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17/03/2005 | FRANCE | N°2004/01724

France | France, Cour d'appel de Lyon, 17 mars 2005, 2004/01724


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 17 Mars 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de VILLEFRANCHE TARARE du 05 février 2004 - N° rôle : 2003/57 N° R.G. :

04/01724

Nature du recours : Appel

APPELANT : Monsieur Romain X... exerçant sous l'enseigne "INCOGNITO". représenté par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assisté de la SCP RIBEYRE ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

INTIMEE : S.A. BNP PARIBAS, anciennement dénommée BANQUE NATIONALE DE PARIS 16 Boulevard des Italiens 75009 PARIS r

eprésentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour assistée de la SCP GRAFMEYER-BAUDRIER, av...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 17 Mars 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de VILLEFRANCHE TARARE du 05 février 2004 - N° rôle : 2003/57 N° R.G. :

04/01724

Nature du recours : Appel

APPELANT : Monsieur Romain X... exerçant sous l'enseigne "INCOGNITO". représenté par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assisté de la SCP RIBEYRE ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

INTIMEE : S.A. BNP PARIBAS, anciennement dénommée BANQUE NATIONALE DE PARIS 16 Boulevard des Italiens 75009 PARIS représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour assistée de la SCP GRAFMEYER-BAUDRIER, avocats au barreau de LYON Instruction clôturée le 04 Février 2005 Audience publique du 10 Février 2005 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, DÉBATS en audience publique du 10 février 2005 tenue par Madame MARTIN, Président, chargé de faire rapport, sans opposition des Avocats dûment avisés, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Madame MARTIN, Président Monsieur SIMON, Conseiller, Madame MIRET, Conseiller, GREFFIER : la Cour était assistée de Mademoiselle Y..., Greffier, lors des débats et du prononcé de l'arrêt, ARRÊT : CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 17 mars 2005 Par Madame MARTIN, Président, qui a signé la minute avec Mademoiselle Y..., Greffier. FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES

Par jugement du 5 février 2004, le tribunal de commerce de

Villefranche-Tarare a condamné M. X... à payer à la BNP PARIBAS :

-la somme de 50.449,76 euros au titre du solde débiteur d'un compte courant avec intérêts au taux conventionnel de 12,20% à compter du 27 janvier 2003,

-la somme de 29.489,91 euros au titre du solde débiteur d'un compte de prêt avec intérêts au taux conventionnel de 9,54% à compter du 27 janvier 2003.

M. X... a relevé appel du jugement.

Dans ses conclusions n°4 déposées au greffe le 3 février 2005, dont le dispositif est identique à celui de ses conclusions n°3 déposées le 21 janvier 2005, il demande à la Cour de réformer le jugement et de débouter la BNP PARIBAS de ses demandes en la condamnant au paiement de la somme de 15.000 euros à titre de dommages intérêts . Il fait valoir à l'appui de ses prétentions que la banque a irrégulièrement clôturé son compte courant et rompu abusivement le découvert bancaire qui lui était accordé, qu'en agissant de la sorte la BNP PARIBAS l'a mis dans l'impossibilité d'honorer les échéances du prêt qui lui avait été consenti, que la banque a commis une faute en procédant à la rupture abusive du crédit accordé.

A titre subsidiaire, il soutient que la BNP PARIBAS ne justifie pas de ce que le taux d'intérêt conventionnel et le taux effectif global appliqués aient été convenus et acceptés entre les parties, que la banque a perçu indûment des intérêts sur son compte courant, qu'à défaut pour la banque de recalculer sa créance en substituant à tous les intérêts conventionnels prélevés l'intérêt au taux légal et en prenant en compte la capitalisation des intérêts, sa créance est manifestement incertaine, que la banque doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes.

Il sollicite l'allocation d'une somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile .

Par conclusions récapitulatives déposées au greffe le 27 janvier 2005, la BNP PARIBAS sollicite la confirmation du jugement en y ajoutant la condamnation de M. X... à lui payer une somme de 1.500 euros à titre de dommages intérêts pour appel abusif et la même somme au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile .

En réponse à l'argumentation de son adversaire et au soutien de ses propres demandes, elle indique qu'elle n'a commis aucune faute en clôturant le compte courant de M. X... conformément à ce qui avait été convenu entre les parties le 8 novembre 1995, qu'en toute hypothèse la clôture intervenue le 3 juin 1997 au lieu du 30 juin 1997 n'a causé aucun préjudice à M. X..., que le taux d'intérêt appliqué au compte courant a été fixé dans un écrit signé de M. X... et contenant la mention du taux effectif global, que toute contestation par M. X... du taux d'intérêt pratiqué serait irrecevable comme prescrite.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 4 février 2005.

Par conclusions du 9 février 2005, la BNP PARIBAS a demandé que les conclusions n°4 notifiées par son adversaire le 3 février 2005 soient déclarées irrecevables pour violer le principe du contradictoire.

La Cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, à leurs écritures précitées. MOTIFS ET DECISION

Attendu que les conclusions n°4 de M. X... ne différent de ses conclusions n°3 que par l'adjonction en pages 10-11 d'un paragraphe de quelques lignes répondant au moyen de prescription de l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels soulevé par la BNP PARIBAS dans ses dernières écritures ; qu'il s'agit d'une argumentation purement juridique qui ne nécessitait pas de réponse particulière, alors que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'il n'est donc pas démontré une violation du principe du contradictoire de sorte que la demande tendant à voir déclarer irrecevables lesdites conclusions

sera rejetée ;

Sur la clôture du compte courant et la rupture abusive de crédit

Attendu que pour les besoins de son activité de confection M. X... a ouvert un compte courant dans les livres de la BNP ; que par acte sous seing privé du 29 décembre 1994 la banque a consenti à M. X... un prêt de 400.000 F au taux de 9,54 % l'an, remboursable sur trois ans, dont l'objet était la restructuration de son fonds de roulement ;

Attendu que le 8 novembre 1995 M. X... adressait à la BNP un courrier dans lequel il reconnaissait que le compte courant ouvert à son nom présentait une position débitrice de 174.817,85 F sous réserve des agios non encore comptabilisés courus depuis le 30 septembre 1995 et s'engageait à réduire progressivement sa dette de sorte que la position débitrice du compte soit ramenée à 340.000 F le 30/11/1995, 330.000 F le 30/12/1995 et ainsi de suite jusqu'à 150.000 F au plus tard le 30 juin 1997 ; que la lettre se terminait par la stipulation suivante: "Il est bien entendu que, faute par moi, de satisfaire aux obligations ci-dessus contractées, vous aurez la possibilité de clôturer le compte, sans préavis, après une notification par lettre recommandée avec accusé de réception, son solde étant alors immédiatement exigible" ;

Attendu qu'ayant constaté que M. X... n'avait pas respecté son engagement de ramener le solde débiteur à 170.000 F au 30/04/1997, la BNP l'a informé par lettre recommandée du 3 juin 1997 qu'elle procédait "à dater de ce jour" à la clôture du compte lequel présentait un solde débiteur de 267.298,35 F ;

Attendu que M. X... fait grief à la banque de ne pas l'avoir averti, préalablement à la rupture, de sa volonté de clôturer le compte courant et de ne lui avoir fixé aucun délai de préavis le privant de la possibilité de régulariser sa situation ;

Attendu que pour se dispenser de l'obligation de notifier son

intention de clôturer le compte courant avant de procéder à la clôture, la BNP PARIBAS ne peut soutenir que le concours consenti à M. X... selon engagement du 8 novembre 1995 était un concours à durée déterminée ; que si M. X... s'est engagé à réduire progressivement sa dette selon un calendrier précis afin que celle-ci ne soit plus que de 150.000 F au 30 juin 1997, cet engagement n'a pu avoir pour effet de transformer le découvert accordé à M. X... en un concours à durée déterminée dont le terme aurait été le 30 juin 1997 ;

Attendu que selon la lettre d'engagement du 8 novembre 1995 il était convenu entre les parties que dans le cas où M. X... ne satisferait pas aux obligations par lui contractées, la BNP aurait la possibilité de clôturer le compte sans préavis après une notification par lettre recommandée avec accusé de réception, son solde étant immédiatement exigible ;

Qu'il est constant que M. X... n'a pas respecté son engagement puisque le solde débiteur du compte était au 30/04/1997 et 31/05/1997 de 267. 298,35 F alors qu'il aurait dû être de 170.000 F et 160.000 F ; qu'en vertu des termes de l'engagement du 8 novembre 1995, la BNP était fondée à "clôturer le compte sans préavis après une notification par lettre recommandée";

Attendu que M. X... se prévaut toutefois des dispositions de la convention de compte courant qui a été signée le même jour entre les parties et, en particulier, de la disposition de l'alinéa 2 de l'article intitulé Clôture selon laquelle "Toutefois, il pourra être clôturé à toute époque, à l'expiration d'un délai de préavis de 30 jours";

Attendu que le document en cause, qui vient s'ajouter à la lettre d'engagement de M. X... du même jour, rappelle la convention de compte existante entre les parties et prévoit l'affectation en nantissement du fonds de commerce de M. X... ; que s'agissant de la clôture du compte

il y est prévu un délai de préavis de 30 jours ; que l'argumentation de la BNP, qui analyse différents termes de la convention pour essayer d'en tirer la conséquence que "ce n'est qu'en dehors de la période d'application de cet engagement que le délai de préavis d'un mois aurait vocation à s'appliquer", n'est pas convaincante ; qu'en réalité, force est de constater que cette clause est contraire à celle figurant à la lettre d'engagement de la même date ; que plus favorable au débiteur celui-ci est en droit de s'en prévaloir ;

Qu'il doit être, en conséquence, considéré que la banque a commis une faute en rompant brutalement le compte courant de M. X... ;

Attendu que M. X... n'est fondé à réclamer que la réparation du préjudice résultant pour lui de la faute commise ; que sa prétention, non étayée, selon laquelle la BNP PARIBAS ne serait pas fondée à lui réclamer le solde du compte doit être rejetée, le solde débiteur du compte étant sans lien avec la rupture brutale ;

Qu'il soutient encore que la banque ne pouvait ignorer qu'en clôturant le compte courant elle le mettait dans l'impossibilité d'honorer les échéances du prêt qui lui avait été accordé dès lors que les règlements mensuels étaient prélevés sur le compte considéré ; que cette affirmation s'avère inexacte puisque l'examen des relevés de compte fait apparaître que les prélèvements du prêt faisaient déjà l'objet d'une annulation depuis le 15 mars 1997 en raison de l'absence de provision sur le compte soit plus de trois mois avant sa clôture ; que la banque fait pertinemment observer que même si les mensualités du prêt avaient continué à être prélevées sur un compte débiteur jusqu'au 30 juin 1997, voire 3 juillet 1997, cela n'aurait fait qu'augmenter le débit du compte sans rien changer au montant de la dette globale de M. X... ; que M. X... n'apporte donc la preuve d'aucun préjudice particulier en rapport avec la faute commise, laquelle ne saurait priver la banque de la possibilité de solliciter le règlement

du prêt laissé impayé ;

Sur l'argumentation subsidiaire de M. X... tenant au caractère indéterminé de la créance de la BNP PARIBAS

Attendu que M. X... soutient que la BNP n'a été à aucun moment en mesure de justifier de ce que le taux de l'intérêt conventionnel et le taux effectif global appliqués auraient été fixés et convenus entre les parties ;

Attendu que l'engagement signé le 8 novembre 1995 par M. X... énonce précisément les conditions financières applicables à son compte courant débiteur et notamment le taux d'intérêt égal au "taux de base de la Banque Nationale de Paris, soit actuellement 8,20% l'an, majoré de 4,00% l'an, soit actuellement 12.20% l'an calculé sur le solde débiteur en valeur" et la commission sur le plus fort découvert égale au "taux moyen de la commission de découvert publié par la Banque de France au cours du trimestre précédant l'arrêté de compte, majoré de 1/3, soit actuellement 0,08 %, applicable sur le montant du plus fort débit du mois en valeur" ; qu'il y est encore stipulé que "compte tenu du montant du découvert et de la durée de réduction convenue, le taux effectif global (TEG) du découvert, calculé selon la méthode proportionnelle, en fonction du taux d'intérêt déterminé ce jour, ressort à 13,464% l'an. En cas de dépassement à l'une quelconque des échéances du solde débiteur autorisé, le TEG calculé en fonction du taux majoré indiqué ci-dessus et à titre d'exemple à partir d'une utilisation à hauteur de 110% de l'autorisation de découvert pendant 3 jours ressort à 13,58% l'an" ;

Attendu que face à ces dispositions qu'il a connues et acceptées, M. X... ne saurait soutenir qu'il n'a pas eu connaissance des taux appliqués depuis le 8 novembre 1995 ;

Que pour la période antérieure il n'est pas davantage fondé à remettre en cause les intérêts conventionnels calculés par la banque

dès lors que dans l'engagement du 8 novembre 1995 il a reconnu devoir le solde débiteur du compte, y compris donc les agios arrêtés au 30 septembre 1995, "sous réserve des agios non encore comptabilisés courus depuis le 30 septembre 1995" ; qu'il n'y a donc pas lieu de revenir sur les intérêts au taux conventionnel prélevés sur le compte avant cette date et expressément reconnus par M. X... ;

Attendu que c'est à juste titre dans ces conditions que le tribunal a considéré que la créance de la BNP PARIBAS était certaine et déterminée ;

Attendu que le jugement sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il a condamné M. X... au paiement des sommes de 29.489,91 euros et 50.449,76 euros outre intérêts au taux conventionnel à compter du 27 janvier 2003 ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la BNP PARIBAS la charge des frais irrépétibles qu'elle a exposés à l'occasion de la procédure d'appel ; qu'il lui sera alloué une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Qu'en revanche, faute de démontrer l'existence du préjudice résultant pour elle de l'abus qu'elle impute à son adversaire, elle sera déboutée de sa demande de dommages intérêts; PAR CES MOTIFS LA COUR, Rejette la demande de la BNP PARIBAS tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions n°4 de M. X...

Confirme le jugement en ce qu'il a condamné M. X... à payer à la BNP PARIBAS la somme de 50.449,76 euros au titre du compte courant, outre intérêts au taux conventionnel de 12,20 % à compter du 27 janvier 2003, et la somme de 29.489,91 euros au titre du solde débiteur du compte, outre intérêts au taux conventionnel de 9,54 % à compter du 27 janvier 2003.

Y ajoutant,

Condamne M. X... à payer à la BNP PARIBAS la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile .

Rejette toutes autres demandes.

Condamne M. X... aux entiers dépens de première instance et d'appel avec, pour ces derniers, droit de recouvrement direct au profit de la SCP BAUFUME SOURBE avoués.la SCP BAUFUME SOURBE avoués.

LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,

M.P. Y...

B. MARTIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2004/01724
Date de la décision : 17/03/2005

Analyses

BANQUE - Responsabilité - Compte courant - / jdf

Lorsque les dispositions d'une lettre d'engagement et d'une convention de compte se contredisent, l'une prévoyant que dans le cas où le débiteur ne satisferait pas à ses obligations, la banque aurait la possibilité de clôturer le compte courant sans préavis, le solde étant immédiatement exigible, alors que l'autre stipulait que la clôture n'interviendrait qu'à l'expiration d'un délai de préavis de trente jours, il convient de retenir la clause la plus favorable au débiteur. Le débiteur était, en conséquence, en droit de se prévaloir du délai de préavis et la banque a commis une faute en rompant brutalement le compte courant. Cependant, le requérant n'est fondé à réclamer que la réparation du préjudice résultant pour lui de la faute commise et la banque fait pertinemment observer que même si les mensualités du prêt avaient continué à être prélevées sur le compte jusqu'à l'expiration du délai de préavis, cela n'aurait fait qu'augmenter le débit sans rien changer au montant de la dette globale. Le requérant ne rapporte, en conséquence, la preuve d'aucun préjudice particulier en rapport avec la faute commise, laquelle ne saurait priver la banque de la possibilité de solliciter le règlement du prêt laissé impayé


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2005-03-17;2004.01724 ?
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