La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/09/2002 | FRANCE | N°2001/00532

France | France, Cour d'appel de Lyon, 19 septembre 2002, 2001/00532


COUR D'APPEL DE LYON

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2002

Décision déférée : Décision du Tribunal de Commerce LYON du 19 décembre 2000 - au fond (R.G. : 1999/04753) N° R.G. Cour : 01/00532

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix APPELANT :

Monsieur X... Jean Y..., exerçant sous l'enseigne "MELODY SERVICES EXPRESS" 17 rue du Rideau Magdeleine 60130 ARGENLIEU représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour assisté de Me MASSOT PELLET, avocat au barreau

de LYON

INTIMÉE : SOCIÉTÉ COMAREG, SA 23 Avenue Georges Pompidou 69003 LYON représen...

COUR D'APPEL DE LYON

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2002

Décision déférée : Décision du Tribunal de Commerce LYON du 19 décembre 2000 - au fond (R.G. : 1999/04753) N° R.G. Cour : 01/00532

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix APPELANT :

Monsieur X... Jean Y..., exerçant sous l'enseigne "MELODY SERVICES EXPRESS" 17 rue du Rideau Magdeleine 60130 ARGENLIEU représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour assisté de Me MASSOT PELLET, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE : SOCIÉTÉ COMAREG, SA 23 Avenue Georges Pompidou 69003 LYON représentée par Me BARRIQUAND, avoué à la Cour assistée de Me DELSART-TESTON, avocat au barreau de LYON Instruction clôturée le 26 Février 2002 Audience de plaidoiries du 21 Mars 2002 COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Monsieur MOUSSA, Président, Monsieur SIMON, Conseiller, Monsieur SANTELLI, Conseiller, GREFFIER :

Monsieur Z..., lors des débats seulement, ARRÊT : CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 19 SEPTEMBRE 2002 par Monsieur MOUSSA , Président, qui a signé la minute avec Mademoiselle A...,

Greffier, présent lors du prononcé.

EXPOSE DU LITIGE - PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par jugement du 19 décembre 2000 le Tribunal de Commerce de LYON a :

- constaté et dit que la société COMAREG n'avait commis aucun abus en notifiant la rupture de ses relations commerciales avec Monsieur Jean-Claude X...,

- débouté Monsieur Jean-Claude X... de toutes ses demandes, l'a condamné à payer à la société COMAREG la somme de 5.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et a rejeté toutes les autres demandes.

Par déclaration du 24 janvier 2001, Monsieur Jean-Claude X... a relevé appel de cette décision dans les forme et délai légaux.

Vu l'article 455 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civile dans sa rédaction issue du décret du 28 décembre 1998.

Vu les prétentions et les moyens développés par Monsieur Jean-Claude X... dans ses conclusions en date du 23 mai 2001 tendant à faire juger que la société COMAREG avait commis une faute en rompant brutalement ses relations commerciales avec lui, alors qu'elle le chargeait à intervalle régulier d'effectuer des opérations de transport pour son compte et sans qu'elle ait donné de motif légitime à la réalisation de ce contrat à durée indéterminée ;

- que la société COMAREG est donc redevable à son égard d'une indemnité de 190.000 francs en réparation de son préjudice résultant de cette rupture et bien que s'étant échelonnée dans le temps n'en a pas moins été subite, alors qu'il réalisait avec la société COMAREG un important chiffre d'affaires ;

- que la société COMAREG doit être déboutée de toutes ses demandes.

X X X

Vu les prétentions et les moyens développés par la société COMAREG dans ses conclusions en date du 18 septembre 2001 tendant à faire juger tout au contraire qu'elle n'a commis aucune faute en rompant ses relations contractuelles avec Monsieur Jean-Claude X..., cette rupture étant motivée par une réorganisation de ses services de presse ;

- que les relations commerciales étaient de toute façon précaires,

- qu'il n'y avait pas de dépendance économique dont pourrait se prévaloir Monsieur Jean-Claude X... qui ne réalisait qu'un chiffre d'affaires limité avec elle,

- qu'il n 'y a pas d'abus dans les conditions de la rupture et qu'en conséquence Monsieur Jean-Claude X... doit être débouté de toutes ses demandes n'ayant subi aucun préjudice indemnisable.

X X X

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 février 2002.

MOTIFS ET DÉCISION :

Attendu que Monsieur Jean-Claude X... reproche à la société COMAREG d'avoir abusivement rompu les relations commerciales qui existaient entre elles depuis qu'en octobre 1993 elle lui avait confié à intervalles réguliers le transport de maquettes de journaux,

mais sans cependant établir de contrat à ces occasions ;

Attendu que dans le courrier qu'elle adressait le 27 novembre 1995 à Monsieur Jean-Claude X..., la société COMAREG, qui prenait acte de la réception de la proposition des nouveaux tarifs de transport pour l'année 1996 que Monsieur Jean-Claude X... venait de lui faire parvenir, ne donnait toutefois aucune justification au souhait qu'elle exprimait de cesser toute activité commerciale avec lui à effet du 1er janvier 1996 ;

Attendu que l'argument de la société COMAREG consistant à prétendre que les prix pratiqués, qui étaient selon elle supérieurs de 35 % à ceux qui lui étaient par ailleurs proposés, n'a pourtant jamais été évoqué dans aucune des correspondances que la société COMAREG adressait à Monsieur Jean-Claude X... ;

Attendu que la société COMAREG renouvelait dans un courrier du 21 janvier 1997 à Monsieur Jean-Claude X... d'interrompre ses relations avec lui dès le 20 janvier 1997, sans exprimer aucun motif à cette décision ;

Attendu qu'il n'est cependant pas contesté que les relations se sont malgré tout poursuivies au cours de l'année 1996, mais qu'elles ont toutefois été réduites de 60 % par rapport à ce qu'elles étaient au cours de l'année précédente, de sorte qu'il peut être déduit de cette diminution de volume d'affaires confiée à Monsieur Jean-Claude X... qu'une rupture partielle des relations commerciales est intervenue, lesquelles ayant continué de baisser en quantité en 1997 et en 1998 ont finalement cessé le 26 septembre 1998 consécutivement à un courrier qu'elle lui adressait le 28 août 1998 lui notifiant cette décision ;

Attendu que ce dernier courrier adressé par la société COMAREG à Monsieur Jean-Claude X... se contentait de faire état d'une

réorganisation des circuits de transport au sein de la société, sans faire aucune référence aux tarifs appliqués par le transporteur ;

Attendu que s'il est loisible à toute partie à un contrat à durée indéterminée d'y mettre un terme quand bon lui semble, elle ne peut cependant le faire qu'à la condition de respecter un préavis suffisant pour permettre à son co-contractant de prendre les dispositions nécessaires pour pallier les difficultés consécutives à la rupture ;

Attendu qu'en effet, engage sa responsabilité tout commerçant du fait qu'il rompt brutalement, même si la rupture n'est que partielle, une relation commerciale établie, sans qu'il soit donné un préavis écrit avant qu'elle n'intervienne et l'oblige, en conséquence, à réparer le préjudice qui en résulte pour celui avec lequel il entretenait ces relations, en tenant compte pour le fixer de leur ancienneté et des usages reconnus dans la profession ;

Attendu que Monsieur Jean-Claude X... ne peut se prévaloir d'une dépendance économique dans laquelle il se serait trouvé à l'égard de la société COMAREG, alors qu'il ne réalisait en 1995 que 16,99 % de son chiffre d'affaires avec la société COMAREG, ce pourcentage étant insuffisant à caractériser un tel état et la rupture abusive n'étant pas subordonnée à cette circonstance ;

Attendu qu'il résulte des circonstances de la cause que le préavis d'un mois donné par la société COMAREG, a été manifestement trop bref et en tout cas insuffisant pour que Monsieur Jean-Claude X... puisse faire face à cette situation que les relations certes moins fréquentes depuis de nombreux mois entre lui et la société COMAREG ne permettait pas vraiment d'envisager, dès lors que la société COMAREG continuait, malgré tout, d'avoir recours à ses services ;

Attendu que la rupture a été, dans ces conditions, brutale pour Monsieur Jean-Claude X... et que le respect d'un préavis plus important s'imposait ;

Attendu que Monsieur Jean-Claude X... ne peut cependant réclamer une indemnisation calculée sur le chiffre d'affaires qu'il réalisait avec la société COMAREG sur la base d'une période de six mois, puisque le préjudice qui résulte de la cessation des relations commerciales ne peut que se déduire d'une perte de marge commerciale que dégageait son entreprise à raison de cette activité ;

Attendu qu'un préavis correspondant à trois mois de marge est habituellement retenu, dans ce cas d'espèce, sauf à prendre en considération l'ancienneté des relations ayant existé entre les parties et l'état de dépendance économique dans lequel se trouve celle qui est victime de la rupture ;

Attendu que du fait que les relations entre les parties étaient récentes et n'avaient pas un caractère de fréquence rendant la relation dépendante pour Monsieur Jean-Claude X..., la Cour peut raisonnablement apprécier le préjudice de Monsieur Jean-Claude X... à une somme forfaitaire de 4.000 euros, à défaut d'autres éléments comptables susceptibles d'évaluer différemment le préjudice et, en conséquence, fixer l'indemnité qui doit le compenser à cette somme ;

Attendu qu'il y a lieu dans ces conditions de condamner la société

COMAREG à payer la somme de 4.000 euros à Monsieur Jean-Claude X..., majorée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et de réformer, en conséquence, le jugement déféré en ce qu'il a considéré à tort que la société COMAREG n'avait commis aucun abus en rompant ses relations commerciales avec Monsieur Jean-Claude X... et en déboutant ce dernier de toutes ses demandes ;

Attendu que l'équité commande d'allouer à Monsieur Jean-Claude X... une somme de 1.400 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Attendu que la société COMAREG, qui succombe, doit supporter les dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS ET CEUX NON CONTRAIRES DU PREMIER JUGE :

LA COUR,

Réforme le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

Déclare Monsieur Jean-Claude X... partiellement fondé dans sa demande en indemnité de préavis faite à la société COMAREG du fait de la brusque rupture des relations commerciales dont elle est l'auteur, Condamne, en conséquence, la société COMAREG à payer à Monsieur Jean-Claude X... la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ainsi que celle de 1.400 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Condamne la société COMAREG à payer les dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant recouvrés par la SCP BRONDEL etamp; TUDELA, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2001/00532
Date de la décision : 19/09/2002

Analyses

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Résiliation - Résiliation conventionnelle - Résiliation unilatérale

S'il est possible pour toute partie à un contrat à durée indéterminée d'y mettre un terme quand bon lui semble, elle ne peut cependant le faire qu'à la condition de respecter un préavis suffisant pour permettre à son cocontractant de prendre les dispositions nécessaires pour pallier les difficultés consécutives à la rupture. Engage ainsi sa responsabilité tout commerçant dès lors qu'il rompt brutalement, même si la rupture n'est que partielle, une relation commerciale établie, sans qu'il soit donné un préavis écrit avant la rupture


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2002-09-19;2001.00532 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award