COUR D'APPEL DE LYON
SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 03 MAI 2005
Décision déférée : Décision du Tribunal d'Instance de LYON du 30 octobre 2003 - (R.G. : 2002/4685) N° R.G. : 03/06989
Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en paiement du prix du transport APPELANTE : SOCIETE TRANSPORT VILLARD représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, Avoués assistée par Maître HORDOT, Avocat, (SAINT-ETIENNE) INTIMEE : COMMUNE DE LA TOUR DE SALVAGNY, représentée par son Maire en exercice représentée par la SCP DUTRIEVOZ, Avoués assistée par Maître CIEVET, Avocat, (TOQUE 187) Instruction clôturée le 25 Janvier 2005 DEBATS en audience publique du 10 Mars 2005 tenue par Madame DUMAS, Conseiller rapporteur, (sans opposition des avocats dûment avisés) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté lors des débats de Madame X..., Greffier, COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : . Monsieur LECOMTE, Président . Madame DUMAS, Conseiller . Madame de la LANCE, Conseiller a rendu l'ARRET
contradictoire prononcé à l'audience publique du 03 MAI 2005, par Monsieur LECOMTE, Président, qui a signé la minute avec Madame X..., Greffier
EXPOSE DU LITIGE
Courant novembre 2001, la SARL TRANSPORTS VILLARD a été chargée par la Menuiserie du PELEM de livrer des chalets en bois commandés par la commune de la Tour de Salvagny.
La livraison ayant été effectuée et la Société TRANSPORTS VILLARD n'ayant pu obtenir le règlement de sa facture de transport par la Menuiserie du PELEM placée en liquidation judiciaire le 3 juillet 2002, la SARL TRANSPORTS VILLARD a assigné le 30 octobre 2002 la commune de la Tour de Salvigny devant le tribunal d'instance de Lyon en paiement direct du montant de la facture en application de l'article 132-8 du Code du commerce en tant que destinataire des marchandises transportées.
Par jugement du 30 octobre 2003, le tribunal d'instance a débouté la SARL TRANSPORTS VILLARD de ses demandes en relevant qu'elle avait commis une faute pour avoir négligé d'informer en temps utile la commune de l'impayé alors que le contrat de transport prévoyait un paiement par l'expéditeur au plus tard le 10 février 2002.
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Appelante de cette décision dont elle poursuit la réformation, la Société TRANSPORTS VILLARD fait valoir que l'article 132-8 du Code du commerce, d'ordre public, n'est assorti d'aucune condition contrairement au raisonnement du premier juge. Elle conteste avoir commis une faute et relève qu'elle a tout naturellement cherché à obtenir paiement auprès du débiteur principal avant de solliciter la garantie du destinataire. Elle ajoute qu'on peut comprendre que la Menuiserie du PELEM n'ait pas réglé le 10 février 2002, soit à la
date de l'échéance, les Transports VILLARD puisque ce n'est que le 4 mars 2002 (pour une mise en paiement le 20 février 2002) qu'elle a été réglée par la commune de la Tour de Salvagny.
L'appelante demande en conséquence à la Cour de condamner la commune de la Tour de Salvagny à lui payer la somme de 4 786,12 ä TTC outre intérêts au taux légal à compter du 14 août 2002, ainsi que la somme de 1 500 ä en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
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La commune de la Tour de Salvagny conclut à la confirmation du jugement déféré, sauf à ajouter la somme complémentaire de 1 200 ä au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Elle réplique que l'action directe au profit du transporteur à l'encontre du destinataire des marchandises transportées dont le coût des frais ne lui aura pas été réglé ne saurait pour autant avoir comme conséquence de créer à son profit un "droit à l'irresponsabilité commerciale" et qu'en l'espèce des négligences multiples ont été commises par la Société des TRANSPORTS VILLARD dans la gestion de leur relation commerciale avec la Société MENUISERIE DU PELEM, qu'il s'agisse de l'absence d'exigence d'un paiement préalable des frais de transports, puis d'un défaut d'information de la commune du non paiement de sa facture de transport alors que les factures antérieures dont le paiement était exigible le 10 janvier 2002 auraient dû tout spécialement attirer son attention.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu qu'aux termes de l'article 132-8 du Code du commerce, le transporteur dispose d'une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du prix du transport, toute clause contraire étant réputée non écrite ;
Attendu qu'en vertu du texte, la Société des TRANSPORTS VILLARD est parfaitement en droit d'obtenir paiement du prix du transport (non réglé par l'expéditeur mis en liquidation judiciaire) par le destinataire des marchandises transportées, la commune de la Tour de Salvagny ;
Attendu que la garantie de paiement mise en place par le législateur s'applique de façon générale, peu important qu'il s'agisse d'un transport "port payé" à 60 jours le 10 ;
Attendu toutefois que la protection d'ordre public instaurée par ce texte au profit du transporteur n'empêche pas le destinataire d'invoquer une faute du transporteur lui permettant seulement d'obtenir des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de cette faute ;
Attendu, en l'espèce, que contrairement à l'appréciation du premier juge, aucune faute caractérisée ne peut être imputée à la société de transport qui a légitimement cherché à obtenir paiement auprès de son débiteur principal, ainsi qu'elle en justifie par la lettre de relance du 12 avril 2002, soit deux mois après l'échéance prévue, et la procédure d'injonction de payer du 5 mai 2002 ; que la circonstance tenant en fait que la société de transporteur n'ait pas immédiatement, dès l'échéance du 10 février 2002, prévenu la commune du non règlement du prix du transport, ce qui lui aurait permis de réserver le mandatement de la dernière facture effectué le 20 février 2002, n'est pas révélatrice d'une faute susceptible d'engager la
responsabilité du transporteur vis-à-vis du destinataire, les délais de réaction n'étant pas anormalement longs ;
Attendu que la Cour, réformant en cela la décision déférée, fait droit à la demande du transporteur, non contestée dans son montant ; Attendu qu'il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la société appelante la somme de 1 200 ä sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Reçoit en la forme l'appel,
Au fond,
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Condamne la commune de la Tour de Salvagny à payer à la SARL DES TRANSPORTS VILLARD la somme de 4 786,12 ä outre intérêts au taux légal à compter du 14 août 2002 et la somme de 1 200 ä en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Déboute la commune de la Tour de Salvagny de ses prétentions,
Condamne la commune de la Tour de Salvagny aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de la SP JUNILLON etamp; WICKY, Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER
LE PRESIDENT