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14/11/2002 | FRANCE | N°2001/03380

France | France, Cour d'appel de Lyon, 14 novembre 2002, 2001/03380


R.G : 01/03380 décision du Tribunal de Grande Instance de LYON au fond du 18 avril 2001 RG N°199902991 X... C/ SOCIETE CABINET JACQUES Y... COUR D'APPEL DE LYON PREMIERE CHAMBRE CIVILE ARRET DU 14 NOVEMBRE 2002 APPELANT :

Monsieur X... représenté par Me LIGIER DE MAUROY, avoué à la Cour assisté de Me GRANGE, avocat au barreau de LYON INTIMEE : CABINET Jacques Y... 62 Rue de Bonnel 69003 LYON représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour assistée de Me CALLOUD, avocat au barreau de LYON

Instruction clôturée le 13 Mai 2002

Audience de plaidoiries du

09 Octobre 2002 COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : - mon...

R.G : 01/03380 décision du Tribunal de Grande Instance de LYON au fond du 18 avril 2001 RG N°199902991 X... C/ SOCIETE CABINET JACQUES Y... COUR D'APPEL DE LYON PREMIERE CHAMBRE CIVILE ARRET DU 14 NOVEMBRE 2002 APPELANT :

Monsieur X... représenté par Me LIGIER DE MAUROY, avoué à la Cour assisté de Me GRANGE, avocat au barreau de LYON INTIMEE : CABINET Jacques Y... 62 Rue de Bonnel 69003 LYON représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour assistée de Me CALLOUD, avocat au barreau de LYON

Instruction clôturée le 13 Mai 2002

Audience de plaidoiries du 09 Octobre 2002 COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : - monsieur LORIFERNE, président, - monsieur ROUX, conseiller, - monsieur GOURD, conseiller, assistés pendant les débats de madame KROLAK, greffier. ARRET : contradictoire prononcé à l'audience publique par monsieur LORIFERNE, président, en présence de madame KROLAK, greffier, qui ont signé la minute. FAITS ET PROCEDURE

Aux termes d'un acte du 23 juillet 1995 intitulé "Traité d'apport",

Monsieur X..., Madame Z... et Madame A... ont apporté à la SOCIETE FINANCIERE DE DEVELLOPEMENT INDUSTRIEL P.I.T. les actions qu'ils possédaient dans le capital de la Société PLASTIQUES ET ISOLANTS TECHNIQUES (P.I.T.) et ont reçu en contrepartie des actions de la société bénéficiaire.

Il était stipulé à l'acte que les trois intéressés déclaraient opter pour le régime du report d'imposition des plus-values d'apport prévu à l'article 160-1 ter 4 et 92 B II du Code général des impôts.

Faute d'avoir souscrit en temps utile une déclaration fiscale demandant expressément le report, Monsieur X..., détenteur de plus de 25 % du capital social, a dû acquitter une imposition sur la plus-value résultant de la cession de ses droits sociaux.

Reprochant à la Société Cabinet Jacques Y..., société d'avocats qui avait établi le traité d'apport, de l'avoir inexactement informé et d'avoir manqué à son obligation de conseil, Monsieur X... a engagé contre elle une action en responsabilité civile professionnelle.

Par jugement du 18 avril 2001, le Tribunal de Grande Instance de LYON l'a débouté de ses demandes.

Monsieur X... a relevé appel et demande à la Cour de réformer le jugement déféré.

Estimant que la responsabilité civile du Cabinet Jacques Y... est engagée tant à raison de l'information erronée qui a été donnée que du manquement à l'obligation de conseil, il réclame 1.400.000 francs de dommages et intérêts et 15.000 francs au titre de l'article700 du

Nouveau Code de procédure civile.

Il soutient avoir interrogé Maître Y... en décembre 1995 sur la nature et l'étendue de ses obligations déclaratives et avoir obtenu une réforme affirmant qui' n'y avait lieu à déclaration, la mention de l'acte étant suffisante.

Il lui reproche de ne pas l'avoir informé de l'obligation de souscrire une déclaration.

Le Cabinet Jacques Y... conclut à la confirmation du jugement et au rejet des demandes de Monsieur X..., sollicitant en outre 2.286,74 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Il expose avoir rédigé un acte valide et efficace, et n'avoir commis aucune faute n'étant pas chargé des déclarations fiscales incombant aux sociétés et à leurs dirigeants.

Il soutient que les attestations établies par Mesdames Z... et A... faisant état d'une conversation téléphonique avec Maître Y... sont dépourvues de force probante.

Il estime qu'aucun manquement à l'obligation de conseil n'est établi et conteste le préjudice allégué. MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'il est constant que Monsieur X... s'est adressé au Cabinet Jacques Y... pour l'assister dans diverses opérations d'acquisition d'actions, de constitution de société et d'apport d'actions à cette Société ;

Que le Cabinet Jacques Y... était ainsi le conseil de Monsieur X... et que les compétences personnelles éventuelles de Monsieur X... dans le domaine des affaires ni dispensaient par l'avocat rédacteur d'acte de son devoir de conseil à son égard ;

Attendu que si le traité d'apport précise que les apporteurs ont opté pour le régime du report d'imposition, il est muet sur la nécessité pour Monsieur X..., détenteur de plus de 25 % du capital social, d'effectuer une déclaration de plus-value avec demande de report dans le cadre de la déclaration de revenus ;

Attendu qu'il n'est pas établi par l'avocat que celui-ci ait attiré l'attention de son client Monsieur X... sur la nécessité de procéder à une telle déclaration indispensable pour faire valoir son droit au report d'imposition, comme il en avait l'obligation au titre de son devoir de conseil ;

Que selon les attestations établies par Mesdames Z... et A..., il aurait au contraire indiqué téléphoniquement puis lors d'une réunion dans son Cabinet (attestation A...) qu'aucune déclaration fiscale n'était requise ;

Que même si ces attestations doivent être prises avec circonspection dans la mesure où elles émanent des associés de Monsieur X..., il n'en demeure pas moins démontré que le Cabinet Jacques Y... n'a pas prodigué à son client les conseils qui s'imposaient pour que le report d'imposition puisse être effectif, et que Monsieur X... a ainsi pu comprendre de bonne foi qu'il n'avait aucune déclaration à établir ;

Or attendu que le redressement fiscal notifié par l'Administration repose sur le fait qu'aucune demande de report d'imposition n'a été effectuée dans les délais légaux et que les stipulations du traité d'apport ne peuvent constituer une demande expresse en ce sens ;

Que le Cabinet Jacques Y... serait malvenu de remettre en cause le principe rappelé par l'Administration Fiscale alors que dans un courrier du 9 juillet 1998 à Monsieur X... il précisait "en droit strict, la position de l'Administration n'apparaît pas contestable". Attendu que le manquement au devoir de conseil est ainsi directement à l'origine du préjudice subi par Monsieur X... du fait du redressement et que la responsabilité du Cabinet Jacques Y... se trouve engagée ; Attendu que le préjudice ne consiste pas dans le fait de payer l'imposition dont l'intéressé ne pouvait être exonéré, étant précisé que Monsieur X... a obtenu remise intégrale des pénalités de retard, mais dans le fait de ne pas avoir bénéficié du report possible et d'avoir été dans l'obligation de trouver des fonds pour faire face plus tôt aux obligations fiscales;

Que ce préjudice est partiellement compensé par l'augmentation ultérieure du taux d'imposition des plus-values dès lors que l'imposition aurait été plus élevée quelques années plus tard ;

Que dans ces conditions, la Cour possède les éléments pour fixer à 10.000 euros le montant des dommages et intérêts que le Cabinet Y... devra régler à Monsieur X...;

Qu'en outre il sera alloué à l'appelant une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Déclare l'appel recevable,

Réforme le jugement déféré et statuant à nouveau,

Condamne la Société Cabinet Jacques Y... à payer à Monsieur X... la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,

Condamne le Cabinet Jacques Y... aux dépens de première instance et d'appel, avec distraction des dépens d'appel de Maître LIGIER de MAUROY, avoué. LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2001/03380
Date de la décision : 14/11/2002

Analyses

AVOCAT - Responsabilité - Obligation de conseil - Etendue

L'avocat qui, chargé d'assister son client dans diverses opérations d'acquisition d'actions, de constitution de société et d'apport d'actions à cette société, n'attire pas l'attention de son client sur la nécessité de procéder à une déclaration de plus-value avec demande de report dans le cadre de la déclaration de revenus pour bénéficier du régime du report d'imposition, commet un manquement à son devoir de conseil dont il n'est pas dispensé par les compétences personnelles éventuelles de son client dans le domaine des affaires


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2002-11-14;2001.03380 ?
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