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08/01/2004 | FRANCE | N°2002-03605

France | France, Cour d'appel de Lyon, 08 janvier 2004, 2002-03605


Instruction clôturée le 03 Octobre 2003

Audience de plaidoiries du 22 Octobre 2003 COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : - monsieur JACQUET, président, - monsieur ROUX, conseiller, - madame BIOT, conseiller, assistés pendant les débats de madame JANKOV, greffier. ARRET : contradictoire prononcé à l'audience publique par monsieur JACQUET, président, en présence de Madame JANKOV, greffier, qui ont signé la minute. FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS DES PARTIES

La Société Anonyme CLINIQUE TRENEL à SAINTE-COLOMBE-LES-VIENNE (Rhône) avait un service

d'urgences assuré depuis mars 1998 par le Docteur Nicolas X... en qualité de...

Instruction clôturée le 03 Octobre 2003

Audience de plaidoiries du 22 Octobre 2003 COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : - monsieur JACQUET, président, - monsieur ROUX, conseiller, - madame BIOT, conseiller, assistés pendant les débats de madame JANKOV, greffier. ARRET : contradictoire prononcé à l'audience publique par monsieur JACQUET, président, en présence de Madame JANKOV, greffier, qui ont signé la minute. FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS DES PARTIES

La Société Anonyme CLINIQUE TRENEL à SAINTE-COLOMBE-LES-VIENNE (Rhône) avait un service d'urgences assuré depuis mars 1998 par le Docteur Nicolas X... en qualité de médecin salarié.

Malgré la création par ce médecin en janvier 1998 en association avec le Docteur Y... d'une société d'exercice libérale dénommée POLYURGENCES, la CLINIQUE TRENEL a conclu le 1er octobre 1998 avec le seul Docteur X... un protocole d'accord prévoyant une autorisation d'exercice de la profession de médecin urgentiste au sein de l'établissement pour une durée de un an moyennant fourniture de moyens, garantie d'un minimum de vingt consultations par jour et rémunération forfaitaire des gardes de nuit.

En contrepartie des prestations offertes par la clinique, le

praticien lui rétrocédait 5 % sur ses honoraires.

Le contrat s'est poursuivi tacitement jusqu'au 11 janvier 2001, date de la notification par la CLINIQUE TRENEL au Docteur X... d'une rupture de contrat à effet du 30 juin 2001.

Par jugement du 4 juin 2002, le Tribunal de Grande Instance de LYON, saisi par le Docteur X... et la Société POLYURGENCES d'une demande en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive de contrat dirigée contre la S.A. CLINIQUE TRENEL, considérant que cette Société ne démontrait pas l'attitude fautive du médecin, et qu'elle n'avait donc aucun motif légitime de rupture a rendu la décision suivante : "- dit n'y avoir lieu à nullité de l'assignation, - dit que la Société POLYURGENCES a un intérêt à agir, - dit qu'en l'absence de fautes prouvées, la rupture des liens contractuels intervenue à l'initiative de la Clinique TRENEL est abusive, - condamne la Clinique TRENEL à payer au Docteur X... et à la Société POLYURGENCES une somme de 50.000 francs à titre de dommages et intérêts, - rejette les demandes reconventionnelles de la CLINIQUE TRENEL, - ordonne l'exécution provisoire du présent jugement, - condamne la CLINIQUE TRENEL à payer aux demandeurs une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, - condamne la CLINIQUE TRENEL aux dépens, distraits au profit de la SELARL BITTARD-ALBISSON, avocats".

La CLINIQUE TRENEL a relevé appel de ce jugement dont elle demande la réformation.

Elle conclut à l'irrecevabilité de la demande de la Société POLYURGENCES qui ne justifie pas d'un intérêt à agir.

Elle conclut en outre au rejet des demandes du Docteur X... en faisant valoir que la rupture du contrat n'est pas abusive dès lors que les parties liées par un contrat à durée indéterminée conservait une liberté de rupture sous réserve du respect d'un préavis, ce qui a été fait en l'espèce.

La clinique appelante indique que le Docteur X... ne démontre ni l'intention de nuire ni des motifs mensongers et maintient que le situation créée par le praticien qui reconvoquait les patients examinés en urgence au détriment des autres services de chirurgie ou de médecine de la clinique était insupportable . Elle affirme qu'il lui appartenait de maintenir un fonctionnement harmonieux des différents services au sein de son établissement et que cette décision de bonne gestion s'imposait.

Subsidiairement, elle demande, pour le cas où la Cour considérerait cette rupture abusive de réduire l'indemnisation, le Docteur X... ne démontrant pas la réalité de son préjudice sachant qu'il ne disposait pas d'une clientèle propre et que ce type de service n'est pas lié à la possibilité de donner des soins immédiats.

Le Docteur X... et la Société POLYURGENCES concluent à la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu le caractère abusif de la rupture et par voie d'appel incident, demandent de condamner la CLINIQUE TRENEL à leur payer la somme de 304.898 euros à titre de dommages et intérêts et une indemnité de 5.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Ils font valoir que la Société POLYURGENCES qui percevait les

honoraires du Docteur X... et rétrocédait à la clinique la redevance de 5 % a un intérêt à agir.

Ils rappellent que la clinique avait vivement recommandé au Docteur X... de s'associer avec un autre médecin urgentiste pour faciliter le bon fonctionnement des gardes.

Ils affirment que la situation de collaboration qui s'est instaurée à l'issue du contrat d'un an correspond à un nouveau contrat et que les droits et obligations issus du premier contrat ne peuvent être invoqués par les parties.

Ils prétendent que l'absence de motifs légitimes est suffisant pour caractériser la faute de l'auteur de la rupture et indiquent qu'en l'espèce la CLINIQUE TRENEL ne justifie pas de motifs déontologiques sérieux qui auraient été retenus parle conseil de l'ordre des médecins mais se contente en cause d'appel d'invoquer des difficultés d'organisation de service et utilise des prétextes fallacieux.

En ce qui concerne le préjudice, le Docteur X... souligne qu'il a été à l'origine de l'essor du service des urgences à la CLINIQUE TRENEL, ce qui permettait à cette Société d'obtenir un chiffre d'affaires spécifique important et considère qu'en raison de l'attitude de celle-ci il n'a pas été en mesure de céder son droit d'exercice au sein de l'établissement en recrutant un remplaçant. MOTIFS ET DECISION

Attendu que le contrat intitulé "Protocole d'accord" a été conclu le 10 octobre 1998 entre la Société Anonyme CLINIQUE TRENEL et Monsieur Nicolas X... seul, afin de prévoir les modalités d'exercice de la

profession de médecin urgentiste de celui-ci dans la clinique,

Attendu que dans ces conditions la Société POLYURGENCES qui avait été constituée auparavant le 15 juillet 1998 et au sein de laquelle Monsieur X... était associé, n'a pas de lien contractuel direct avec la clinique et qu'elle n'a donc pas d'intérêt à faire constater le caractère abusif de la rupture contractuelle ;

Attendu que sa demande est donc irrecevable ;

Attendu que ce contrat du 1er octobre 1998, conclu pour une durée de un an devait être prorogé avec l'accord du conseil d'administration de l'établissement ;

Attendu cependant que cet organisme n'a pas donné son avis à la date fixée mais qu'en l'absence de rédaction d'un second contrat écrit un nouveau contrat à durée indéterminée s'est néanmoins instauré du fait de la poursuite par Monsieur X... de l'exercice libéral de sa profession de médecin urgentiste dans cette clinique ;

Attendu que par une lettre recommandée du 11 janvier 2001 la CLINIQUE TRENEL a notifié à Monsieur X... la fin des relations contractuelles à la date du 30 juin 2001 en faisant état de points de divergence sans les énoncer expressément ;

Attendu toutefois que bien qu'elle n'ait pas invoqué de motifs précis au soutien de sa résiliation, la CLINIQUE TRENEL n'a pas pour autant rompu abusivement des relations contractuelles auxquelles elle pouvait mettre fin unilatéralement dès lors qu'elle respectait un préavis raisonnable ;

Attendu qu'elle a en effet donné un préavis de six mois, ce qui permettait au médecin de prendre toutes dispositions utiles pour assurer la continuité des soins ; que sa lettre de rupture avait été précédée de réunions et d'essais de conciliation et qu'il n'est pas établi par les éléments du dossier que cette rupture relevait d'une intention manifeste de nuire au praticien ou de masquer des irrégularités ;

Attendu qu'il convient dès lors, infirmant le jugement, de débouter Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive et de ses prétentions complémentaires ;

Attendu que la Société CLINIQUE TRENEL est fondée à réclamer la restitution des sommes versées en exécution du jugement assorti de l'exécution provisoire ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à cette intimée la charge de l'intégralité de ses frais irrépétibles ; qu'il lui sera alloué une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevable la demande de la Société POLYURGENCES,

Constate que la Société CLINIQUE TRENEL n'a pas rompu abusivement le contrat la liant à Monsieur Nicolas X...,

Déboute Monsieur Nicolas X... de toutes ses prétentions,

Condamne Monsieur Nicolas X... et la Société POLYURGENCES à restituer à la Société CLINIQUE TRENEL la somme de CINQUANTE MILLE EUROS (50.000 EUROS) outre intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt,

Condamne Monsieur Nicolas X... et la Société POLYURGENCES à verser à la CLINIQUE TRENEL une indemnité de DEUX MILLE EUROS (2.000 EUROS) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,

Les condamne aux dépens de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de la Société Civile Professionnelle JUNILLON-WICKY, Société d'avoués.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2002-03605
Date de la décision : 08/01/2004

Analyses

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin - Contrat avec une clinique - Rupture par la clinique - Caractère abusif

La rupture d'un contrat conclu entre un médecin et une clinique n'est pas abusive dès lors que celle-ci a mis fin unilatéralement au contrat en respectant un préavis raisonnable. Il en va ainsi lorsque la clinique donne un préavis de six mois permettant au médecin de prendre toutes dispositions utiles pour assurer la continuité des soins, que sa lettre de rupture est précédée de réunions et d'essais de conciliation et qu'il n'est pas établi par les éléments du dossier que cette rupture relevait d'une intention manifeste de nuire au praticien ou de masquer des irrégularités


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2004-01-08;2002.03605 ?
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