La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/10/2003 | FRANCE | N°2002/01330

France | France, Cour d'appel de Lyon, 23 octobre 2003, 2002/01330


Instruction clôturée le 09 Mai 2003 Audience publique du 28 Mai 2003 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, DÉBATS en audience publique du 28 MAI 2003

tenue par Monsieur SIMON, Conseiller, et Monsieur SANTELLI, Conseiller, chargés de faire rapport, sans opposition des Avocats dûment avisés, qui en ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré, COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Monsieur SIMON, Conseiller le plus ancien de la Chambre, faisant fonction de Président en vertu de l'ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de LYON en date

du 10 décembre 2002 Monsieur SANTELLI, Conseiller, Monsieur KERRAUDR...

Instruction clôturée le 09 Mai 2003 Audience publique du 28 Mai 2003 LA TROISIÈME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, DÉBATS en audience publique du 28 MAI 2003

tenue par Monsieur SIMON, Conseiller, et Monsieur SANTELLI, Conseiller, chargés de faire rapport, sans opposition des Avocats dûment avisés, qui en ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré, COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Monsieur SIMON, Conseiller le plus ancien de la Chambre, faisant fonction de Président en vertu de l'ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de LYON en date du 10 décembre 2002 Monsieur SANTELLI, Conseiller, Monsieur KERRAUDREN, Conseiller, GREFFIER : Mademoiselle X..., lors des débats seulement, ARRÊT :

CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 23 OCTOBRE 2003 Par Monsieur SIMON, faisant fonction de Président, qui a signé la minute avec Madame Y..., Greffier, présent lors du prononcé de l'arrêt.

EXPOSE DU LITIGE - PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par déclaration du 5 mars 2002, la société SCAC et la société TRANS SERVICE LINE ont relevé appel d'un jugement rendu le 31 janvier 2002 à l'encontre de la société AIG EUROPE par le Tribunal de Commerce de LYON qui s'est déclaré compétent pour connaître du litige, qui les a condamnées à payer à la société AIG EUROPE la somme de 24.588,60 euros majorée des intérêts légaux à compter du 10 février 1999, qui a condamné la société DSR à relever et garantir les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINE des condamnations prononcées contre elles, qui a condamné in solidum les sociétés SCAC, TRANS SERVICE LINE et DSR à

payer à la société AIG EUROPE la somme de 762,25 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, rejetant toutes les autres demandes.

Par déclaration du 30 avril 2002 la société DSR - SENATOR LINES a relevé appel de ce jugement à l'encontre des sociétés AIG EUROPE, SCAC et TRANS SERVICE LINE.

Vu l'article 455 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civile dans sa rédaction issue du décret du 28 décembre 1998 ;

Vu les prétentions et les moyens développés par société TRANS SERVICE LINE et SCAC dans leurs conclusions du 10 mars 2003 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé tendant à faire juger qu'en tant que commissionnaires de transport, leur responsabilité ne peut excéder celle du transporteur ; que celui-ci - la société DSR SENATOR LINES - est exonéré de toute responsabilité, en vertu de l'article 4-2 de la Convention de BRUXELLES du 25 août 1924, dès lors qu'il y a eu "périls de mer", ce qui est le cas en l'espèce à raison de conditions climatiques très défavorables rencontrées par le navire à l'origine du sinistre ; qu'il y a lieu à infirmation ; qu'à titre subsidiaire, pour le cas où l'événement ne serait pas exonératoire, il convient de confirmer le jugement, lequel a retenu que la clause attributive de juridiction invoquée ne peut leur être applicable, n'ayant pas signé le connaissement et n'ayant pas eu ainsi connaissance de cette clause qui n'a pu de ce fait être acceptée ; qu'en conséquence c'est bien le tribunal saisi à l'origine, celui de LYON, qui a vocation à statuer au titre de la demande en garanti contre la société DSR - SENATOR LINES ou au titre de la demande en intervention ;

Vu les prétentions et les moyens développés par la société DSR - SENATOR LINES dans ses conclusions récapitulatives du 7 mai 2003 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé

tendant à faire juger que l'exception d'incompétence qu'elle soulève au profit du tribunal de ROSTOCK en vertu de la clause attributive du connaissement est recevable et au surplus bien fondée, dès lors qu'elle a prévu la juridiction compétente avec précision et qu'il n'est pas nécessaire que le connaissement soit signé par le chargeur pour que les conditions du transporteur lui soient opposables, s'agissant d'usages établis dans la branche d'activité et d'un pratique habituelle, alors même qu'elle avait en l'espèce connaissance de cet usage pour avoir noué des rapports commerciaux avec elle ; qu'en conséquence cette clause est opposable à la société SCAC ; que les conditions de la fortune de mer sont réalisées, dès lors qu'il est établi que le navire a rencontré des vents de force 7 à 9, ce qui exclut le cas de force majeure ; qu'ainsi la Convention de BRUXELLES s'applique, exonérant le transporteur, confirmant sur le fond le jugement déféré ;

Vu les prétentions et les moyens développés par la société AIG EUROPE dans ses conclusions récapitulatives du 13 mars 2003 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé tendant à voir déclarer irrecevables et en tout cas mal fondées les sociétés appelantes de leur appel, à les voir ainsi déboutées de toutes leurs demandes, à voir confirmer le jugement déféré, à voir condamner les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LIGNE à lui payer 3.000 euros à titre de dommages et intérêts;

X X X

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 mai 2003.

MOTIFS ET DÉCISION :

I/ Sur la demande principale de la société AIG EUROPE à l'encontre des sociétés SCAC et TRANS SERVICE LIGNE :

Attendu que la société AIG EUROPE, qui est subrogée dans les droits de la société CGF GALLET pour l'avoir indemnisée des conséquences d'un sinistre qui a eu lieu au cours d'une opération de transport que celle-ci avait confié à la société SCAC, agit en remboursement des sommes qu'elle a versées à son assuré à l'encontre de la société SCAC, prise en sa qualité de commissionnaire de transport, ainsi qu'à l'encontre de la société TRANS SERVICE LINES qui est intervenue à la demande de celle-ci en tant que commissionnaire de transport substitué ;

Attendu qu'à ce titre les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES sont tenues à l'égard de l'expéditeur d'une obligation de résultat, de sorte qu'elles sont présumées responsables de tous les dommages et des avaries qui sont survenus en cours de transport, dont l'exécution leur avait été confiée ;

Attendu qu'elles invoquent pour s'en prévaloir, dès lors qu'elles n'ont commis aucune faute personnelle et que leur responsabilité ne peut excéder celle légalement encourue par le transporteur, l'article 4-2 de la Convention de BRUXELLES, qui dispose que le transporteur n'est pas responsable des pertes ou des dommages résultant ou provenant des périls, dangers ou accidents de la mer ;

Attendu qu'en l'espèce il résulte du livre de bord et du rapport d'expertise de ITS que le navire chargeant les marchandises a effectivement rencontré en mer des conditions climatiques difficiles le 25 mars 1998 entre une heure du matin et douze heures ;

Attendu que la qualification de fortune de mer suppose la réalisation d'un événement anormalement pénible qui est distinct de la force majeure, de sorte qu'elle n'exige pas du transporteur qu'il démontre

que l'événement était imprévisible ; que les conditions atmosphériques rencontrées par le navire paraissent tout à fait habituelles à cette période de l'année dans cette zone de l'Atlantique Nord ; qu'e, effet des vents de force 7 à 9 ne constituent pas un cas de fortune de mer, quand bien-même seraient-ils considérés comme présentant des circonstances difficiles pour le transporteur ;

Attendu qu'il est faux de prétendre que les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES ont reconnu leur responsabilité, alors qu'elles ont toujours allégué la fortune de mer ;

Attendu qu'il convient en conséquence de rejeter ce moyen de défense des sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES comme insuffisamment fondé ; Attendu, dans ces conditions, que la demande en indemnisation de la société AIG EUROPE est bien fondée à l'égard des sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES, lesquelles avaient la responsabilité du transport en tant que commissionnaires ;

Attendu que les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES ne discutent plus devant la Cour, fût-ce à titre subsidiaire, le montant de la réclamation de la société AIG EUROPE, de sorte qu'il y a lieu de faire droit à sa prétention tendant à voir confirmer le jugement déféré sur ce point en les condamnant à lui payer la somme de 24.588,60 euros (161.290,67 F) majorée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 10 février 1999 ;

Attendu que le jugement déféré doit être en conséquence confirmé du chef de cette demande ;

II/ Sur la clause d'attribution de compétence et son applicabilité au litige :

Attendu que la société DSR - SENATOR LINES ne peut invoquer la clause d'attribution de compétence figurant dans le connaissement au profit

du tribunal de ROSTOCK pour contester aux sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES qui l'ont appelée en garantie la compétence du Tribunal de Commerce de LYON, dès lors qu'elle ne démontre pas, alors qu'elle en a la charge, que ces sociétés ont eu connaissance de cette clause ;

Attendu que le fait que cette convention attributive puisse être conclue dans le commerce international sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties avaient connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée ne dispense pas pour autant la société DSR - SENATOR LINES, qui entend se prévaloir de cet usage, de fournir des éléments propres à établir son existence ; que faute de rapporter cette preuve de quelque façon, il convient de rejeter ce moyen comme insuffisamment fondé, la société DSR - SENATOR LINES ne pouvant se contenter d'affirmer que cet usage était connu ou censé être connu des sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES, lesquelles n'ayant pas signé le connaissement, la signature de ce document par le chargeur n'est d'ailleurs pas requise, sont justifiées à opposer au transporteur leur ignorance de cette clause ;

Attendu que par conséquent les conditions mises pour l'application de cette clause par l'article 17 de la Convention de BRUXELLES ne sont pas remplies ; qu'elle ne peut ainsi être opposée aux sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES ;

Attendu qu'ayant appelé en garantie la société DSR - SENATOR LINES, c'est à bon droit que les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES, l'ont attraite devant le tribunal saisi de la demande originaire ; qu'il y aurait eu, si les affaires devaient être jugées séparément, un risque de solutions inconciliables ;

Attendu que c'est dans ces conditions le Tribunal de Commerce de LYON qui était compétent, confirmant le jugement déféré de ce chef ;

III/ Sur la demande en garantie des sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES :

Attendu que les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES, dès lors que le moyen invoqué de fortune de mer a été écarté, sont bien fondées à réclamer à la société DSR - SENATOR LINES de les relever et garantir des condamnations prononcées contre elles, le transporteur maritime étant tenu des conséquences du sinistre dont la survenance lui est seul imputable, les commissionnaires de transport n'ayant commis aucune faute ;

Attendu qu'en conséquence le jugement, qui a condamné la société DSR - SENATOR LINES à relever et garantir les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES de la condamnation à payer à la société AIG EUROPE la somme de 24.588,60 euros outre intérêts au taux légal à compter du 10 février 1999, doit être confirmé ;

IV/ Sur les autres demandes :

Attendu que la société AIG EUROPE ne justifie pas d'un préjudice indemnisable à l'encontre des sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES et qu'il y a lieu ainsi de la débouter de sa demande en dommages et intérêts formée contre elles, confirmant le jugement déféré de ce chef ;

Attendu qu'il serait inéquitable que la société AIG EUROPE supporte les frais irrépétibles de l'instance à l'égard des sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES, de même que les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES à l'égard de la société DSR - SENATOR LINES ; qu'il y a lieu en conséquence d'allouer à la société AIG EUROPE une somme de 1.500 euros à la charge des sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES et aux sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES une somme de 3.000 euros à la charge de la société DSR - SENATOR LINES au titre de l'article 700 du

Nouveau Code de Procédure Civile ;

Attendu que les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES et DSR - SENATOR LINES doivent être condamnées in solidum aux dépens ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES à payer à la société AIG EUROPE la somme de 1.500 euros et la société DSR - SENATOR LINES à payer aux sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES celle de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Condamne in solidum les sociétés SCAC et TRANS SERVICE LINES et DSR - SENATOR LINES à payer les dépens qui seront recouvrés par la SCP DUTRIEVOZ, avoués, à l'encontre des autres parties conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2002/01330
Date de la décision : 23/10/2003

Analyses

TRANSPORTS MARITIMES - Marchandises - Transport international - Convention de Bruxelles du 25 août 1924 - Responsabilité du transporteur - Exonération - Dangers et périls de mer

La qualification de fortune de mer suppose la réalisation d'un événement anormalement pénible, distinct de la force majeure, de sorte qu'il n'est pas exigé du transporteur qu'il démontre que l'événement était imprévisible. Dès lors que les conditions atmosphériques rencontrées par le navire paraissent tout à fait habituelles à cette période de l'année dans la zone traversée, celles-ci ne sauraient constituer un cas de fortune de mer quand bien-même elles représenteraient des circonstances difficiles pour le transporteur


Références :

2
Convention de Bruxelles du 25 août 1924, article 4

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2003-10-23;2002.01330 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award