400 ç à titre de dommages et intérêts, a débouté Monsieur Y... de sa demande de diffusion d'un extrait du jugement dans une revue, a ordonné l'exécution provisoire du jugement et a condamné Monsieur X... à payer à Monsieur Y... la somme de 350 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Monsieur X... a interjeté appel de ce jugement et soutient que

l'application de la loi du 29 juillet 1881 est incompatible avec celle de l'article R 321-8 du Code de l'organisation judiciaire, que l'article 53 de la loi précitée impose, à peine de nullité, de notifier la citation au ministère public et de communiquer les pièces visées, que les pièces n'ayant été communiquées que plus de trois mois après les faits, la procédure de Monsieur Y... est irrégulière et donc nulle, que ce dernier, ayant choisi la voie civile, ne peut ainsi revendiquer l'observation de l'article 55 de la même loi, qu'en conséquence, toutes les preuves fournies aux débats par Monsieur X... sont recevables de plein droit, que l'action de Monsieur Y... est irrecevable, que la lettre incriminée est confidentielle, les membres du comité directeur ayant une communauté d'intérêt, et ne contient aucun propos diffamatoires, seulement des critiques sur une gestion et un comportement incompatibles avec la vie associative motivant la démission, que Monsieur Y... a présenté les faits de façon mensongère dans son acte introductif, que la transmission à la Préfecture ne caractérise pas l'élément de publicité, que toute modification doit être déclarée, que l'autorité de tutelle définie par la loi ne peut être considérée comme un tiers, que la procédure engagée par Monsieur Y... est abusive et tente de nuire à l'association, et que le préjudice allégué par celui-ci n'est pas établie.

Monsieur X... demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de constater l'irrégularité de la procédure engagée, de juger irrecevable, comme non fondée, l'action en diffamation diligentée ainsi que son caractère abusif, et de condamner Monsieur Y... à lui payer la somme symbolique de 1 000 ç en réparation de son préjudice moral et celle de 2 500 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Monsieur Y... fait valoir que Monsieur X... ne peut faire état

pour la première fois devant la Cour de moyens de nullité concernant la procédure, que la lettre litigieuse ayant été adressée à la Préfecture, la diffamation doit être considérée comme publique, que cette lettre de démission n'avait pas à être publiée, que la dénonciation à Parquet a été faite, que la référence à l'article R 321-8 du Code de l'organisation judiciaire n'est pas une faute procédurale, ce texte désignant la juridiction compétente, qu'il était dans l'obligation de citer les articles de la loi de 1881 applicables, que l'article 55 de cette loi n'a pas été respecté par Monsieur X... qui ne peut donc discuter de la véracité des faits dénoncés dans sa lettre, qu'il n'y a donc pas lieu de distinguer selon que les imputations sont vraies ou fausses, que les propos tenus dans son courrier sont bien attentatoires à l'honneur et à la considération, qu'en outre, les reproches faits ne résistent pas à l'analyse, que le comportement de la nouvelle direction n'est pas exempt de reproches, et que les sommes allouées par le premier juge ne réparent pas son préjudice.

Monsieur Y... demande à la Cour de confirmer sur le principe le jugement de première instance, de condamner Monsieur X... à lui payer une somme de 10 000 ç à titre de dommages et intérêts, à supporter les frais d'insertion, dans une revue consacrée aux sports hippiques, d'un extrait du jugement sans que le coût excède 1 200 ç et à lui payer une somme de 2 500 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que l'action engagée par Monsieur Y... est une action en diffamation publique par la voie civile, soumise à la procédure particulière prévue par la loi du 29 juillet 1881, notamment ses articles 29 et 32 renvoyant à l'article 23, et ses articles 53 et 55 ; que la compétence du tribunal d'instance saisi est prévue par l'article R 321-8 du Code de l'organisation judiciaire s'agissant de diffamation autrement que par voie de presse ;

Attendu que Monsieur X... soutient que la procédure est irrégulière au regard de l'article 53 de la loi précitée ; qu'il apparaît que ce moyen de nullité n'a pas été soulevé avant toute défense au fond devant le premier juge ; qu'il est donc irrecevable en cause d'appel ; qu'en tout état de cause, il peut être retenu que l'assignation, qui a précisé et qualifié le fait incriminé, a indiqué le texte de loi applicable et a été notifiée au ministère public, est régulière ; Attendu, comme l'a jugé le premier juge par des motifs que la Cour adopte expressément, que si les membres du comité directeur de l'Escadron de Saumur sont liés entre eux par une communauté d'intérêts excluant le caractère public de la diffamation si le courrier litigieux n'avait été diffusé qu'à ceux-ci, le fait que le courrier ait été aussi adressé à la Préfecture a rendu publique la diffamation incriminée ; que la Préfecture ne peut être considérée que comme un tiers à l'association et à son comité directeur, n'ayant aucune communauté d'intérêts avec eux ; que l'obligation d'envoyer une déclaration modificative à la Préfecture ne peut justifier de la

nécessité d'adresser également le courrier motivant la démission et contenant les propos critiqués ;

Attendu que la Cour adopte également les motifs du jugement déféré concluant au caractère diffamatoire des propos tenus dans le courrier de Monsieur X... ; qu'en effet, dans ce courrier, Monsieur X... dénonce, notamment, le comportement dictatorial, abusif de Monsieur Y..., certaine démarche qui ne lui a pas paru des plus honnêtes ou cherchant à induire le vote de membres du comité, le fait qu'il modifie à sa convenance le contenu des PV de réunion, ainsi qu'un fonctionnement de l'association non conforme aux dispositions légales ; qu'il s'agit de faits précis mettant en cause l'honnêteté et la loyauté de Monsieur Y... dans ses actes et ses intentions ;

Attendu que l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881, applicable en l'espèce, prévoit la possibilité pour l'auteur de la diffamation reprochée de prouver la véracité des faits imputés au plaignant mais dans certaines formes précises ; que ces prescriptions sont d'ordre public ; que là également le premier juge a retenu, à bon droit, que Monsieur X... ne s'étant pas conformé à ces dispositions, les éléments produits pour établir la véracité des faits diffamatoires sont irrecevables ; que la diffamation est ainsi retenue sans qu'il ne puisse être examiné si les faits imputés sont vrais ou faux ;

Attendu, cependant, que le caractère public de la diffamation se limite à l'envoi de la lettre de démission de Monsieur X... à la Préfecture ; que l'allégation en cause d'appel du fait que cette lettre aurait été exposée dans l'enceinte de l'association et auraient pu être vues par tous les membres de celle-ci, n'est étayée par aucun élément ; que la Cour confirmera la décision du premier juge qui a retenu que le préjudice subi par Monsieur Y... était limité et doit être indemnisé par une somme de 400 ç à titre de dommages et intérêts sans qu'il soit nécessaire d'ordonner la

diffusion d'un extrait de la décision ;

Attendu que le bien fondé partiel des demandes de Monsieur Y... entraîne le rejet des demandes de Monsieur X... ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Déclare irrecevable le moyen de nullité de la procédure soulevé par Monsieur Robert X...,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Déboute Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes,

Condamne Monsieur X... à payer à Monsieur Xavier Y... la somme de 700 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, en sus de celle déjà accordée par le premier juge,

Condamne Monsieur X... aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de la SCP JUNILLON etamp; WICKY, Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0030
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006947245
Date de la décision : 03/11/2005

Analyses

DIFFAMATION ET INJURES

Si les membres du comité directeur de l'association sont liés entre eux par une communauté d'intérêts excluant le caractère public de la diffamation si le courrier litigieux concernant le président de l'association n'avait été diffusé qu'à ceux-ci, le fait que le courrier ait été adressé à la Préfecture a rendu publique la diffamation incriminée. La Préfecture ne être considérée que comme un tiers à l'association et à son comité directeur, n'ayant aucune communauté d'intérêt avec eux, l'obligation d'envoyer une déclaration modificative à la Préfecture ne pouvant justifier de la nécessité d'adresser également le courrier motivant la démission d'un membre du comité directeur et contenant les propos critiqués.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2005-11-03;juritext000006947245 ?
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