R.G : 03/06494 décision du Tribunal de Grande Instance de LYON Ord. référé 2003/02546 du 27 octobre 2003 MARTELON C/ NOIERIE EURL NMC COUR D'APPEL DE LYON 8ème Chambre Civile * ARRET du 25 Octobre 2005 APPELANT :
Monsieur Paul MARTELON
43 rue de la République
69600 OULLINS
Représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
Assisté de Me Luc CHAUPLANNAZ, avocat
substitué par Me Albert BRUNET, Avocat INTIMEES :
Madame Nadine X...
147 Grande Rue
69600 OULLINS
Représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués
Assistée de Me TALLENT, avocat
EURL NMC
représentée par sa gérante
147 Grande Rue
69600 OULLINS
Représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués
Assistée de Me TALLENT, avocat Instruction clôturée le 07 Mars 2005 Audience de plaidoiries du 13 Septembre 2005 La huitième chambre de la COUR d'APPEL de LYON, composée lors des débats et du délibéré de : * Martine BAYLE, conseiller, faisant fonction de Président, * Jean DENIZON, conseiller, * Mireille QUENTIN de GROMARD, Vice-présidente placée, désignée par ordonnance du premier Président en date du 1er Septembre 2005, assistés lors des débats tenus en audience publique par Nicole MONTAGNE, Greffier, a rendu l'ARRET contradictoire suivant : ELEMENTS DU LITIGE
Par acte sous seing privé en date du 1er octobre 2001 M. Paul MARTELON a donné à bail à Mme Nadine X... un local commercial sis 43 rue de la République à Oullins (69 600).
Par ordonnance du 27 octobre 2003 le juge des référés du tribunal de
grande instance de Lyon, saisi sur assignation de M. MARTELON tendant à l'expulsion de Mme X... et de la société E.U.R.L. NMC, société exploitant le fonds de commerce, a débouté le bailleur de ses demandes, l'a condamné à payer aux défendeurs une somme de 650 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile (ci-après N.C.P.C.) et l'a condamné aux dépens.
Par déclaration d'appel remise au greffe de la Cour d'Appel de Lyon le 10 novembre 2003 M. MARTELON a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions. PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Au terme de ses conclusions no2 en réponse et récapitulatives, notifiées et déposées le 9 décembre 2004, M. MARTELON demande à la Cour :
- de réformer l'ordonnance de référé querellée,
- de dire et juger que le premier juge aurait dû ordonner l'expulsion de Mme X... et de la société E.U.R.L. NMC,
- de constater que le 4 décembre 2003 Mme X... a rendu les clés au bailleur,
- de le décharger de la condamnation prononcée contre lui par le juge des référés au titre de l'article 700 du N.C.P.C.,
- de condamner solidairement Mme X... et la société E.U.R.L. NMC à lui payer la somme de 7 891,61 euros, outre la somme de 650 euros au titre de l'article 700 du N.C.P.C. pour la procédure devant le premier juge ainsi que 650 euros en application de ce même article pour la procédure d'appel,
- de condamner solidairement les intimés aux dépens tant de première instance que d'appel qui comprendront le coût du procès verbal de constat de Maître GRANGE, huissier de justice, et qui seront distraits, pour ceux d'appel, au profit de Maître MOREL, avoué, en application de l'article 699 du N.C.P.C.
M. MARTELON expose que les parties avaient expressément entendu
déroger aux dispositions du décret 53-960 du 30 septembre 1953 portant statut général des baux commerciaux et prévu de conclure un bail de courte durée, inférieur à deux années, défini à l'article 3-2 de ce décret, bail qui ne doit pas être confondu avec une convention précaire. Il souligne que les parties usant d'une faculté légale n'ont pas à s'expliquer sur les raisons pour lesquelles le bail est limité à une durée n'excédant pas deux ans.
M. MARTELON précise réclamer à titre provisionnel en application de l'article 873 du N.C.P.C. la somme de 7 891,61 euros se décomposant en une indemnité d'occupation (1 737 euros) suite au départ de Mme X... et de la société E.U.R.L. NMC, en des frais de remplacement de la vitrine de magasin (926,90 euros) et en des frais de remise en état du local commercial (5 227,71 euros). Réfutant toute irrecevabilité de ses demandes en paiement il souligne que celles-ci ne sont que l'accessoire et la conséquence de sa demande initiale en expulsion suite au départ de la locataire et qu'elles proviennent en outre de la révélation d'un fait, en l'espèce un dégât important commis par la locataire.
Dans leurs écritures notifiées et déposées le 22 novembre 2004 Mme X... et la société à responsabilité limitée E.U.R.L. NMC concluent à la confirmation de l'ordonnance déférée, au débouté des demandes de M. MARTELON comme irrecevables, injustifiées et non fondées et à la condamnation du bailleur à leur verser la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du N.C.P.C. pour la procédure d'appel, outre sa condamnation aux dépens lesquels seront distraits au profit de la S.C.P. AGUIRAUD-NOUVELET, avoués, en application de l'article 699 du N.C.P.C.
Elles soutiennent que le recours à un bail de courte durée est limitée d'une part quant aux raisons objectives de conclusion d'un tel contrat et d'autre part quant à sa durée qui ne peut être
supérieure à deux années ; qu'en l'espèce le bail a été conclu pour une durée de plus de deux années, aucune raison particulière n'ayant en outre été exposée par le bailleur pour la signature d'un tel bail dérogatoire de courte durée ; qu'il a donc été conclu en fraude des droits du locataire. Ils prétendent enfin que Mme X... avait obtenu l'assurance orale de M. MARTELON de ce qu'à l'issue de cette période de deux ans le bail serait prolongé sur une période de neuf années.
Contestant les demandes en paiement du bailleur, les intimées exposent qu'elles sont irrecevables car présentées pour la première fois en cause d'appel et qu'en outre le juge du fond est déjà saisi d'une demande d'indemnité d'occupation et d'indemnité au titre des réparations locatives. Elles critiquent également le constat d'huissier établi non contradictoirement, nient être à l'origine du bris de la vitrine et soulignent enfin que le bail ayant été résilié immédiatement elles ne sont pas redevables des indemnités d'occupation de septembre, octobre et novembre.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 mars 2005.
A l'audience des plaidoiries du 13 septembre 2005, l'affaire a été utilement appelée. MOTIVATION DE LA DECISION Les parties ayant comparu, la présente décision sera contradictoire. 1 - sur le bail de courte durée
A l'appui de ses prétentions M. MARTELON verse aux débats le bail commercial signé par les deux parties le 1er octobre 2001 lequel est intitulé "bail de courte durée (inférieure à 2 ans) non soumis au statut des baux commerciaux (art. 3-2 du décret du 30 septembre 1953)". Le chapitre 1 de ce document, relatif au "régime juridique", prévoit les dispositions suivantes :
" De convention expresse sans laquelle le présent bail n'aurait pas été conclu, les parties entendent déroger aux dispositions du décret no 53-960 du 30 septembre 1953 portant statut général des baux
commerciaux.
En conséquence, et conformément à l'article 3-2 du décret précité, ce bail, soumis aux seules dispositions du droit commun relatives aux baux et notamment aux articles 1714 à 1762 du Code Civil, est conclu pour une durée au plus égale à 24 mois, jour pour jour.
Dans le cade de l'article 3-2 du décret précité, le preneur reconnaît n'avoir aucun droit à la propriété commerciale sur lesdits locaux qu'il s'oblige irrévocablement à libérer à l'expiration du terme fixé.
(...)"
L'article L. 145-5 du Code de Commerce -ancien article 3-2 du décret du 30 septembre 1953- dispose que "Les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions du présent décret à la condition que le bail soit conclu pour une durée au plus égale à deux ans."
Il résulte de ce texte que les parties, qui ont la faculté de par la loi de soustraire le contrat de location au statut des baux commerciaux, doivent avoir eu la volonté claire et non équivoque de fixer une durée inférieure ou égale à deux ans.
En l'espèce les termes du bail commercial qui disposent de manière expresse que ce bail est conclu pour une durée au plus égale à 24 mois jour pour jour, dans le cadre de l'article 3-2 du décret no 53-960 du 30 septembre 1953, ne laissent aucun doute sur la commune intention du bailleur et du preneur d'écarter les règles du statut des baux commerciaux et d'appliquer un bail de courte durée. La fraude invoquée par les intimées n'est donc pas rapportée.
Dès lors, en relevant que le bail ne contient aucune précision sur la motivation du bailleur et du preneur sur le choix de la durée de deux ans, le premier juge a ajouté au texte. En conséquence l'ordonnance de référé du 27 octobre 2003 doit être infirmée en toutes ses
dispositions.
Il résulte des débats et du reçu délivré par M. MARTELON à Mme X... et contresigné par elle le 4 décembre 2003 que le preneur a remis les clefs du local commercial sis 43 rue de la République à Oullins le 4 décembre 2003. En conséquence la demande initiale d'expulsion présentée par le bailleur est désormais sans objet.lsion présentée par le bailleur est désormais sans objet. 2 - sur la demande de provision
Les demandes d'indemnités provisionnelles, en ce qu'elles sont les conséquences et le complément des demandes formulées devant le premier juge, sont recevables.
Il convient de faire droit à la demande d'indemnité d'occupation pour les mois de septembre, octobre et novembre 2003, les clefs n'ayant été remises que le 4 décembre 2003, soit une indemnité provisionnelle de 1 737 euros.
A l'appui de sa demande de réparations locatives M. MARTELON produit un état des lieux en date du 26 septembre 2002 signé par le locataire, le propriétaire et son mandataire, lesquels constatent que l'état des lieux est satisfaisant, et un procès verbal dressé par Maître GRANGE huissier de justice à Oullins daté du 16 décembre 2003 mentionnant des sols sales, poussiéreux, voire encrassés, des murs à la peinture jaunie, sale et fissurée, des fa'ences murales sales.
Si Mme X... et la société E.U.R.L. NMC contestent ce procès verbal en ce qu'il n'aurait pas été contradictoirement établi, M. MARTELON verse aux débats les copies du courrier recommandé de convocation adressé le 5 décembre 2003 par l'huissier de justice qu'ils ne contestent pas avoir reçu. En conséquence cette argumentation doit être écartée.
Au vu de ce constat d'huissier et du devis établi par M. GUILLOT en date du 30 décembre 2003 lequel porte sur des travaux relatifs au
lessivage des plafonds et des fa'ences, au dégraissage des tuyauteries, au nettoyage général des sols, à l'application de couches de peinture, la demande de M. MARTELON doit être accueillie à hauteur de 5 227,71 euros.
L'huissier de justice a relevé dans son constat que la pièce principale est éclairée par une baie vitrée laquelle est fissurée en deux endroits en partie basse, son arête étant en outre ébréchée.
Si les intimés contestent être à l'origine du bris de la vitrine du magasin ils n'ont cependant pas critiqué la lettre de M. PLANTIN datée du 27 octobre 2003 produit par M. MARTELON à l'appui de sa demande lequel indique avoir été le témoin de la détérioration de la vitrine par M. Montoya alors qu'il rentrait le panneau publicitaire dans la pizzeria. En conséquence et au vu du devis en date du 18 novembre 2003 il y a lieu de retenir la somme de 926,90 euros.
Dès lors Mme X... et la société E.U.R.L. NMC doivent être solidairement condamnées à régler une indemnité provisionnelle de 7 891,61 euros à M. MARTELON. 3 - autres demandes
Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. MARTELON l'intégralité des frais exposés par lui en première instance et en appel, notamment les frais de constat de Maître GRANGE huissier de justice en date du 16 décembre 2003. Il convient de lui allouer la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du N.C.P.C.
Conformément à l'article 696 du N.C.P.C. Mme X... et la société E.U.R.L. NMC, parties perdantes, doivent être solidairement condamnées aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de Maître MOREL, avoué, en application de l'article 699 du N.C.P.C. PAR CES MOTIFS La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement,
INFIRME l'ordonnance du 27 octobre 2003 rendue par le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon,
Statuant à nouveau,
CONSTATE qu'ensuite du départ du preneur des lieux loués la demande d'expulsion est devenue sans objet,
CONDAMNE solidairement Mme Nadine X... et la société E.U.R.L. NMC, prise en la personne de ses représentants légaux, à payer à M. Paul MARTELON une indemnité provisionnelle de 7 891,61 euros (sept mille huit cent quatre vingt onze euros et soixante et un centimes),
CONDAMNE solidairement Mme X... et la société E.U.R.L. NMC, prise en la personne de ses représentants légaux, à payer à M. MARTELON la somme de 1 000 euros (mille euros) en application de l'article 700 du N.C.P.C.,
CONDAMNE solidairement Mme X... et la société E.U.R.L. NMC, prise en la personne de ses représentants légaux, aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de Maître MOREL, avoué, en application de l'article 699 du N.C.P.C.
Cet arrêt a été prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile, et signé par Martine BAYLE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de la huitième chambre, en l'absence de la Présidente légitimement empêchée, et par Nicole MONTAGNE, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par le Magistrat signataire.
LE GREFFIER
LE PRESIDENT
Mme MONTAGNE
Mme BAYLE