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30/10/2003 | FRANCE | N°2002/02353

France | France, Cour d'appel de Lyon, 30 octobre 2003, 2002/02353


LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, DÉBATS en audience publique du 25 SEPTEMBRE 2003

tenue par Madame MARTIN, Président, et Monsieur SIMON, Conseiller, chargés de faire rapport, sans opposition des Avocats dûment avisés, qui en ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré, COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Madame MARTIN, Président, Monsieur SIMON, Conseiller, Monsieur KERRAUDREN, Conseiller, GREFFIER : Mademoiselle X..., lors des débats seulement, ARRÊT :

CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 30 OCTOBRE 2003 Par Madame MARTIN, Pr

ésident, qui a signé la minute avec Madame Y..., Greffier en chef, présent lo...

LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, DÉBATS en audience publique du 25 SEPTEMBRE 2003

tenue par Madame MARTIN, Président, et Monsieur SIMON, Conseiller, chargés de faire rapport, sans opposition des Avocats dûment avisés, qui en ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré, COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Madame MARTIN, Président, Monsieur SIMON, Conseiller, Monsieur KERRAUDREN, Conseiller, GREFFIER : Mademoiselle X..., lors des débats seulement, ARRÊT :

CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 30 OCTOBRE 2003 Par Madame MARTIN, Président, qui a signé la minute avec Madame Y..., Greffier en chef, présent lors du prononcé de l'arrêt.

FAITS - PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La société FITNESS DEVELOPPEMENT est cliente du CREDIT COOPERATIF.

Au mois d'octobre 2000, le CREDIT COOPERATIF a ouvert un compte à la société EXECO.

Le 12 décembre 2000, la société FITNESS DEVELOPPEMENT a émis en faveur de la société EXECO un billet à ordre relevé venant à échéance le 28 février 2001, d'un montant de 500 000 F, correspondant à divers travaux d'impression.

Le 14 décembre 2000, la société EXECO a établi un bordereau de remise de l'effet à l'escompte.

Le CREDIT COOPERATIF, à la fois banquier présentateur de l'effet et banquier domiciliataire, a quelques jours avant l'échéance retourné à la société FITNESS DEVELOPPEMENT le relevé récapitulant les effets à

payer. Cette dernière a refusé le paiement de l'effet de 500 000 F souscrit au profit d'EXECO en indiquant sur le récapitulatif "tirage contesté". Toutefois, le CREDIT COOPERATIF a débité le compte de la société FITNESS DEVELOPPEMENT de la somme de 500 000 F.

C'est dans ces conditions que par acte du 28 août 2001, la société FITNESS DEVELOPPEMENT a assigné le CREDIT COOPERATIF en déclaration de responsabilité et indemnisation et que par jugement du 12 avril 2002 le tribunal de commerce de LYON a condamné le défendeur au paiement de la somme de 76 224,51 euros à titre de dommages intérêts, outre la somme de 500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile .

Le CREDIT COOPERATIF, appelant, demande à la Cour dans ses conclusions récapitulatives n°2 du 24 avril 2003, de réformer le jugement, de dire que c'est à juste titre qu'il a débité, à l'échéance, le compte de la société FITNESS DEVELOPPEMENT de la somme de 500 000 F en sa qualité de porteur de bonne foi du billet à ordre, à titre subsidiaire de constater que l'escompte du billet à ordre a servi à régler les fournisseurs de la société FITNESS DEVELOPPEMENT et que cette société ne démontre pas avoir subi le moindre préjudice du fait du débit du billet à ordre, en tout état de cause de condamner la société FITNESS DEVELOPPEMENT à lui payer la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Dans ses conclusions récapitulatives déposées le 15 mai 2003, la société FITNESS DEVELOPPEMENT demande à la Cour de condamner le CREDIT COOPRATIF à lui rembourser la somme de 76 224,51 euros, majorée des intérêts légaux à compter du 5 mars 2001, indûment débitée de son compte, d'ordonner la capitalisation des intérêts, de condamner le CREDIT COOPERATIF à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages intérêts ainsi que la somme de 2 500 euros en

application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle soutient principalement qu'à l'échéance du billet à ordre le CREDIT COOPERATIF a contre-passé celui-ci dans les comptes de la société EXECO en débitant le billet pour un montant de 500 119,60 F, que la banque a exercé son recours cambiaire en contre-passant de façon définitive et irrévocable le billet à ordre dans les comptes du remettant, que le CREDIT COOPERATIF n'était plus porteur du billet à ordre relevé et ne pouvait débiter le compte de la société FITNESS DEVELOPPEMENT unilatéralement cinq jours après l'échéance de la traite, qu'en outre la banque a manifestement manqué à son obligation de conseil et d'information.

La Cour se réfère, pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, aux écritures sus visées.

MOTIFS ET DÉCISION :

Attendu qu'il est constant que le 12 décembre 2000 la société FITNESS DEVELOPPEMENT a émis au profit de la société EXECO un billet à ordre relevé, venant à échéance le 28 février 2001, d'un montant de 500 000 F ;

Attendu qu'en tant que banque domiciliataire, le CREDIT COOPERATIF a quelques jours avant l'échéance édité un relevé récapitulant les effets à payer, document spécifiant les "Instructions concernant les effets présentés au paiement" en ces termes :

"Si vous souhaitez refuser tout ou partie des effets décrits, sur le présent relevé, vous devez compléter ce document en indiquant le montant total à payer et le montant total refusé. L'ensemble formant le total du relevé.

Dans ce cas, renvoyez le document à l'adresse ci-dessous (à savoir l'agence de la banque de Lyon Saxe) avant la date indiquée (à savoir 27 02 01). Sans réponse de votre part à cette date, ces effets seront payés ou rejetés en impayés pour tout ou partie en cas de défaut de

provision.";

Qu'il n'est pas discuté que la société FITNESS DEVELOPPEMENT a donné des instructions au CREDIT COOPERATIF afin que l'effet de 500 000 F ne soit pas payé à la société EXECO ;

Attendu que l'examen des pièces produites montre que, face au refus de paiement manifesté par la société FITNESS DEVELOPPEMENT, le CREDIT COOPERATIF-lequel avait escompté le billet à ordre au profit de la société EXECO et en était porteur- a dans un premier temps débité le compte de la société EXECO à la date du 28 février 2001 pour une somme de 500 119,60 F puis, le 5 mars 2001, a annulé l'opération de débit sur le compte de la société EXECO et débité le compte de la société FITNESS DEVELOPPEMENT de la somme de 500 000 F sans l'informer ;

Attendu qu'en inscrivant la somme de 500 000 F correspondant au montant du billet pris à l'escompte au débit du compte de la société EXECO dès l'échéance du 28 février 2001, le CREDIT COOPERATIF a usé de la faculté de contre-passation dont il bénéficiait pour se faire rembourser ;

Que l'annulation de l'écriture est intervenue le 5 mars 2001, soit cinq jours après le débit du compte de la société EXECO ;

Que le délai écoulé, trop long, exclut que l'on puisse considérer l'opération comme une simple régularisation d'écritures ;

Qu'au contraire, il apparaît que la contre-passation ayant sérieusement aggravé la situation du compte de la société EXECO, la banque a entendu devant cet état de fait reprendre le billet afin de se faire rembourser par le souscripteur de l'effet ;

Attendu, cependant, que l'écriture inscrite par le CREDIT COOPERATIF au débit du compte de la société EXECO s'analysant en une contre-passation irrévocable, le banquier avait perdu la propriété du billet à ordre qu'il devait remettre à la société EXECO ; qu'il ne

pouvait donc débiter directement le compte de la société FITNESS DEVELOPPEMENT alors qu'il n'était plus porteur du billet ;

Que, de plus, le CREDIT COOPERATIF a méconnu les ordres de sa mandante en débitant de son compte directement le montant du billet sans exercer les recours cambiaires prévus par la loi en cas de non paiement de l'effet par le tiré ;

Attendu que le CREDIT COOPERATIF ne peut dissocier les trois qualités qu'il cumulait et tirer argument de sa qualité de banquier présentateur et porteur de l'effet pour soutenir qu'en fait il a simplement annulé comptablement les opérations relatives au billet à ordre et à son rejet illégal, alors que d'une part, s'agissant d'un billet à ordre relevé, la société FITNESS DEVELOPPEMENT avait selon la convention intervenue la faculté de refuser le paiement de l'effet, que d'autre part en tant que banquier domiciliataire il devait payer non pas au vu des mentions figurant sur le titre mais en vertu de l'ordre extérieur au titre, matérialisé par le relevé (comportant en l'espèce refus de payer), qu'enfin en cas de non paiement de l'effet par le tiré il appartient au tireur et au porteur d'exercer les recours cambiaires ;

Attendu que le CREDIT COOPERATIF ayant débité sans droit le compte de la société FITNESS DEVELOPPEMENT, cette dernière est fondée à obtenir la restitution de la somme de 500 000 F, soit 76 224,51 euros, outre le paiement des intérêts au taux légal à compter du 5 mars 2001, date du prélèvement , sans qu'il soit besoin de se pencher sur la question de savoir quelles prestations le billet à ordre litigieux était destiné à couvrir et si la société FITNESS DEVELOPPEMENT peut ou non se prévaloir d'un préjudice au niveau du règlement de ses fournisseurs ;

Attendu que la société FITNESS DEVELOPPEMENT sollicite le paiement d'une somme de 10 000 euros à titre de dommages intérêts mais

n'apporte aucune justification du préjudice financier et moral qu'elle allègue avoir subi ; que ce chef de demande sera rejeté ;

Attendu qu'il serait, en revanche, inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles qu'elle a exposés à l'occasion de la procédure d'appel; qu'il lui sera alloué, en sus de l'indemnité déjà allouée par le tribunal, une somme de 1 500 euros ;

Attendu que la capitalisation des intérêts sera ordonnée conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil à compter de la demande ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Confirme le jugement sur le principe de la condamnation, sur l'article 700 et les dépens.

Réformant pour le surplus et statuant à nouveau,

Condamne le CREDIT COOPERATIF à rembourser à la société FITNESS DEVELOPPEMENT la somme de 76 224,51 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 5 mars 2001.

Dit que les intérêts seront capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil à compter du 15 mai 2003.

Condamne le CREDIT COOPERATIF à payer à la société FITNESS DEVELOPPEMENT la somme de 1 500 euros pour les frais irrépétibles qu'elle a exposés en appel.

Rejette toute autre demande.

Condamne le CREDIT COOPERATIF aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP JUNILLON-WICKY avoués.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2002/02353
Date de la décision : 30/10/2003

Analyses

EFFET DE COMMERCE - Billet à ordre

Le banquier escompteur qui à l'échéance d'un billet à ordre use de la faculté de contre-passation dont il bénéficie pour se faire rembourser, perd la propriété du titre, l'annulation de l'écriture au débit du compte survenue dans un délai de 5 jours ne pouvant être considérée comme une simple régularisation d'écritures, ce délai étant trop long. Dès lors, la banque escompteur ne peut débiter directement le compte de la société émettrice du billet à ordre


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2003-10-30;2002.02353 ?
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