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31/03/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946653

France | France, Cour d'appel de Lyon, 31 mars 2005, JURITEXT000006946653


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 31 Mars 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 21 mai 2003 - N° rôle : 2002/996 N° R.G. : 03/04141

Nature du recours : Appel

APPELANTE : Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT, S.A.R.L., prise en la personne de son représentant légal en exercice représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour assistée de Me Dominique BASCHET, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE : Mademoiselle Sophie X... représentée par Me DE FOURCROY, avoué à la Cour a

ssistée de Me Alexandre NOVION, avocat au barreau de BORDEAUX Instruction clôturée le 04 Févri...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 31 Mars 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 21 mai 2003 - N° rôle : 2002/996 N° R.G. : 03/04141

Nature du recours : Appel

APPELANTE : Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT, S.A.R.L., prise en la personne de son représentant légal en exercice représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour assistée de Me Dominique BASCHET, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE : Mademoiselle Sophie X... représentée par Me DE FOURCROY, avoué à la Cour assistée de Me Alexandre NOVION, avocat au barreau de BORDEAUX Instruction clôturée le 04 Février 2005 Audience publique du 23 Février 2005 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Madame MARTIN, Président, Monsieur SIMON, Conseiller Monsieur SANTELLI, Conseiller DEBATS : à l'audience publique du 23 février 2005 GREFFIER : la Cour était assistée de Mademoiselle Y..., Greffier, présent lors des débats et du prononcé de l'arrêt, ARRET : CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 31 mars 2005 par Madame MARTIN, Président, qui a signé la minute avec Mademoiselle Y..., Greffier. FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT et Madame Sophie X... ont conclu, le 11 décembre 2000, un "contrat de partenariat" (contrat de franchise) par lequel la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT a concédé à Madame Sophie X... le droit exclusif de commercialiser ses produits et de bénéficier de son savoir-faire et de ses méthodes

commerciales dans le domaine de l'amincissement du corps, des soins corporels et de la diététique, développés sous la marque "FRANCE Evasion Amincissement". Madame Sophie X... a ouvert un centre d'amincissement et de soins corporels, le 2 avril 2001. La Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT a mis en oeuvre par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 14 décembre 2001, la clause résolutoire pour manquements de Madame Sophie X... aux obligations contenues au contrat de partenariat, la résiliation de plein droit étant effective un mois après la réception de la mise en demeure.

Par jugement rendu le 21 mai 2003, le Tribunal de Commerce de LYON, prononçant pour dol la nullité du contrat de partenariat re-qualifié de contrat de franchise, a condamné la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT à payer à Madame Sophie X... la somme de 34.333,96 euros à titre de dommages et intérêts, outre une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et a débouté la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT de sa demande reconventionnelle en paiement d'une facture au titre du contrat de franchise, le jugement étant assorti de l'exécution provisoire pour l'ensemble de ses dispositions.

La Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT a régulièrement fait appel de cette décision dans les formes et délai légaux.

Vu l'article 455 alinéa premier du nouveau code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret N° 98-1231 du 28 décembre 1998 ;

Vu les prétentions et les moyens développés par la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT dans ses conclusions récapitulatives en date du 10 mai 2004 tendant à faire juger:

- qu'elle a parfaitement respecté ses obligations légales et contractuelles tant avant la conclusion du contrat de franchise qu'au cours de son exécution,

- que Madame Sophie X... a suivi "une formation de base" dans des centres pilotes lyonnais du 4 au 12 décembre 2000 et a reçu à cette occasion un "volumineux manuel de formation de base", outre une "assistance" avant l'ouverture de son centre à BORDEAUX (3 attestations en ce sens sur le suivi des travaux, la présence à l'inauguration...),

- que des actions nombreuses menées après l'ouverture du centre n'ont pu empêcher Madame Sophie X... de commettre des fautes de gestion,

- qu'elle a remis à Madame Sophie X... le document d'information pré-contractuelle prévue à la loi "DOUBIN" contenant toutes les informations légales et que la preuve de cette remise résulte de l'empressement de l'affiliée à vouloir ouvrir un second centre, outre des attestations des personnes qui ont remis le document d'information pré-contractuelle et de la reconnaissance de ce fait par Madame Sophie X..., dans le contrat de franchise lui-même,

- qu'il n'y a pas eu vice du consentement ensuite du respect total de l'obligation de renseignement et d'information,

- subsidiairement que l'évaluation faite par Madame Sophie X... de son préjudice est erronée et exagérée, certains postes ne pouvant être exigés au titre du prétendu préjudice,

- que le montant des redevances impayées arrêté au 31 décembre 2001 s'élève à 3.990,60 euros et qu'il conviendra de sanctionner "l'attitude particulièrement déloyale" de Madame Sophie X... par l'octroi de dommages et intérêts à hauteur de 120.000 euros ;

Vu les prétentions et les moyens développés par Madame Sophie X... dans ses conclusions N° 1 en date du 2 mars 2004 tendant à faire juger :

- que le contrat de partenariat n'était qu'une suite d'obligations pécuniaires mises à sa charge sans réciprocité,

- que des frais ou participations de toute nature lui ont été réclamés et dès le mois de novembre 2000 une facture de 542.694,29

francs a été émise, un acompte de 140.000 francs étant immédiatement réglé,

- qu'elle a dû recourir à un prêt de 700.000 francs pour faire face à l'ensemble de l'investissement considérable qui lui était demandé et qu'elle chiffre à 1.554.410 francs,

- que la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT n'a pas respecté les obligations légales d'information des futurs franchisés, en ignorant la quasi totalité du dispositif légal et en ne remettant que des documents sans intérêt et erronés ,

- qu'elle a été victime d'un dol par dissimulation volontaire d'informations qui lui auraient permis de prendre une décision éclairée,

- que son préjudice est important comme ayant dû cesser son activité et se faire radier du registre du commerce et des sociétés, le 23 septembre 2003, et doit être évalué à 262.439,13 euros;

MOTIFS ET DÉCISION

Attendu que selon l'article L 330-3 du code de commerce le franchiseur (affiliant) "est tenu préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie (l'affiliée) un document donnant des information sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause" ; que ce document dont le contenu est fixé par le décret N° 91-337 du 4 avril 1991, doit préciser notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné ... ainsi que le champ d'exclusivité ; qu'il doit être communiqué vingt jours au minimum avant la signature du contrat, ou le cas échéant, avant le versement de toute somme exigée préalablement à la signature du contrat ;

Attendu qu'en l'espèce, la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT a émis le 14 novembre 2000 une facture pour "redevance

d'entrée" et fourniture d'appareils et produits, outre des prospectus et objets pour une campagne publicitaire d'un montant de totale 542.694,29 francs Ttc, sur laquelle Madame Sophie X... a réglé le même jour la somme de 140.000 francs à titre d'acompte ; que le contrat de partenariat a été signé, le 11 décembre 2000; qu'à ce contrat figurent en annexes un plan délimitant le territoire concédé en exclusivité, un "manuel rassemblant le savoir-faire" dit FRANCE Evasion Amincissement et "un plan média";

Attendu qu'il appartient à la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT de faire la preuve qu'elle a satisfait à son obligation légale d'information préalable en justifiant avoir fourni à Madame Sophie X... toutes les informations sur le réseau de franchisage et ses perspectives de développement ; que cette preuve ne saurait résulter de la simple stipulation dans le contrat de partenariat que "l'affiliée a eu communication, depuis 20 jours au moins précédent la date de signature du présent contrat, du document d'information pré-contractuelle, tel que visé par la loi du 31 décembre 1989", sans référence à la nature précise des documents qui auraient été remis et des circonstances précises de leur remise ; que celle-ci aurait dû intervenir au plus tard vingt jours avant le 14 novembre 2000 ;

Attendu que la preuve de cette remise ne peut résulter de l'attestation d'un autre gérant affilié de Centre, Monsieur Z..., qui a fait visiter en septembre 2000 le Centre de son épouse à ARLES (13), a répondu aux questions de Madame Sophie X... sur le fonctionnement d'un centre et lui a "remis le document d'information pré-contractuelle" ; qu'une telle attestation qui mentionne au détour d'une page la remise sans précision sur la nature et la composition du "document" en question et sans expliciter en quelle qualité la remise a été faite, observation faite que ce document doit contenir nombre d'informations précises et

confidentielles - comptes annuels des deux derniers exercices, les envisagées conditions du contrat, une présentation du réseau... - est de pure complaisance et ne peut être retenue ; que de même "l'attestation" (non conforme aux dispositions de l'article 202 du nouveau code de procédure civile) de Monsieur Thierry A..., gérant de la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT qui ne se présente pas sous cette qualité mentionnant que Madame Sophie X... " a reçu de ma part ou (sic) de la part de Monsieur Z... et de Monsieur B... tous les documents concernant la législation en vigueur (re sic) avant ma visite sur BORDEAUX le 24 novembre 2000" ne peut être retenue, nul ne pouvant se constituer des preuves à soi-même et le témoignage étant particulièrement indigent sur la nature et la consistance du "document" en question ;

Attendu que Madame Sophie X... n'a reçu que quelques bribes d'informations fragmentaires ne pouvant satisfaire aux exigences légales et réglementaires quant aux comptes annuels des deux derniers exercices de la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT, au rappel des principales étapes de l'évolution de l'entreprise, à la liste des entreprises qui font partie du réseau, à celles des entreprises qui ont entendu cesser de faire partie du réseau au cours de l'année précédant celle de la délivrance du document avec précision sur la cause de la rupture du contrat... ; qu'aucune des rares et éparses pièces remises ne concerne la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT ; qu'elles ont trait à des membres de la famille A..., Thierry ou Christian (ä) ;

Attendu que le défaut d'information préalable n'entraîne la nullité du contrat de franchise que s'il a eu pour effet de vicier le consentement du franchisé ; qu'en l'espèce la quasi absence de toute informations exactes et sincères données préalablement à la remise de fonds et/ou à la signature du contrat de franchise, a réalisé une

réticence dolosive de la part de la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT ; que cette réticence dolosive n'a pas permis à Madame Sophie X... de prendre une décision éclairée et l'a trompée sur les possibilités de développer une clientèle en bénéficiant d'un savoir-faire et de méthodes éprouvés; que le comportement du franchiseur qui a dissimulé la véritable situation économique et juridique de son entreprise et celle économique de son réseau de franchisés (de nombreux échecs et fermetures de centres étant enregistrés) a abusé Madame Sophie X... sur les conditions réelles dans lesquelles elle a été amenée à contracter ;

Attendu que les premiers juges ont justement prononcé la nullité du contrat de franchise pour réticence dolosive ;

Attendu qu'il n'est pas avéré que Madame Sophie X... a commis des fautes de gestion expliquant le résultat déficitaire de son Centre ; que ce résultat déficitaire est imputable aux seules fautes commises par la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT principalement avant la conclusion du contrat de franchise (sur-estimation des résultats possibles ou plus exactement totale imprévision quant aux résultats possibles) ; que le montant des redevances impayées au 31décembre 2001 doit rester à la charge de la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT, comme conséquence de la nullité prononcée ou/et à titre de dommages et intérêts ;

Attendu en outre que Madame Sophie X... a subi une perte d'exploitation, a été privé d'un gain escompté résultant du fait que les relations contractuelles n'ont pas eu une durée raisonnablement admissible et a engagé des investissements hors de proportion avec les profits qu'elle pouvait raisonnablement tirés de l'exploitation du Centre ; que pour l'ensemble de son préjudice, il convient d'allouer à Madame Sophie X... la somme de 35.000 euros ;

Attendu que l'équité commande de faire application de l'article 7OO

du nouveau code de procédure civile ; que la partie tenue aux dépens devra payer à l'autre la somme de 3.000 ä au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens ; PAR CES MOTIFS, La Cour, statuant par arrêt contradictoire,

Reçoit l'appel de la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT comme régulier en la forme,

Au fond, confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf celles "arrêtant" le préjudice de Madame Sophie X... à la somme de 34.333,96 euros.

Statuant à nouveau, condamne la Société CT2P - FRANCE EVASION AMINCISSEMENT à porter et payer à Madame Sophie X... la somme de 35.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement attaqué à titre compensatoire et celle de 3.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, en cause d'appel. Condamne la Société CT2P - FRANCE Evasion Amincissement aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de Maître Annick de FOURCROY, Avoué sur son affirmation de droit, en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,

M.P. Y...

B. MARTIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946653
Date de la décision : 31/03/2005

Analyses

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Consentement - Nullité - /JDF

En vertu de l'article L 330-3 du Code de commerce, le franchiseur (affiliant) est tenu préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie (l'affiliée) un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause et ce document doit, aux termes du décret du 4 avril 1991, préciser l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné. ainsi que le champ d'exclusivité, il doit être communiqué vingt jours au minimum avant la signature du contrat ou, le cas échéant, avant le versement de toute somme exigée préalablement à la signature du contrat. Il appartient au débiteur de faire la preuve qu'elle a satisfait à son obligation légale d'information préalable en justifiant avoir fourni toutes les informations sur le réseau de franchisage et ses perspectives de développement et cette preuve ne saurait résulter de la simple stipulation dans le contrat de partenariat que " l'affiliée a eu communication, depuis vingt jours au moins précédent la date de la signature du présent contrat, du document d'information précontractuel, tel que visé par la loi du 31 décembre 1989 ", sans référence à la nature précise des documents qui auraient été remis et des circonstances précises de leur remise. La preuve de cette remise ne peut résulter de l'attestation, de pure complaisance, d'un autre gérant affilié qui aurait fait visité le Centre à l'affiliée, répondu à ses questions, et qui lui aurait remis " le document d'information pré-contractuelle ", dès lors que cette attestation ne précise pas la nature et la composition du document en question et n'explicite pas en quelle qualité la remise a été faite, observation faite que ce document doit contenir nombre d'informations précises et confidentielles. La nullité du contrat de franchise pour réticence dolosive doit, en conséquence, être prononcée


Références :

Code de commerce : L. 330-3

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2005-03-31;juritext000006946653 ?
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