FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES Suivant contrat de travail en date du 2 janvier 1991, Monsieur X... Michel Y... a été engagé par la société GECI en qualité de responsable technique produit. Ce contrat stipulait à la charge de Monsieur X... une clause de non-concurrence d'une durée d'une année à compter de sa résiliation, moyennant, en contrepartie, une indemnité mensuelle. Monsieur X... a présenté sa démission le 6 septembre 1996. Par lettre du 12 septembre 1996, la société GECI a accusé réception de sa démission, l'a dispensé d'effectuer son préavis de deux mois mais lui a rappelé le maintien de la clause de non-concurrence jusqu'au 5 novembre 1997. Monsieur X... a été embauché ensuite par la société VENAIR FRANCE . Estimant qu'il n'avait pas respecté la clause de non-concurrence, la société GECI a agi contre lui, le 22 février 1999, devant le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins d'obtenir sa condamnation à lui rembourser les sommes perçues par lui en contrepartie de ladite clause et à lui payer des dommages-intérêts correspondant aux charges patronales. Par jugement du 18 janvier 2000, le Conseil de prud'hommes a constaté que Monsieur X... a violé la clause de non-concurrence, l'a condamné à rembourser à la société GECI la somme de 13.850,01 euros représentant la totalité des indemnités versées pour l'exécution de cette clause mais a rejeté la demande de dommages-intérêts. Monsieur X... a interjeté appel de ce jugement et l'instance d'appel est toujours pendante devant la chambre sociale de cette cour. Entre-temps, et par acte du 10 décembre 1999, la société GECI a fait assigner Monsieur X... et son nouvel employeur, la société VENAIR FRANCE, devant le tribunal de commerce de Lyon, demandant leur condamnation in solidum à lui payer en application de l'article 1382 du code civil la somme de 2.605.000 F à titre de dommages-intérêts . Par jugement du 13 avril 2001, le tribunal de commerce de Lyon a :
dit que l'exception d'incompétence
soulevée par Monsieur X... et celle de sursis à statuer soulevée par Monsieur X... et la société VENAIR FRANCE irrecevables, constaté que la société VENAIR FRANCE et Monsieur X... ont commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société GECI, dit que le préjudice subi par la société GECI, en conséquence de ces actes, s'élève à la somme de 50.000 F, condamné in solidum la société VENAIR FRANCE et Monsieur X... à payer à la société GECI la somme de 50.000 F à titre de dommages-intérêts et celle de 12.000 F en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejeté toutes autres demandes, condamné Monsieur X... et la société VENAIR FRANCE aux dépens. Monsieur X... et la société VENAIR FRANCE ont interjeté appel de ce jugement séparément. Les deux instances d'appel ont été jointes par le conseiller de la mise en état. Par conclusions du 4 septembre 2001, Monsieur X... demande à la cour de réformer le jugement entrepris, de dire que le tribunal de commerce de Lyon était incompétent pour connaître des réclamations de la société GECI à son encontre, de débouter celle-ci de toutes ses demandes et de la condamner aux dépens. La société VENAIR FRANCE demande à la cour, par conclusions du 13 septembre 2001: In limine litis : de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt qui sera rendu par la chambre sociale de la cour d'appel de Lyon ensuite de l'appel du jugement rendu le 18 janvier 2000 par le conseil de prud'hommes de Lyon, Sur le fond : de réformer le jugement déféré, de débouter la société GECI de toutes ses demandes et de la condamner aux dépens et à lui payer la somme de 40.000 F en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Par conclusions du 14 janvier 2002, la société GECI demande à la cour de : confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit irrecevables les exceptions soulevées et en ce qu'il a constaté que la société VENAIR FRANCE et Monsieur X... ont commis des actes de concurrence déloyale à son encontre, le réformer pour le
surplus, condamner la société VENAIR FRANCE et Monsieur X... in solidum à lui payer la somme de 397.129,69 euros en réparation de son préjudice, les condamner aux dépens et à lui payer 3.048,98 euros en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, à leurs dernières conclusions respectives susvisées.
MOTIFS DE LA DECISION Sur la recevabilité des exceptions Attendu que la procédure devant le tribunal de commerce étant orale en vertu de l'article 871 du nouveau code de procédure civile, les conclusions sur le fond parvenues ou remises au tribunal avant l'audience ne privent pas leur auteur de soulever à l'audience une exception de procédure, à la condition, toutefois, qu'elle le soit avant toute défense au fond, conformément aux dispositions de l'article 74 du nouveau code de procédure civile ; que l'ordre de présentation des moyens prévu par l'article 74 doit être apprécié à l'audience des plaidoiries, et non à une audience préparatoire, appelée communément " audience de mise en état ", tenue généralement par le juge rapporteur ; Attendu qu'en l'espèce, les premiers juges ont déclaré irrecevables les exceptions de procédure soulevées à l'audience par Monsieur X... et par la société VENAIR FRANCE au seul motif que ces exceptions n'avaient pas été invoquées dans les conclusions respectives comportant des moyens de défense au fond, déposées six mois auparavant " à l'audience de la mise en état " ; Attendu qu'en statuant ainsi alors que les exceptions en question ont été soulevées, selon les affirmations non démenties des appelants, à l'audience des plaidoiries, avant toute défense au fond, les premiers juges ont méconnu les dispositions combinées des articles 871 et 74 du nouveau code de procédure civile ; qu'en conséquence, le jugement déféré sera réformé en ce qu'il a déclaré les exceptions de procédure irrecevables ; Sur l'exception d'incompétence invoquée par Monsieur
X... Attendu que la société GECI reproche à Monsieur X..., d'une part, la violation de son engagement contractuel de non-concurrence et, d'autre part, des actes de concurrence déloyale commis après sa démission (page 16 de ses conclusions ); Attendu que la violation de la clause contractuelle de non-concurrence ressortait de la compétence exclusive du conseil de prud'hommes, cette clause étant stipulée dans le contrat de travail, alors que les actes de concurrence déloyale relevaient de la compétence du tribunal de commerce ; Attendu, cela étant, que cette cour étant juridiction d'appel relativement au Conseil de prud'hommes de Lyon et au tribunal de commerce de Lyon, elle évoquera le fond en application de l'article 89 du nouveau code de procédure civile ; Sur le sursis à statuer Attendu que dans le cadre de la présente instance , la société GECI soutient (page 16 de ses dernières conclusions) que " Monsieur X... et la société VENAIR FRANCE ont commis des actes de concurrence déloyale constitués de : la violation par Monsieur X... de l'engagement de non-concurrence auquel il était tenu, la commercialisation de produits concurrents par Monsieur X... et VENAIR FRANCE entre le 7 novembre 1996 et le 7 novembre 1997, le démarchage systématique de (sa) clientèle, (son) dénigrement par Monsieur X..., les actes de parasitisme commis par Monsieur X... et la société VENAIR FRANCE " ; Qu'elle fait également grief à la société VENAIR FRANCE d'avoir embauché Monsieur X... alors qu'il était encore tenu par son engagement de non-concurrence (page 9 de ses dernières conclusions) ; Attendu que les griefs de démarchage déloyal, de dénigrement et de parasitisme ne font pas l'objet de l'instance d'appel pendante devant la chambre sociale de cette cour, suite à l'appel interjeté par Monsieur X... contre le jugement précité du Conseil de prud'hommes de Lyon en date du 18 janvier 2000 qui a jugé qu'il avait violé la clause de non-concurrence ; Attendu que, par
contre, le grief tiré de " la violation par Monsieur X... de l'engagement de non-concurrence auquel il était tenu " est celui-là même qui est soumis à la chambre sociale ; que les griefs fondés sur " la commercialisation de produits concurrents par Monsieur X... et VENAIR FRANCE entre le 7 novembre 1996 et le 7 novembre 1997 " et sur l'embauche de Monsieur X... ne pourraient être appréciés et retenus que s'il était jugé que Monsieur X... a bien violé la clause de non-concurrence ; qu'en outre, l'étendue du préjudice allégué par la société GECI dépend partiellement du bien-fondé ou non de ces griefs ; que dès lors, et pour éviter le risque de contrariétés de décisions sur ces points, il sera sursis à statuer sur l'ensemble des demandes jusqu'à l'arrêt à intervenir de la chambre sociale, ce que les premiers juges auraient dû faire, même d'office ; Attendu que les dépens seront réservés ;
PAR CES MOTIFS La cour, Statuant publiquement et contradictoirement, Réforme le jugement déféré en ce qu'il a dit irrecevables les exceptions de procédure soulevées par Monsieur X... et la société VENAIR FRANCE ; Statuant à nouveau de ce chef et évoquant, Dit lesdites exceptions recevables ; Sursoit à statuer sur l'ensemble des autres demandes jusqu'à l'arrêt qui sera rendu par la chambre sociale de cette Cour ensuite de l'appel interjeté par Monsieur X... contre le jugement précité du Conseil de prud'hommes de Lyon en date du 18 janvier 2000 ; Réserve les dépens. LE GREFFIER
LE PRESIDENT