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07/04/2003 | FRANCE | N°2001/03765

France | France, Cour d'appel de Lyon, 07 avril 2003, 2001/03765


R.G: O 1/03765

décision du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de VICHY au fond du 12 février 1998 Arrêt de la Cour de Cassation du 21 février 2001 Arrêts de la Cour d'Appel de RIOM (Chambre Sociale) du 1er décembre 1998 et du 2février 1999 COUR D'APPEL DE LYON AUDIENCE SOLENNELLE ARRET DU 07 AVRIL 2003 APPELANTS:

Monsieur Francis X...

assisté de Me BAUDOT, avocat au barreau de MACON

Madame Félicie Y... épouse X...

assistée de Me BAUDOT, avocat au barreau de MACON

INTIMES:

Monsieur Christian Z...

assisté de la SCP DE BOI

SSY HUGUET BARGE avocat au barreau de CUSSET-VICHY

Monsieur Roger A... assisté de Me COTESSAT, avocat au ...

R.G: O 1/03765

décision du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de VICHY au fond du 12 février 1998 Arrêt de la Cour de Cassation du 21 février 2001 Arrêts de la Cour d'Appel de RIOM (Chambre Sociale) du 1er décembre 1998 et du 2février 1999 COUR D'APPEL DE LYON AUDIENCE SOLENNELLE ARRET DU 07 AVRIL 2003 APPELANTS:

Monsieur Francis X...

assisté de Me BAUDOT, avocat au barreau de MACON

Madame Félicie Y... épouse X...

assistée de Me BAUDOT, avocat au barreau de MACON

INTIMES:

Monsieur Christian Z...

assisté de la SCP DE BOISSY HUGUET BARGE avocat au barreau de CUSSET-VICHY

Monsieur Roger A... assisté de Me COTESSAT, avocat au barreau de MACON 2 Madame Odile B... épouse A...

assistée de Me COTESSAT, avocat au barreau de MACON

Monsieur Serge A...

assisté de Me COTES SAT, avocat au barreau de MACON

Monsieur Yannick A...

assisté de Me COTES SAT, avocat au barreau de MACON

GAEC DU BOIS CORNU

assistée de Me COTES SAT, avocat au barreau de MACON COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré: MONSIEUR JACQUET, président, suppléant monsieur le premier président, désigné à cet effet par ordonnance du 10 décembre 2002, MONSIEUR VEBER, président, MADAME BIOT, conseiller, MONSIEUR DENIZON, conseiller, MONSIEUR BAUMET, conseiller, en présence pendant les débats de madame KROLAK, greffier. DEBATS : En audience solennelle et publique du LUNDI 03 FEVRIER 2003 ARRET : contradictoire prononcé à l'audience solennelle et publique du 07 AVRIL 2003 par monsieur JACQUET, président, en présence de madame KROLAK, greffier, qui ont signé la minute. FAITS -

PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES Par acte sous seing privé du 1er janvier 1995 et intitulé "convention de location précaire" Francis X... a mis à la disposition de Christian Z... pour une durée d'un an un ensemble de quinze parcelles en nature de pré et d'une superficie totale de 33 hectares 16 ares 27 centiares. Par deux actes du 12 avril 1995 Francis X... et Christian Z... ont déclaré le premier "vendre en vente d'herbe" le second "prendre en vente d'herbe" "sur 3 ans campagne J 995-1996-1997 avec eau d'adduction comprise pour un prix de 27.000 francs et pour une superficie de trente-trois hectares trente-trois ares. Paiement vers le il novembre de chaque année". Par acte sous seing privé du 7 avril 1997 Francis X... à donné les mêmes parcelles à bail à ferme à Roger A..., Yannick A... et Serge A... Christian Z... a assigné Francis X... et Roger A..., Yannick A..., Serge A... et le GAEC du Bois Cornu (les consorts A...) pour faire juger que lui-même était titulaire d'un bail rural et que le bail consenti aux consorts A... était nul. Par jugement du 12 février 1998 le tribunal paritaire des baux ruraux de Vichy a dit que bail signé le 1er janvier 1995 par Francis X... et Christian Z... était soumis au statut du fermage, déclaré Christian Z... fermier des parcelles litigieuses à compter du 1 erjanvier 1995, déclaré nul le contrat passé le 7 avril 1997 avec les consorts A..., ordonné une expertise pour déterminer le prix du fermage et le préjudice causé à Christian Z... par la privation de jouissance des terres louées. Francis X... ayant fait appel de cette décision, son épouse Félicie Y... est intervenue volontairement à l'instance. Par arrêt du 1er décembre 1998 rectifié par arrêt du 2 février 1999 la cour d'appel de Riom, ayant retenu que le bail aurait dû être conclu avec l'accord de Félicie Y... dès lors qu'il s'agissait de biens de communauté, a infirmé le jugement, dit nul le bail rural conclu par Francis X... et Christian Z... le lerjanvier 1995, condamné Christian Z... à payer aux époux X... une indemnité d'occupation et ordonné une expertise

pour évaluer le préjudice subi par les consorts A... C... arrêt a été cassé pour défaut de base légale par arrêt du 21 février 2001 de la cour de cassation, la Cour d'Appel n'ayant pas recherché, comme il le lui était demandé, si Francis X... n'avait pas agi en gérant d'affaires. Les époux X... ont saisi la Cour d'Appel de Lyon, désignée cour de renvoi. Ils soutiennent que la convention du 1er janvier 1995 est nulle principalement pour vice du consentement, Francis X... ayant été trompé par les termes de l'imprimé sur lequel cette convention a été établie et Christian Z... s'étant livré à des manoeuvres constitutives de dol ; qu'elle est nulle, subsidiairement et si la qualification de bail rural était retenue, par application des articles 1425 et 1427 du code civil. Ils font en outre valoir qu'il faut rechercher si Christian Z... avait reçu les autorisations administratives nécessaires à l'exploitation des terres. Ils demandent à la cour d'annuler la convention du 1er janvier 1995, de dire que Christian Z... devra quitter les parcelles litigieuses sous astreinte, de le condamner à verser une indemnité d'occupation à compter du 1er janvier 1997 et jusqu'à la libération effective des lieux et de le condamner à payer des dommages-intérêts et une indemnité en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Christian Z... répond que, Félicie Y... étant présente lors des discussions relatives aux modalités d'exploitation et l'ayant reçu lors des règlements annuels qu'il faisait, il ne pouvait que supposer que Francis X... soit était seul propriétaire des terres soit agissait comme mandataire apparent soit comme gérant d'affaires. Ils concluent à la confirmation du jugement et à la condamnation des époux X... à lui payer une indemnité enapplication de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. MOTIFS DE LA DECISION: Attendu que le premier juge a fait une exacte analyse de la convention conclue le 1er janvier 1995 et en a déduit à bon droit qu'elle était soumise au statut du fermage; Attendu que la

qualification de bail rural résulte de l'application des dispositions d'ordre public de l'article L. 411-1 du Code rural, indépendamment de la volonté des parties; que, dès lors, il est indifférent que francis X... ait entendu s'engager "sur une notion d'occupation précaire" et non pour un bail rural et qu'il ait ignoré les textes régisant le statut du fermage; Attendu qu'il importe de rechercher si la mention "renouvelable année 1996 et année 1197" a été inscrite par Christian Z... sur l'acte du 1er janvier 1995 avant ou après que Francis X... eut signé cet acte dès lors que ce dernier ne conteste ni qu'il a , librement et en toute conscience, rédigé et siné l'acte du 12 avril 1995 par lequel il a déclaré "vendre en vente d'herbe... sur 3 ans campagne 1995-1996-1997..." ni que la "vente d'herbe" convenue le 1er janvier 1995 pour l'année 1995 a été renouvelée pour l'année 1996, reconnaissant et confirmant ainsi que la convention litigieuse était effectivement renouvelable; que Francis X... est mal fondé à prétendre que l'inscription par Christian Z... de la mention citée i-dessus constitue une manoeuvre dolosive; Que les époux X... doivent donc être déboutés de leur demande d'annulation de la convention du 1er janvier 1995 pour vice du consentement; Attendu que Christian Z... justifie de l'obtention des autorisations administratives pour l'exploitation des terres X...; Attendu qu'aux termes de l'article 1425 du code civil les époux ne peuvent, l'un sans l'autre donner à bail un bien rural dépendant de la communauté; Qu'il est constant que les terrains qui sont l'objet de la convention litigieuse ont été acquis pendant le temps du mariage des époux Francis X... et Félicie Y... et sont donc des biens communs; Que les époux X... arguent de la nullité de cette convention parce qu'elle a été signée par Francis X... seul alors que Félicie Y... aurait également dû y prendre part, tandis que Christian Z... prétend que, nonobstant cette circonstance, Félicie Y... est engagée par cette convention motif pris que Francis X... avait agi soit comme

mandataire apparent soit comme gérant d'affaire; Attendu que, s'agissant du mandat apparent, Christian Z... ne peut pas se borner à prétendre aujourd'hui qu'il "ne pouvait que supposer que Francis X... était soit seul propriétaire des terres soit habilité à en disposer avec l'accord de son épouse" sans préciser ce qu'il a effectivement cru quant aux pouvoirs de Francis X...; Que Christian Z... n'était dispensé de vérifier quels étaient réellement les pouvoirs de Francis X... ni par la circonstance que Francis X... avait exploité seul ces terres les années précédentes ni par la présence de Félicie Y... lors des "discussions relatives aux modalités d'exploitation" et encore moins par "l'artifice" que constituait le recours à une convention de location précaire devant permettre aux époux X... de bénéficier des prestations de la Mutualité sociale agricole ; que c'est en vain qu'il fait état d'autres circonstances qui lui étaient toutes inconnues lorsqu'il a signé l'acte du 1er janvier 1995 puisqu'elles sont postérieures à cette date ou ne lui ont été révélées qu'au cours de la procédure judiciaire (régime matrimonial des époux X... -conditions d'acquisitions des terres par eux); Mais attendu que dans les quatre actes authentiques, respectivement datés des 10 août 1990, 13 février 1993, 5 et 9 décembre 1995 et 19 décembre 1995, par lesquels les époux X... ont acquis les parcelles visées dans la "convention de location précaire" du 1er janvier 1995 Francis X... est seul mentionné comme acquéreur, bien qu'il fût précisé qu'il était "époux de Félicie BA UDINA T... marié sous le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts"; Qu'en signant tous ces actes Francis X... avait nécessairement conscience d'agir pour le compte de la communauté existant entre lui et son épouse, ce qu'il ne nie pas; Qu'il est constant que, jusqu'au jour où elle ont été mises à la disposition de Christian Z..., ces terres ont été exploitées par Francis X...; Qu'il ressort des propres écritures ("Rappel des faits") des époux

X... que Francis X... prenait seul les décisions concernant les bien communs, même quand il s'agissait d'actes de disposition; Que Francis X... ne prétend pas qu'au moment de signer la convention litigieuse avec Christian Z... il n'avait plus à l'esprit que son épouse avait sur ces terres l]mêmes droits que lui ni qu'il ignorait les limites légales de ses pouvoirs de gestion de ces biens Que, par ailleurs, cette convention du 1er janvier 1995 était utile à Félicie Y... comme à Francis X... puisque, alors même que Francis X... conservait la possibilité de cotiser à la mutualité sociale agricole et d'accroître ainsi les droits en découlant et devant profiter ensuite à la communauté, les époux X... ont reçu de Christian Z... des redevances largement supérieures au montant du ferma]e pour ces terres tel qu'il serait résulté de l'application de la réglementation; Que l'ensemble de ces circonstances démontre la volonté de Francis X... d'agir en gérant d'affaires en signant l'acte du 1 erjanvier 1995 et en consentant au renouvellement de la convention; Que Félicie Y... est engagée par cet acte dont, au surplus, elle avait été informée puisqu'elle ne conteste pas avoir été présente tant lors des négociations de cette convention que lorsque Christian Z... a versé les redevances; Que doit donc être écarté le moyen tiré de la nullité du bail rural dont est titulaire Christian Z...; Attendu que l'existence de ce bail interdisait aux époux X... de conclure un autre bail, pour les mêmes terres, avec les consorts A...; Que c'est donc à bon droit que le tribunal paritaire des baux a déclaré que ce second bail était nul et a ordonné aux consorts A... de libérer ces terres; Que doivent en outre être confirmées les dispositions du jugement ordonnant l'expertise; Attendu que Christian Z... a exigé, en vertu de l'exécution provisoire dujugement du 12 février 1998, que les terres du bail fussent libérées par les consorts A... mais que ceux-ci sont mal fondés à lui réclamer réparation du préjudice ainsi subi puisqu'il est reconnu

titulaire du bail qui lui donnait droit d'exploiter seul ces terres; Que les consorts A... doivent donc être déboutés de leurs demandes dirigées contre Christian Z...; Attendu que, subsidiairement, ils demandent que les époux X... soient condamnés à les indemniser de leur entier préjudice "qui sera fixé à dire d'expert"; Qu'il est certain que les époux X... ont commis une faute qui a causé préjudice aux consorts A... en signant avec ces derniers un contrat de bail pour des terres qu'ils avaient déjà données à bail à Christian Z...; Que le préjudice ainsi causé aux consorts A... est nécessairement différent de celui qu'ils disaient avoir subi du fait de Christian Z... et qu'est inutile le rapport de l'expert (Françoise MENAT) qui avait été commis par la cour d'appel de Riom pour évaluer le préjudice causé aux consorts A... non par les époux X... mais par le retard de Christian Z... à quitter les lieux; Que, à défaut d'autre précision des consorts A... quant à la nature de leur préjudice, il apparaît que la faute des époux X..., qui leur a faussement fait croire qu'ils étaient bénéficiaires d'un bail, les a privés de l'espérance du gain qu'ils pouvaient tirer de l'exploitation des terres X..., ce qui constitue un préjudice moral pour l'évaluation duquel il n'est pas utile de recourir à un expert; Que ce préjudice sera réparé par la somme de sept mille euros; Attendu qu'il y a lieu d'allouer à Christian Z... et aux consorts A... des indemnités pour leurs frais non compris dans les dépens et exposés à l'occasion de cette procédure; PAR CES MOTIFS, LA COUR, Confirme le jugement; Y... ajoutant, Condamne les époux Francis X... et Félicie Y... à payer aux consorts A... la somme de sept mille euros (7.000 E) à titre de dommages-intérêts; Les condamne, en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, à payer a: - Christian Z... la somme de trois mille euros (3.000 E), - aux consorts A... la somme de trois mille euros (3.000 E); Les condamne aux dépens de première instance et d'appel et autorise les avoués de leurs

adversaires à recouvrer directement contre eux les sommes dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante. LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2001/03765
Date de la décision : 07/04/2003

Analyses

BAIL RURAL - Bail à ferme - Bailleur - Bail consenti par un époux

Un bien rural dépendant de la communauté donné à bail par un seul époux n'encourt pas la nullité si cet époux a agi en gérant d'affaires des biens communs ou en vertu d'un mandat apparent de son conjoint. La preuve de l'apparence d'un tel mandat s'apprécie au moment de la pas- sation de l'acte et ne peut résulter ni de la circonstance que le mari avait exploité seul ces terres les années précédentes, ni de la présence de son épouse lors des discussions relatives aux modalités d'exploitation et encore moins de l'artifice que constituait le recours à une convention de location précaire devant permettre aux époux de bénéficier des prestations de la Mutualité sociale agricole, le preneur n'étant pas dispensé de vérifier quels étaient réellement les pouvoirs du mari. En revanche, le mari a agi en agent d'affaires pour le compte de la commu- nauté en signant seul l'ensemble des actes de location, ces conventions étant au surplus utiles à l'épouse, les droits en découlant profitant à la communauté


Références :

Code civil, article 1425

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2003-04-07;2001.03765 ?
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