COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 14 Octobre 2004
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 27 mars 2003 - N° rôle : 2000/4381 N° R.G. : 03/02655
Nature du recours : Appel
APPELANTS : S.A.R.L. COTRIMO GESTION représentée par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour assistée de Me SAINT AVIT, avocat au barreau de LYON Monsieur Yves X... représenté par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour assisté de Me SAINT AVIT, avocat au barreau de LYON INTIME : Maître Bruno WALCZAK, agissant en qualité de mandataire liquidateur de la Société COTRIMO, SARL représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour assisté de Me Joùl GAUDE, avocat au barreau de LYON Instruction clôturée le 25 Juin 2004 Audience publique du 10 Septembre 2004 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, Monsieur SIMON, Conseiller le plus ancien de la Chambre, faisant fonction de Président en vertu de l'ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de LYON en date du 19 Juillet 2OO4, Monsieur SANTELLI, Conseiller Madame MIRET, Conseiller DÉBATS : à l'audience publique du 10 septembre 2004 GREFFIER : La Cour était assistée de Mademoiselle Y..., Greffier, lors des débats et du prononcé de l'arrêt, ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 14 octobre 2004 par Monsieur SIMON, Conseiller, qui a signé la minute avec Mademoiselle Y..., Greffier.
EXPOSE DU LITIGE - PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par déclaration du 25 avril 2003, la société COTRIMO GESTION et Monsieur Yves X... ont relevé appel d'un jugement rendu le 27 mars 2003 par le Tribunal de Commerce de LYON qui a prononcé la nullité de la déclaration de l'assemblée générale extraordinaire du 29 décembre 1998 de la société COTRIMO GESTION ainsi que toutes les assemblées subséquentes - qui a dit que l'action à raison de l'absence d'approbation des comptes de l'exercice clos le 31 mars 1997 se heurte à la prescription - qui lui a donné acte qu'il se réservait le droit de faire évaluer à dire l'expert les parts qu'il détenait dans la société COTRIMO - qui a ordonné la réintégration à l'actif de la société COTRIMO GESTION des rémunérations que le gérant s'est vu octroyer indûment pour 78.583,00 euros sous astreinte de 50,00 euros par jour de retard à compter du trentième jour suivant la signification du jugement - qui l'a débouté ès qualités de sa demande de dommages et intérêts - qui a condamné solidairement la société COTRIMO GESTION et Monsieur Yves X... à lui payer ès qualités la somme de 2000,00 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Vu l'article 455 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civile dans sa rédaction issue du décret du 28 décembre 1998 ;
Vu les prétentions et les moyens développés par la société COTRIMO GESTION et Monsieur Yves X... dans leurs conclusions du 18 juin 2004 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé tendant à faire juger que l'assemblée générale extraordinaire des associés a régulièrement décidé d'augmenter le capital de la société pour y faire entrer un nouvel associé - que cette décision était nécessitée par la société déficitaire de la société et était donc conforme à l'intérêt social , même si elle s'est traduite par une réduction de la part de chacun des autres associés - qu'il n'était
pas envisageable de prévoir une prime d'émission du fait que les capitaux propres de la société étaient négatifs et que le nouvel associé exigeait qu'il n'y en ait point pour accepter de souscrire - que le fait que les associés aient accepté de réserver la souscription des parts nouvelles à un nouvel associé impliquait qu'ils renoncent à leur droit préférentiel à leur profit - qu'il n'y a donc pas eu de fraude aux droits des associés - que l'augmentation de la rémunération du gérant Monsieur Yves X... a été décidée à l'assemblée générale ordinaire des associés du 8 février 2000, donc régulièrement et qu'elle était justifiée - que celui-ci a contribué au redressement de la société en abandonnant son compte courant - qu'en conséquence le jugement doit être réformé.
Vu les prétentions et les moyens développés par Maître WALCZAK, en sa qualité de mandataire liquidateur de la société COTRIMO dans ses conclusions récapitulatives du 8 juin 2004 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé tendant à faire juger que la délibération de l'assemblée générale extraordinaire du 29 décembre 1998 décidant une augmentation du capital social est nulle pour n'avoir pas respecté les dispositions statutaires qui prévoient que les associés doivent renoncer à leur droit préférentiel de souscription, ce qui n'a pas été fait lors de cette réunion - qu'il en résulte que les droits des associés ont été bafoués et qu'ils ont été lésés, d'autant plus qu'il n'a pas été prévu de prime d'émission à la charge du nouvel associé, que le jugement déféré doit être ainsi réformé. MOTIFS ET DECISION :
I/ Sur la demande en nullité de la délibération de l'assemblée générale extraordinaire du 29 décembre 1998 décidant une augmentation de capital dans la société COTRIMO GESTION :
Attendu qu'il n'appartient au juge ni d'apprécier les raisons pour lesquelles ni les conditions dans lesquelles les associés ont pris
leur décision lors d'une assemblée générale, ni l'opportunité de les avoir prises, ni même de leur conformité à l'intérêt social - que seule l'assemblée générale des associés est souveraine à cet égard - que par conséquent les considérations de Maître WALCZAK, ès qualités de mandataire liquidateur de la société COTRIMO pour exercer les droits de cette société en tant qu'associée de la société COTRIMO GESTION sont parfaitement inopérantes en ce qu'elles tendent à critiquer la décision prise lors de l'assemblée générale extraordinaire tenue le 29 décembre 1998 dans cette société ;
Attendu que Maître WALCZAK, ès qualités, est en revanche bien fondé dans son action lorsqu'elle tend à rechercher d'une part si les conditions dans lesquelles l'assemblée générale du 29 décembre 1998 s'est tenue sont régulières et si, d'autre part, les règles statutaires, qui sont prévues pour prendre la décision litigieuse, ont bien été respectées - que le contrôle du juge ne peut porter sur ces points ;
Attendu qu'un associé dispose d'aucun droit la convocation à l'assemblée générale ayant été faite dans le délai de quinze jours prévu par la loi, ce qui n'est pas contesté par Maître WALCZAK, ès qualités, avant la tenue de cette réunion, pour obtenir son report - qu'il appartenait en revanche au gérant de la société de communiquer aux associés en même temps que la convocation, sans qu'ils aient à en faire la demande Maître WALCZAK, ès qualités, a réclamé dans un courrier du 28 décembre 1998, la veille de l'assemblée générale, cette communication, les documents nécessaires permettant aux associés d'examiner les conditions dans lesquelles les résolutions proposées par la gérance d'augmenter le capital social devaient se prendre avant qu'elles ne soient soumises au vote des associés - que l'absence de ces documents joints à la convocation- la demande de Maître WALCZAK, ès qualités, démontrant qu'ils ne l'ont pas été -
constitue une irrégularité sanctionnée de nullité des délibérations prises lors de cette assemblée ;
Attendu que les statuts de la société prévoyaient qu'en cas d'augmentation du capital en numéraire, les associés avaient un droit de préférence à la souscription des parts nouvelles proportionnellement à leur droit dans le capital, sauf renonciation expresse de ceux-ci, selon des modalités à définir par une décision extraordinaire des associés - qu'une assemblée générale extraordinaire pourra décider de la suppression totale ou partielle du droit préférentiel de souscription au profit de personnes dénommées ou sans indication de bénéficiaire ;
Attendu que ces dispositions exigent une renonciation expresse des associés à leur droit préférentiel de souscription et au surplus que la suppression de ce droit soit décidée par l'assemblée générale - qu'en conséquence les appelants ne peuvent soutenir qu'en décidant qu'un nouvel associé souscrive aux parts nouvelles, qui étaient mises à la souscription par le gérant en vue de l'augmentation du capital envisagée, les associés ont renoncé à leur droit préférentiel de souscription, sauf à admettre qu'il suffirait que cette renonciation, dont les statuts prévoient qu'elle soit expresse, pourrait être seulement implicite - qu'il convenait que la suppression de ce droit soit décidée par l'assemblée générale, ce que la lecture du procès-verbal n'établit pas - que cette irrégularité est sanctionnée de nullité ;
Attendu que dans ces conditions il convient de prononcer la nullité de la délibération de l'assemblée générale du 29 décembre 1998 qui a statué sur l'augmentation du capital, confirmant sur ce point le jugement déféré, mais sur d'autres motifs ;
II/ Sur les assemblées générales arrêtant les comptes de l'exercice clos le 31 mars 1997 :
Attendu que le premier juge a fait une exacte application des articles L. 223-19 et L. 223-24 du Code de Commerce en décidant que l'action entreprise par Maître WALCZAK, ès qualités pour demander la nullité de l'assemblée générale ordinaire qui a statué sur les comptes de l'exercice clos le 31 mars 1997 était prescrite - qu'en effet Maître WALCZAK, ès qualités, en tant que représentant de la société COTRIMO, associée de la société COTRIMO GESTION, ne pouvait ignorer que l'assemblée générale, appelée à statuer sur les comptes de cet exercice, devait se tenir le 30 septembre 1997 au plus tard, soit dans le délai de six mois après cette clôture - qu'en conséquence le point de départ du délai de la prescription de trois ans a couru à compter du 30 septembre 1997 - qu'il importe peu en conséquence que cette assemblée se soit effectivement réunie après l'expiration de ce délai ;
Attendu que le jugement déféré, qui a constaté cette prescription, l'action en justice ayant été engagée le 19 décembre 2000, doit être confirmé ;
III/ Sur la demande en restitution des sommes versées au gérant de la société COTRIMO GESTION à titre de rémunération :
Attendu qu'aucun texte ne prévoit qu'un associé puisse réclamer, à défaut d'avoir demandé que la délibération de l'assemblée générale, qui s'est prononcée sur la fixation de la rémunération du gérant, soit annulée à raison d'une irrégularité - la restitution dans la société des sommes jugées excessives que cette assemblée générale a décidé d'allouer à son gérant à titre de rémunération - que dans ces conditions, faute de fondement, la demande de Maître WALCZAK, ès qualités, faite au nom de la société COTRIMO qu'il représente en sa qualité d'associé de la société COTRIMO GESTION , doit être rejetée - que cette demande n'est pas davantage fondée à l'égard de Monsieur Yves X..., bénéficiaire de ces sommes ;
Attendu que le jugement déféré doit être réformé de ce chef ;
IV/ Sur la demande en dommages et intérêts faite par Maître WALCZAK, ès qualités :
Attendu que Maître WALCZAK, ès qualités, ne justifie pas que les sommes qu'il réclame à titre de dommages et intérêts à la société COTRIMO GESTION et à Monsieur Yves X..., qu'il prétend avoir exposées, soient distinctes de celles qu'il sollicite au titre des frais irrépétibles, s'agissant de dépenses générées par la présente instance - qu'il doit en conséquence être débouté à ce titre de sa demande, confirmant de ce chef le jugement déféré ;
V/ Sur les autres demandes :
Attendu qu'il serait inéquitable que Maître WALCZAK, ès qualités, supporte ses frais irrépétibles d'appel et qu'il convient ainsi de lui allouer au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile une somme de 1000 euros à la charge in solidum des appelants, qui s'ajoutera à celle accordée par le premier juge ;
Attendu que la société COTRIMO GESTION et Monsieur Yves X... doivent être condamnés in solidum aux dépens ;
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celle qui concerne la restitution dans la société COTRIMO GESTION des sommes versées au gérant à titre de rémunération,
Le réforme de ce seul chef,
Et statuant à nouveau,
Déboute Maître WALCZAK, ès qualités de mandataire liquidateur de la société COTRIMO des rémunérations allouées à Monsieur Yves X..., gérant, par l'assemblée générale du 8 février 2000,
Y ajoutant,
Condamne in solidum la société COTRIMO GESTION et Monsieur Yves X... à payer à Maître WALCZAK, ès qualités, la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que les dépens qui seront recouvrés par Maître MOREL, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER,
LE CONSEILLER,
M.P. Y...
R. SIMON