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04/12/2003 | FRANCE | N°2002/04115

France | France, Cour d'appel de Lyon, 04 décembre 2003, 2002/04115


Instruction clôturée le 05 Septembre 2003

DEBATS : audience publique du 23 SEPTEMBRE 2003, tenue par monsieur ROUX, conseiller rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée de madame KROLAK, greffier. COMPOSITION DE LA COUR, lors du délibéré : - monsieur ROUX, président, - madame BIOT, conseiller, - monsieur GOURD, conseiller, ARRET : contradictoire prononcé à l'audience publique par monsieur ROUX, conseiller, remplaçant le président légitimement empêché, en présence de madame JANKOV, greffier,

qui ont signé la minute. EXPOSE DU LITIGE

Madame Colette-Marie X... épou...

Instruction clôturée le 05 Septembre 2003

DEBATS : audience publique du 23 SEPTEMBRE 2003, tenue par monsieur ROUX, conseiller rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée de madame KROLAK, greffier. COMPOSITION DE LA COUR, lors du délibéré : - monsieur ROUX, président, - madame BIOT, conseiller, - monsieur GOURD, conseiller, ARRET : contradictoire prononcé à l'audience publique par monsieur ROUX, conseiller, remplaçant le président légitimement empêché, en présence de madame JANKOV, greffier, qui ont signé la minute. EXPOSE DU LITIGE

Madame Colette-Marie X... épouse Y... a adhéré le 30 juin 2000 à un contrat d'assurance sur la vie dit "ABONDANCE 2" souscrit par le CREDIT COMMERCIAL DE FRANCE (C.C.F.) auprès de la Compagnie ERISA.

Elle a versé lors de cette adhésion un capital de 250.000 francs.

Le contrat avait pour objet la constitution d'un capital composé d'une garantie exprimée en francs et de garanties exprimées en unités de compte correspondant à des supports financiers prédéterminés par le gestionnaire.

La répartition pouvait être modifiée en cours de contrat. Ces modifications étaient appelées arbitrages.

Après prélèvement des frais d'adhésion (7.500 francs) le capital investi par Madame Y... (soit 242.500 francs) a été réparti à raison de 48.500 francs sur le support dit "Elysées Dynamique" et 194.000 francs sur le support "Elysées Equilibre".

A la date du 8 mars 2001 Madame Y... a effectué un arbitrage consistant à transférer sur la garantie exprimée en francs ce qui restait de la garantie sur le support "Elysées Dynamique", soit 41.387,75 francs.

Par lettre du 31 juillet 2001, le C.C.F. et la Compagnie ERISA informaient Madame Y... d'une modification du contrat affectant notamment les conditions de l'arbitrage. Les frais d'arbitrage étaient portés de 0,50 % à, 0,90 %. ERISA se réservait par ailleurs le droit de surseoir aux demandes d'arbitrage dans certaines conditions.

La lettre se terminait par ces mots : " Ces modifications envisagées conformément à l'article L 140-4 du Code des Assurances prendront effet le 3 septembre 2001. Pour le cas où vous n'accepteriez pas les modifications à vos droits et obligations, vous disposez de la faculté de dénoncer votre adhésion dans les conditions prévues par l'article susvisé".

Par lettre recommandée en date du 13 août 2001 adressée au C.C.F. Madame Y... exprimait son désaccord sur les modifications apportées et son mécontentement quant à l'exécution de ce contrat qui avait eu pour effet de réduire à environ 215.000 francs son capital.

Elle déclarait exercer sa faculté de "renonciation" prévue à l'article L 140-4 du Code des Assurances et sollicitait la

restitution de la somme de 250.000 francs versée le 30 juin 2000.

Faute de réponse Madame Y... réitérait sa demande dans un courrier recommandé très circonstancié adressé au C.C.F. le 1er octobre 2001, puis par une nouvelle mise en demeure du 22 octobre 2001 adressée par son conseil.

Dans ces deux courriers elle soutenait que l'article L 140-4 du Code des Assurances visé dans le courrier du 31 juillet 2001 lui ouvrait droit à la dénonciation de son adhésion de sorte que les deux parties devaient se retrouver dans la situation antérieure à la signature du contrat. Elle invoquait à cet égard les dispositions de l'article L 132-5-1 du Code des Assurances prévoyant la restitution du capital versé en cas de renonciation par le souscripteur.

Par lettre datée du 15 octobre 2001 (en fait 15 novembre) la Société ERISA répondait au conseil de Madame Y... que la faculté ouverte à cette dernière par l'article L 140-4 de dénoncer son contrat lui permettait d'exercer son droit de rachat total et de recevoir le montant du capital garanti déterminé selon les dispositions contractuelles, mais qu'en revanche Madame Y... ne pouvait prétendre invoquer les dispositions de l'article L 132-5-1 du Code des Assurances prévoyant une possibilité de renonciation dans les trente jours du premier versement.

Madame Y... répondait par l'intermédiaire de son conseil que la faculté de rachat était un droit spécifique propre au souscripteur et dont il pouvait user à tout montant de sorte que l'article L 140-4 ne lui ouvrait pas un droit qu'elle possédait déjà mais emportait en cas de

dénonciation la remise en cause du contrat et la possibilité de restitution des sommes versées suivant les modalités et délais prévus par l'article L 132-5-1 du Code des Assurances. La Compagnie ERISA maintenait sa position par lettre du 6 décembre 2001.

Par actes en date du 23 et 25 janvier 2002 Madame Y... assignait le C.C.F. et la Compagnie ERISA devant le Tribunal de Grande Instance de LYON en demandant au Tribunal de : - constater qu'elle n'était plus adhérente au contrat d'assurance groupe pour l'avoir dénoncé par lettre du 13 août 2001, conformément aux dispositions des articles L 132-5-1 et L 140-4 du Code des Assurances, - subsidiairement prononcer l'annulation du contrat pour vice de consentement et manquement à l'obligation de conseil et d'information incombant au C.C.F., - constater quoi qu'il en soit que les parties doivent être remises dans l'état antérieur à l'adhésion, - condamner la Compagnie ERISA à lui restituer la somme de 250.000 francs outre intérêts au taux légal majoré de moitié à compter du 14 novembre 2001, sous astreinte de 5.000 francs par jour de retard courant dès le quatrième jour suivant la signification du jugement à intervenir, - condamner la Société ERISA et le C.C.F. à lui payer chacun 20.000 francs à titre de dommages et intérêts, la première pour résistance abusive et le second pour manquement à son obligation d'information et de conseil, - condamner les mêmes à payer 15.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

La Compagnie ERISA résistait à la demande en soutenant que Madame Y... n'avait qu'un droit de dénonciation qui lui permettait de racheter le capital dans les conditions prévues au contrat.

Le C.C.F. soutenait qu'il n'avait plus failli à son obligation

d'information et de conseil qui n'était au demeurant qu'une obligation de moyens

Par jugement en date du 25 juin 2002 le Tribunal de Grande Instance de LYON a estimé que la modification du contrat n'ouvrait à Madame Y... que la faculté de rachat et que la seule faute à reprocher à la Société ERISA était d'avoir attendu le 15 novembre 2001 pour répondre à une requête du 13 août 2001, lui occasionnant ainsi une perte de chance de racheter plus vite son portefeuille.

Par ailleurs le Tribunal estimait que Madame Y... n'apportait pas la preuve que le C.C.F. ait manqué à son obligation de renseignement et de conseil.

Le Tribunal : - disait en conséquence qu'à la date du 13 août 2001 Madame Y... ne pouvait bénéficier que d'une faculté de rachat du contrat souscrit le 30 juin 2000, - rejetait les demandes de Madame Y... tendant à obtenir la dénonciation du contrat, - donnait acte à la Société ERISA de ce qu'elle s'engageait à verser à Madame Y... la provision mathématique de son contrat correspondant à la valeur du capital garanti au jour de la demande de rachat, selon les modalités prévues par la notice d'information afférente au contrat, - disait que la Société ERISA avait commis une faute en ne prenant en compte la demande qui lui était adressée le 13 août 2001 qu'à la date du 15 novembre 2001, - condamnait en conséquence la Société ERISA à payer à Madame Y... la somme de 1.600 euros à titre de dommages et intérêts sur ce fondement, - rejetait les demandes formées par Madame Y... et le C.C.F., - ordonnait l'exécution provisoire du jugement, - condamnait la Société ERISA à payer à Madame Y... la somme de 800 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, -

la condamnait à payer au C.C.F. la somme de 400 euros sur ce même fondement, - condamnait la Société ERISA aux dépens de l'instance.

Par déclaration en date du 16 juillet 2002 Madame Y... a relevé appel de cette décision.

Elle maintient que par suite des modifications substantielles du contrat elle dispose en vertu des articles L 140-4 et L 132-5-1 du droit de dénoncer le contrat, c'est-à-dire de récupérer l'intégralité du capital versé. Elle renouvelle sa demande principale et sa demande subsidiaire en annulation du contrat pour vice du consentement.

Elle fait valoir qu'en tout état de cause si la Cour admettait la thèse de la Société ERISA celle-ci devrait être condamnée à lui verser la valeur de rachat au 31 juillet 2001 soit 32.854,93 euros outre intérêts au taux légal majoré de moitié à compter du 14 septembre 2001 puis doublé à partir du 14 novembre 2001 sous astreinte de 762,25 euros par jour de retard dès le lendemain de la signification de l'arrêt à intervenir.

En tout état de cause elle sollicite la condamnation de la Compagnie ERISA pour procédure abusive et du C.C.F. pour manquement à son devoir de conseil à lui payer chacun 3.048,98 euros à titre de dommages et intérêts.

Elle demande en outre leur condamnation in solidum à lui payer 2.286,74 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

La Compagnie ERISA conclut à la confirmation du jugement déféré sur le rejet de la demande principale. Elle demande qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle s'engage à verser la provision mathématique de son contrat dès demande de rachat.

Elle sollicite la réformation du jugement sur les condamnations prononcées à son encontre et demande la condamnation de Madame Y... à lui payer 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Le C.C.F. conclut à la confirmation du jugement déféré sauf à ce qu'il lui soit alloué 750 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile en plus de la somme déjà allouée à ce titre par le jugement déféré. DISCUSSION

Attendu que dans leur courrier du 31 juillet 2001 annonçant des modifications du contrat la Compagnie ERISA et le C.C.F. font référence à l'article L 140-4 du Code des Assurances et proposent à l'adhérent de faire usage de la faculté de dénonciation offerte par ce texte ;

Attendu que le droit de dénonciation ne se confond pas avec le droit de rachat qui constitue un droit personnel du souscripteur dont il peut disposer à tout montant en vertu de l'article L 132-21 du Code des Assurances ;

Attendu que l'article L 140-4 du Code des Assurances applicable en cas de modification du contrat ne saurait avoir pour seul effet de conférer au souscripteur un droit qu'il a déjà, même en l'absence de modifications ;

Attendu que l'article L 140-4 institue un dispositif protecteur du souscripteur qui le remet dans la situation où il se trouvait lors de la souscription initiale du contrat et lui ouvre la faculté de renonciation prévue à l'article L 132-5-1 du Code des Assurances ;

Attendu qu'en l'espèce la Compagnie ERISA ayant notifié les modifications par lettre du 31 juillet 2001 Madame Y... disposait d'un délai de trente jours à compter de cette date pour renoncer au contrat, ce qu'elle a fait par courrier recommandé du 13 août 2001 réitéré par courrier du 14 septembre 2001 ;

Attendu qu'il y a lieu en conséquence de réformer le jugement déféré et de condamner la Compagnie ERISA à payer à Madame Y... l'équivalent en euros de 250.000 francs outre intérêts au taux légal à compter du 14 septembre 2001 ;

Attendu que s'agissant du paiement d'une somme d'argent il n'y a pas lieu d'assortir cette condamnation d'une astreinte, le retard apporté dans le paiement étant réparé par les intérêts au taux légal ;

Attendu qu'il n'est pas établi que le C.C.F. ait failli à son devoir de conseil dans la mesure où Madame Y... ne démontre pas avoir sollicité un placement dit de "père de famille" plutôt qu'un placement à risques ; que Madame Y... sera en conséquence déboutée de ses demandes à l'encontre du C.C.F. ;

Attendu que Madame Y... ne démontre pas avoir subi un préjudice justifiant les dommages et intérêts qu'elle sollicite pour résistance

abusive ;

Attendu que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile au bénéfice du C.C.F. ; qu'il y a lieu par contre de condamner la Compagnie ERISA à payer à Madame Y... la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Réforme le jugement déféré,

Dit que Madame Colette-Marie X... épouse Y... n'est plus adhérente au contrat d'assurance -groupe souscrit par le CREDIT COMMERCIAL DE FRANCE (C.C.F.) auprès de la Compagnie ERISA pour l'avoir régulièrement dénoncé par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 août 2001, conformément aux dispositions de l'article L 140-4 du Code des Assurances, et ce, dans le délai imparti par la Société ERISA,

Condamne en conséquence la Société ERISA à restituer à Madame Colette-Marie X... épouse Y... la somme de DEUX CENT CINQUANTE MILLE FRANCS (250.000 F) soit TRENTE HUIT MILLE CENT DOUZE EUROS VINGT CINQ CENTS (38.112,25 EUROS) outre intérêts au taux légal à compter du 14 septembre 2001,

Condamne la Société ERISA à payer à Madame Y... la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 EUROS) en application de l'article 700 du Nouveau

Code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2002/04115
Date de la décision : 04/12/2003

Analyses

ASSURANCES DE PERSONNES

2° - Assurance de personnes * Assurance-vie * Souscripteur * Rachat du contrat ou modification ou substitution du bénéficiaire * Faculté de renonciation * condition 1° - Le droit de renonciation de l'article L140-4 du Code des assurances ne se confond pas avec le droit de rachat qui constitue un droit personnel du souscripteur dont il peut disposer à tout moment en vertu de l'article L132-21 du même Code.2° - L'article L140-4 du Code des assurances applicable en cas de modification du contrat d'assurance, institue un dispositif protecteur du souscripteur qui le remet dans la situation où il se trouvait lors de la souscription initiale du contrat ouvrant ainsi la faculté de renonciation prévue à l'article L132-5-1 du Code des assurances.


Références :

article L 140-4 du Code des assurances

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2003-12-04;2002.04115 ?
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