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08/01/2004 | FRANCE | N°2002/04010

France | France, Cour d'appel de Lyon, 08 janvier 2004, 2002/04010


Instruction clôturée le 07 Octobre 2003 Audience publique du 12 Novembre 2003 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Madame MARTIN, Président, Monsieur SIMON, Conseiller Monsieur SANTELLI, Conseiller DÉBATS : à l'audience publique du 12 NOVEMBRE 2003 GREFFIER : Madame SERVIN, Greffier, présent lors des débats seulement, ARRÊT : CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 8 JANVIER 2004 par Madame MARTIN, Président, qui a signé la minute avec Mademoiselle BRISSY, Greffier, présent lors du prononcé de l'arr

êt. Les pièces de la procédure ont été régulièrement communiquées ...

Instruction clôturée le 07 Octobre 2003 Audience publique du 12 Novembre 2003 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Madame MARTIN, Président, Monsieur SIMON, Conseiller Monsieur SANTELLI, Conseiller DÉBATS : à l'audience publique du 12 NOVEMBRE 2003 GREFFIER : Madame SERVIN, Greffier, présent lors des débats seulement, ARRÊT : CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 8 JANVIER 2004 par Madame MARTIN, Président, qui a signé la minute avec Mademoiselle BRISSY, Greffier, présent lors du prononcé de l'arrêt. Les pièces de la procédure ont été régulièrement communiquées à Monsieur le Procureur Général.

FAITS - PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par jugement du 9 juin 2000, le tribunal de commerce de Bourg en Bresse a condamné M. X à payer à la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION la somme de 849.863,81 F en principal, outre intérêts au taux légal à compter du 29 mai 1999, la somme de 10 000 F à titre de dommages intérêts pour résistance abusive et la somme de 7 000 F en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Ce jugement a été confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Lyon en date du 3 mai 2002 alors que M. X avait fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire le 6 juillet 2001, ce dont il s'était abstenu d'informer la Cour.

La société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION a déclaré sa créance entre les mains de la SCP BELAT-DESPRAT par lettre recommandée du 20 juin 2002 en demandant son admission à titre privilégié à hauteur de 54.881,64 euros et à titre chirographaire à hauteur de 91.709,94 euros.

Parallèlement, la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION a saisi le

juge-commissaire chargé de la liquidation judiciaire de M. X d'une requête afin d'être relevée de la forclusion.

Par ordonnance du 28 juin 2002, le juge-commissaire a dit la forclusion opposable à la requérante en retenant que la SCP BELAT-DESPRAT avait adressé une lettre recommandée avec accusé de réception le 8 octobre 2001 au domicile élu, Me BEAUDOT, afin que la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION puisse produire au passif de M. X.

La société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION a relevé appel de l'ordonnance en intimant M. et Mme X et la SCP BELAT-DESPRAT..

Par conclusions n°5 en date du 11 septembre 2003, elle fait valoir qu'elle est créancière hypothécaire de M. et Mme X et donc titutaire "d'une sûreté ayant fait l'objet d'une publication" au sens de l'article L 621-43 du code de commerce, que dès lors en qualité de créancier inscrit elle devait faire l'objet d'un avertissement personnel par le mandataire liquidateur, qu'à défaut d'avertissement personnel et conforme aux exigences des dispositions légales la forclusion ne lui est pas opposable conformément à l'article L 621-46 alinéa 2 du code de commerce de sorte qu'elle n'a même pas à établir que sa défaillance n'est pas due à son fait, qu'en tout état de cause, selon que la Cour entendra ou non faire une application distributive des régimes de l'inopposabilité et du relevé de forclusion selon la nature chirographaire ou privilégiée de la créance, elle doit être relevée de la forclusion encourue compte tenu du comportement déloyal de son adversaire pendant le cours de la procédure d'appel.

Elle demande en conséquence la réformation de l'ordonnance et la condamnation des époux X ou qui mieux le devra à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive et la même somme en application de l'article 700 du nouveau code de

procédure civile.

M. et Mme X concluent à la confirmation de l'ordonnance. Ils soutiennent que la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION ne verse aux débats aucun document permettant d'apporter la preuve qu'elle aurait la qualité de créancier titulaire d'une sûreté ayant fait l'objet d'une publication, que la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION ayant élu domicile en l'étude de Me BEAUDOT, notaire à Bourg en Bresse, lors de l'inscription des hypothèques conventionnelles prises le 28 décembre 1995 sur le bien immobilier propriété de M. X, Me BEAUDOT a reçu et accepté une lettre recommandée que lui a adressé la SCP BELAT-DESPRAT le 8 octobre 2001 l'avertissant de la liquidation judiciaire de M. X et lui demandant de lui faire parvenir la déclaration de créances de la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION, que les dispositions de l'article L 621- 46 alinéa 2 du code de commerce ont été respectées, que la forclusion encourue est opposable à la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION , qu'à titre subsidiaire elle serait éventuellement inopposable uniquement pour sa créance déclarée à titre privilégié pour la somme de 54 881,54 euros, que pour le surplus la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION qui était censée connaître la situation juridique de M. X se trouve dans l'incapacité de démontrer que l'absence de déclaration de créances effectuée dans le délai réglementaire ne serait pas due à son fait, que M. X ne saurait supporter les conséquences d'une éventuelle carence de Me BEAUDOT qui a reçu les informations apportées par la SCP BELAT-DESPRAT, que M. X n'a pas agi de manière déloyale ou frauduleuse puisqu'il avait expressément indiqué à la SCP BELAT-DESPRAT qu'il était débiteur de cette société, la créance de la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION figurant dans la liste des créances remise au liquidateur, que ce n'est qu'à la suite d'un simple oubli et alors qu'il se trouvait dans une situation financière

et morale difficile qu'il a omis d'informer ses conseils devant la cour de la liquidation judiciaire dont il avait fait l'objet.

La SCP BELAT-DESPRAT s'en rapporte à la sagesse de la Cour sur le bien fondé de l'appel interjeté par la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION.

Le Procureur Général à qui la procédure a été communiquée a visé celle-ci sans observation.

La Cour se réfère, pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, aux écritures précitées.

MOTIFS ET DÉCISION :

Attendu que la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION a, le 20 juin 2002, sollicité son admission au passif de la liquidation judiciaire de M. X pour une somme de 54 881,64 euros à titre privilégié et pour une somme de 91 709, 94 euros à titre chirographaire, ces sommes résultant de la condamnation prononcée à son profit par le jugement du 9 juin 2000 confirmé par arrêt du 3 mai 2002 ;

Attendu que la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION justifie de sa qualité de créancière titulaire d'une sûreté publiée par la production de la fiche d'immeuble sur laquelle figurent deux inscriptions d'hypothèques conventionnelles prises à son profit le 28 décembre 1995 ;

Que les époux X prétendent que l'immeuble ayant été vendu le 13 avril 2001 la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION avait consenti à donner mainlevée des hypothèques mais ils n'en rapportent pas la preuve ; qu'au contraire, il ressort de la lettre du 8 octobre 2001 que la SCP BELAT-DESPRAT a adressée à Me BEAUDOT notaire que la procédure de purge était en cours au moment du prononcé de la liquidation judiciaire de M. X ;

Sur l'inopposabilité de la forclusion à la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION :

Attendu qu'en vertu des dispositions de l'article L 621-46 du code de commerce, les créanciers qui n'ont pas déclaré leurs créances dans les délais fixés par la loi ne sont pas admis dans les répartitions et dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due à leur fait ; que selon l'alinéa 2 la forclusion n'est pas opposable aux créanciers mentionnés dans la seconde partie du premier alinéa de l'article L 621-43 dès lors qu'ils n'ont pas été avisés personnellement ;

Que la seconde partie du premier alinéa de l'article L 621-43 dispose que les créanciers titulaires d'une sûreté ayant fait l'objet d'une publication ou d'un contrat de crédit-bail publié sont avertis personnellement et, s'il y a lieu, à domicile élu ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que le représentant des créanciers doit avertir personnellement les créanciers bénéficiant d'une sûreté publiée ou d'un contrat de crédit-bail publié d'avoir à déclarer leurs créances ; que selon les dispositions de l'article 66 alinéa 3 du décret du 27 décembre 1985 cet avertissement doit être donné par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; que la forclusion n'est pas opposable à ces créanciers dès lors qu'ils n'ont pas été avisés personnellement ;

Attendu qu'en l'espèce, la SCP BELAT-DESPRAT a seulement adressé à Me BEAUDOT, notaire à Bourg en Bresse, une lettre recommandée avec accusé de réception par laquelle elle demandait à celui-ci de lui préciser si les sommes objet des inscriptions d'hypothèque conventionnelle étaient remboursées, en ajoutant que dans la négative "il conviendra alors de m'adresser, dans les meilleurs délais, la déclaration de créance de la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION accompagnée des justificatifs correspondants" ;

Attendu que le liquidateur n'ayant pas averti personnellement la

société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION, créancier bénéficiant d'une sûreté publiée, au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception, et la lettre adressée le 8 octobre 2001 à Me BEAUDOT ne pouvant satisfaire à l'exigence de la loi, la forclusion est inopposable à la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION par application de l'article L 621-46 alinéa 2 du code de commerce ;

Sur la demande en relevé de forclusion :

Attendu que s'agissant de la créance chirographaire déclarée par la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION pour la somme de 91 709,94 euros, sont applicables les dispositions de l'alinéa 1 de l'article L 621-46 du code de commerce ;

Attendu qu'il ne peut être tenu compte de la lettre adressée à Me BEAUDOT le 8 octobre 2001 puisque ce dernier n'en a pas fait part à la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION et que la carence du notaire ne peut être considérée comme un fait imputable à l'appelante ;

Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats que M. X, appelant du jugement rendu par le tribunal de commerce de Bourg en Bresse le 9 juin 2000, a conclu devant la Cour, bien après la liquidation judiciaire qu'il a déclenché, et ce en faisant mention d'une adresse pour laquelle la consultation du K bis ne faisait mention d'aucune procédure collective encore au 24 mai 2002 ; que ce n'est que par un courrier de l'huissier chargé de signifier l'arrêt du 3 mai 2002 que la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION a appris que M. X était en liquidation judiciaire depuis le 6 juillet 2001 ; qu'en recherchant et sollicitant un extrait K bis au nom de M. X à une adresse différente de celle mentionnée dans ses conclusions devant la Cour la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION a alors constaté qu'un jugement de liquidation judiciaire avait été rendu le 6 juillet 2001 après déclaration de cessation de paiement du 26 juin 2001 concernant M. X non inscrit au greffe ;

Attendu que M. X peut difficilement faire valoir que ce n'est qu'à la suite d'un simple oubli et alors qu'il se trouvait dans une situation financière et morale difficile qu'il a omis d'informer ses conseils devant la Cour du prononcé de sa liquidation judiciaire ; que la SCP BELAT-DESPRAT verse, en effet, aux débats la lettre qu'elle a adressée le 24 juillet 2001 à l'avocat de M. X devant la Cour l'informant de la liquidation judiciaire intervenue et l'interrogeant sur la créance de la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION , la réponse de l'avocat décrivant l'avancement de la procédure, la lettre de la SCP BELAT-DESPRAT en date du 30 août 2001 demandant à l'avocat de M. X s'il avait avisé la partie adverse de la liquidation judiciaire de son client, lui indiquant qu'il n'y avait pas intérêt à intervenir volontairement à la procédure mais lui rappelant qu'il importait que la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION déclare sa créance au passif;

Attendu qu'il apparaît ainsi que la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION a été pendant de nombreux mois induite en erreur sur la situation de son débiteur par M. X lui-même; que par suite des agissements de celui-ci elle n'a pu produire entre les mains de la SCP BELAT-DESPRAT dans les deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au BODACC ; qu'elle établit que sa défaillance à déclarer sa créance n'est pas de son fait ; qu'elle doit être relevée de la forclusion ;

Attendu qu'il convient enfin de relever que les procédures de liquidation judiciaire de M. et Mme X ayant été déclarées communes par jugement du 26 octobre 2001, la SCP BELAT-DESPRAT a informé la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION que sa créance sera prise en compte dans la liquidation judiciaire de Madame et Monsieur X ;

Attendu qu'eu égard à l'état de liquidation judiciaire de M. et Mme X, il ne sera pas fait droit aux demandes de dommages intérêts et

d'indemnité pour frais irrépétibles présentées par l'appelante ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Réformant l'ordonnance du 28 juin 2002 et statuant à nouveau,

Dit que la forclusion encourue n'est pas opposable à la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION, créancier titulaire d'une sûreté publiée n'ayant pas fait l'objet d'un avertissement personnel et conforme aux exigences légales.

Relève la société THEVENIN DUCROT DISTRIBUTION de la forclusion pour le surplus de sa créance.

Rejette les autres demandes des parties.

Condamne M. X aux dépens lesquels seront tirés en frais privilégiés de liquidation judiciaire avec distraction au profit de la SCP BAUFUME-SOURBE et de la SCP DUTRIEVOZ avoués.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2002/04010
Date de la décision : 08/01/2004

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Redressement judiciaire - Période d'observation - Créancier - Déclaration des créances - Créancier titulaire d'une sûreté publiée ou d'un crédit-bail - Avertissement d'avoir à déclarer - Défaut - Effets - Inopposabilité de la forclusion - /

Le liquidateur qui n'a pas averti personnellement un créancier bénéficiant d'une sûreté publiée au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception, mais seulement le notaire chez lequel il avait élu domicile lors de l'inscription des hypothèques, ne satisfait pas aux exigences de la loi, de sorte que la forclusion est inopposable au dit créancier par application de l'article L. 621-46, alinéa 2, du Code de commerce


Références :

Code de commerce, article L 621-46 alinéa 2

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2004-01-08;2002.04010 ?
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