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19/04/2004 | FRANCE | N°2000/04411

France | France, Cour d'appel de Lyon, 19 avril 2004, 2000/04411


PARTIES CONVOQUEES LE : 18 JUILLET 2003 DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 01 MARS 2004 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : Madame Françoise X..., Présidente Madame Claude MORIN, Conseiller Madame Christine DEVALETTE, Conseiller Assistés pendant les débats de Madame Marie-France Y..., Greffier. ARRET :

CONTRADICTOIRE Prononcé à l'audience publique du 19 Avril 2004 par Madame Claude MORIN, Conseiller, en remplacement du Président empêché, en présence de Madame Marie-France Y..., Greffier, qui ont signé la minute. ************* Exposé du litige

Madame

Z... a été engagée en qualité de femme toutes mains par la société SEC...

PARTIES CONVOQUEES LE : 18 JUILLET 2003 DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 01 MARS 2004 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : Madame Françoise X..., Présidente Madame Claude MORIN, Conseiller Madame Christine DEVALETTE, Conseiller Assistés pendant les débats de Madame Marie-France Y..., Greffier. ARRET :

CONTRADICTOIRE Prononcé à l'audience publique du 19 Avril 2004 par Madame Claude MORIN, Conseiller, en remplacement du Président empêché, en présence de Madame Marie-France Y..., Greffier, qui ont signé la minute. ************* Exposé du litige

Madame Z... a été engagée en qualité de femme toutes mains par la société SECCV VINATIER, le 1er Septembre 1990, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel.

La société SECCV VINATIER exploitait, sur le site du C.H.S. du VINATIER, une cafétéria, une épicerie et une boutique.

La société SECCV VINATIER a été déclarée en liquidation judiciaire par jugement du Tribunal de Commerce de Lyon le 16 Février 1998, l'état de cessation des paiements ayant été déclaré le 10 Février 1998.

Maître DUBOIS a été désigné comme mandataire liquidateur.

Madame Z... a travaillé au sein de la cafétéria jusqu'au 31 Décembre 1997.

Au début de l'année 1998, la Société COREDA a repris la gestion de la cafétéria exploitée jusque là par la société SECCV VINATIER et a confirmé, par courrier du 5 Janvier 1998, à Madame Z... son embauche dans le cadre d'un contrat à durée déterminée de 6 mois, à temps partiel.

Ce contrat a pris fin le 3 Juillet 1998, sans procédure de licenciement.

Le 15 Avril 1999, Madame Z... a saisi le Conseil des Prud'hommes de Lyon qui a, par jugement du 26 Juin 2000 :

- fixé la créance salariale de Madame Z... à l'égard de Maître DUBOIS es qualités de mandataire liquidateur de la société SECCV VINATIER à la somme de 521,85 euros à titre de rappel de salaire de Décembre 1997, - ordonné à Maître DUBOIS, es qualités, de remettre à Madame Z... les bulletins de salaire de Novembre et Décembre 1997,

- dit que le contrat de travail de Madame Z... conclu avec la société SECCV VINATIER le 1er Septembre 1990, s'est poursuivi par application de l'article L122-12 du Code du Travail, au sein de la Société COREDA,

- déclaré en conséquence que le contrat à durée déterminée conclu entre cette dernière et Madame Z... était nul et non avenu et ne pouvait faire l'objet d'une requalification,

- dit que la rupture de travail prononcée par la Société COREDA s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné en conséquence la Société COREDA à verser à Madame Z... les sommes suivantes :

[* 1.057,95 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

*] 105,79 euros à titre de congés payés afférents,

[* 408,08 euros à titre d'indemnité de licenciement,

*] 365,29 euros à titre d' indemnité compensatrice de congés payés du 1er Juin 1997 au 6 Janvier 1998, outre intérêts à compter de la demande.

- ordonné l'exécution provisoire et fixé la moyenne mensuelle des salaires de Madame Z... à la somme de 3.469,84 francs,

- condamné la Société COREDA à verser à Madame Z... la somme de 35.000

francs à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre intérêts à compter du jugement,

- ordonné le remboursement par la Société COREDA des indemnités de chômage limitées sur 3 mois.

Le Conseil de Prud'hommes a encore déclaré le jugement opposable à l'AGS et au CGEA de Chalon sur Saône pour la partie concernant la liquidation judiciaire de la société SECCV VINATIER, les a mis hors de cause ainsi que Maître DUBOIS, es qualités, pour ce qui concerne la Société COREDA et débouté Madame Z... du surplus de ses demandes et la Société COREDA de sa demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par lettre simple du 11 Juillet 2000, la Société COREDA a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 28 Juin 2000. 000

Au soutien de son appel, la Société COREDA, devenue SPACIO, conteste avoir repris l'activité de la société SECCV VINATIER et considère en conséquence qu'il ne peut être fait application de l'article L.122-12 du Code du Travail, n'ayant repris aucun élément d'actif corporel ou incorporel de cette dernière mais ayant au contraire, en procédant à d'importants travaux d'équipements et de mise aux normes et à l'achat de tout le matériel de restauration, crée une activité nouvelle de restauration d'appoint alors que l'activité ancienne ne consistait qu'en la fourniture de boissons et biscuits, sans commercialisation de produits frais.

L'appelante demande la réformation du jugement qui a considéré que l'article susvisé était applicable et qu'il soit jugé que le contrat conclu avec la société SECCV ne s'est pas poursuivi.

S'il était néanmoins retenu par la Cour, que le nouveau contrat conclu entre elle et Madame Z... devait être requalifié en contrat à durée indéterminée par absence d'énonciation des motifs, la société SPACIO demande qu'il soit jugé que l'indemnité de licenciement n'est

pas due, faute d'ancienneté suffisante de la salariée, que l'indemnité compensatrice de préavis soit fixée à 528,97 euros (outre congés payés afférents) et qu'il appartient à Madame Z... de justifier de son préjudice pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Encore plus subsidiairement, l'appelante demande, en cas de confirmation du jugement sur l'application de l'article L.122-12, que l'indemnité allouée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse soit réduite en fonction du préjudice subi et que l'indemnité compensatrice de congés payés sur la période antérieure à la reprise ne soit pas mise à sa charge, demande non formulée initialement par Madame Z... et désormais prescrite et se heurtant surtout aux dispositions de l'article L.122-12 alinéa 2 qui excluent le transfert des obligations au nouvel employeur dans le cadre d'une procédure collective.

La société SPACIO demande la condamnation de Madame Z... à lui verser la somme de 1200 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. 000

À titre liminaire, Madame Z... demande la confirmation du jugement en ce qu'il a fixé sa créance sur la liquidation de la société SECCV VINATIER à la somme de 521,85 euros à titre de rappel de salaire pour le mois de Décembre 1997, période durant laquelle elle a bien travaillé pour le compte de cette société, sans être payée.

Madame Z... demande également la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré que le contrat conclu le 7 Janvier 1998 était nul et non avenu, ayant justement fait application de l'article L.122-12 du Code du Travail à l'espèce où l'activité initiale de cafétéria a bien été poursuivie, même si elle a été développée, avec maintien de la salariée à ce service.

À titre subsidiaire, si la Cour ne devait pas suivre ce raisonnement, Madame Z... demande la requalification du nouveau contrat en contrat à

durée indéterminée et le paiement par la société SPACIO des sommes suivantes :

- 1.200 euros à titre d'indemnité de requalification,

- 528, 97 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 52,90 euros au titre des congés payés afférents,

- 5.335,70 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ayant subi une période de chômage ensuite de la rupture injustifiée du contrat.

Madame Z... demande enfin la confirmation du jugement sur la condamnation de la Société COREDA ,devenue SPACIO, à lui verser la somme de 365,29 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés et subsidiairement demande que cette somme soit portée à la liquidation de la société SECCV VINATIER. 000

L'AGS et le CGEA de Chalon sur Saône et Maître DUBOIS, es qualités, demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a mis hors de cause la procédure collective de la société SECCV VINATIER au titre des créances de rupture. Ils s'en rapportent sur la demande au titre du rappel de salaire sauf à vérifier sur les relevés bancaires de Madame Z... l'absence de perception de son salaire de Décembre 1997.

Concernant l'indemnité compensatrice de congés payés, ils demandent que celle-ci soit laissée à la charge de la société SPACIO, dès lors que le transfert ne s'est pas effectué dans le cadre de la procédure collective mais antérieurement à celle-ci et qu'en tout état de cause le montant de cette indemnité soit ramené à 313,11 euros.

L'AGS et le CGEA de Chalon sur Saône rappellent enfin les conditions et limites légales de leur garantie. Motifs et décision :

Sur le rappel de salaire de Décembre 1997

Sauf à renverser la charge de la preuve, Maître DUBOIS, es qualités, qui ne justifie du paiement à Madame Z... de ce salaire, doit porter cette créance s'élevant à 521,85 euros, au passif de la liquidation de la société SECCV VINATIER, ce qui conduit à confirmer le jugement sur ce point.

Sur la mise en oeuvre des dispositions de l'article L122-12 du Code du Travail

Ce texte d'ordre public qui déroge au principe de l'effet relatif des contrats, en prévoyant la persistance des contrats de travail, malgré la modification juridique de la situation de l'employeur d'origine, s'applique même comme en l'espèce, en l'absence de lien de droit entre celui-ci et le nouvel employeur, faute de cession de fonds de commerce, dès lors que cette modification opère transfert d'une entité économique entendue comme un ensemble organisé de moyens en vue de la poursuite ou de la reprise d'une activité économique conservant son identité.

Il résulte du dossier, notamment des documents comptables produits, que la société SECCV VINATIER exerçait au sein du C.H.S. du VINATIER, avant la résiliation de son bail d'exploitation, une activité de cafétéria, certes principalement consacrée à la commercialisation de boissons chaudes ou froides mais aussi à la vente d'aliments solides de type restauration rapide ou épicerie.

À partir de Janvier 1998, la Société COREDA, devenue SPACIO, ne peut valablement prétendre qu'elle n'a pas poursuivi l'activité de cafétéria de la société SECCV VINATIER au motif qu'elle aurait réalisé d'importants travaux d'équipements et de rénovation des locaux ou qu'elle aurait modifié totalement cette activité par la fourniture de plats chauds, en restauration rapide, alors qu'elle a conservé les mêmes locaux et certains équipements technique fixes, et que les nouveaux services offerts à la clientèle constituent un

simple élargissement des activités normales d'une cafétéria.

La Société COREDA a, de surcroît, entendu clairement poursuivre cette activité au moins pendant la durée des travaux, étant tenue dans le cadre de la convention de concession d'assurer une continuité de fonctionnement, en conservant à son service Madame Z..., sans rupture de collaboration entre l'ancien et le nouvel employeur, sinon de façon artificielle, par l'établissement par ce dernier, d'un contrat d'embauche prenant effet au 7 Janvier 1998, date de reprise d'activité après les fêtes.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont considéré que la modification constituait une poursuite d'activité d'une entité économique par utilisation de moyens corporels et incorporels, entrant dans le champ d'application de l'article L.122-12 du Code du Travail et que le contrat de travail à durée indéterminée de Madame Z... s'était poursuivi au sein de la Société COREDA.

Le jugement déféré doit être confirmé sur ce point comme sur les conséquences qu'en a tirées le Conseil sur la nullité du contrat à durée déterminée rendant inutile la demande de requalification et sur la mise hors de cause de la liquidation de la société SECCV VINATIER pour toutes les indemnités de rupture.

Sur les conséquences de la rupture

La rupture du contrat de travail à durée indéterminée, intervenue le 6 Juillet 1998, sans procédure de licenciement, a justement été analysée par le Conseil comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse et les indemnités de rupture allouées à Madame Z... doivent être confirmées comme faisant une exacte application des droits de celle-ci et une juste appréciation de son préjudice, eu égard à son âge, à son ancienneté et à la durée de la période de chômage consécutive au licenciement.

La condamnation de la Société COREDA (devenue SPACIO) au remboursement, dans la limite de trois mois, des allocations chômage versées par l'ASSEDIC à Madame Z... doit également être confirmée sur le fondement de l'article L.122-14-4 du Code du Travail.

Sur l'indemnité compensatrice de congés payés sur la période du 1er juin 1997 au 6 Janvier 1998

En l'absence de convention entre l'ancien et le nouvel employeur, l'indemnité de congés payés correspondant à la période antérieure au changement d'employeur ne peut, en application de l'article L.122-12-1 du Code du Travail, être mise à la charge du nouvel employeur, la Société COREDA.

Le jugement qui a condamné celle-ci à régler cette indemnité doit en conséquence être infirmé.

Il doit être en revanche fait droit à la demande en paiement de cette indemnité présentée par Madame Z... dès le début de la procédure à l'encontre de la liquidation de la société SECCV VINATIER, en en limitant toutefois le montant à 313,11 euros, représentant 1/10 ème des rémunérations brutes perçues pendant la période de référence.

Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

La Société SPACIO, qui succombe dans son appel principal, doit être déboutée de sa demande.

Par ces motifs

La Cour,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la Société COREDA à verser à Madame Z... la somme de 365,29 euros à titre d'indemnité

compensatrice de congés payés,

Confirme ledit jugement en toutes ses autres dispositions,

Et statuant à nouveau,

Fixe la créance de Madame Z... sur la liquidation judiciaire de la société SECCV VINATIER à la somme de 313,11 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

Déboute la société SPACIO (anciennement COREDA) de sa demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Condamne la société SPACIO aux dépens de la procédure d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions sur l'Aide Juridictionnelle.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2000/04411
Date de la décision : 19/04/2004

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Modification dans la situation juridique de l'employeur - Effets

Le texte de l'article L122-12 du Code du travail déroge au principe de l'effet relatif des contrats en prévoyant la persistance des contrats de travail malgré la modification juridique de la situation de l'employeur d'origine et s'applique même en l'absence de lien juridique entre l'employeur d'origine et le nouvel employeur faute de cession de fonds de commerce dès lors que l'activité du nouvel employeur résulte d'un transfert d'une entité économique, c'-est-à-dire d'un ensemble organisé de moyens de l'employeur originel au profit du nouvel employeur en vue de la poursuite ou de la reprise d'une activité économique conservant son identité.Tel est le cas lorsqu'il y à poursuite de l'activité de cafétéria par la fourniture d'aliments et de boissons dans les mêmes locaux avec les mêmes équipements techniques fixes et que les services supplémentaires proposés ne constituent q'un élargissement des activités d'origine.Dès lors, la rupture du contrat de travail a durée indéterminée sans procédure de licenciement constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2004-04-19;2000.04411 ?
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