COUR D'APPEL DE LYON
SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 05 NOVEMBRE 2003
Décision déférée : Décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE du 07 mars 2002 (R.G. : 200102554) N° R.G. Cour :
02/02060
Nature du recours : APPEL Affaire : Demande relative aux saisies et mesure conservatoire sans autre indication APPELANTE : SARL MAX représentée par Maître BARRIQUAND, Avoué assistée de Maître PROUTEAU, Avocat, (ANNEMASSE) INTIMEE : SARL SHALIMAR représentée par Maître DE FOURCROY, Avoué assistée de Maître VIBERT, Avocat, (BOURG- EN- BRESSE)
Instruction clôturée le 08 Avril 2003 Audience de plaidoiries du 30
Septembre 2003
LA SIXIEME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, composée lors des débats et du délibéré de :
. Monsieur LECOMTE, Président
. Madame DUMAS, Conseiller
. Monsieur BAUMET, Conseiller assistés lors des débats tenus en audience publique par Madame X..., Greffier, a rendu l'ARRET contradictoire suivant prononcé à l'audience publique du 05 NOVEMBRE 2003, par Monsieur LECOMTE, Président, qui a signé la minute avec Madame X..., Greffier
EXPOSE DU LITIGE
Par acte authentique du 20 décembre 2000, la SARL SHALIMAR a vendu un fonds de commerce de restaurant sis à ORNEX (AIN) à la ARL MAX moyennant le prix de 500 000 F, payé comptant à hauteur de 350 000 F, le solde payable au plus tard le 20 mars 2001.
La SARL MAX n'a pas réglé le solde du prix de 150 000 F malgré sommation.
Par acte du 4 septembre 2001, la SARL SHALIMAR a fait dresser un procès-verbal de saisie-attribution sur un compte de la SARL MAX auprès du Crédit Lyonnais. Une somme de 9 226,09 F a été saisie.
Contestant cette mesure d'exécution, la SARL MAX a saisi le 19 septembre 2001, le Juge de l'Exécution du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE. Elle a soutenu avoir réglé le 10 novembre 2000 une somme occulte de 310 000 F en vertu d'une contre-lettre qui est frappée de nullité absolue.
Par jugement du 7 mars 2002, le Juge de l'Exécution :
- s'est déclaré compétent pour statuer sur les demandes formées par la SARL MAX en mainlevée de la saisie-attribution effectuée par la SARL SHALIMAR à son préjudice le 4 septembre 2001 et en dommages et intérêts et, à l'occasion de cette contestation, de trancher sur la réalité d'un versement opéré en SUISSE et la validité de la contre-lettre invoqués par la SARL MAX ;
- constatant l'absence de preuve d'un versement et la réalité d'une créance résiduelle de 150 000 F de la SARL SHALIMAR envers la SARL MAX, a rejeté la demande en mainlevée de la saisie-attribution ;
- a rejeté la demande en dommages et intérêts formée par la SARL MAX ;
- a condamné la SARL MAX à payer à la SARL SHALIMAR la somme de 500 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Appelante de cette décision, la SARL MAX conclut à la réformation du jugement déféré et à la mainlevée de la saisie-attribution.
A cet effet, elle demande à la Cour, en application de l'article 1840 du Code Général des Impôts, de prononcer la nullité de la contre-lettre en exécution de laquelle, le 10 novembre 2000, Madame Y..., future gérante de la SARL MAX, en cours de constitution, a fait remettre à Monsieur Shahid Z..., gérant de la SARL SHALIMAR, un chèque de banque à son ordre d'un montant de 310 000 F tiré sur la Banque de Commerce et de Placement situé à GENEVE.
En raison de cette nullité, elle sollicite le remboursement de la somme de 310 000 F (42 259,20 ä) outre intérêts légaux à compter du
23 octobre 2001, date de la première mise en demeure et demande qu'il soit jugé que ladite somme a été payée à hauteur de 150 000 F (22 867,35 F) par compensation avec la créance de la SARL SHALIMAR sur la SARL MAX en application de l'acte du 20 décembre 2000.
Au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, la société appelante réclame la somme de 3 000 ä.
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La SARL SHALIMAR conclut à l'incompétence du Juge de l'Exécution français pour connaître de la transaction financière intervenue par l'intermédiaire d'une banque suisse entre la Société DERDAVIS IMPEX LTD et Monsieur Z..., ressortissant suisse, au profit des juridictions suisses. Dans le cas où la Cour retiendrait sa compétence, elle conclut à la confirmation du jugement en soutenant que contrairement à ce qui est prétendu par la partie adverse, le Juge de l'Exécution n'a nullement statué ultra petita ou infra petita puisqu'il ne pouvait statuer sur la mainlevée de la saisie sans examiner les règlements allégués en exécution d'une contre-lettre.
En tout état de cause, elle déclare que la saisie-attribution est parfaitement fondée sur un titre exécutoire et sollicite la somme de 2 300ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu qu'en raison du lieu d'exécution de la saisie-attribution et du domicile du défendeur, le Juge de l'Exécution du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE est bien territorialement
compétent pour connaître de la contestation ;
Attendu qu'en application de l'article L 311-12-1 du Code de l'Organisation Judiciaire, le Juge de l'Exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, "même si elles portent sur le fond du droit" ;
Attendu, toutefois, que l'instance devant le Juge de l'Exécution ne peut être utilisée pour faire trancher à titre principal d'une question de fond et ainsi détourner le Juge de l'Exécution de son rôle de gardien du titre ;
Attendu, en l'espèce, que la saisie-attribution pratiquée par la SARL SHALIMAR est fondée sur un titre exécutoire, à savoir, l'acte notarié revêtu de la formule exécutoire, relatif à la cession du fonds de commerce, constatant une créance certaine, liquide et exigible et alors qu'il n'est pas contesté que la SARL MAX n'a pas réglé le solde du prix soit 150 000 F ;
Que la contestation de cette dernière vise à voir consacrer par le Juge de l'Exécution la nullité d'une contre-lettre en application de l'article 1840 du Code Général des Impôts entraînant restitution d'un règlement occulte allégué de 310 000 F et compensation partielle avec le solde du prix convenu dans l'acte authentique ;
Qu'une telle demande de nullité d'une contre-lettre, déniée par le vendeur et faisant l'objet d'une instance principale devant la juridiction civile, excède la compétence reconnue au Juge de l'Exécution ;
Attendu que la Cour, si elle ne peut suivre le premier Juge en ce qu'il s'est déclaré compétent pour apprécier au fond l'existence de la contre-lettre et écarter la réalité du versement occulte invoqué,
est néanmoins conduite à confirmer la décision entreprise ayant débouté la SARL MAX de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution dès lors que cette mesure d'exécution a été valablement pratiquée en vertu d'un titre exécutoire pour paiement du solde du prix en application de l'article 55 du décret du 31 juillet 1992 ;
Attendu qu'il apparaît équitable de maintenir à la somme de 500 ä l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit de la Société SHALIMAR ;
Attendu que la Société MAX, qui succombe, supportera les entiers dépens de première instance et d'appel ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Dit que le Juge de l'Exécution n'est pas compétent pour trancher la question du fond relative à la validité d'une contre-lettre faisant l'objet d'une instance au fond,
Confirme, par substitution de motifs, la décision déférée ayant débouté la SARL MAX de sa demande en mainlevée de la saisie-attribution diligentée à son encontre le 4 septembre 2001 par la SARL SHALIMAR en exécution de l'acte authentique du 20 décembre 2000,
Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples des parties, Maintient à la somme de 500 ä l'application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Condamne la SARL MAX aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de Maître DE FOURCROY, Avoué, conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. LE GREFFIER
LE PRESIDENT