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29/01/2003 | FRANCE | N°2001/02877

France | France, Cour d'appel de Lyon, 29 janvier 2003, 2001/02877


COUR D'APPEL DE LYON

SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 29 JANVIER 2003

Décision déférée : Décision du Tribunal de Grande Instance de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE du 23 mars 2001 (R.G. : 200000149) N° R.G. Cour : 01/02877

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en réparation des dommages causés par d'autres faits personnels APPELANTE : Madame Henriette X... représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, Avoués assistée par Maître DESILETS, Avocat, (VILLEFRANCHE-SUR-SAONE) INTIMEES : SOCIETE LODEN CLUB Siège social :

511 rue Nationale 69400 VILLEFRANCHE-SUR-SAONE

représentée par Maître MOREL, Avoué assistée par Maître MORTIMORE, Avocat, (VILLEFRANC...

COUR D'APPEL DE LYON

SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 29 JANVIER 2003

Décision déférée : Décision du Tribunal de Grande Instance de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE du 23 mars 2001 (R.G. : 200000149) N° R.G. Cour : 01/02877

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en réparation des dommages causés par d'autres faits personnels APPELANTE : Madame Henriette X... représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, Avoués assistée par Maître DESILETS, Avocat, (VILLEFRANCHE-SUR-SAONE) INTIMEES : SOCIETE LODEN CLUB Siège social :

511 rue Nationale 69400 VILLEFRANCHE-SUR-SAONE représentée par Maître MOREL, Avoué assistée par Maître MORTIMORE, Avocat, (VILLEFRANCHE-SUR-SAONE) SOCIETE AXA ASSURANCES Siège social : 233 Cours Lafayette 69006 LYON représentée par Maître MOREL, Avoué assistée par Maître MORTIMORE, Avocat, (VILLEFRANCHE-SUR-SAONE) MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE L AIN SES DIRIGEANTS LEGAUX Siège social : 15 Avenue du Champ de Foire 01059

BOURG EN BRESSE CEDEX 09 représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, Avoués assistée par Maître TURCHET, Avocat, (BOURG-EN-BRESSE) Instruction clôturée le 18 Juin 2002 Audience de plaidoiries du 19 Décembre 2002

LA SIXIEME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, composée lors des débats et du délibéré de :

. Monsieur VEBER, Président

. Madame DUMAS, Conseiller

. Monsieur SORNAY, Conseiller assistés lors des débats tenus en audience publique par Madame Y..., Greffier, a rendu l'ARRET contradictoire suivant prononcé à l'audience publique du 29 JANVIER 2003, par Monsieur VEBER, Président, qui a signé la minute avec Madame Y..., Greffier

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Le 20 février 1998, Madame Henriette X... s'est blessée lors d'une chute dans l'escalier du magasin LODEN CLUB lui causant une fracture du fémur gauche.

Par actes du 26 janvier 2000 et du 15 juin 2000, Madame X... a fait assigner la Société LODEN CLUB, son assureur, la Compagnie AXA ASSURANCES, et la Mutuelle Sociale Agricole (MSA) devant le Tribunal de Grande Instance de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE afin d'obtenir, sur le fondement de l'article 1384 alinéa1, la condamnation solidaire du magasin et de son assureur à lui payer la somme de 65.500 F au titre de la réparation de ses préjudices fonctionnels, la somme de 50.000 F au titre de son préjudice matériel et la somme de 10.000 F en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La MSA a demandé la condamnation solidaire de la Société LODEN CLUB et de son assureur à lui rembourser le montant de ses débours, soit la somme de 42.729,75 F et de lui verser la somme de 5.000 F en application de l'article L.376-1 du Code de la Sécurité Sociale et celle de 5.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement du 23 mars 2001, le Tribunal a débouté Madame X... et la MSA de leurs demandes, la Société LODEN CLUB et la Compagnie AXA de leur demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Appelante de cette décision, Madame X... en demande la réformation.

Elle fait valoir que le commerçant, qui a la garde du sol de son magasin, doit assurer la sécurité des personnes qui y pénètrent et qu'étant entrée dans l'arrière-boutique avec l'accord du personnel, elle n'a commis aucune faute, rien n'indiquant en outre au client qu'il ne peut pénétrer dans cette zone.

Madame X... soutient que l'escalier conduisant à l'arrière-boutique présente une forte déclivité nécessitant de prendre appui sur une étagère sans lien avec celui-ci dont les clients ignorent la capacité de résistance et ajoute que l'accident a eu lieu au mois de février dans la partie la plus sombre du magasin où l'escalier ne bénéficie d'aucun système d'éclairage particulier.

Concernant son préjudice, Madame X... fait état de l'expertise du docteur Z... et présente la demande suivante :

- ITT : 3 mois 1/2 - 15.000 F

- Préjudice esthétique (1/7) : 1.000 F

- Pretium doloris (3/7) : 12.000 F

- IPP (15 %) : 37.500 F

Elle demande également une somme de 50.000 F au titre de son préjudice matériel en raison de la nécessité d'installer un élévateur dans son domicile et sollicite une somme de 15.000 F en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.[*

La MSA conclut également à la réformation du jugement estimant que la Société LODEN CLUB a commis une faute et à tout le moins un manquement à son obligation de sécurité. Elle soutient que la distinction entre client et non client est inopérante car, à partir du moment où le magasin accueille du public, il doit être à même d'offrir à toute personne des conditions de sécurité identiques et qu'en l'espèce les conditions d'accès aux toilettes sont particulièrement acrobatiques.

Elle demande le remboursement de ses frais et débours soit la somme de 42.729,75 F (6.514,11 ä) outre 726,25 ä au titre de l'article L.376-1 du Code de la Sécurité Sociale et 762,25 ä au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

*]

La Société LODEN CLUB et la Compagnie AXA répliquent que l'action de Madame X... ne peut être fondée sur l'article 1384 alinéa 1 du Code Civil car si le commerçant est bien gardien du sol de son magasin, sa responsabilité n'est engagée que lorsque la chose gardée a eu un comportement anormal, soit intrinsèquement soit à raison d'un détritus, la charge de la preuve reposant sur la victime, ce que Madame X... n'établit pas. Ils soulignent que la MSA ne fonde pas sa demande sur ce texte et considère que la chose n'a pas joué de rôle anormal.Ils ajoutent qu'aucune obligation de sécurité ne pèse sur le vendeur à l'égard de l'acheteur ni à l'égard de toute personne se trouvant dans ses locaux et susceptible d'y effectuer des achats.

La Société LODEN CLUB et la Compagnie AXA relèvent que Madame X... a admis qu'elle n'était pas entrée dans le magasin en qualité de cliente (attestation MOULIN), qu'elle s'était rendue dans l'arrière-boutique avec l'accord du personnel pour aller aux toilettes soit dans un endroit non accessible à la clientèle et qu'ainsi elle ne peut imputer une faute au commerçant pour n'avoir pas installé des dispositifs de sécurité. Ils soutiennent que l'escalier du magasin emprunté par Madame X... permet l'accès à la réserve.

Ils font valoir que l'escalier n'a pas de forte déclivité puisqu'il ne comporte que trois marches d'une hauteur de 15 cm et d'une profondeur de 31 cm, que l'éclairage n'est pas insuffisant et qu'il n'est pas nécessaire de prendre appui pour le franchir. Ils soulignent en outre que l'accident s'est produit lorsque Madame X... est revenue des toilettes soit après avoir déjà utilisé l'escalier. Ils estiment que Madame X... ne rapporte pas la preuve d'un rôle actif de l'escalier.

Concernant les préjudices, la Société LODEN CLUB et la Compagnie AXA, à titre subsidiaire, proposent d'indemniser l'ITT à hauteur de 6.000

F, l'IPP à hauteur de 30.000 F, une somme de 10.000 F pour le pretium doloris et s'opposent à la demande au titre du préjudice matériel qui n'est pas justifiée.

Ils sollicitent enfin une somme de 800 ä en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

MOTIFS

Attendu que Madame X..., ayant fait une chute alors qu'elle se trouvait dans le magasin de la Société LODEN CLUB, a fait assigner cette dernière et son assureur, la Compagnie AXA, ainsi que la MSA en réparation de son préjudice ; qu'elle fonde sa demande tout à la fois sur la garde du sol qui relève du commerçant, lequel n'a pas pris les mesures de sécurité nécessaire au regard du caractère dangereux de l'escalier où s'est produit l'accident, et sur l'obligation de sécurité qui incombe au commerçant à l'égard des personnes qui accèdent à son magasin, client ou non ;

Que la MSA soutient pour sa part que la Société LODEN CLUB a commis une faute, tout au moins un manquement à son obligation de sécurité en laissant sa clientèle utiliser un escalier acrobatique ;

Attendu que le commerçant n'est pas tenu à l'égard des personnes se trouvant dans son magasin d'une obligation contractuelle de sécurité ;

Qu'il résulte de la présomption de responsabilité de l'article 1384 alinéa 1 du Code Civil qu'une chose inerte, un escalier en l'espèce, peut être l'instrument d'un dommage si la preuve est rapportée qu'elle a occupé une position anormale ou se trouvait en mauvais état

;

Que l'administration de cette preuve appartient à la victime qui doit établir que la chose a été, en quelque manière, l'instrument du dommage ;

Attendu qu'il est constant que Madame X... est entrée dans l'arrière-boutique du magasin pour utiliser les toilettes avec l'accord du personnel ;

Attendu que Madame X... soutient au vu des photographies produites par la Société LODEN CLUB que les marches permettant d'accéder à l'arrière-boutique forment une forte déclivité, que l'escalier est pentu et donc dangereux et que l'absence de toute rampe ou main-courante oblige à s'assurer en prenant appui sur une étagère à proximité sans lien avec l'escalier, ce qui constitue une utilisation anormale de ce dernier ; qu'enfin, Madame X... précise que seuls les plafonniers du magasin avant et après l'escalier assurent l'éclairage de celui-ci qui se trouve ainsi dans la partie la plus sombre du magasin ;

Attendu qu'il ressort de l'examen des photographies que quelque soit le sens de marche, aller ou retour, vue du magasin ou de l'arrière boutique, l'escalier est parfaitement visible, que l'éclairage est constant d'une pièce à l'autre, assuré par une rampe continue de lampes électriques ;

Qu'en outre la largeur de l'escalier est suffisamment faible pour permettre à une personne de pouvoir assurer son passage en prenant appui soit sur une étagère dont la solidité apparente ne peut être suspectée soit directement sur le mur ;

Qu'enfin, la Société LODEN CLUB a produit les cotes de l'escalier dont il résulte que la hauteur de chaque marche est de 15 cm et leur profondeur de 31 cm ; qu'ainsi la forte déclivité avancée par Madame X... n'est que de 45 cm ;

Attendu qu'il convient d'ajouter que le sol est recouvert d'une moquette dont il n'est ni allégué ni soutenu qu'elle aurait présenté des défauts tels que trous ou déchirures susceptibles d'entraver une progression normale et que la chute de Madame X... s'est produite alors qu'elle revenait des toilettes soit après avoir déjà franchi une première fois l'escalier ;

Attendu que c'est donc à juste titre que le Premier Juge a retenu que Madame X... n'établissait pas que l'escalier avait eu un rôle actif dans la réalisation de l'accident et qu'ainsi la responsabilité de son gardien n'était pas engagée ;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer la décision déférée ;

Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable que Madame X... participe à hauteur de 800 ä aux frais irrépétibles que la Société LODEN CLUB et la Compagnie AXA ont été contraints d'engager ;

Attendu que Madame X... qui succombe supporte les dépens ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Madame X... à verser à la Société LODEN CLUB et à la Compagnie AXA la somme de 800 ä en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Condamne Madame X... aux dépens d'appel et autorise Maître MOREL, Avoué, à les recouvrer aux formes et conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2001/02877
Date de la décision : 29/01/2003

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Chose dont on a la garde - Fait de la chose

1° Le commerçant n'est pas tenu à l'égard des personnes se trouvant dans son magasin d'une obligation contractuelle de sécurité. 2° Il résulte de la présomption de responsabilité de l'article 1384, alinéa premier, du Code civil qu'une chose inerte, un escalier en l'espèce, peut être l'instrument d'un dommage si la preuve, dont l'administration appartient à la victime, est rapportée qu'elle a occupé une position anormale ou se trouvait en mauvais état.


Références :

article 1384 alinéa 1er du code civil

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2003-01-29;2001.02877 ?
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