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12/05/2005 | FRANCE | N°03/04065

France | France, Cour d'appel de Lyon, 12 mai 2005, 03/04065


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 12 Mai 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 18 juin 2003 - N° rôle : 2002/2603 N° R.G. : 03/04065

Nature du recours : Appel

APPELANTE : La société LE RESERVOIR, SAS représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assistée de la SELARL BOISSESON ET ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX

INTIMEE : La Société RENAULT TRUCKS, SAS, anciennement dénommée Renault Véhicules Industriels représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à

la Cour assistée de Me Rémi LLINAS, avocat au barreau de LYON Instruction clôturée le 25 Février ...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 12 Mai 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 18 juin 2003 - N° rôle : 2002/2603 N° R.G. : 03/04065

Nature du recours : Appel

APPELANTE : La société LE RESERVOIR, SAS représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assistée de la SELARL BOISSESON ET ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX

INTIMEE : La Société RENAULT TRUCKS, SAS, anciennement dénommée Renault Véhicules Industriels représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour assistée de Me Rémi LLINAS, avocat au barreau de LYON Instruction clôturée le 25 Février 2005 Audience publique du 10 Mars 2005 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Monsieur ROBERT, Président, Monsieur SANTELLI, Conseiller Madame MIRET, Conseiller DEBATS : à l'audience publique du 10 mars 2005 GREFFIER : la Cour était assistée de Mademoiselle X..., Greffier, présent lors des débats et du prononcé de l'arrêt, ARRET : CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 12 mai 2005 par Monsieur ROBERT, Président, qui a signé la minute avec Mademoiselle X..., Greffier.

EXPOSE DU LITIGE - PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par déclaration du 30 juin 2003, la société LE RÉSERVOIR a relevé appel d'un jugement rendu le 18 juin 2003 par le Tribunal de Commerce de LYON qui a dit que la société RVI n'avait pas commis de faute dans la procédure de résiliation du contrat la liant à la société LE

RÉSERVOIR eu égard aux engagements pris et non respectés par la société LE RÉSERVOIR - qui l'a déboutée de sa demande en résiliation abusive et donc de sa demande en réparation d'un préjudice et de toutes ses demandes, rejetant en conséquence les demandes d'instruction faites pour en fixer le montant - qui l'a condamnée à payer à la société RVI la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Vu l'article 455 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civile dans sa rédaction issue du décret du 28 décembre 1998 ;

Vu les prétentions et les moyens développés par la société LE RÉSERVOIR dans ses conclusions récapitulatives du 15 février 2005 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé tendant à faire juger qu'en dépit du contrat du 3 mai 1999 pour une durée de 3 ans, la société RVI a rompu abusivement le contrat le 25 octobre 2001 brusquement avec un seul préavis de trois semaines et sans motif - que ce contrat organisait une coopération privilégiée avec la société RENAULT TRUCKS pour la fabrication et la livraison à celle-ci de composants automobiles (réservoirs à air comprimé) dans le cadre d'un "plan progrès continu" - que s'il avait été prévu une renégociation au cas où les objectifs n'étaient pas atteints, il n'était pas convenu pour autant une résiliation unilatérale du contrat avant le terme - qu'elle n'était donc tenue qu'à une obligation de moyens, faute d'avoir convenu, qu'à défaut de la réalisation des objectifs, il s'agissait d'une faute qui permettait la rupture du contrat - qu'il est faux de soutenir que les parties ont arrêté d'autres conditions se substituant au contrat, les documents invoqués n'étant pas contractuels et alors qu'il ne s'agissait dans le compte rendu de réunion du 9 juin 2000 que de préciser de nouvelles modalités pour son exécution - que la société RENAULT TRUCKS a été déloyale envers elle en lui imposant des

conditions draconiennes - que le fait de pouvoir renégocier impliquait qu'il n'y avait pas d'obligation de résultat - qu'un contrat à durée déterminée doit aller à son terme, sauf manquement suffisamment grave d'un co-contractant - qu'il n'y a eu aucun manquement de sa part, et qu'aucune mise en demeure ne lui a été adressée - que la société RENAULT TRUCKS ne peut alléguer pour justifier la rupture une augmentation des prix qu'elle a acceptée - que c'est la société RVI qui a choisi de se fournir ailleurs - qu'elle a subi un préjudice du fait d'un manque à gagner par impossibilité d'écouler ses stocks et de la perte d'un chiffre d'affaires égal à un tiers du chiffre d'affaires total de l'entreprise, sans compter la déstabilisation qui en est résultée (licenciements de personnel) et l'atteinte à son image commerciale, soit un préjudice de 1.537.540,93 euros - qu'elle est donc bien fondée à réclamer 1.500.000 euros - qu'il y a donc lieu à réformation.

Vu les prétentions et les moyens développés par la société RENAULT TRUCKS anciennement RVI dans ses conclusions récapitulatives du 18 février 2005 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé tendant à faire juger qu'au cas où les objectifs n'étaient pas atteints les parties pouvaient soit renégocier, soit mettre fin par anticipation au contrat, la poursuite d'un contrat ne répondant pas aux objectifs étant inenvisageable - que la renégociation ne garantissait pas une issue favorable - que l'obligation prévue ne pouvait être que de résultat, dès lors que la condition essentielle du contrat, dont l'objet était l'approvisionnement, portait sur le prix des achats sur lequel la société LE RÉSERVOIR s'était engagée en même temps qu'elle s'engageait à atteindre les objectifs qui étaient une diminution des prix de 3 % par an - qu'il y a eu renégociation, ce qui prouve que les objectifs étaient atteignables - qu'à cette

occasion un accord est intervenu le 9 juin 2000 pour une hausse provisoire des prix de 13 % sur une période de 6 mois avec maintien des objectifs passé ce délai et en prévoyant un désengagement en cas d'échec avec préavis de trois semaines - qu'il y a eu acceptation de la société LE RÉSERVOIR - que si cet accord n'a pas été contresigné, il n'en est pas moins applicable faute d'avoir été remis en cause, les échanges de lettres le démontrant explicitement - que le fait de résilier les commandes équivaut à résilier le contrat d'approvisionnement - que le fait de prévoir que les prix ne pourraient être augmentés avant le 31 décembre 2002 ne signifie pas que le contrat ne pourrait prendre fin avant cette date - que les prix fixés étaient la convention des parties et qu'ils n'étaient pas anormalement bas - que les griefs faits à la société LE RÉSERVOIR sont fondés sur une inexécution de ses engagements - qu'ils justifient la résolution du contrat à son initiative - qu'elle a laissé suffisamment de temps à la société LE RÉSERVOIR pour respecter ses engagements, puis après la résiliation pour écouler ses stocks - que la société LE RÉSERVOIR ne justifie d'aucun préjudice indemnisable, dès lors que la rupture est de droit, qu'elle n'a pas été brutale, et qu'elle est intervenue le 27 novembre 2001, soit moins de 6 mois avant le terme du contrat - qu'il y a lieu à confirmation. MOTIFS ET DÉCISION :

I/ Sur le contenu et le respect des obligations contractuelles :

Attendu que le contrat que les parties ont conclu le 3 mai 1999

instaurait pour une durée de trois ans une coopération privilégiée de la société LE RÉSERVOIR, spécialisée dans la fabrication de réservoirs à air comprimé à vocation industrielle, avec la société RVI devenue la société RENAULT TRUCKS dont l'objet était de s'approvisionner auprès d'elle en tant que fournisseur de ces marchandises aux meilleures conditions de prix et de bénéficier comme acheteur des gains de productivité que lui procurerait une baisse de 3 % des prix convenus à chacune des échéances du 1er janvier 2000 et du 1er janvier 2001 - qu'il a été prévu, au cas où les objectifs ne seraient pas atteints, qu'une renégociation aurait lieu pour trouver un accord - que c'est donc tout naturellement qu'en application de cette clause devant les difficultés que rencontrait la société LE RÉSERVOIR pour satisfaire à ces exigences et confrontée à la demande qu'elle lui faisait aux termes de courriers en date des 12 avril et 18 mai 2000 d'augmenter les prix convenus de 14 %, la société RVI s'est rapprochée de son co-contractant et qu'elles ont convenu ensemble au terme de leurs discussions de poursuivre leurs relations pendant une durée de 6 mois et de pratiquer sur les commandes à compter du 1er mai 2000 jusqu'au 31 décembre 2002 une hausse temporaire des prix de 13 % subordonnée à l'engagement de réduction des coûts dans les conditions prévues au contrat initial, les parties devant se réunir à la fin de septembre 2000 pour examiner la situation, compte tenu des résultats obtenus à partir de ce nouvel accord sur les prix;

Attendu que si les parties ont pu trouver un terrain d'entente sur les points qui viennent d'être évoqués et qu'aucune d'elles par conséquent ne remet en cause, elles sont cependant radicalement contraires sur la sanction qu'il convient de donner au non respect de cet accord, et le délai qui doit être retenu pour apprécier si les conditions initialement arrêtées ont été effectivement observées par

la société LE RÉSERVOIR à l'égard de son co-contractant ;

Attendu que la société RENAULT TRUCKS entend se prévaloir, outre le contrat, du compte rendu de la réunion qui s'est tenue le 9 juin 2000 en présence du représentant de la société LE RÉSERVOIR qu'elle a établi de sa propre initiative et qu'elle a seule signé le 17 juin 2000 - que c'est à juste titre qu'elle soutient que l'inobservation de ce qui a été convenu lors de la signature du contrat, à savoir d'atteindre les objectifs de prix, ne peut être que la résiliation du contrat au terme du délai de 6 mois accordé à la société LE RÉSERVOIR pour mettre en application ses engagements à compter du 9 juin 2000, ce délai ayant valeur probatoire - qu'en effet l'engagement de la société LE RÉSERVOIR de pratiquer les prix arrêtés dans le contrat initial constituait un élément essentiel des accords qui ne pouvait être qu'une obligation de résultat contractée par l'appelante pour parvenir à la réduction des prix convenus dans les délais impartis et que la renégociation prévue par le contrat, qui a été mise en oeuvre et qui s'est conclue aux termes de la réunion du 9 juin 2000, n'était qu'une faculté offerte aux parties, dépourvue de sanction dans le contrat, le fait qu'elle n'ait pas abouti laissant le contrat inexécuté ;

Attendu qu'il est vain dans ces conditions pour la société LE RÉSERVOIR de savoir si les accords arrêtés le 9 juin 2000, qu'elle prétend n'avoir pas acceptés pour n'avoir pas signé le procès-verbal de réunion, ont valeur contractuelle, dès lors que les courriers qu'elle a adressés à la société RVI le 3 juillet 2000 ne remettent pas en cause ces accords, se contentant de solliciter l'application de la révision de prix au bout de 6 mois, soit à compter de novembre 2000, circonstance qui, à supposer que tel ait été l'accord des parties sur ce point, est dénuée de toute incidence quant aux griefs que lui fait la société RENAULT TRUCKS, lesquels ne portent pas sur

la révision des prix, mais sur les conditions d'exécution du contrat, telles qu'elles avaient été convenues - qu'elle ne peut en même temps contester toute valeur au compte rendu de la réunion du 9 juin 2000 et invoquer à son profit la disposition de ce compte rendu selon laquelle la résiliation envisagée ne concernerait que tout ou partie de certaines commandes et non le contrat lui-même ;

II/ Sur le bien fondé de la rupture du contrat par la société RVI :

Attendu que quelle que soit la date à laquelle la société LE RÉSERVOIR entend se placer pour apprécier si les engagements qu'elle a pris aux termes du contrat ont été respectés, il est constant qu'au 25 octobre 2001, date à laquelle la société RVI a adressé à la société LE RÉSERVOIR une lettre recommandée avec accusé de réception pour lui notifier sa volonté de se désengager du contrat en observant un délai de préavis de trois semaines, les résultats escomptés n'étaient pas conformes aux objectifs contractuellement fixés - que c'est à tort que le premier juge a retenu que le contrat prévoyait une faculté de résiliation unilatérale, une telle clause ne figurant pas dans le contrat - que cependant la gravité du comportement d'une partie au contrat peut justifier que l'autre y mette fin - que la société LE RÉSERVOIR s'était contractuellement engagée à atteindre des objectifs de prix - qu'il s'agissait bien d'une condition essentielle du contrat d'approvisionnement qui a déterminé les parties à contracter en ce que son objet était de permettre le développement d'un partenariat entre les parties fondé tout à la fois sur le développement de la société LE RÉSERVOIR en tant que fournisseur de matériels et sur la réduction des coûts de production qu'entendait réaliser la société RVI à cette occasion - que manifestement le résultat n'a pas été atteint - que ce défaut de réalisation de ce qui faisait l'objet du contrat constitue un

manquement d'une gravité suffisante pour justifier sa résiliation avant son terme le 3 mai 2002 - que la société RVI n'a pas commis de faute - qu'elle était donc bien fondée à mettre fin au contrat d'approvisionnement du 3 mai 1999 à la date du 25 octobre 2001 pour inexécution et ce pour l'avenir ;

Attendu que le jugement déféré doit être confirmé sur ce point ;

III/ Sur le caractère brusque de la rupture :

Attendu que la société RVI a prévu dans son courrier du 25 octobre 2001 que le contrat ne serait rompu qu'au terme d'un préavis de trois semaines - que cette rupture fait suite à divers incidents qui ont émaillé les relations des parties et relatés dans les courriers produits par la société RENAULT TRUCKS - que la société RVI écrivait à cet effet le 12 juillet 2000 à la société LE RÉSERVOIR pour faire connaître qu'à raison de difficultés rencontrées dans leurs relations, elle ne pouvait se permettre d'envisager une coopération à long terme avec elle - que la société LE RÉSERVOIR en tant que professionnel dans le secteur de l'automobile ne pouvait ignorer les risques qu'elle encourrait sachant qu'elle était dans l'incapacité de respecter ses engagements - qu'il convient dans ces conditions de considérer le délai de préavis de trois semaines comme suffisant et par conséquent la rupture comme n'ayant pas de caractère brutal et de débouter ainsi la société LE RÉSERVOIR de sa demande au titre d'un préjudice qu'elle allègue sans en justifier faute de démontrer que le stock en sa possession était exclusivement destiné au marché conclu avec la société RVI ;

Attendu que le jugement déféré doit être confirmé de ce chef ;

IV/ Sur les autres demandes :

Attendu qu'il serait inéquitable que la société RENAULT TRUCKS supporte ses frais irrépétibles et qu'il convient ainsi de lui allouer une somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau

Code de Procédure Civile, qui s'ajoutera à celle de 2500 euros accordée par le premier juge ;

Attendu que la société LE RÉSERVOIR, qui succombe, doit être condamnée aux dépens; PAR CES MOTIFS LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société LE RÉSERVOIR à payer à la société RENAULT TRUCKS la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que les dépens qui seront recouvrés par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,

M.P. X...

H. ROBERT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 03/04065
Date de la décision : 12/05/2005
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2005-05-12;03.04065 ?
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