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24/03/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946248

France | France, Cour d'appel de Lyon, 24 mars 2005, JURITEXT000006946248


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 24 Mars 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 15 avril 2003 - N° rôle : 2001/614 N° R.G. : 03/03067

Nature du recours : Appel

APPELANTE : Société SOGREAH, S.A. représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour assistée de Me Pierre-Marie DURADE-REPLAT, avocat au barreau de LYON

INTIMEES : Société HEWLETT-PACKARD FRANCE (dite HP), S.A.S., nouvelle dénomination de la société COMPAQ COMPUTER FRANCE représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, av

oués à la Cour assistée de SCP MONNOT-CALLET, avocats au barreau de PARIS Société INTEGRATIONS ...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 24 Mars 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 15 avril 2003 - N° rôle : 2001/614 N° R.G. : 03/03067

Nature du recours : Appel

APPELANTE : Société SOGREAH, S.A. représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour assistée de Me Pierre-Marie DURADE-REPLAT, avocat au barreau de LYON

INTIMEES : Société HEWLETT-PACKARD FRANCE (dite HP), S.A.S., nouvelle dénomination de la société COMPAQ COMPUTER FRANCE représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assistée de SCP MONNOT-CALLET, avocats au barreau de PARIS Société INTEGRATIONS ET SERVICES, S.A. représentée par Me BARRIQUAND, avoué à la Cour assistée de Me BOUT CAROT, avocat au barreau d'AVIGNON Instruction clôturée le 28 Janvier 2005 Audience publique du 17 Février 2005 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Madame MARTIN, Président, Monsieur SIMON, Conseiller Madame MIRET, Conseiller DEBATS : à l'audience publique du 17 février 2005 GREFFIER : la Cour était assistée de Mademoiselle X..., Greffier, présent lors des débats et du prononcé de l'arrêt, ARRET : CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 24 mars 2005 par Madame MARTIN, Président, qui a signé la minute avec Mademoiselle X..., Greffier. FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La S.A. SOGREAH à Grenoble (38) a pris en location courte durée du matériel informatique fourni par deux sociétés distinctes, le contrat

arrivant à expiration le 31 mars 2001. La société Compaq Computer aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la S.A. HEWLETT-PACKARD FRANCE, l'un des deux loueurs qui avait fourni un micro-portable ARMADA M 7OO avait confié à la S.A. Intégrations etamp; Services à Gennevilliers (92) "une prestation de logistique, de technique et de gestion" afférente aux opérations de mise à disposition/location de matériels informatiques et la S.A. Intégrations etamp; Services devait notamment assurer le retour et le stockage des matériels informatiques. Le 31 mars 2001, le matériel informatique faisant l'objet du contrat de location courte durée devait être restitué aux deux loueurs, une station de travail H P C 360 à l'un (la société Paros Computer à Vénissieux 69) et le micro-portable ARMADA M 7OO à la S.A. Intégrations etamp; Services pour le compte de l'autre, la société Compaq Computer. Une inversion de colis s'est produite dans les locaux de la S.A. SOGREAH, chacun des deux transporteurs prenant en charge ou recevant le fret destiné à l'autre loueur. La société Express 92, chargée du transport à destination de la S.A. Intégrations etamp; Services, s'est vue refuser par cette dernière la livraison de la station de travail H P C 360, le 2 avril 2001. Ce matériel a ensuite été "perdu" par la société Express 92 qui n'a pu le livrer à son véritable destinataire, la société Paros Computer. Celle-ci en a alors facturé la valeur (10.939,74 euros Ttc, outre un mois de location 2.229,52 euros Ttc) à la S.A. SOGREAH.

Par jugement rendu le 15 avril 2003, le Tribunal de Commerce de LYON a condamné la S.A. SOGREAH à payer à la société Paros Computer les sommes que celle-ci avait réclamées, a déclaré irrecevables les demandes de la S.A. SOGREAH formées contre la société Compaq Computer (faute de lien de droit avéré) et a condamné la S.A. Intégrations etamp; Services à payer à la S.A. SOGREAH la somme de 914,69 euros représentant le montant de l'indemnité de transport que la S.A.

Intégrations etamp; Services avait reçue de la société Express 92, le jugement étant assorti de l'exécution provisoire pour l'ensemble de ses dispositions.

La S.A. SOGREAH a régulièrement fait appel de cette décision dans les formes et délai légaux, puis s'est désisté de son appel uniquement en ce qui concerne la société Paros Computer.

Vu l'article 455 alinéa premier du nouveau code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret N° 98-1231 du 28 décembre 1998 ;

Vu les prétentions et les moyens développés par la S.A. SOGREAH dans ses conclusions récapitulatives en date du 24 novembre 2004 tendant à faire juger :

- qu'elle n'a commis aucune faute lors de l'inversion des colis dans ses locaux, les transporteurs respectifs étant responsables de cette méprise facilement évitable eu égard à la taille respective des colis,

- que l'assignation en garantie qu'elle a fait délivrer à l'encontre de la société Compaq Computer devenue la S.A. HEWLETT-PACKARD FRANCE n'est pas nulle et comporte le fondement de sa demande,

- que la société Compaq Computer ne peut opposer la prescription annale du droit des transports, s'agissant d'une action fondée sur la "responsabilité civile" de droit commun,

- qu'au demeurant la S.A. Intégrations etamp; Services a reconnu sa responsabilité le 16 mars 2001 et ce faisant a interrompu la prescription,

- que la société Compaq Computer, après la société Express 92 lors du chargement, a commis une faute de nature quasi-délictuelle en n'assurant pas ou en ne faisant pas assurer dans des conditions satisfaisantes le retour de la station de travail H P C 360 à son véritable destinataire, la société Paros Computer,

- que la société Compaq Computer doit être condamnée à lui régler

l'ensemble des condamnations qu'elle a dû assumer en faveur de la société Paros Computer soit 13.169,33 euros;

Vu les prétentions et les moyens développés par la société Compaq Computer devenue la S.A. HEWLETT-PACKARD FRANCE dans ses conclusions récapitulatives N° 1 en date du 24 février 2004 tendant à faire juger :

- que l'appel en intervention forcée de la S.A. SOGREAH la concernant est nul faute de préciser le fondement juridique de la demande,

- que l'action en garantie de la S.A. SOGREAH fondée sur un contrat de transport est prescrite,

- subsidiairement que sa faute n'est nullement démontrée par la S.A. SOGREAH, cette dernière étant à l'origine de l'inversion des colis qui s'est produite dans ses locaux,

- qu'en toutes hypothèses, la S.A. Intégrations etamp; Services devra la relever et garantir des condamnations prononcées contre elle dès lors que les colis litigieux ont été remis à son prestataire de services qui les a refusés et a entendu les renvoyer dans les locaux de la S.A. SOGREAH par les soins de la société Express 92, le voiturier ;

Vu les prétentions et les moyens développés par la S.A. Intégrations etamp; Services dans ses conclusions en date du11 mai 2004 tendant à faire juger :

- que sa responsabilité ne pourrait être recherchée que sur le fondement de l'article L 133-1 du code de commerce et par conséquent la prescription annale peut être opposée avec succès,

- que les limitations d'indemnisation inhérentes au type de transport effectué sont opposables aux personnes agissant sur le fondement du contrat de transport et qu'il a été offert à la S.A. SOGREAH l'indemnisation obtenue de la société Express 92, soit 914,69 euros,

- que l'appel en garantie formé par la société Compaq Computer devenue la société Paros Computer est mal fondé,

- que la S.A. SOGREAH a commis la faute à l'origine du dommage qu'elle subit,

- qu'enfin aucune condamnation aux dépens même partielle ne peut être prononcée contre elle dès lors qu'elle a proposé à la S.A. SOGREAH qui l'a refusé, le versement de l'indemnisation reçue de la société Express 92, soit 914,69 euros ;

MOTIFS ET DÉCISION

Attendu que selon l'article 56 alinéa 2° du nouveau code de procédure civile, l'assignation contient à peine de nullité : "l'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit"; qu'en l'espèce répond à cette exigence, l'assignation en garantie délivrée par la S.A. SOGREAH, le 17 septembre 2001, qui énonce suffisamment les moyens de droit sur lesquels elle fonde sa demande en paiement à l'encontre de la société Compaq Computer; que l'assignation en intervention forcée après un exposé des faits énonce que "dans ces conditions la responsabilité de la société Compaq Computer (dans la disparition de deux colis contenant la station de travail H P C 360) est pleine et entière à l'égard de la S.A. SOGREAH"; que l'assignation vise plusieurs circonstances (reconnaissance implicite de responsabilité, choix de la société Compaq Computer d'un voiturier déficient...) desquelles la S.A. SOGREAH déduit la responsabilité de la société Compaq Computer ; que le moyen de nullité sera rejeté ;

Attendu que les dispositions des articles L 133-3 et suivants du code de commerce s'appliquent à tous les contrats de transports terrestres internes et régissent seulement les actions nées du contrat de transport ; que l'action en réparation du dommage résultant de

l'absence du retour à l'expéditeur de colis expédiés par erreur à un autre destinataire ne peut être considérée comme l'exécution d'un contrat de transport pouvant donner lieu à application de l'article L 133-3 du code de commerce ; que par conséquent les parties à l'instance, la S.A. HEWLETT-PACKARD FRANCE et la S.A. Intégrations etamp; Services, ne peuvent opposer la prescription annale prévue à l'article L 133-6 alinéa 2 du code de commerce qui concerne toutes les actions auxquelles le contrat de transport peut donner lieu tant contre le voiturier que le destinataire ; qu'en l'espèce, la S.A. SOGREAH agit contre la société Compaq Computer - qui, au surplus, n'a pas véritablement la qualité de destinataire (la S.A. Intégrations etamp; Services chargée d'une prestation de transport, de gestion et de logistique étant titulaire de cette qualité) - pour obtenir la réparation de son dommage résultant de la perte des colis lors de leur ré-expédition par la S.A. Intégrations etamp; Services ensuite de leur livraison faite à une destination erronée ;

Attendu que la S.A. SOGREAH fonde son action sur la responsabilité quasi-délictuelle des articles 1382 et 1383 du code civil et doit donc faire la preuve que la société Compaq Computer a commis une faute à l'origine de son préjudice consistant pour elle à payer à la société Paros Computer la valeur des matériels informatiques "égarés"; que la S.A. SOGREAH n'établit pas que la société Compaq Computer ou son prestataire de services, la S.A. Intégrations etamp; Services, a commis une quelconque faute en ré-expédiant le jour où ils lui étaient livrés par erreur par la société Express 92 des colis qui ne lui étaient pas destinés ; que la société Compaq Computer ou ,plus exactement, la S.A. Intégrations etamp; Services était en droit de refuser la livraison de deux colis qui ne lui étaient pas destinés et d'inviter le transporteur, la société Express 92, de retourner à son destinataire les deux colis litigieux ; qu'aucune faute ne peut

être imputée à la société Compaq Computer ou à son prestataire de services ;

Attendu en revanche que la S.A. SOGREAH a commis lors des opérations de chargement dans ses locaux des deux matériels informatiques litigieux, une erreur en ne remettant pas aux deux transporteurs distincts les colis qui leur revenaient ou en ne leur fournissant pas des instructions suffisantes propres à éviter une double méprise ; que seule la S.A. SOGREAH était en mesure d'apprécier si les colis par leur taille et leur nombre étaient correctement affectés au transporteur idoine ;

Attendu que la S.A. SOGREAH doit être déboutée de son action en réparation dirigée contre la société Compaq Computer devenue la S.A. HEWLETT-PACKARD FRANCE dont elle a seulement saisi la Cour d'Appel de LYON ; que la S.A. SOGREAH ne réitère pas sa demande de condamnation à l'encontre de la S.A. Intégrations etamp; Services qu'elle avait obtenue des premiers juges à hauteur de 914,69 euros.

Attendu qu'il n'y a pas lieu d'examiner l'appel en garantie formée par la S.A. HEWLETT-PACKARD FRANCE à l'encontre de la S.A. Intégrations etamp; Services ;

Attendu que l'équité commande de faire application de l'article 7OO du nouveau code de procédure civile ; que la partie tenue aux dépens, la S.A. SOGREAH, devra payer à la S.A. HEWLETT-PACKARD FRANCE la somme de 1.500 ä et à la S.A. Intégrations etamp; Services celle de 800 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; PAR CES MOTIFS, La Cour, statuant par arrêt contradictoire et vu le désistement partiel d'appel de la S.A. SOGREAH à l'encontre de la société Paros Computer,

Reçoit l'appel de la S.A. SOGREAH comme régulier en la forme,

Au fond, réforme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau, déboute la S.A. SOGREAH de sa demande en

réparation dirigée contre la S.A. HEWLETT-PACKARD FRANCE sur le fondement quasi-délictuel.

Condamne la S.A. SOGREAH à porter et payer à la S.A. HEWLETT-PACKARD FRANCE la somme de 1.500 euros et à la S.A. Intégrations etamp; Services la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Condamne la S.A. SOGREAH aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de la S.C.P. d'Avoués JUNILLON etamp; WICKY et de Maître André BARRIQUAND, Avoué sur leur affirmation de droit, en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,

M.P. X...

B. MARTIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946248
Date de la décision : 24/03/2005

Analyses

TRANSPORTS TERRESTRES - Marchandises - Prescription - Prescription annale (article L.133-6 du Code de commerce) - Domaine d'application - / jdf

Les dispositions des articles L133-3 et suivants du Code de commerce s'appliquent à tous les contrats de transports terrestres internes et régissent seulement les actions nées du contrat de transport. L'action en réparation du dommage résultant de l'absence du retour à l'expéditeur de colis expédiés par erreur à un autre destinataire ne peut être considérée comme l'exécution d'un contrat de transport pouvant donner lieu à l'application de l'article L133-3 du Code de commerce. Par conséquent les parties à l'instance ne peuvent opposer la prescription annale prévue à l'article L133-6 alinéa 2 du Code de commerce qui concerne toutes les actions auxquelles le contrat de transport peut donner lieu tant contre le voiturier que le destinataire. En l'espèce, le locataire qui agit contre le loueur de matériels informatiques pour obtenir la réparation de son dommage résultant de la perte des colis lors de leur réexpédition par le prestataire de service ensuite de leur livraison faite à une destination erronée et qui fonde son action sur la responsabilité quasi-délictuelle des articles 1382 et 1383 du Code civil doit donc faire la preuve que le loueur a commis une faute à l'origine de son préjudice consistant pour elle à payer la valeur des matériels informatiques égarés. La société locatrice n'établissant pas que le loueur ou son prestataire de service a commis une quelconque faute en réexpédiant le jour où il lui étaient livrés par erreur par le transporteur des colis qui ne lui étaient pas destinés, le loueur ou plus exactement le prestataire de service étant en droit de refuser la livraison de deux colis qui ne lui étaient pas destinés et d'inviter le transporteur de retourner à son destinataire les deux colis litigieux, aucune faute ne peut être imputée au loueur ou à son prestataire de service


Références :

Code civil, articles 1382, 1383
Code de commerce, articles L133-3, L133-6

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2005-03-24;juritext000006946248 ?
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