COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile ARRÊT DU 16 Septembre 2004
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce LYON du 28 janvier 2003 - N° rôle : 2001/3337 N° R.G. : 03/00823
Nature du recours : Appel
APPELANTS : S.A.R.L. BOURRO, représentée par son gérant. 64 Quai Pierre Scize 69005 LYON 05 représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assistée de Maître PROTIERE, avocat au barreau de LYON Monsieur Pierre BOUSQUET 9 B Rue Monmousseau 69200 VENISSIEUX représenté par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assisté de Maître PROTIERE, avocat au barreau de LYON Madame Annie X épouse Y 9 B Rue Monmousseau 69200 VENISSIEUX représentée par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assistée de Maître PROTIERE, avocat au barreau de LYON Monsieur Jérôme Z 9 B Rue Monmousseau 69200 VENISSIEUX représenté par la SCP JUNILLON-WICKY, avoués à la Cour assisté de Maître PROTIERE, avocat au barreau de LYON
INTIMEE : S.A.R.L. CABINET HENRI 52 Cours Emile Zola 69100 VILLEURBANNE représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour assistée de Maître PALAZZOLO, avocat au barreau de LYON Instruction clôturée le 23 Avril 2004 Audience publique du 12 Mai 2004 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Madame MARTIN, Président, Monsieur SANTELLI, Conseiller Monsieur KERRAUDREN, Conseiller DEBATS : à l'audience publique du 12 mai 2004 GREFFIER : la Cour était
assistée de Mademoiselle BRISSY, Greffier, présent lors des débats seulement, ARRET : CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 16 septembre 2004 par Madame MARTIN, Président, qui a signé la minute avec Mademoiselle BASTIDE, Greffier.
EXPOSE DU LITIGE - PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par déclaration en date du 10 février 2003, la société BOURRO a relevé appel d'un jugement rendu le 28 janvier 2003 par le Tribunal de Commerce de LYON qui a donné acte à Monsieur Pierre Y, Madame Annie Z et Monsieur Jérôme Z de leur intervention volontaire - qui a dit que la société CABINET HENRI, intermédiaire entre Monsieur et Madame Y et Monsieur Jérôme Z d'une part et la société BOURRO d'autre part a droit à une juste rémunération pour la cession des titres de la société BOURRO et du fonds de commerce y afférent - qui a condamné la société BOURRO à payer à la société CABINET HENRI la somme de 10.939,74 euros TTC outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation - qui a dit que le comportement de la société BOURRO était de mauvaise foi et qui l'a condamnée à payer à la société CABINET HENRI la somme de 1524,49 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive - qui a débouté la société BOURRO, Monsieur et Madame Y et Monsieur Jérôme Z, intervenants volontaires, de toutes leurs demandes - qui a condamné la société BOURRO à payer à la société CABINET HENRI la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Vu l'article 455 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civile dans sa rédaction issue du décret du 28 décembre 1998 ;
Vu les prétentions et les moyens développés par la société BOURRO ainsi que Monsieur Pierre Y et Madame Annie Z et par Monsieur Jérôme Z dans leurs conclusions du 5 juin 2003 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé tendant à faire juger que la
société CABINET HENRI chargée de vendre le fonds de commerce a manqué à ses obligations d'information et de conseil à son égard en ne vérifiant pas par les extraits du Registre du Commerce et des Sociétés que le fonds en question ne lui appartenait, mais était la propriété de la société MAGIC, elle-même ne l'exploitant qu'en tant que locataire gérante de cette société - que l'intermédiaire a donc commis des négligences engageant sa responsabilité envers elle - que le bailleur n'a donné son consentement ni à la cession du droit au bail ni à la cession de la licence - que de la sorte les actes établis pour la vente du fonds ne sont opposables ni au bailleur ni aux tiers que sont la société CABINET HENRI ainsi que Monsieur et Madame Y et Monsieur Jérôme Z - que ceux-ci en acquérant les parts de la société BOURRO en croyant qu'elle possédait le fonds ont été trompés par la société CABINET HENRI - qu'ils ont subi un préjudice pour avoir du régler les dettes de la société BOURRO à hauteur de 65.565,27 euros (430.080 francs), les obligeant à contracter deux emprunts à cette occasion de 300.000 francs outre l'utilisation de leur épargne pour 109.580 francs - qu'ils doivent être indemnisés à ce titre - que la commission réclamée par l'intimée n'est pas due par elle, dès lors que le gérant Monsieur Richard X... qui savait que la société n'était pas propriétaire du fonds a abusé l'intermédiaire pour en définitive traiter personnellement avec Monsieur et Madame Y et Monsieur Jérôme Z dans son seul intérêt - que le jugement doit être en conséquence réformé.
Vu les prétentions et les moyens développés par la société CABINET HENRI dans ses conclusions du 2 octobre 2003 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé tendant à faire juger que la société BOURRO en donnant mandat de vendre le fonds a reconnu en être propriétaire - que personne ne conteste qu'elle est à l'origine de la transaction - qu'elle a bien rempli ses obligations issues du mandat
de vente à l'égard de la société BOURRO avec laquelle elle a seule contracté, Monsieur Richard X... n'étant pas son co-contractant - qu'ainsi elle a droit à sa commission en application de la loi du 2 janvier 1970 - qu'elle n'a commis aucune faute à l'égard des appelants - qu'il est établi que depuis le 7 juillet 2000 la société BOURRO est propriétaire du fonds pour avoir acquis le droit au bail de la société MAGIC ainsi que la licence IV - que le mandat de vendre du 11 juillet 2000 est postérieur - que ce sont Monsieur et Madame Y ainsi que Monsieur Jérôme Z qui ont préféré acquérir les parts sociales -que s'ils estiment avoir été trompés ils devraient alors agir contre le vendeur en résolution de la cession des parts - qu'ils n'ont subi aucun préjudice - qu'ils ne peuvent rien réclamer - que la société BOURRO de mauvaise foi doit être condamnée à des dommages et intérêts. MOTIFS ET DECISION :
I/ Sur la demande principale de la société CABINET HENRI en paiement de sa commission d'intermédiaire :
Attendu qu'il n'est pas contesté que c'est la société BOURRO qui a seule donné mandat le 11 juillet 2000 à la société CABINET HENRI de vendre son fonds de commerce - qu'ayant acquis par acte du 7 juillet 2000 le fonds de la société MAGIC, elle ne peut, pour prétendre n'en avoir pas été propriétaire, invoquer l'absence de formalités consécutives à cet acte lesquelles, à supposer non effectuées, ne sont pas de nature à mettre en cause sa validité ni ses effets résultant de l'accord des parties - que la société BOURRO a été régulièrement engagé au titre de ce mandat par son gérant en exercice, Monsieur Richard X... - que le mandat avec cette société ne peut être en conséquence discuté ;
Attendu que ni la société BOURRO ni Monsieur et Madame Y et Monsieur Jérôme Z, intervenants volontaires dans la procédures, ne contestent que c'est la société CABINET HENRI qui les a mis en relation - qu'il
importe peu que Monsieur Richard X... ait proposé à Monsieur et Madame Y ainsi qu'à Monsieur Jérôme Z de céder les parts qu'il détenait majoritairement dans la société BOURRO ou que ce soit ceux-ci qui aient préféré s'en rendre acquéreurs - qu'en effet la société CABINET HENRI est étrangère à cette modification dans les modalités de la transaction - qu'il ne peut donc lui en être fait grief par ceux-là qui ont souhaité que l'affaire soit transmise dans ces conditions - lesquels ne remettent pas en cause que la société CABINET HENRI est bien à l'origine de la négociation ;
Attendu que si la cession des parts sociales est juridiquement distincte de la vente d'un fonds de commerce, il n'en reste pas moins que cette opération lorsqu'elle porte sur la totalité des parts composant le capital social entre le champ d'application de la loi du 2 janvier 1970 sur les transactions commerciales - qu'elle donne donc droit à rémunération à l'intermédiaire qui a rapproché les parties - qu'en décider autrement reviendrait à priver la société CABINET HENRI de sa commission, alors qu'elle a rempli à l'égard de la société BOURRO ses obligations contractées aux termes du mandat sans qu'il puisse lui être opposé les conditions dans lesquelles l'affaire a finalement été transmise - que la société BOURRO qui avait donné le mandat aurait pu seule s'en plaindre - que force est de constater qu'elle n'a émis aucune critique sur les conditions de la transaction ;
Attendu qu'il convient en conséquence de déclarer la société CABINET HENRI bien fondée dans sa demande en paiement dirigée contre la société BOURRO, laquelle doit être ainsi condamnée à lui payer la somme de 10.939 euros TTC au titre de la commission prévue dans le mandat, majorée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 21 septembre 2001 ;
Attendu que le jugement déféré, qui a fait droit à cette demande,
doit être ainsi confirmé ;
II/ Sur la demande des intervenants volontaires :
Attendu que Monsieur et Madame Y ainsi que Monsieur Jérôme Z sont intervenus volontairement dans l'instance pour réclamer que leur soient alloués des dommages et intérêts, la société CABINET HENRI ayant manqué à son obligation d'information et de conseil à leur égard en ne les informant pas que la société BOURRO n'était pas propriétaire de son fonds ou à tout le moins en négligeant de procéder aux vérifications qui auraient permis de s'en convaincre ;
Attendu que ce moyen n'est pas fondé, preuve étant rapportée qu'aux termes d'un acte du 7 juillet 2000 la société BOURRO s'est rendue acquéreur du fonds auprès de la société MAGIC - qu'il doit donc être écarté ;
Attendu que Monsieur et Madame Y et Monsieur Jérôme Z ne peuvent faire grief à la société CABINET HENRI d'avoir du s'acquitter, étant acquéreurs des parts sociales, des dettes de la société BOURRO - que le fait que la société CABINET HENRI n'était liée avec eux par aucun contrat et que le choix d'acquérir les parts de la société BOURRO plutôt que le fonds appartient à eux seuls, la société CABINET HENRI n'étant d'aucune sorte intervenue dans cette transaction, celle-ci ne peut être recherchée sur un manquement à une obligation d'information et de conseil - qu'il n'est pas inutile de relever que l'acquéreur des titres d'une société reprend nécessairement, du fait même qu'il devient associé aux lieu et place du vendeur, la société dans l'état où elle se trouve au jour de la cession avec ses éléments d'actif et de passif - que les intervenants ne peuvent par conséquent incriminer la société CABINET HENRI - que s'ils ont été mal conseillés dans leur décision, ils ne peuvent s'en prendre qu'à leur conseil et s'ils estiment avoir été trompés dans leur consentement, agir en annulation de la cession contre leur vendeur ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède que Monsieur et Madame Y ainsi que Monsieur Jérôme Z sont mal fondés dans leurs prétentions et qu'ils doivent en être déboutés, confirmant de ce chef le jugement déféré ;
III/ Sur la demande de dommages et intérêts de la société CABINET HENRI :
Attendu que la société BOURRO en cherchant à évincer la société CABINET HENRI de tout droit à commission a manifestement agi de mauvaise foi - que cependant l'intimée ne justifie pas d'un préjudice indemnisable distinct du retard à percevoir sa commission, lequel a donné droit à des intérêts de retard - qu'il convient de la débouter de cette demande, réformant de ce chef le jugement déféré ;
IV/ Sur les autres demandes :
Attendu qu'il serait inéquitable que la société CABINET HENRI supporte ses frais irrépétibles et qu'il y a lieu ainsi de lui allouer une somme de 1800 euros à la charge in solidum de la société BOURRO et des intervenants volontaires au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, qui s'ajoutera à l'indemnité mise à la charge de la société BOURRO à ce titre par le premier juge ;
Attendu que les appelants qui succombent doivent être condamnés in solidum aux dépens ;
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne les dommages et intérêts réclamés par la société CABINET HENRI,
Le réforme de ce seul chef,
Et statuant à nouveau sur ce point,
Déclare la société CABINET HENRI mal fondée dans sa demande en dommages et intérêts formée contre la société BOURRO et l'en déboute, Y ajoutant,
Condamne in solidum la société BOURRO ainsi que Monsieur et Madame Y et Monsieur Jérôme Z à payer à la société CABINET HENRI la somme de 1800 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que les dépens qui seront recouvrés par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués, conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER,
LE PRESIDENT,
M.P. BASTIDE
B. MARTIN