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04/11/2004 | FRANCE | N°03/03640

France | France, Cour d'appel de Lyon, 04 novembre 2004, 03/03640


4 XI 2004 Sté Deloitte et Touche . / cts TOURVIEILLE. RG 03/03640 FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES Par l'intermédiaire de Jean-Paul Y, auquel ils avaient donné moyennant rémunération mission d'effectuer toutes démarches et études auprès de tout établissement financier et de toute banque, Paul X... et Albert X... ont chacun conclu le 19 avril 1994 avec la société de droit suisse Financial Consultants Gbler & Co (la société Gbler) un "contrat d'investissement" d'une durée de 12 mois portant sur la somme de 400.000 dollars US, qu'ils ont mise à sa disposition sur un co

mpte de la Neue Aargauer Bank à Wohlen ; ayant été informés par ...

4 XI 2004 Sté Deloitte et Touche . / cts TOURVIEILLE. RG 03/03640 FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES Par l'intermédiaire de Jean-Paul Y, auquel ils avaient donné moyennant rémunération mission d'effectuer toutes démarches et études auprès de tout établissement financier et de toute banque, Paul X... et Albert X... ont chacun conclu le 19 avril 1994 avec la société de droit suisse Financial Consultants Gbler & Co (la société Gbler) un "contrat d'investissement" d'une durée de 12 mois portant sur la somme de 400.000 dollars US, qu'ils ont mise à sa disposition sur un compte de la Neue Aargauer Bank à Wohlen ; ayant été informés par lettre de la société Gbler du 21 septembre 1994 que l'opération ne pouvait pas "se déboucler normalement", ils ont résilié leurs contrats mais ils les sommes investies ne leur ont pas été remboursées. Ils ont engagé une procédure pénale à l'encontre de Hugo G BLER, dirigeant de la société Gbler en faillite, mais le juge d'instruction du canton d'Aargau a rendu une ordonnance de non lieu. Ils ont ensuite assigné devant le tribunal de grande instance de Lyon Jean-Paul Y et la société Deloitte & Touche Conseil, par laquelle ils avaient mis en relation avec Jean-Paul Y, en responsabilité et payement de sommes. Jacqueline A, veuve X..., Marie-Christine X... épouse Y..., Marie-Françoise X... épouse Z... et Marie-Noùlle X... épouse A... sont intervenus à l'instance en qualité d'héritiers de Paul X..., décédé. Jean-Paul Y a appelé en garantie Valérie D et Gérard Z, dirigeants de droit et de fait de la société Vertumne en liquidation judiciaire avec laquelle il était lié par un contrat d'agent commercial. Par jugement du 10 avril 2003 Jean-Paul Y et la société Deloitte et Touche ont été condamnés in solidum à payer la somme de 358.236,76 euros à Albert X... et celle de 358.236,76 euros aux héritiers de Paul X..., outre une indemnité en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, . Par déclaration du 10 juin 2003 la société Deloitte et Touche a

interjeté appel de cette décision en intimant les consorts X... et Jean-Paul Y ; cette procédure a été enregistrée sous le numéro 03/03640. Elle fait valoir qu'elle n'est tenue à l'égard de ses clients que d'une obligation de moyens et que sa faute ne saurait être présumée. Elle soutient qu'Albert et Paul X... n'étaient pas des profanes mais des hommes d'affaires avisés qui avaient refusé les placements sécurisés qu'elle leur avait proposés parce qu'ils recherchaient des gains plus importants ; qu'elle leur a alors donné les coordonnées de deux professionnels susceptibles de satisfaire leur demande ; que rien ne lui permettait de douter de la compétence de Jean-Paul Y, pas plus que celui-ci pouvait se convaincre du défaut de compétence de Hugo G BLERdont la culpabilité n'est pas démontrée ; que le préjudice subi par les consorts X... trouve sa cause dans un détournement commis par un tiers qu'elle ne pouvait ni prévoir ni empêcher. Elle demande d'être mise hors de cause et que les consorts X... soient condamnés à lui payer une indemnité en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Par déclaration du 23 juin 2003 Jean-Paul Y a formé un appel principal en intimant les consorts X..., la société Deloitte & Touche, Virginie D et Gérard Z ; cette procédure a été enregistrée sous le numéro 03/03934. Il expose qu'il n'exerce pas d'autre activité professionnelle que celle d'agent commercial de la société Vertumne et que c'est en cette qualité qu'il est entré en relation avec Albert et Paul X... Il soutient qu'à l'égard de ceux-ci il a accompli sa mission dans le respect des directives données par la société Vertumne qui suivait ce dossier ; que, sans qu'il ait commis aucune faute, sa mission a pris fin avec la signature des contrats d'investissement conclus par Albert et Paul X... avec la société Gbler ; que le problème survenu ultérieurement est indépendant de son rôle ; que le préjudice allégué par les consorts X... n'est pas avéré,. Il demande à la cour

principalement de le mettre hors de cause, subsidiairement de débouter les consorts X... de leur demande et très subsidiairement de condamner Valérie D, Gérard Z et la société Deloitte et Touche à le relever et garantir de toute éventuelle condamnation et, en toute hypothèse, de lui allouer une indemnité en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Les consorts X... concluent à la confirmation du jgt en son principe et forment appel incident pour faire condamner Jean-Paul Y et la société Deloitte et Touche à payer à Albert X... la somme de 525.000 euros en principal, celle de 9.040,23 euros en remboursement des honoraires versés et celle de 5.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et pareilles sommes aux héritiers de Paul X... Assigné à sa personne à la requête de Jean-Paul Y, Gérard Z n'a pas constitué avoué. Valérie D n'a pas constitué avoué et n'a pas été assignée. MOTIFS DE LA DÉCISION Attendu que les procédures enregistrées sous les numéros 03/03640 et 03/03934 doivent être jointes ; Attendu que le tribunal a considéré à bon droit que dans ses relations avec Albert et Paul X... Jean-Paul Y n'avait pas fait état du contrat d'agent commercial qui le liait à la société Vertumne de sorte qu'il n'était pas fondé à leur opposer l'existence de ce contrat pour contester sa responsabilité à leur égard ; Attendu qu'il n'est pas établi que Paul et Albert X... étaient des investisseurs avisés ni même que Jean-Paul Y la société Deloitte et Touche disposaient d'informations à leur sujet ayant pu le leur faire croire ; que la circonstance qu'ils ont refusé d'autres propositions d'investissement dont ils trouvaient insuffisant le rendement importe peu dès lors qu'il n'est pas prétendu que la société Deloitte et Touche ou Jean-Paul Y les ont informés des risques que pouvaient présenter des placements offrant une rentabilité exceptionnellement élevée, tel celui que proposait la société Gbler ; Attendu que pas plus qu'en première instance il

n'est démontré que, d'une part, la société Deloitte et Touche avait vérifié la réputation, les références, les compétences et les garanties de Jean-Paul Y avant de mettre Albert et Paul X... en rapport avec lui et que, d'autre part, celui-ci avait vérifié les garanties offertes tant par la société Gbler que par l'opération financière proposée à ses clients ; Que, d'ailleurs, dans sa lettre du 6 mai 1996 adressée à Jean-Paul Y la société Deloitte et Touche a affirmé que la société Gbler était dirigée "par un escroc notoire"; Attendu que lorsque les contrats qu'ils avaient conclus avec la société Gbler ont été résiliés Albert et Paul X... ont vainement demandé le remboursement des sommes remises par eux aux fins d'investissement ; que la société Gbler a été déclarée en faillite ; Que, même s'il existe une incertitude quant au détenteur de ces sommes et aux possibilités futures de recouvrement, les consorts X..., qui en sont toujours privés, subissent un préjudice certain et actuel s'analysant en une perte de chance d'avoir pu se faire restituer les sommes investies et en percevoir les fruits ; Attendu qu'il a été jugé à bon droit que la société Deloitte et Touche et Jean-Paul Y étaient responsables de ce préjudice dès lors que c'est par leurs conseils que Paul et Albert X... avaient été amenés à contracter avec la société Gbler, peu important que la disparition des sommes investies soit imputable à des tiers ; Que la société Deloitte et Touche a d'ailleurs reconnu, dans sa lettre du 21 juin 1996 adressée à Paul et Albert X... qu'elle avait des obligations envers ceux-ci en envisageant seulement que la responsabilité soit partagée par Jean-Paul Y en raison du partage opéré par eux de la rémunération versée par Paul et Albert X... ; Que doit être prise en considération, pour apprécier la responsabilité de la société Deloitte et Touche et de Jean-Paul Y, la circonstance que tous deux ont été rémunérés par Paul et Albert X... ; Attendu que compte tenu du temps écoulé depuis l'introduction de la

demande en justice, le montant de la réparation de chacun des préjudices causés par la société Deloitte et Touche et Jean-Paul Y à Albert X..., d'une part, et aux héritiers de Paul X... doit être fixé à la somme de 420.000 euros ; Attendu, en outre, que les consorts X... sont bien fondés à demander le remboursement de la commission qu'ils ont versée et qu'ont partagée Jean-Paul Y et la société Deloitte et Touche ; Attendu qu'il y a lieu d'allouer aux consorts X... une indemnité pour leurs frais, non compris dans les dépens, exposés en cause d'appel ; Attendu qu'il ne peut pas être statué sur la demande présentée à l'encontre de Valérie D qui n'a pas été assignée ; qu'il n'a pas été fait injonction à Jean-Paul Y d'assigner cette partie ; qu'il y a lieu de renvoyer, sur ce point, l'affaire à la mise en état ; Attendu que pour justifier son action à l'encontre de Gérard Z Jean-Paul Y invoque l'article L.622-32 du code de commerce en faisant état de la clôture pour insuffisance d'actif de la procédure de liquidation judiciaire de la société Vertumne dont Gérard Z était dirigeant de fait et de l'interdiction de gérer prononcée contre celui-ci ; Attendu, toutefois, qu'il y a lieu de s'interroger d'une part sur l'application en l'espèce de l'article L.622-32 du code de commerce alors que la créance apparaît être née après l'ouverture de la procédure collective et, d'autre part et si l'on considère que cette créance est antérieure à l'ouverture de la procédure collective, sur la recevabilité de l'action alors qu'il n'est pas prétendu que cette créance a été déclarée au passif de la société Vertumne ; Qu'il convient de rouvrir les débats et d'inviter Jean-Paul Y à s'expliquer sur ce point ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, Dit que sont jointes les procédures enregistrées sous les numéros 03/03640 et 03/03934 ; Confirme le jugement, hormis en ce qu'il a fixé à 358.236,76 euros la condamnation mise à la charge de

la société Deloitte & Touche et de Jean-Paul Y au bénéfice d'Albert X..., d'une part, et des héritiers de Paul X..., d'autre part ; Statuant à nouveau et ajoutant, Condamne in solidum la société Deloitte & Touche Conseil et Jean-Paul Y à payer à Albert X... les sommes de : - quatre cent mille euros (400.000 ) à titre de dommages-intérêts, - neuf mille quarante euros vingt-trois cents (9.040,23 ) en remboursement de commission ; Condamne in solidum la société Deloitte & Touche Conseil et Jean-Paul Y à payer à Jacqueline A, veuve X..., Marie-Christine X... épouse Y..., Marie-Françoise X... épouse Z... et Marie-Noùlle X... épouse A..., ensemble et en qualité d'héritiers de Paul X..., les sommes de : - quatre cent mille euros (400.000 ) à titre de dommages-intérêts, - neuf mille quarante euros vingt-trois cents (9.040,23 ) en remboursement de commission ; Les condamne à payer aux consorts X..., ensemble, la somme de trois mille euros (3.000 ä) en complément de l'indemnité déjà allouée par le premier juge en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Les condamne aux dépens de première instance et d'appel concernant les consorts X... et autorise l'avoué de ceux-ci à recouvrer directement contre eux les sommes dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante. Sursoit à statuer sur l'action de Jean-Paul Y à l'encontre de Gérard Z et Virginie D et, quant au litige opposant ces parties, renvoie l'affaire à la mise en état en enjoignant à Jean-Paul Y d'assigner Virginie D, d'une part, et en l'invitant à s'expliquer sur l'application de l'article L.622-32 du code de commerce et sur le fondement de son appel en garantie dirigé contre Gérard Z et Virginie D, d'autre part ; Dit que Jean-Paul Y devra notifier à Gérard Z le présent arrêt et ses explications sur le point évoqué par la cour ; Dit que l'affaire sera rappelée à l'audience de la mise en état du ... LE GREFFIER LE PRÉSIDENT Madame B...

J.-F. JACQUET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 03/03640
Date de la décision : 04/11/2004
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2004-11-04;03.03640 ?
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