AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE R.G : 02/05789 X... C/ SA LT PIVER APPEL D'UNE DECISION DU :
Conseil de Prud'hommes de LYON du 12 Septembre 2002 RG : 012705 COUR D'APPEL DE LYON CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 22 MARS 2005 APPELANTE :
Madame Nicole X... comparant en personne, assistée de M. Gérard Y... (Délégué syndical ouvrier) INTIMEE : SA LT PIVER 152 RUE GALLIENI 92100 BOULOGNE BILLANCOURT représentée par Me PERALS, avocat au barreau de PARIS PARTIES CONVOQUEES LE : 17 SEPTEMBRE 2004 DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 09 Février 2005 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : M. Didier JOLY, Président M. Dominique DEFRASNE, Conseiller Madame Aude LEFEBVRE, Conseiller Assistés pendant les débats de Mme Yolène Z..., Greffier. ARRET : CONTRADICTOIRE Prononcé à l'audience publique du 16 Mars 2005 par M. Didier JOLY, Président, en présence de Mme Yolène Z..., Greffier, qui ont signé la minute. *************
LA COUR,
Statuant sur l'appel interjeté le 8 octobre 2002 par Nicole X... d'un jugement rendu le 12 septembre 2002 par le Conseil de Prud'hommes de LYON (section encadrement) qui : - a dit et jugé que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, - l'a déboutée, en conséquence, de l'ensemble de ses demandes, - a débouté la Société LT PIVER de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 9 février 2005 par Nicole X... qui demande à la Cour de : 1°) infirmer le jugement entrepris, 2°) condamner la Société LT PIVER à payer à Nicole X... les sommes suivantes : - dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail
1 524, 49 ä - indemnité de clientèle
3 811, 23 ä avec intérêts au taux légal, - article 700 du nouveau code de procédure civile
762, 25 ä
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales par la Société LT PIVER qui demande à la Cour de : - déclarer l'appel de Nicole X... irrecevable et en tout cas mal fondé, - confirmer le jugement entrepris, - condamner Nicole X... à verser à la Société LT PIVER la somme de 2 000 ä pour frais irrépétibles en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que Nicole X... a été engagée par la Société LT PIVER en qualité de voyageur représentant de commerce multicartes suivant contrat écrit à durée indéterminée du 17 mai 1999 ; qu'elle était chargée de visiter pour le compte de son employeur les parfumeries et instituts de beauté, et de vendre des articles diffusés sous la marque E. COUDRAY dans un secteur d'activité comprenant les départements suivants : 69, 01, 38, 42, 73 et 74 ; qu'indépendamment des objectifs commerciaux annuels définis en commun, Nicole X... s'est engagée à ce que son chiffre d'affaires hors taxes effectué avec la société ne soit jamais inférieur aux montants suivants :
- 250 000 F H.T. la première année, du 17 mai 1999 au 16 mai 2000,
- 500 000 F H.T. les années suivantes, du 17 mai au 16 mai de l'année suivante ;
Que les commissions de Nicole X... ont été fixées à 15% sur toutes les commandes directes ou indirectes provenant de quelque manière que ce soit de son secteur, sans exception ni réserve ;
Que par lettre recommandée du 29 janvier 2001, la Société LT PIVER a convoqué Nicole X... le 9 février 2001 en vue d'un entretien préalable à son licenciement ; que par lettre recommandée du 13 février 2001,
elle lui a notifié son licenciement pour les motifs suivants :
- chiffre d'affaires très largement inférieur aux objectifs contractuels :
CA réalisé en 2000 = 103 KF (objectif 1999 = 250 KF, objectif 2000 =
500 KF)
- baisse de votre chiffre d'affaires en 2000 par rapport en 1999 :
(103 KF en 2000 pour 130 KF en 1999)
- apport insuffisant de nouveau chiffre d'affaires (60 KF) sur ce secteur comparativement à l'époque où le secteur n'était pas visité. Que le 28 juin 2001, Nicole X... a saisi le Conseil de Prud'hommes qui a rendu le jugement entrepris ; Sur le motif du licenciement :
Attendu que la clause du contrat de travail de Nicole X..., qui fait de la non-réalisation des objectifs une cause de résiliation de plein droit de ce contrat, est illicite ; qu'en instituant, en effet, une cause de rupture de plein droit du contrat de travail, elle prive le salarié du bénéfice des dispositions d'ordre public de l'article L 122-14-3 du code du travail ; qu'en application de ce texte légal, il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige et de former sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; que l'insuffisance de résultats ne peut constituer une cause de licenciement que si elle procède soit d'une insuffisance professionnelle, soit d'une faute du salarié ; qu'il incombe donc à l'employeur de démontrer que les objectifs définis étaient raisonnables et compatibles avec le marché et que le salarié est responsable du fait de ne pas les avoir atteints ;
Qu'en l'espèce, les objectifs fixés par comparaison avec les résultats atteints par un V.R.P. qui prospectait un secteur voisin, et compte tenu du potentiel commercial de l'agglomération lyonnaise,
n'étaient pas irréalistes ; que Nicole X... ne fournit aucune explication de la baisse du chiffre d'affaires réalisé par elle entre 1999 et 2000 ; qu'elle ne justifie pas du respect de son obligation contractuelle de prospecter dix nouveaux clients potentiels au moins par mois ; qu'elle ne communique d'ailleurs aucun compte rendu écrit de ses prospections ; qu'il est établi par les pièces communiquées que l'insuffisance de prospection de la salariée est la cause de la médiocrité de ses résultats ; que Nicole X... n'ayant pas accompli la prestation de travail qu'elle s'était engagée à réaliser, le licenciement litigieux procède d'une cause réelle et sérieuse ; que le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point ; Sur la demande d'indemnité de clientèle :
Attendu qu'aux termes de l'article L 751-9 du code du travail, en cas de résiliation d'un contrat à durée indéterminée par le fait de l'employeur et lorsque cette résiliation n'est pas provoquée par une faute grave du salarié, celui-ci a droit, en sus de l'indemnité allouée le cas échéant pour rupture abusive, à une indemnité pour la part qui lui revient personnellement dans l'importance en nombre et en valeur de la clientèle apportée, créée ou développée par lui, compte tenu des rémunérations spéciales accordées en cours de contrat pour le même objet ainsi que des diminutions qui pourraient être constatées dans la clientèle préexistante et provenant du fait de l'employé ; qu'il appartient à celui-ci de prouver qu'il a personnellement développé une clientèle ayant un certain degré de stabilité ;
Qu'en l'espèce, Nicole X... a perçu seulement la somme de 17 276, 15 F (2 633, 73 ä) à titre de commissions entre le 1er avril 2000 et le 31 mars 2001, ce qui donne la mesure de la clientèle apportée ou créée ; que la régression du chiffre d'affaires réalisé par l'appelante démontre en outre que cette clientèle n'avait aucun caractère de
stabilité ; qu'en conséquence, le jugement entrepris sera encore confirmé en ce qu'il a débouté Nicole X... de sa demande d'indemnité de clientèle ; Sur les frais irrépétibles :
Attendu qu'il ne serait pas équitable de laisser la Société LT PIVER supporter la totalité des frais qu'elle a dû exposer en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'une somme de 1 000 ä lui sera allouée sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
Reçoit l'appel régulier en la forme,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant :
Condamne Nicole X... à payer à la Société LT PIVER la somme de mille euros (1 000 ä) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile pour les frais exposés devant la Cour,
Condamne Nicole X... aux dépens d'appel.
LE GREFFIER
LE PRESIDENT
Y. Z...
D. JOLY