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25/03/2004 | FRANCE | N°2002/04436

France | France, Cour d'appel de Lyon, 25 mars 2004, 2002/04436


Instruction clôturée le 04 Novembre 2003 Audience publique du 07 Janvier 2004 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, DÉBATS en audience publique du 7 janvier 2004 tenue par Madame MARTIN, Président, et par Monsieur SANTELLI, Conseiller, chargés de faire rapport, sans opposition des Avocats dûment avisés, qui en ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré, COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Madame MARTIN, Président Monsieur SANTELLI, Conseiller, Monsieur SIMON, Conseiller, GREFFIER : la Cour était assistée de Mademoiselle X..., Greffier, lors des débats et

du prononcé de l'arrêt, ARRÊT : CONTRADICTOIRE prononcé à l'audien...

Instruction clôturée le 04 Novembre 2003 Audience publique du 07 Janvier 2004 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, DÉBATS en audience publique du 7 janvier 2004 tenue par Madame MARTIN, Président, et par Monsieur SANTELLI, Conseiller, chargés de faire rapport, sans opposition des Avocats dûment avisés, qui en ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré, COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Madame MARTIN, Président Monsieur SANTELLI, Conseiller, Monsieur SIMON, Conseiller, GREFFIER : la Cour était assistée de Mademoiselle X..., Greffier, lors des débats et du prononcé de l'arrêt, ARRÊT : CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 25 mars 2004 Par Madame MARTIN, Président, qui a signé la minute avec Mademoiselle X..., Greffier. FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par jugement rendu le 1er juillet 2002, le Tribunal de Commerce de LYON a débouté Monsieur Henri Y..., artisan taxi, de sa demande dirigée contre la société anonyme coopérative des taxis-radio de LYON tendant à la nullité de la sanction de "suspension de radio" d'une durée de 14 jours prononcée contre lui par ladite coopérative et l'a condamné à payer à cette dernière la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Monsieur Henri Y... a régulièrement formé appel de cette décision dans les formes et délai légaux.

Vu l'article 455 alinéa premier du nouveau code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret N° 98-1231 du 28 décembre 1998 ;

Vu les prétentions et les moyens développés par Monsieur Henri Y... dans ses conclusions récapitulatives en date du 15 septembre 2003 tendant à faire juger :

- que la procédure disciplinaire est irrégulière dès lors qu'il n'a pas disposé d'un temps suffisant pour préparer sa défense devant l'instance disciplinaire et discuter les griefs qui lui étaient

faits,

- qu'un membre du conseil d'administration (Monsieur Z...) ne peut siéger dans l'instance disciplinaire alors qu'il est également plaignant,

- qu'au demeurant la sanction prononcée est injustifiée dès lors que la réalité des deux manquements (-injures vis-à-vis d'un "collègue", Monsieur Z... et -comportement discourtois envers un client), n'est pas établie,

- que cette sanction injustifiée lui a causé un préjudice commercial et personnel (moral) qu'il estime à hauteur de 7.622,45 euros et que l'attitude dénigrante de la société anonyme coopérative des taxis-radio de LYON lui a causé un préjudice particulier estimé à 3.500 euros ;

Vu les prétentions et les moyens développés par la société anonyme coopérative des taxis-radio de LYON dans ses conclusions en réponse en date du 11 février 2003 tendant à faire juger :

- que l'avertissement oral donné, le 27 février 2001, à Monsieur Henri Y... pour des faits survenus le 21 janvier 2001 est parfaitement justifié,

- que Monsieur Henri Y... a bien eu avec un client qu'il conduisait dans un hôpital un comportement inadapté et gravement fautif et qu'il est mal venu de contester être l'auteur de la course émaillée de l'incident,

- que Monsieur Henri Y... a insulté, le 5 mars 2001, un administrateur, Monsieur Z... et que la prise d'une sanction faisant immédiatement suite au second incident est parfaitement justifiée,

- subsidiairement, que le préjudice allégué par Monsieur Henri Y... pendant la période de suspension n'est pas démontré et qu'en outre il

n'est pas avéré que son arrêt maladie est la conséquence de la sanction qui a été prononcée, son état de santé le prédisposant à être vindicatif et querelleur pouvant expliquer d'une part, les reproches qui lui ont été faits et d'autre part, l'arrêt de travail pour maladie consécutif à la sanction disciplinaire, mal ressentie,

- qu'enfin la réalité économique de son préjudice est nullement établie ;

MOTIFS ET DÉCISION

Attendu que le juge judiciaire est compétent contrôler les conditions dans lesquelles une sanction disciplinaire a été prononcée par un organe disciplinaire d'une société à l'encontre de l'un de ses membres sociétaires ; que le juge judiciaire doit vérifier les conditions de mise en oeuvre de la sanction disciplinaire et notamment si le sociétaire a été mis en mesure de préparer sa défense et, d'une manière générale, si l'exercice des droits de la défense a été préservée ; qu'en l'espèce, il apparaît que Monsieur Henri Y... auquel deux faits étaient imputés (-attitude incorrecte à l'égard d'un client pris en charge, faits qui seraient survenus le 15 janvier 2001 entre 9 heures et 9 heures 10 et -insultes proférées, le 5 mars 2001, à l'encontre de Monsieur Z..., administrateur de la société anonyme coopérative des taxis-radio de LYON), a été convoqué le 6 mars 2001 par le standard de TAXI-RADIO relié à son véhicule taxi pour comparaître le même jour à une séance du Conseil d'Administration de la société anonyme coopérative des taxis-radio de LYON siégeant comme Conseil de Discipline ; qu'une sanction de 15 jours de "coupure" de radio a été immédiatement prononcée après sa comparution, comme le rapporte le compte-rendu écrit de la séance du Conseil d'Administration, daté du 6 mars 2001 ;

Attendu que les conditions dans lesquelles a été prise la sanction disciplinaire à l'encontre de Monsieur Henri Y... ne sont pas respectueuses des droits de la défense ; que Monsieur Henri Y... n'a pas été mis en mesure de faire valoir une défense efficace dès lors qu'il a été convoqué de manière informelle et particulièrement hâtive devant l'organe disciplinaire sans qu'il soit porté à sa connaissance les motifs précis de sa convocation de manière à ce qu'il prépare sa défense efficacement et dans un délai de temps suffisant ; qu'au surplus, Monsieur Z... administrateur "offensé" a participé à la décision du Conseil d'Administration ; que le procès-verbal de la séance faisant état de sa "présence" à la séance tenue ce jour-là en sa qualité d'administrateur délibérant sur toutes les questions à l'ordre du jour, ne mentionne pas qu'il se soit abstenu de participer à la décision disciplinaire ; que de plus l'article 19 du "règlement intérieur de la coopérative des taxis-radio de LYON" prévoit que le secrétaire "rédigera un compte rendu détaillé qui sera remis au Conseil d'Administration" ; que cette phase d'instruction préparatoire à la prise d'une sanction disciplinaire n'a pas été mise en oeuvre ; qu'enfin selon le même article, les "listings" retraçant les communications entre le standard et les taxis munis d'appareils radios, permettant d'attribuer avec certitude telle course à tel taxi connu sous un nom de code, en l'espèce "Léon 26", "seront laissés à la disposition du Conseil d'Administration", ce qui n'a pas été fait - aucune mention de cette diligence ne figurant sur le compte-rendu de la séance ; que Monsieur Henri Y... dénie la réalité des faits qui seraient survenus le 15 janvier 2001 ; que la précipitation avec laquelle la sanction a été prise n'a pas permis à l'organe disciplinaire d'établir avec certitude que le chauffeur de taxi incriminé pour ces faits et non identifié par le client-plaignant est

réellement Monsieur Henri Y... ; que le listing "ésotérique" (pièce n° 8 bis versée en cause d'appel et censée établir que Monsieur Henri Y... s'est chargé "à l'évidence" (ä) de la course litigieuse) ne permet pas à défaut de toutes explicitations, de s'en convaincre ; qu'il n'est pas été soumis à Monsieur Henri Y... lors de sa comparution devant l'instance disciplinaire ;

Attendu que la sanction disciplinaire prise irrégulièrement au mépris des droits élémentaires de la défense doit être annulée ;

Attendu que Monsieur Henri Y... ne fait pas suffisamment la preuve que la sanction prononcée irrégulièrement contre lui, lui a causé un préjudice économique certain ; que par contre elle lui a causé un préjudice moral certain qui sera réparé par l'allocation d'une somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts ;

Attendu que l'équité commande de faire application de l'article 7OO du nouveau code de procédure civile ; que la partie tenue aux dépens devra payer à l'autre la somme de 1.000 ä au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; PAR CES MOTIFS, La Cour, statuant par arrêt contradictoire,

Reçoit l'appel de Monsieur Henri Y... comme régulier en la forme,

Au fond, réforme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau, prononce la nullité de la sanction disciplinaire prise par la société anonyme coopérative des taxis-radio de LYON à l'encontre de Monsieur Henri Y... pour non-respect des droits de la défense et condamne la société anonyme coopérative des taxis-radio de LYON à porter et payer à Monsieur Henri Y... la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt et celle de 1.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Condamne la société anonyme coopérative des taxis-radio de LYON aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de la S.C.P.

d'Avoués JUNILLON etamp; WICKY sur son affirmation de droit, en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Le Greffier,

Le Président,

Z... X...

B. MARTIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2002/04436
Date de la décision : 25/03/2004

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Droits de la défense - Principe de la contradiction - Violation

Le juge judiciaire est compétent pour contrôler les conditions dans lesquelles une sanction disciplinaire a été prononcée par un organe disciplinaire d'une société à l'encontre de l'un de ses membres sociétaires. Le juge doit vérifier les conditions de mise en oeuvre de la sanction disciplinaire et notamment si le sociétaire a été mis en mesure de préparer sa défense et, d'une manière générale, si l'exercice des droits de la défense a été préservée.En l'espèce, le membre sociétaire n'a pas été mis en mesure de faire valoir une défense efficace dès lors qu'il a été convoqué de manière informelle et particulièrement hâtive devant l'organe disciplinaire sans qu'il soit porté à sa connaissance les motifs précis de sa convocation de manière à ce qu'il prépare sa défense efficacement et dans un délai de temps suffisant.


Références :

article 455 alinéa 1er du nouveau code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 98-1231 du 28 décembre 1998

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2004-03-25;2002.04436 ?
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