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17/03/2005 | FRANCE | N°2003/03484

France | France, Cour d'appel de Lyon, 17 mars 2005, 2003/03484


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 17 Mars 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 24 avril 2003 - N° rôle : 2001/2615 N° R.G. : 03/03484

Nature du recours : Appel

APPELANTE : BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS, société coopérative à capital variable 141 rue Garibaldi 69003 LYON représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour assistée de Me François KUNTZ, avocat au barreau de LYON

INTIMES : Monsieur Eric X... représenté par Me GUILLAUME, avoué à la Cour assisté de Me Miche

l BEL, avocat au barreau de LYON Madame Christelle Y... épouse X... représentée par Me GUILLAUME...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 17 Mars 2005

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 24 avril 2003 - N° rôle : 2001/2615 N° R.G. : 03/03484

Nature du recours : Appel

APPELANTE : BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS, société coopérative à capital variable 141 rue Garibaldi 69003 LYON représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour assistée de Me François KUNTZ, avocat au barreau de LYON

INTIMES : Monsieur Eric X... représenté par Me GUILLAUME, avoué à la Cour assisté de Me Michel BEL, avocat au barreau de LYON Madame Christelle Y... épouse X... représentée par Me GUILLAUME, avoué à la Cour assistée de Me Michel BEL, avocat au barreau de LYON Instruction clôturée le 21 Janvier 2005 Audience publique du 11 Février 2005 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Monsieur SIMON, Conseiller le plus ancien de la Chambre, faisant fonction de Président en vertu de l'ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de LYON en date du 6 décembre 2OO4, Monsieur SANTELLI, Conseiller Madame MIRET, Conseiller DÉBATS : à l'audience publique du 11 février 2005 GREFFIER : La Cour était assistée de Mademoiselle Z..., Greffier, lors des débats et du prononcé de l'arrêt, ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 17 mars 2005 par Monsieur SIMON, Conseiller, qui a signé la minute avec Mademoiselle Z..., Greffier. FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par acte notarié en date du 2 juin 1992, la Banque Populaire LOIRE et

LYONNAIS a consenti à Monsieur et Madame Eric X... un prêt de 450.000 francs en trois "Tranches" de nature différenciée PBA, P C A et PANA, remboursable en 84 mensualités et destiné à financer l'acquisition et les travaux d'aménagement d'un fonds de commerce de pâtisserie-confiserie-glaces.

Monsieur Eric X... a ouvert dans les livres de la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS, le 21 avril 1992, un compte courant "Entreprise" pour les besoins de son activité professionnelle. A la suite de difficultés financières, un protocole d'accord a été signé, le 14 septembre 1998, entre les parties pour convenir de l'apurement de la dette de Monsieur et Madame Eric X... résultant de la déchéance du terme du prêt et du fonctionnement du compte courant.

Par jugement rendu le 24 avril 2003, le Tribunal de Commerce de LYON, écartant l'exception de prescription de l'action en nullité de la stipulation d'intérêts du prêt soulevée par la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS, constatant la caducité du protocole d'accord et estimant que Monsieur et Madame Eric X... avaient réglé à la banque toutes les sommes qu'ils devaient, a débouté la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS de ses demandes en paiement du solde du prêt et du solde débiteur du compte courant, dirigée contre Monsieur et Madame Eric X... et en vente forcée du fonds de commerce qui avait été nantie et l'a condamnée à leur payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS a régulièrement fait appel de cette décision dans les formes et délai légaux.

Vu l'article 455 alinéa premier du nouveau code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret N° 98-1231 du 28 décembre 1998 ;

Vu les prétentions et les moyens développés par la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS dans ses conclusions récapitulatives en date du 15 novembre 2004 tendant à faire juger :

- que l'action de Monsieur et Madame Eric X... en nullité de la stipulation des intérêts qui est une action en nullité relative se prescrit par cinq années à compter de la signature de la convention initiale de compte courant et de la conclusion du prêt,

- que l'exception de nullité invoquée pour faire échec à une demande principale en paiement et en exécution, fondée sur un acte juridique qui a été exécuté partiellement n'est pas perpétuelle et ne peut donc être présentée au-delà du délai de prescription quinquennale, comme le font à tort les époux X...,

- subsidiairement que Monsieur Eric X... qui a volontairement payé les intérêts conventionnels exigés au titre du compte courant ne peut demander leur répétition,

- que la convention de compte courant prévoit expressément la détermination du taux d'intérêts applicable au solde débiteur du compte courant, Monsieur Eric X... acceptant la stipulation d'un intérêt conventionnel dont le taux résultait des conditions particulières de la convention faisant elles-mêmes référence aux dépliants édités périodiquement pour fixer le prix des différents services bancaires, - que le T.E.G. inclut tous les éléments à l'exclusion des frais correspondant à une prestation de service distincte du prêt lui-même, certains frais ne pouvant en outre être intégrés "techniquement" dans le T.E.G.,

- que le taux des intérêts débiteurs sont mentionnés sur chacun des relevés de compte bancaire adressés à Monsieur Eric X...,

- que le taux d'intérêt du prêt ne doit pas inclure les frais ou débours non obligatoires pour l'obtention du prêt et que les frais de la caution SOCAMA comme ceux de l'assurance-groupe (résultat d'une équation particulièrement complexe) ne devaient pas nécessairement être engagés pour obtenir le prêt,

- que la vente du fonds de commerce doit être ordonnée eu égard à sa créance arrêtée à 42.128,84 euros et qu'il ne s'agit nullement d'une demande nouvelle formée en appel ;

Vu les prétentions et les moyens développés par Monsieur et Madame Eric X... dans leurs conclusions récapitulatives en date du 25 octobre 2004 tendant à faire juger :

- que leur action en nullité des stipulations d'intérêts présentée par voie d'exception n'est pas irrecevable comme prescrite par l'écoulement du délai de cinq années,

- que leur action en répétition des intérêts perçus indûment par la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS au titre du compte courant et du prêt est recevable et bien fondée,

- que la convention de compte courant ne comporte pas de stipulation écrite du taux des intérêts conventionnels et qu'à défaut de mention du T.E.G. prévu par les articles L 313-1 et R 313-1 du code de la consommation sur les relevés bancaires et de communication du taux de période au débiteur, seuls les intérêts au taux légal peuvent être exigés,

- qu'au demeurant un nombre de frais, commissions et débours divers prélevés sur le compte courant et s'élevant au total à 66.293,82 francs auraient dû être intégrés dans le T.E.G. et que la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS a une pratique condamnable en percevant hors de tout cadre légal des frais, rémunérations et commissions liées pourtant à l'octroi du prêt ou de l'ouverture du compte courant,

- que la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS devra restituer la somme de 5.233,47 euros au titre des agios perçus indûment en sus des intérêts au taux légal seuls exigibles, et au total la somme de

15.339,90 euros compte tenu de tous les prélèvements indus,

- que la garantie SOCAMA et la souscription d'une assurance-groupe sur la tête des deux co-emprunteurs solidaires génèrent des frais qui auraient dû être inclus dans le T.E.G., ce qui emporte comme conséquence que la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS ne peut exiger que des intérêts au taux légal,

- que compte tenu des versements effectués et après compensation opérée, la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS leur est redevable de la somme de 12.338,97 euros au titre du prêt ;

MOTIFS ET DÉCISION

Attendu que selon l'article 1907 du code civil le taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit ; que cette exigence d'un écrit mentionnant le taux d'intérêt vaut en matière de prêt d'argent même constaté dans un acte authentique, comme en matière d'intérêts afférents au solde débiteur d'un compte courant ; que les articles L 313-1 et L 313-2 du code de la consommation relatifs à la détermination du T.E.G. (Taux Effectif Global) et à sa mention dans tout écrit constatant un contrat de prêt, ont une portée générale ; que les règles posées par ces dispositions légales conditionnent la validité de la stipulation d'intérêts ;

Attendu que les dispositions d'ordre public sur l'exigence d'un écrit sont édictées dans le seul intérêt des emprunteurs ou des clients d'une Banque ; qu'il s'ensuit que leur méconnaissance est sanctionnée par la nullité relative de la clause de stipulation des intérêts conventionnels quand celle-ci n'est pas conforme aux exigences légales ; que cette action fondée sur l'article 1304 du code civil s'éteint si elle n'a pas été exercée dans le délai de cinq années qui suit la signature du contrat de prêt ou celle de la convention de compte courant ; qu'en l'espèce le contrat de prêt a été signé par Monsieur et Madame Eric X..., le 2 juin 1992 et la convention

d'ouverture du compte courant "entreprise" par Monsieur Eric X..., seul, le 21 avril 1992 ; que Monsieur et Madame Eric X... ont reconnu, par protocole du 14 septembre 1998, devoir certaines sommes assorties de taux d'intérêts conventionnels distincts au titre du prêt débloqué en 3 tranches et du fonctionnement du compte courant et s'étaient engagés à les rembourser par versements mensuels de 5.000 francs ; que ce protocole a été déclaré caduc, le 6 septembre 2000, par suite du non-respect depuis le mois de mars 2000 par Monsieur et Madame Eric X... de l'obligation de remboursement qu'ils avaient souscrite, le protocole prévoyant la faculté pour la Banque de provoquer la caducité en cas de manquements des débiteurs ; que la prescription de l'action en nullité relative court du jour de la signature de l'acte de prêt et de l'ouverture du compte courant ; que la reconnaissance par Monsieur et Madame Eric X... de leur dettes dans un protocole n'a pas eu pour effet de faire courir un nouveau délai de prescription ; Attendu que l'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté ; que l'exception de nullité n'est pas recevable à l'endroit d'un acte ayant déjà reçu un commencement d'exécution ; qu'en l'espèce, Monsieur et Madame Eric X..., emprunteurs et Monsieur Eric X..., titulaire d'un compte courant "Entreprise" ont saisi le Tribunal de Commerce de LYON par voie d'exception et pour la première fois, après l'assignation délivrée le 9 juillet 2001, d'une demande en remboursement de diverses sommes (frais, agios, commissions ou rémunérations de toute nature...) prélevées par la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS, selon eux, de manière indue en contravention avec les textes légaux exigeant la fixation par écrit d'un T.E.G. dans toutes ses composantes, en dehors du délai de prescription ; que Monsieur et Madame Eric X... avaient exécuté leurs obligations

successives en remboursant de nombreuses mensualités du prêt et cela jusqu'au mois de mars 2000 ; que Monsieur Eric X... a effectué des remises sur le compte courant qui a été débité régulièrement d'agios et autres commissions par prélèvements multiples de la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS ; qu'il s'ensuit que Monsieur et Madame Eric X... sont irrecevables en leur demande de nullité des stipulations d'intérêts conventionnels concernant tant le prêt que le compte courant ;

Attendu que la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS avait sollicité devant les premiers juges dans son acte introductif d'instance en date du 9 juillet 2001 et par conclusions écrites reprises dans le jugement, la vente du fonds de commerce appartenant à Monsieur et Madame Eric X... ; qu'elle n'a donc pas formé de demande nouvelle en appel en requérant l'application des dispositions légales des articles L 143-3 et suivants du code de commerce ;

Attendu que la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS, après avoir argumenté sur le compte courant et le prêt, se borne à solliciter la condamnation de Monsieur et Madame Eric X... au titre du seul prêt en trois tranches à hauteur de la somme de 42.128,84 euros arrêtée au 1er août 2003, selon son "décompte détaillé", (sa pièce N° 13) ; que l'exécution partielle du protocole semble avoir permis l'amortissement total du solde débiteur du compte courant ; que Monsieur et Madame Eric X... ne discutent pas, même subsidiairement ledit décompte, comme d'ailleurs ils n'avaient produit au débat aucune pièce concernant le décompte qu'il proposaient ; qu'ainsi ils affirmaient rester débiteurs de la somme de 19.684,83 francs sans aucun justificatif au soutien de leur affirmation péremptoire, sauf à livrer en "vrac" des extraits de compte sans explicitations afférentes; que le décompte présenté par la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS sera admis quant à son montant ;

Attendu que l'équité ne commande pas qu'il soit fait application de l'article 7OO du nouveau code de procédure civile ; que les parties seront déboutées de leur demande présentée à ce titre ; PAR CES MOTIFS, La Cour, statuant par arrêt contradictoire,

Reçoit l'appel de la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS comme régulier en la forme,

Au fond, réforme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau, condamne solidairement Monsieur et Madame Eric X... à porter et payer à la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS la somme de 42.128,84 euros avec intérêts au taux conventionnel à compter du 1er août 2003, au titre du prêt notarié souscrit le 2 juin 1992.

Ordonne qu'à défaut de paiement de cette somme par Monsieur et Madame Eric X... dans le délai d'une année commençant à courir à compter de la signification du présent arrêt, la vente du fonds de commerce de pâtisserie-confiserie-glaces exploité 110, boulevard de la Croix Rousse à LYON (1er) aura lieu à la requête de la Banque Populaire LOIRE et LYONNAIS après l'accomplissement des formalités prévues à l'article L 143-6 du code de commerce.

Commet Monsieur le Président de la Chambre Départementale des Huissiers du Rhône ou son délégataire pour procéder à la vente, après avoir dressé l'inventaire des marchandises, agencements, matériels et mobiliers, et le cahier des charges prévoyant notamment l'interdiction pour Monsieur et Madame Eric X... de se rétablir dans un fonds similaire pendant trois années dans un rayon de trois kilomètres à vol d'oiseau.

Fixe la mise à prix du fonds de commerce à 40.000 euros - 30.000

euros pour les éléments incorporels et 10.000 euros pour les éléments corporels - et dit qu'à défaut d'enchères sur la mise à prix, celle-ci pourra être baissée de moitié.

Condamne solidairement Monsieur et Madame Eric X... aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de la S.C.P. d'Avoués BRONDEL etamp; TUDELA sur son affirmation de droit, en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER,

LE CONSEILLER,

M.P. Z...

R. SIMON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2003/03484
Date de la décision : 17/03/2005

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS

'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté et n'est pas recevable à l'endroit d'un acte ayant déjà reçu un commencement d'exécution. Les requérants sont irrecevables en leur demande de nullité des stipulations d'intérêts conventionnels, fondée sur les articles 1907 du Code civil, L 313-1 et L 313-2 du Code de la consommation, concernant tant le prêt d'argent que le solde débiteur du compte courant, dès lors qu'ils avaient exécuté leurs obligations successives en remboursant de nombreuses mensualités du prêt et en effectuant des remises sur le compte courant, régulièrement débité d'agios et autres commissions.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2005-03-17;2003.03484 ?
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