AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR R.G : 03/00317 GUILHOT C/ Société SAIM LEASE APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de SAINT ETIENNE du 06 Décembre 2002 RG : 01/31 COUR D'APPEL DE LYON CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 28 JANVIER 2005 APPELANTE : Madame MARTINE X... comparante, assistée de Maître BOGENMANN, avocat au barreau de SAINT ETIENNE INTIMEE : Société SAIM LEASE représentée par Maître HENRY, avocat au barreau de SAINT ETIENNE PARTIES CONVOQUEES LE : 30 septembre 2004 DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 16 Décembre 2004 Présidée par Madame PANTHOU-RENARD, magistrat rapporteur, chargé de faire rapport et qui a tenu seule l'audience (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Madame LE BRETON, greffier, COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Madame PANTHOU-RENARD, Président Madame DEVALETTE, Conseiller Monsieur CATHELIN, Conseiller ARRET : CONTRADICTOIRE Prononcé à l'audience publique du 28 Janvier 2005 par Madame PANTHOU-RENARD, en présence de Madame LE BRETON, Greffier, qui ont signé la minute.
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LA COUR Lors de la remise du bulletin de paie de Mai 1996 la direction de l'entreprise YALE-Chariots élévateurs- exploitée par la Sté SAIM LEASE adressait à chaque salarié la note suivante, destinée "à tout le personnelle de manutention rhodanienne" : "En regardant votre feuille de paie de ce mois, vous avez pu vous apercevoir de l'absence de la prime qui vous est habituellement accordée. Le gérant a décidé d'en suspendre le paiement du fait du non-respect des objectifs de chacun : - les vendeurs ne tiennent pas leur quotas, - les techniciens perdent leur outillage, - les chariots ne sont pas facturés à temps, - les échéances clients ne sont pas relancées, - les chefs d'ateliers ne sont pas à l'écoute des clients, - les responsables d'agence s'en lavent les mains, - etc ... Bref, tout le monde étant "hors sujet", il est nécessaire de repartir d'un bon pied et de réaliser enfin les objectifs que chacun s'est fixé. Nous espérons que l'effort de tout le personnel permettra de reprendre rapidement le paiement de cette prime". Lors d'une réunion des délégués du personnel du 4 Juillet 1996 sur la question portée à l'ordre du jour sur les raisons du non paiement de la prime litigieuse en Juin, "la direction rappelait que les primes exceptionnelles ne seront plus versées jusqu'à nouvel avis, ceci ayant été clairement expliqué dans une note accompagnant les paies du mois de Mai 1996". Le 2 Janvier 2001, Madame X..., salariée de l'entreprise depuis le 1er Mars 1976 en qualité d'employée, saisissait le Conseil de Prud'hommes de SAINT ETIENNE aux fins de condamnation de la Société SAIM LEASE au paiement d'un rappel de primes à compter du 1er Mai 1996 et de dommages-intérêts. Par décision du 6 Mars 2001, le bureau de conciliation du Conseil
(section commerce) ordonnait une enquête confiée à deux conseillers rapporteurs afin que le mode d'obtention de la prime litigieuse versée à l'ensemble du personnel non cadre puisse être élucidé. Les conseillers rapporteurs concluaient le 25 Avril 201 que la prime exceptionnelle servie a été remplacée par une prime de participation aux bénéfices, que le salaire annuel des intéressés n'en a pas été diminué, que la prime exceptionnelle étant versée mensuellement et la p rime de participation au contraire en une fois sur un compte spécial et bloqué, un manque à gagner était cependant subi par les intéressés, que la prime exceptionnelle est directement liée au contrat de travail alors que la prime de participation est liée aux résultats de l'entreprise puis distribué à chacun sans critère d'appréciation de l'employeur ; que les deux primes ne visent pas le même objectif ; Madame X... était licenciée pour motif économique par lettre du 1er décembre 2003.
°°°°°°°°°° Par jugement du 6 Décembre 2002, la formation de départage de la section commerce du conseil déboutait Madame X... de ses prétentions. Cette dernière interjetait appel le 31 Décembre 2002 de ce jugement qui lui a été notifié le 14 Décembre 2002.
SUR QUOI Vu les conclusions du 16 Décembre 2004 régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales de Madame X... qui demande à la Cour, par réformation du jugement déféré de condamner la
Société SAIM LEASE à lui payer un rappel de 3.658,78 euros au titre de cette p rime mensuelle de 400 francs sur la période du 31 Mai 1996 au 31 Mai 2001 et un rappel de 1.957,25 euros pour la période du 1er Juin au 3 Février 2004 - subsidiairement la somme de 5.616,03 euros sur le fondement de la non substitution de la participation à un élément de rémunération - des dommages-intérêts à hauteur de 4.000 euros ainsi que la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, au moyen essentiel que le versement de la prime litigieuse servie depuis Janvier 2004 a le caractère d'un usage qui n'a pas été dénoncé régulièrement, Vu les conclusions d u 16 Décembre 2004 régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales de la Société SAIM LEASE aux fins de confirmation du jugement déféré et de condamnation de l'appelant au paiement de la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, au moyen essentiel que la prime litigieuse ne présente pas un caractère de fixité dès lors quelle était supprimée en fonction de l'absenté'sme et du comportement des salariés, et que son montant variait, ni un caractère général puisque ne bénéficiant pas à l'ensemble du personnel, que les salariés ont été informés individuellement de la suppression de cette prime en l'absence en Mai 1996 d'institution représentative du personnel, que la direction de la société a mis alors en place l'intéressement légal des salariés aux résultats de l'entreprise, qu'elle a versée en décembre 2000 d'autres primes d'assiduité et de rendement liées aux résultats personnels de chaque salarié, Vu les explications des parties qui en ont débattu à l'audience sur la qualification de l'engagement de l'employeur, Considérant que par sa note précitée adressée à chaque salarié avec le bulletin de paie d'avril 1996, l'employeur d'une part reconnaît qu'une prime était habituellement accordée à tout le personnel de
"manutention rhodanienne" et d'autre part annonce la suppression de cette prime pour des motifs résultant de son insatisfaction sur la manière de servir des catégories concernées, à savoir les vendeurs, les techniciens, les facturiers, les chefs d'atelier, les responsables d'agence, "etc", en fait "tout le monde ... hors sujet" ; Qu'ainsi, l'employeur reconnaît avoir pris antérieurement un engagement de verser "habituellement" à l'ensemble du personnel une prime sans condition de ne pas enfreindre certaines obligations dans le travail ; Que cet engagement à caractère collectif s'analyse en un engagement unilatéral de l'employeur qui le lie ; Que la discussion des parties sur les critères de l'usage est en conséquence sans objet ; Qu'au demeurant, la société SAIM LEASE n'est pas fondée en son moyen tiré de l'absence de généralité contraire à l a note précitée, ses explications démontrant seulement que l'ouverture du droit au versement de la prime était soumis à des conditions de présence et de comportement satisfaisant des salariés sans caractère discrétionnaire, notamment quant au montant de la prime servie à chacun ; Or considérant que la Société SAIM LEASE n'a respecté aucun délai pour dénoncer son engagement puisqu'elle a supprimé l'avantage servi du jour au lendemain, lors du versement du salaire de Mai 1996, sans en avoir informé au préalable les délégués du personnel qui n'ont été réunis que le 4 Juillet suivant, sans pour autant qu'une négociation ait été alors mise en place et qu'une nouvelle dénonciation individuelle intervienne ; Considérant que l'engagement unilatéral de verser une prime sans condition d'assiduité et de comportement satisfatoire de chaque intéressé n'a p as la même cause que la participation légale aux résultats de l'entreprise ; que le moyen de l'intimée tiré d'une substitution de l'une par l'autre n'est pas fondé ; Considérant en conséquence qu'il doit être fait droit, par réformation du jugement déféré,à la demande en paiement des
primes échues jusqu'au terme du contrat, dont les montants acquis sont établis par les bulletins de salaire versés aux débats ; Considérant au contraire, que Madame X... ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui indemnisé par les intérêts moratoires ; que les attestations produites sont inopérantes dès lors qu'elles ne concernent pas Madame X... personnellement et que celle-ci n'a pas contesté son licenciement ;
PAR CES MOTIFS La Cour, CONDAMNE la Société SAIM LEASE à verser à Madame X..., avec intérêts de droit, les sommes de : - 3.658,78 euros (trois mille six cent cinquante huit euros soixante dix huit centimes) au titre des primes dues sur la période du 31 Mai 1996 au 31 Mai 2001, - 1.957,25 euros (mille neuf cent cinquante sept euros vingt cinq centimes) au titre de celles dues sur la période du 1er Juin au 3 Février 2004, DEBOUTE Madame X... de sa demande de dommages-intérêts, CONDAMNE la Société SAIM LEASE aux dépens, Vu les dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, CONDAMNE la Société SAIM LEASE à payer à Madame X... la somme de 1.500 euros (mille cinq cents euros) et REJETTE sa demande à ce titre. Le Greffier
Le Président F. LE BRETON
E. PANTHOU-RENARD