La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/03/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006945719

France | France, Cour d'appel de Lyon, 07 mars 2005, JURITEXT000006945719


R.G : 03/04637 décision du Tribunal de Grande Instance de NIMES au fond du 17 décembre 1992 Arrêt de la Cour de Cassation du 27 mai 2003 Arrêt de la Cour d'Appel de GRENOBLE (Chambres Réunies) du 12 juin 2001 COUR D'APPEL DE LYON AUDIENCE SOLENNELLE ARRET DU 07 MARS 2005 APPELANTS : Monsieur Jean Christophe X... représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour assisté de Me COURTOIS avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE Société AXA ASSURANCES venant aux droits de la Compagnie LES MUTUELLES UNIES Grande Arche Paroi Nord 92044 PARIS LA DEFENSE représentée par la SCP BRONDEL-TUD

ELA, avoués à la Cour assistée de Me COURTOIS avocat au barre...

R.G : 03/04637 décision du Tribunal de Grande Instance de NIMES au fond du 17 décembre 1992 Arrêt de la Cour de Cassation du 27 mai 2003 Arrêt de la Cour d'Appel de GRENOBLE (Chambres Réunies) du 12 juin 2001 COUR D'APPEL DE LYON AUDIENCE SOLENNELLE ARRET DU 07 MARS 2005 APPELANTS : Monsieur Jean Christophe X... représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour assisté de Me COURTOIS avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE Société AXA ASSURANCES venant aux droits de la Compagnie LES MUTUELLES UNIES Grande Arche Paroi Nord 92044 PARIS LA DEFENSE représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour assistée de Me COURTOIS avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE INTIMES : Monsieur Bernard Y... ès qualités d'administrateur judiciaire du règlement judiciaire de la Société Z... et des époux Z... représenté par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour Monsieur A... Z... représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour assisté de Me BALORIN-NASSE avocat au barreau de PARIS Madame Jeanne B... épouse Z... représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour assistée de Me BALORIN-NASSE avocat au barreau de PARIS Maître Laurent B ès qualités d'administrateur ad hoc de Monsieur et Madame Z... Quartier Roquecourbe C... 84100 UCHAUX représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour assisté de Me BALORIN-NASSE avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION de la COUR , lors des débats et du délibéré :

- Monsieur JACQUET, président, suppléant monsieur le premier président désigné à cet effet par ordonnance du 06 décembre 2004,

- Monsieur LECOMTE, président,

- Monsieur ROBERT, président,

- Madame BAYLE, conseiller,

- Madame MONLEON, conseiller,

assistés pendant les débats de madame JANKOV, greffier.

INSTRUCTION CLOTUREE le : 17 DECEMBRE 2004

DEBATS: en audience solennelle du

10 JANVIER 2005

ARRÊT : contradictoire

prononcé à l'audience publique par monsieur JACQUET, président, en présence de madame JANKOV greffier, qui ont signé la minute.

FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 12 mars 1982 le tribunal de commerce d'Avignon a ouvert la procédure de règlement judiciaire de la société à responsabilité limitée Société d'exploitation bâtiment et travaux publics Z... etamp; Fils (la société Z...) dont Pierre Z... était alors le gérant.

Bernard Y... a été nommé syndic et a reçu une lettre datée du 18 mars 1982 ainsi rédigée : "Comme suite à notre dernier entretien, nous, Mr. et Mme Z... A..., confirmons par la présente que nous sommes d'accord pour collaborer au passif social de la Sarl Z... etamp; Fils. À cet effet, nous donnons notre accord pour donner en collaboration tous nos biens mobiliers et immobiliers, et sommes également d'accord pour que vous preniez une inscription hypothécaire sur nos biens. De toute façon, Mr.Z A... est le gérant de fait de la Sté Z... et il existe une confusion de patrimoine entre la Sarl Z... etamp; Fils et Mr.Z A... D'ailleurs, si vous engagez une action en extension du règlement judiciaire de la Sarl Z... etamp; Fils à Mr.Z A..., celui-ci ne s'y opposera pas."

À la requête de Bernard Y... ès-qualités, ayant élu domicile au cabinet de Jean-Christophe X..., avocat au barreau d'Avignon, les époux A... Z... et Jeanne B... ont, par acte du 5 avril 1982, été assignés à

comparaître devant le tribunal de commerce d'Avignon aux fins de condamnation d'Antoine Z... à payer l'ensemble des dettes sociales de la société Z... en application de l'article 101 de la loi du 13 juillet 1967.

Le 7 avril 1982 a été adressée à Jean-Christophe X... une lettre signée par Jeanne A-Z ainsi rédigée : "Nous vous prions de bien vouloir trouver ci-joint copie de l'assignation qui vient de nous être remise à la requête de M° Y... pour le 23/4/82. Nous restons dans l'attente de vos instructions et vous remercions par avance de bien vouloir faire le nécessaire."

Le 21 avril 1982 Jean-Christophe X... a adressé aux époux Z... la lettre suivante :

"Je m'empresse de vous accuser réception de votre courrier du 7 avril et de l'assignation qui y était jointe. Il s'agit de l'assignation que je vous ai fait délivrer à la requête du syndic, ainsi que nous en avions convenu lors de notre dernière entrevue. Je pense dans ces conditions que compte tenu de l'accord que vous avez donné au syndic et des lettres que vous lui avez adressées, la solution la plus simple est de ne pas bouger lors de l'audience du 23 avril où l'extension de règlement judiciaire sera prononcée."

Les époux Z... ayant été assignés à cette fin par acte du 11 mai 1982 délivré à la requête de Bernard Y... ès-qualités, ayant élu domicile au cabinet de Jean-Christophe X..., le règlement judiciaire de la société Z... leur a été étendu par jugement du tribunal de commerce du 4 juin 1982 qui est devenu irrévocable. Le règlement judiciaire, tant de la société Z... que des époux Z..., a été converti en liquidation de biens par jugement du 22 octobre 1984 qui a été confirmé par arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 4 juin 1992.

Par acte du 19 octobre 1990 les époux Z... ont assigné Jean-Christophe X... en responsabilité professionnelle et pour le faire condamner, solidairement avec son assureur Les Mutuelles unies, à leur payer des

dommages-intérêts ; ils lui reprochaient d'avoir plaidé contre eux alors qu'il était leur conseil depuis de nombreuses années et d'avoir gravement failli à son obligation de conseil en ne les éclairant pas sur les conséquences de l'extension du règlement judiciaire et en ne leur conseillant pas de faire appel. Par jugement du 17 décembre 1992 le tribunal de grande instance de Nîmes a dit la responsabilité de Jean-Christophe X... intégralement engagée et la garantie de son assureur les Mutuelles unies acquise et les a condamnés solidairement à relever et garantir les époux Z... de toutes les sommes qui pourraient être mises à la charge de ces derniers à l'issue de la procédure collective et à leur payer la somme de 10.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Ce jugement a été réformé par arrêt du 30 mars 1994 de la cour d'appel de Nîmes qui a débouté les époux Z... de toutes leurs demandes.

La cour de cassation ayant cassé l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes et renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de Grenoble, celle-ci a, par arrêt du 12 juin 2001, infirmé le jugement querellé et débouté les époux Z... de leurs demandes.

L'arrêt du 12 juin 2001 a été cassé par arrêt du 27 mai 2003 de la cour de cassation au motif que la cour d'appel de Grenoble avait violé les articles 1315 et 1147 du code civil en énonçant qu'il appartient à celui qui invoque un défaut de conseil de le prouver, d'une part, et en considérant que les époux Z... avaient décidé seul de l'extension du passif de la société Z... et qu'ils étaient à même de saisir les enjeux de la situation alors que l'avocat n'est pas déchargé de ses obligations professionnelles par les compétences de son client, d'autre part.

Jean-Christophe X..., la société Axa assurances, venant aux droits des Mutuelles unies, et Bernard Y... ont saisi la cour d'appel de Lyon désignée cour de renvoi.

Jean-Christophe X... et la société Axa contestent que l'avocat ait manqué à ses obligations professionnelles. Ils soutiennent que Jean-Christophe X... n'avait pas vu d'autre moyen, pour sauver la société familiale et par là-même le patrimoine des époux Z..., que l'extension du passif ; que cette décision et son acceptation par les époux Z... ayant été prises en commun il ne pouvait avoir conscience de représenter des intérêts opposés et il est incohérent, dans ces circonstances, de se demander s'il pouvait être conseillé de relever appel du jugement d'extension du règlement judiciaire; que le processus de cette mesure d'extension a été irrémédiablement enclenchée par la lettre du 18 mars 1982 des époux Z... ; que cette mesure était justifiée puisque ces derniers étaient gérants de fait de la société Z... et que leur intérêt était indissociable de ceux de la société Z... ; que le risque que comportait cette décision d'extension était connu des époux Z... qui avaient l'expérience d'un concordat antérieur. Ils font valoir que, n'étant plus leur conseil, Jean-Christophe X... a restitué tous leurs dossiers aux époux Z..., et qu'il ne dispose plus des éléments de preuve Jean-Christophe X... ; qu'il n'est pas démontré qu'il a été consulté par les époux Z... entre le 12 et le 18 mars 1982.

Ils soutiennent que les époux Z... n'ont pas été effectivement dépossédés de leur patrimoine et n'ont donc pas subi le préjudice qu'ils allèguent ; que leur demande de réparation au titre d'un préjudice alimentaire est irrecevable car nouvelle en cause d'appel. Ils soutiennent encore que l'échec de la solution adoptée n'est pas imputable à Jean-Christophe X... ; que le lien de causalité retenu par le tribunal est hors de propos dès lors qu'Antoine Z... avait fait la démonstration qu'il était le gérant de fait de la société Z... et que de ce fait les époux Z... n'avaient aucune chance de gagner leur procès.

Ils demandent que le jugement soit infirmé, qu'il soit procédé à

divers constats et que les époux Z... soient déboutés de toutes leurs demandes ; subsidiairement que soit ordonnée une expertise; en tout cas que les époux Z... soient condamnés à payer une indemnité en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Les époux Z... et Laurent B, mandataire ad hoc de ceux-ci, demandent à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et, y joutant, de condamner Jean-Christophe X... et la société Axa à leur payer les sommes de 1.001.067 euros et de 150.000 euros en réparation de leurs préjudices alimentaire et moral, et celle de 50.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Bernard Y... ès-qualités fait observer qu'aucune des autres parties ne conclut contre lui et qu'il intervient dans cette procédure uniquement pour fournir "une information complémentaire". Il indique que l'extension du règlement judiciaire de la société Z... aux époux Z... était "économiquement nécessaire" puisque l'actif de la société était insuffisant pour couvrir le passif et que les époux Z... étaient propriétaires d'immeubles ; que, ayant relevé appel du jugement de conversion du règlement judiciaire et liquidation de biens, les époux Z... ont présenté le 10 mai 1988 des propositions concordataires qui n'ont pu aboutir et que la cour d'appel a donc confirmé le jugement de conversion. Il demande que les appelants soient condamnés à lui payer une indemnité en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que bien qu'étant déjà le conseil des époux Z... et de la société Z... depuis plusieurs années - et son père, également avocat, l'ayant été avant lui - Jean-Christophe X..., agissant alors pour le compte de Bernard Y... syndic du règlement judiciaire de la société Z..., a fait assigner les époux Z... pour qu'ils fussent déclarés personnellement en règlement judiciaire par application de l'article

101 de la loi du 13 juillet 1967 ;

Que la mesure prévue par ce texte constitue une sanction et, comme telle, est par nature défavorable à celui à l'égard duquel elle est prise, de sorte qu'il n'est pas sérieux de soutenir que les époux Z... avaient, avec Bernard Y... ès-qualités qui la sollicitait, un intérêt commun à ce que la procédure collective leur fût étendue ;

Que, de plus, le choix de procéder par assignation pour saisir le tribunal de commerce de la demande d'extension du règlement judiciaire a eu pour

Que, de plus, le choix de procéder par assignation pour saisir le tribunal de commerce de la demande d'extension du règlement judiciaire a eu pour effet de donner à la procédure une nature contentieuse de sorte qu'était applicable en l'espèce la règle interdisant que le même avocat représente ou assiste les parties ayant des intérêts opposés ;

Que, ayant reçu la lettre du 7 avril 1982 des époux Z..., non seulement Jean-Christophe X... ne les a pas informés qu'il ne pouvait pas être leur conseil, au moins dans cette procédure, et qu'ils devaient se faire assister ou représenter par un autre avocat s'ils entendaient se défendre, mais qu'il leur a répondu qu'il convenait de "ne pas bouger lors de l'audience du 23 avril où l'extension de règlement judiciaire sera prononcée"; qu'il a ainsi accepté de continuer à être leur conseil tout en étant celui de leur adversaire, Bernard Y... ès-qualités ;

Que ce faisant il a gravement enfreint la règle édictée par l'article 84 du décret n° 72-468 du 9 juin 1972 ;

Attendu que, dès lors qu'il avait accepté de continuer à être leur conseil et quelles qu'aient été leurs connaissances juridiques, Jean-Christophe X... avait l'obligation de fournir aux époux Z... tous conseils et informations quant à l'extension de la procédure

collective et à ses effets à leur égard et quant aux autres mesures envisageables pour parvenir au sauvetage de la société Z... ;

Attendu qu'il résulte de ses écritures, où il relate que "sur interventions du syndic ... il fut accepté par les époux Z..., en plein accord avec leur conseil, de garantir la situation avec leur patrimoine personnel par le moyen d'un extension du passif" (p.2 in fine), ainsi que de sa lettre du 21 avril 1982 que Jean-Christophe X... a pris part aux discussions entre Bernard Y... ès-qualités et les époux Z... mais qu'il n'est pas démontré qu'il a, lors de cet entretien où à une autre occasion, rempli ses obligations à l'égard de ces derniers ;

Qu'il n'a pas informé les époux Z... qu'il entendait ne pas les représenter ni les assister à l'audience lors de laquelle le tribunal devait examiner la demande d'extension du règlement judiciaire à leur égard ; qu'il s'est borné à leur indiquer qu'il convenait de "ne pas bouger" ce qui n'était ni clair ni utile aux intérêts des époux Z... ;

Que Jean-Christophe X..., qui n'a donné aux époux Z... ni information ni conseil quant aux possibilités d'interjeter appel du jugement du 4 juin 1982, pouvait, certes, penser incohérent de leur conseiller ce recours alors qu'il était aussi le conseil de leur adversaire mais que cet argument est inopérant puisque cette incohérence provient de son infraction à une règle essentielle de sa profession;

Attendu que c'est donc à bon droit que le tribunal a retenu qu'il avait gravement manqué à ses obligations professionnelles ; que par ces fautes les époux Z... ont été privés d'une chance de voir le règlement judiciaire de la société Z... ne pas leur être étendu ;

Attendu qu'il est établi par les nombreuses attestations produites aux débats que les époux Z..., émigrés italiens, maîtrisaient imparfaitement la langue française et étaient dépourvus des

connaissances juridiques ; qu'il ne peuvent donc pas être les véritables rédacteurs des passages de la lettre du 18 mars 1992 où il est fait état de 'gérant de fait', de 'confusion de patrimoine' et d'action en 'extension de règlement judiciaire', notions dont le sens leur échappait manifestement ;

Que, de plus, cette lettre n'a pas la portée que prétendent les appelants et Bernard Y... puisque, textuellement, elle contient à titre principal accord des époux Z... seulement pour "collaborer au passif social de la société Z..." et, à cette fin, pour apporter leurs biens immobiliers avec acceptation que le syndic prenne des inscriptions d'hypothèque, ce qui ne correspond pas à une extension de règlement judiciaire pour laquelle il n'y a pas accord formel des signataires ; Que, dans ces conditions et si les époux Z... avaient été consciencieusement et efficacement conseillés et assistés en justice, la lettre du 18 mars 1982 ne pouvait à elle seule être déterminante pour que fût ordonnée l'extension du règlement ; que le tribunal de commerce et la cour d'appel, en cas de recours, auraient dû rechercher si les époux Z... se trouvaient effectivement dans l'un des cas prévus par l'article 101 de la loi du 13 juillet 1967 ; qu'il n'est pas démontré qu'il y avait réellement confusion des patrimoines de la société Z... et des époux Z..., seul cas allégué par les appelants;

Que, par ailleurs, il apparaît que les biens immobiliers des époux Z..., qui ont été évalués à plus de 7,4 millions de francs par un expert (Cabinet PASCAL) dont le rapport du 26 janvier1988 est incontesté, étaient suffisants pour apurer le passif de la société Z... qui, selon les explications du syndic, a été admis pour moins de 5 millions de francs ;

Qu'il ressort de ces éléments que les époux Z... auraient eu les plus grandes chances d'éviter que le règlement judiciaire leur fût étendu

si Jean-Christophe X... avait rempli ses obligations envers eux ;

Attendu que la décision du tribunal de commerce de leur étendre le règlement judiciaire de la société Z... a nécessairement causé aux époux Z... un préjudice moral qui sera intégralement réparé par la somme de 150.000 euros ;

Attendu que, s'ils n'ont pu saisir la portée des passages de la lettre du 18 mars 1992 où il est fait état de 'gérant de fait', de 'confusion de patrimoine' et d'action en 'extension de règlement judiciaire', les époux Z... étaient en mesure de saisir le sens des deux premiers paragraphes de cette lettre ; qu'ils ne contestent pas avoir effectivement entendu "collaborer au passif social de la Sarl Z... etamp; Fils" et, "à cet effet," donner tous leurs biens immobiliers ; que, s'étant ainsi valablement engagés à acquitter le montant du passif de la société Z..., ils sont mal fondés à demander d'être relevés et garantis des sommes qui pourraient être mis à leur charge à ce titre ;

Attendu qu'il n'est pas démontré que les quatre terrains à bâtir dont ils étaient propriétaires et que leur syndic a vendus en 1994, 1995 et 2000, ont été cédés à un prix très inférieur à leur valeur réelle; qu'en effet les estimations que Gérard C en a faites, à leur demande unilatérale, ne peuvent être retenues dès lors que celui-ci n'a fait référence à aucun élément de comparaison et n'a fourni aucune indication sur sa méthode d'évaluation ;

Que, d'ailleurs, il résulte des pièces du dossier que les époux Z... ont été consultés par Bernard Y... ès-qualités lorsque celui-ci a vendu ces terrains et qu'ils n'ont alors élevé aucune protestation à ce sujet ; Qu'ils ont personnellement signé l'acte acte sous seing privé du 8 janvier 2003 portant vente à la société LCP Immobilier d'un terrain à bâtir avec hangar, sis Quartier des Martines à Perthuis au prix de

533.570 euros alors que deux mois auparavant Gérard C avait, encore à leur demande, estimé ce bien à plus d'un million d'euros ; qu'ils ne prétendent pas que leur consentement a été vicié à cette occasion et que, au surplus, ils se sont abstenus de comparaître à l'audience du 24 novembre 2004 lors de laquelle le tribunal de commerce a autorisé la vente aux conditions prévues dans l'acte du 8 janvier 2003 ;

Attendu, enfin, qu'il ressort de pièces communiquées par les appelants et non contestées par les époux Z... que ces derniers ont, bien qu'étant théoriquement dessaisis de l'administration et de la disposition de leurs biens par l'effet de la liquidation de biens, ont donné certains de leurs immeubles en location et ont perçu les loyers ; que cela contredit leurs affirmations selon lesquelles ils ont été privés de revenus ;

Attendu, en conséquence, que les époux Z... ne sont donc pas fondés à réclamer d'autre réparation que celle de leur préjudice moral ;

Attendu qu'il y a lieu d'allouer aux époux Z... une indemnité pour leurs frais, non compris dans les dépens, exposés en cause d'appel ;

Qu'en revanche il n'est pas inéquitable de laisser à Bernard Y... ès-qualités la charge des frais de même nature qu'il a exposés ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement, hormis en ce qu'il a condamné Jean-Christophe X... et la compagnie Mutuelles unies à relever et garantir les époux Z... de toutes les sommes qui pourraient être mises à leur charge à l'issue de la procédure collective ;

Y... ajoutant,

Condamne solidairement Jean-Christophe X... et la société Axa Assurances à payer aux époux A... Z... et Jeanne B... les sommes de : - cent cinquante mille euros (150.000 ä) à titre de dommages-intérêts, -

vingt cinq mille euros (25.000 ä) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Déboute Bernard Y... de sa demande d'indemnité en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne Jean-Christophe X... et la société Axa Assurances aux dépens de première instance et d'appel, exposés tant devant la cour de Nîmes que devant la cour de Grenoble et que devant la cour de Lyon, et autorise les avoués de leurs adversaires à recouvrer directement contre eux les sommes dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT Madame JANKOV

J.-F. JACQUET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006945719
Date de la décision : 07/03/2005

Analyses

AVOCAT - Discipline - Manquements aux règles professionnelles - / jdf

L'avocat qui représente les gérants d'une société et qui, dans le même temps, agit pour le compte du syndic du règlement judiciaire et assigne les gérants afin qu'ils soient déclarés personnellement en règlement judiciaire, en application de l'article 101 de la loi du 13 juillet 1967, enfreint gravement la règle édictée par l'article 84 du décret du 9 juin 1972. Il a, d'une part, méconnu la règle interdisant à l'avocat de représenter ou d'assister en justice des parties ayant des intérêts opposés et a, d'autre part, manqué à son devoir d'information en ne les avertissant pas de ce qu'il ne pouvait pas les représenter dans cette procédure, en ne leur fournissant pas tous conseils et informations quant à l'extension de la procédure collective et à ses effets, quant aux moyens de se défendre, et quant aux mesures envisageables pour parvenir au sauvetage de leur société, d'autant qu'il ressort des faits que les intéressés auraient eu les plus grandes chances d'éviter que le règlement judiciaire leur soit étendu si l'avocat avait rempli ses obligations


Références :

Décret n° 72-468 du 9 juin 1972, article 84
Loi du 13 juillet 1967, article 101

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2005-03-07;juritext000006945719 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award