R.G : 03/04770 décision du Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE Au fond RG :2002/00076 du 13 mai 2003 VERSTRAETEN VERSTRAETEN C/ PACHE PACHE PACHE LELEU COUR D'APPEL DE LYON DEUXIEME CHAMBRE CIVILE Section X... ARRET DU 26 Octobre 2004 APPELANTS : Madame Laurence Y... épouse Z..., représentée par Me DE FOURCROY, avoué à la Cour assistée de Me LE CHENE CHRISTOPHE, avocat au barreau de VALENCE Monsieur Vincent Y..., représenté par Me DE FOURCROY, avoué à la Cour assisté de Me LE CHENE CHRISTOPHE, avocat au barreau de VALENCE INTIMES : Mademoiselle Corinne A... représentée par Me GUILLAUME, avoué à la Cour assistée de Me CAUET, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE Monsieur Guillaume A... représenté par Me GUILLAUME, avoué à la Cour assisté de Me CAUET, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE N RG. 2003/4770 Monsieur Fernand A... représenté par Me GUILLAUME, avoué à la Cour assisté de Me CAUET, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE Madame Simone X... épouse A... représentée par Me GUILLAUME, avoué à la Cour assistée de Me CAUET, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
En présence du Ministère Public,
représenté par Monsieur B..., substitut général
Instruction clôturée le 03 Septembre 2004
Audience de plaidoiries du 21 Septembre 2004 LA DEUXIEME CHAMBRE, section X..., DE LA COUR D'APPEL DE LYON, composée lors des débats et du délibéré de : * Maryvonne DULIN, Présidente, * Patricia MONLEON, Conseillère, * Pierre BARDOUX, Vice-président placé auprès du Premier Président magistrats ayant tous les trois participé au délibéré, assistées lors des débats tenus en audience non publique d'Anne Marie BENOIT, greffière, a rendu l'arrêt contradictoire suivant : N RG. 2003/4770 EXPOSE DU LITIGE :
Par actes des 20 et 28 décembre 2001, madame Laurence Y... épouse Z... et monsieur Vincent Y... ont fait assigner mademoiselle Corinne A..., monsieur Guillaume A..., monsieur Fernand A... et son épouse madame Simone X..., devant le Tribunal de grande instance de
SAINT ETIENNE aux fins de voir prononcer la nullité du mariage intervenu entre monsieur Patrick A... et madame Rachel C..., le 29 juin 1996, à VALENSOLE (ALPES DE HAUTE PROVENCE), pour bigamie. Par jugement en date du 13 mai 2003, le Tribunal de grande instance de SAINT ETIENNE a déclaré irrecevable pour défaut d'intérêt l'action de madame Laurence Y... et de monsieur Vincent Y..., et a condamné ces derniers à payer aux consorts A..., globalement, la somme de 700 euros en application de l' article 7OO du nouveau code de procédure civile. Par déclaration remise au greffe de la Cour le 24 juillet 2003, madame Laurence Y... et monsieur Vincent Y... ont relevé appel de ce jugement. Par conclusions déposées au greffe de la Cour le 21 juin 2004, madame Laurence Y... et monsieur Vincent Y... demande à la Cour de réformer le jugement déféré, de prononcer la nullité du mariage intervenu entre monsieur Patrick A... et madame Rachel C..., et ce par application des dispositions des articles 147 et 184 du code civil, d'ordonner la mention de la dite annulation sur les actes d'état civil concernés, de débouter les consorts A... de leur demande de dommages et intérêts, et de condamner les intimés au paiement d'une indemnité de 2 000 euros chacun par application de l' article 7OO du nouveau code de procédure civile. Au soutien de leur appel, madame Laurence Y... et monsieur Vincent Y... font valoir que le mariage de leur mère, Rachel C... avec monsieur Patrick A... est entaché de nullité pour bigamie, conformément aux dispositions de l'article 147 du code civil, dès lors qu'au moment de leur union, monsieur Patrick A... était encore dans les liens de son mariage précédent avec madame D.... N RG. 2003/4770 Ils reprochent à la décision attaquée d'avoir considéré qu'ils ne justifiaient pas d'un intérêt personnel à agir en nullité du mariage, alors qu'ils sont ayants droit de madame C..., suite à leur adoption plénière en 1981, qu'ils ont un intérêt né et actuel d'ordre financier pour poursuivre l'annulation du mariage, les
créanciers de monsieur A... pouvant les poursuivre en leur qualité d'héritiers de madame C..., sur le fondement des dispositions de l'article 220 du code civil, qu'en particulier les cotisations afférentes au régime de prévoyance sociale constituent des dettes relevant de la solidarité de l'article 220 du code civil, ainsi que les dettes fiscales, ce qui représente un passif dont le montant total dépasse 200 000 F. Par conclusions déposées au greffe de la Cour le 16 avril 2004, les consorts A... demandent à la Cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et de condamner monsieur et madame Y... à leur verser la somme de 7 600 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, ainsi que la somme de 1 500 euros au titre de l' article 7OO du nouveau code de procédure civile. Ils exposent qu'ils sont issus du mariage en septembre 1976 de monsieur A... et de madame D..., que leur père s'est remarié le 29 juin 1996, alors que le jugement de divorce rendu le 5 décembre 1995, avait été frappé d'appel, et a donné lieu à un arrêt de la Cour d'appel de LYON du 4 février 1997. Ils font valoir que les requérants en nullité ne justifient d'aucun intérêt particulier pour agir, dès lors qu'ils ne sont pas les ayants droits de monsieur A... et donc qu'ils ne sont pas concernés par la situation financière de celui-ci au jour de son décès, que madame C... ne pouvait être concernée par l'endettement personnel de monsieur A..., qu'aucun des créanciers de monsieur A... n'a poursuivi les demandeurs en nullité. Concernant la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, ils soulignent que la situation difficile qu'a engendrée cette procédure abusive, a eu des conséquences importantes sur la famille, en ce qu'elle leur fait revivre des événements particulièrement douloureux. N RG. 2003/4770 MOTIFS DE LA DECISION Attendu qu'aux termes de l'article 147 du code civil, il ne peut être contracté un second mariage avant la dissolution du premier ; Que conformément aux
dispositions de l'article 184 du code civil, le mariage contracté en violation de l'article 147 du code civil peut être attaqué soit par les époux eux-mêmes, soit par tous ceux qui y ont intérêt, soit par le ministère public ; Qu'en l'espèce il n'est pas contesté que monsieur Patrick A..., de nationalité française, a contracté mariage, le 29 juin 1996, avec madame Rachel C... divorcée Y..., en état de bigamie, son mariage avec madame D... n'était pas dissous, dès lors qu'il avait fait appel du jugement en date du 5 décembre 1995 prononçant le divorce à ses torts exclusifs ; Que la monogamie étant un principe fondamental en droit français, l'ordre public impose l'annulation de tout mariage célébré en FRANCE, en violation de l'interdiction de la bigamie, et ce même si les dispositions des lois nationales des époux étrangers validaient un tel mariage ; Qu'en l'espèce monsieur A... et madame C... sont décédés dans un accident de la circulation survenu le 7 janvier 1998, sur la commune de GANAGOBIE (ALPES DE HAUTE PROVENCE) ; Que madame Laurence Y... et monsieur Vincent Y... justifient être les descendants et ayants droit de madame C..., pour avoir été légitimés par adoption, par monsieur Jean Emile Y... et son épouse, madame Rachel C..., de nationalité belge, suite à un jugement en date du 1er juin 1981 du Tribunal de la Jeunesse de BRUXELLES ; Que si les requérants doivent justifier, pour agir en nullité du mariage, d'un intérêt pécuniaire né et actuel, à la date de la saisine de la juridiction, il est établi d'une part qu'ils sont héritiers de madame C... et d'autre part, que Maître MALET-CLEMENT N RG. 2003/4770 notaire chargé du règlement de la succession de monsieur A..., a fait savoir aux intéressés, par courrier du 19 novembre 1998, que dans le passif successoral figuraient notamment des dettes fiscales relatives à l'impôt sur le revenu et à la taxe d'habitation dus pour les années 1996 et 1997, des arriérés de cotisations URSSAF sur plusieurs années, et des comptes bancaires débiteurs ouverts au nom de monsieur
ou madame A..., auprès de la Société Générale ; Que nonobstant le régime de séparation de biens adopté par monsieur A... et madame C... au moment de leur union, qui a fait l'objet d'un contrat de mariage souscrit le 10 juin 1996, monsieur et madame Y... sont bien fondés à souligner que certaines des dettes, dont l'importance a conduit les héritiers de monsieur A... à renoncer à sa succession, relèvent de la solidarité prévue par les dispositions de l'article 220 du code civil ; Qu'il en est ainsi notamment pour les dettes fiscales ci dessus visées, ainsi que pour les soldes débiteurs des comptes joints ouverts au nom de monsieur A... et de madame C... ; Attendu en conséquence que monsieur et madame Y... justifient d'un intérêt né et actuel à poursuivre la nullité du mariage de leur mère, madame C... avec monsieur A... ; Qu'il convient donc d'infirmer le jugement déféré, et de déclarer monsieur et madame Y... recevables et fondés à solliciter la nullité du mariage pour vice de bigamie ; Attendu qu'il convient par voie de conséquence de débouter les consorts A... de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, ; Qu'enfin et pour des raisons d'équité, il convient de débouter monsieur et madame Y... de leur demande indemnitaire fondée sur l'application de l' article 7OO du nouveau code de procédure civile ; N RG. 2003/4770 PAR CES MOTIFS La Cour, Infirme le jugement attaqué, Statuant à nouveau :
Déclare recevable et fondée l'action en nullité du mariage, Prononce la nullité du mariage célébré le 29 juin 1996, entre monsieur Patrick A... et madame Rachel C..., devant l'Officier d'état civil de la commune de VALENSOLE, Ordonne la mention du dispositif du présent arrêt en marge de l'acte de mariage et des actes de naissance de monsieur A... et de madame C..., Déboute les consorts A... de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, Déboute monsieur et madame Y... de leur demande indemnitaire fondée sur l'application de l' article 7OO du nouveau code de procédure civile, Condamne les intimés aux dépens de
première instance, et dépens d'appel qui seront recouvrés par les avoués conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile Cet arrêt a été prononcé publiquement par Maryvonne DULIN, présidente, en présence d'Anne Marie BENOIT, greffière, et signé par elles. LA GREFFIÈRE,
LA PRÉSIDENTE,