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28/11/2002 | FRANCE | N°2001/03310

France | France, Cour d'appel de Lyon, 28 novembre 2002, 2001/03310


COUR D'APPEL DE LYON FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES Par acte du 12 mai 1992, reçu par maître Pierre LEUFFLEN et maître Michel RAYMOND (ciaprès les notaires), la société civile immobilière Les Jonquilles (la SCI) a vendu aux époux X... un terrain à bâtir inscrit au cadastre de la commune de Sainte-Foy-lès Lyon sous le numéro 125 de la section AK, issu de la division de la parcelle cadastrale AK 42 dont le surplus, numéroté AK 124, restait la propriété de la SCI ; La parcelle AK 125 était grevée d'une servitude de passage au bénéfice de la parcelle AK 124 mais

les parties sont convenues de constituer une servitude de passage au ...

COUR D'APPEL DE LYON FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES Par acte du 12 mai 1992, reçu par maître Pierre LEUFFLEN et maître Michel RAYMOND (ciaprès les notaires), la société civile immobilière Les Jonquilles (la SCI) a vendu aux époux X... un terrain à bâtir inscrit au cadastre de la commune de Sainte-Foy-lès Lyon sous le numéro 125 de la section AK, issu de la division de la parcelle cadastrale AK 42 dont le surplus, numéroté AK 124, restait la propriété de la SCI ; La parcelle AK 125 était grevée d'une servitude de passage au bénéfice de la parcelle AK 124 mais les parties sont convenues de constituer une servitude de passage au profit de la parcelle AK 125 sur la parcelle AK 124, cette constitution de servitude faisant l'objet d'une clause de l'acte du 12 mai 1992 rédigée dans les termes suivants (sic): "La SCI les Jonquilles concède à la parcelle AK 125 une servitude sur la partie Est de la parcelle AK 124 pour leur permettre de modifier à leur frais l'accès route. L'entretien serait supporté pour 1 /5 pour AK 125 et 4/5 pour AK 124. Cette servitude d'exercera sur la partie de la parcelle AK 124 hachurée sur le plan ci-annexé. Dans ce cas la servitude de passage de AK 124 sur AK 125 serait supprimé sans indemnité de part ni d'autre. Cette constitution de servitude est consentie moyennant une indemnité de 237.200 F°'. Monsieur X... étant décédé, sa veuve et ses enfants, Emmanuelle X... épouse X... et Julien X..., (les consorts X...) ont assigné les notaires pour les faire déclarer responsables du préjudice qu'ils disaient avoir subi et les faire condamner à leur payer le prix de la constitution de servitude (237.200 F) et des dommages-intérêts (150.000 F) pour trouble de jouissance, outre une indemnité en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; ils leur reprochaient d'avoir commis une faute en prévoyant la constitution d'une servitude juridiquement impossible. Par jugement du 18 avril 2001 le tribunal de grande instance de Lyon a débouté les demandeurs

de leurs prétentions et les a condamnés à payer aux notaires une indemnité en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Appelants de cette décision, les consorts X... reprennent expressément devant la cour leurs demandes initiales. Ils exposent que la constitution de servitude était un élément déterminant de la vente ; qu'ils ont sollicité l'autorisation de la réaliser matériellement mais qu'il résulte d'un courrier de la Direction départementale de l'équipement qu'il est impossible de créer la servitude convenue ; que c'était déjà le cas le 12 mai 1992, ce que les notaires ont omis de relater. Les notaires, qui concluent à la confirmation du jugement et sollicitent l'allocation d'une indemnité complémentaire en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, contestent qu'en 1992 il était impossible de créer la servitude convenue par les parties. Ils font valoir que les consorts X... s'abstiennent d'agir contre la SCI, propriétaire du fonds servant, alors que c'est elle qui serait débitrice de l'obligation de rembourser le prix perçu en contrepartie de la constitution de servitude si cette dernière était irréalisable ; que les notaires ne peuvent être tenus de rembourser un prix qu'ils n'ont pas perçu ; que la situation actuelle n'est pas préjudiciable aux consorts X... Le Y... public, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas formulé d'observation. MOTIFS DE LA DÉCISION Attendu que les notaires, qui ont l'obligation d'assurer l'efficacité des actes qu'ils reçoivent, doivent vérifier que rien n'interdit l'exécution des obligations souscrites par les parties et stipulées dans ces actes ; Attendu qu'il est mentionné dans l'acte du 12 mai 1992 que l'autorité compétente a délivré le 1 er octobre 1991 un certificat d'urbanisme dont le texte a été retranscrit et en particulier le paragraphe suivant "Le terrain est concerné par une servitude de protection instituée par le P.O.S. dite servitude de

boisement. Toute demande d'autorisation d'utilisation du sol devra être accompagnée d'éléments ou de pièces techniques permettant d'évaluer l'insertion du projet dans l'espace vert existant"; Attendu que les notaires reconnaissent qu'il ressort d'un courrier du 21 septembre 1991 de la Direction départementale de l'équipement que selon le P.O.S. révisé le 26 février 2001 le terrain est situé en zone Urp et se trouve concerné par une servitude espaces verts végétalisés à préserver' et que cette nouvelle classification exclut tout travaux susceptibles de porter atteinte au boisement actuel et rendrait a priori impossibles les terrassements nécessaires à la réalisation de l'accès prévu par la convention de constitution de servitude de 1992 ; Attendu qu'en cause d'appel les consorts X... rapportent la preuve que la réalisation de cette servitude était déjà impossible lorsqu'elle a été convenue, le 12 mai 1992 ; Qu'en effet ils ont communiqué deux courriers des 27 novembre 2001 et ler mars 2002 du directeur de l'Organisation territoriale de la Communauté urbaine de Lyon où il est écrit "Le plan d'occupation des sols applicable le 12 mai 1992 classe ce terrain en espace boisé classé. En conséquence, tout nouvel accès ne pouvait être autorisé au regard de l'article L.130-1 du code de l'urbanisme", Que les notaires prétendent que, malgré la servitude de boisement, avait été accordée en 1992 aux consorts X... l'autorisation de créer le nouvel accès prévu selon la convention de constitution de servitude mais qu'ils n'en apportent aucune preuve ; Attendu qu'il en résulte que maîtres LEUFFLEN et RAYMOND, qui savaient que le terrain supportait une servitude de boisement et devaient en connaître les conséquences, ont commis une faute en recevant un acte stipulant la constitution d'une servitude de passage qui était irréalisable, avec payement immédiat du prix convenu pour cette constitution de servitude ; Attendu que les consorts X... ne demandent pas aux notaires de leur rembourser le

prix convenu pour la constitution de servitude mais de réparer le préjudice que leur faute leur a causé et qui consiste dans le versement, sans contrepartie effective, de la somme de 237.200 francs pour prix de la servitude ; Attendu que cette action n'a pas de caractère subsidiaire et que les consorts X... n'étaient pas tenus d'agir d'abord à l'encontre de la SCI ; Attendu qu'il n'est pas sérieux de contester le préjudice causé aux consorts par l'impossibilité de créer le nouvel accès puisque cela les contraint de continuer à supporter la servitude passive qui grève leur fonds au profit de la parcelle AK 125 et leur interdit d'user du droit de passage convenu sur ladite parcelle ; Que ce préjudice est réel bien qu'il fût convenu que les consorts X... devaient supporter le coût de la réalisation du nouvel accès ; Qu'il importe peu que les consorts X... aient attendu six ans avant de demander l'autorisation de créer le nouvel accès selon la servitude convenue puisque cette création était impossible dès le 12 mai 1992 ; Attendu que l'importance du préjudice est équivalente au prix versé en contrepartie de la constitution de la servitude irréalisable ; Que les notaires doivent donc être condamnés à payer la contrepartie en euros de la somme de 237.200 francs, soit 36.160,91 euros qui constitue la juste et intégrale réparation du préjudice subi par les consorts X... ; Attendu qu'il y a lieu d'allouer aux consorts X... une indemnité pour leurs frais non compris dans les dépens et exposés à l'occasion de cette procédure ; PAR CES MOTIFS, LA COUR, Infirme le jugement, Et statuant à nouveau, Condamne maître Pierre LEUFFLEN et maître Michel RAYMOND à payer à Michèle X... veuve X..., à Emmanuelle X... épouse Z... et à Julien X..., ensemble, les sommes de - trente-six mille cent soixante euros quatre-vingt-onze centimes (36.160,91 ä) à titre de dommagesintérêts, - mille cinq cents euros (1.500 ä) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, Les condamne aux dépens de première

instance et d'appel et autorise l'avoué de leur adversaire à recouvrer directement contre eux les sommes dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2001/03310
Date de la décision : 28/11/2002

Analyses

OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Notaire - Responsabilité - Obligation de vérifier - Définition - Recherche de l'efficacité de l'acte - /

Le notaire a l'obligation d'assurer l'efficacité des actes qu'il reçoit et doit notamment vérifier que rien n'interdit l'exécution des obligations souscrites par les parties et stipulées dans ces actes.Viole cette obligation et est donc fautif le notaire qui savait que le terrain supportait une servitude de boisement et reçoit un acte stipulant la constitution d'une servitude de passage qui était irréalisable, avec paiement immédiat du prix convenu pour cette constitution de servitude


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2002-11-28;2001.03310 ?
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