La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/06/2002 | FRANCE | N°2000/07355

France | France, Cour d'appel de Lyon, 27 juin 2002, 2000/07355


1 RG : 2000/7355 La première chambre de la cour d'appel de Lyon, composée, lors des débats et du délibéré, de : Monsieur JACQUET, président, Monsieur ROUX, conseiller, Monsieur GOURD, conseiller, en présence, lors des débats en audience publique, de Madame KROLAK, greffier, a rendu l'arrêt contradictoire suivant, EXPOSE DU LITIGE:

Les époux Jean X... et Jocelyne Y..., se sont mariés sous le régime de la communauté légale réduite aux acquêts. Par acte du 3 février 1992, Monsieur Y... a consenti à la société Lyonnaise de banque, sur le compte commun des époux, un nan

tissement sur la somme de 100.000 francs, en garantie de toute dette de lui...

1 RG : 2000/7355 La première chambre de la cour d'appel de Lyon, composée, lors des débats et du délibéré, de : Monsieur JACQUET, président, Monsieur ROUX, conseiller, Monsieur GOURD, conseiller, en présence, lors des débats en audience publique, de Madame KROLAK, greffier, a rendu l'arrêt contradictoire suivant, EXPOSE DU LITIGE:

Les époux Jean X... et Jocelyne Y..., se sont mariés sous le régime de la communauté légale réduite aux acquêts. Par acte du 3 février 1992, Monsieur Y... a consenti à la société Lyonnaise de banque, sur le compte commun des époux, un nantissement sur la somme de 100.000 francs, en garantie de toute dette de lui-même ou de la société Adatec à l'égard de la Banque. Cette somme a été prélevée sur le compte commun des époux et déposée sur deux comptes à terme ouverts auprès de la société lyonnaise de banque au nom des époux Y.... Entre-temps, Monsieur Jean X... Y... a été licencié et la société Adatec a été déclarée en liquidation judiciaire. Par acte en date du 10 septembre 1999, la société Lyonnaise de banque a fait assigner Monsieur Y... afin qu'il soit ordonné que le gage constitué par celui-ci à son profit, lui demeure en paiement jusqu'à concurrence de la créance de la banque à l'égard de la société Adatec. Elle a sollicité, en outre, des dommages et intérêts. Par un jugement en date du 31 octobre 2000, le tribunal de grande instance de Saint Etienne a débouté la société Lyonnaise de banque de ses demandes.

La société Lyonnaise de banque a relevé appel de cette décision.

* Elle conclut à la réformation de ce jugement et au rejet de la demande de nullité du nantissement. Elle sollicite qu'il soit décidé que ledit nantissement lui demeurera en paiement jusqu'à concurrence de sa créance, laquelle est supérieure aux 100.000 francs nantis. Elle réclame, en outre, 1.524 euros 49 à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et 726 euros 25 sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle prétend que, en vertu du principe de l'autorité de la chose jugée, la cour ne peut statuer sur la demande de nullité du nantissement cette prétention ayant déjà été soutenue devant le tribunal de grande instance de Saint Etienne et rejetée par celui-ci le 20 avril 1994. Elle fait valoir que le moyen tiré de la violation de l'article 1415 du Code civil ne peut être invoqué que par l'époux dont le consentement était requis. Elle explique, en outre, que l'article 1415 du code civil est relatif à la protection des biens propres et donc inapplicable en l'espèce puisque le nantissement porte sur un bien appartenant à la communauté matrimoniale en vertu de l'article 1402 du code civil ; que cet article est également inapplicable puisque la sûreté est un gage comportant l'obligation essentielle de donner une chose déterminée et non l'obligation de garantir les dettes d'un tiers. Elle en déduit que l'acte de nantissement est valable, Monsieur Y... ayant le pouvoir de disposer des biens de la communauté en application de l'article 1421 du code civil, que ce gage est donc efficace et qu'il convient de faire droit à sa demande sur le fondement de l'article 2078 du code civil.

[* Intimé, Monsieur Jean X... Y... sollicite de la cour la confirmation du jugement entrepris, outre une somme de 5.000 francs sur le fondement de l'article 700 du NCPC. Il soutient que le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée ne peut être accueilli, faisant valoir que, dans l'instance ayant abouti au jugement du 20 avril 1994, le concluant avait réclamé la nullité du nantissement pour dol au visa des articles 1116 et suivants du code civil et son épouse sur le fondement des articles 1422 et 1427 du code civil concernant les actes de dispositions, alors que la présente instance se fonde sur l'article 1415 du Code civil. Il maintient que l'article 1415 du code civil, applicable au nantissement qui doit être considéré comme un cautionnement réel garantissant la dette d'autrui et exposant la communauté conjugale à un risque d'appauvrissement, est relatif à la protection des biens communs ; qu'en l'espèce, l'acte ayant été établi sans le consentement de son épouse, le nantissement doit être privé de toute efficacité.

*] Madame Y... née Z..., intervient volontairement à l'instance et fait sienne l'argumentation développée par Monsieur Jean X... Y.... MOTIFS DE LA DECISION : Attendu que l'intervention de Madame Y..., qui a repris à son compte les prétentions de son mari, n'est pas contestée ; qu'elle est recevable

;

* que la société Lyonnaise de banque demande de dire que, en application de l'article 2078 du code civil, le gage constitué par Monsieur Jean X... Y... à son profit, lui demeurera en paiement jusqu'à concurrence de sa créance sur la société Adatec ; que Monsieur Jean X... Y... et son épouse, qui se joint à ses demandes, sollicitent que la banque soit déboutée de ses prétentions, le nantissement accordé étant nul comme donné sur des biens communs sans le consentement exprès de l'épouse mariée sous le régime légal de la communauté réduite aux acquêts ; attendu que la banque soutient que le tribunal de grande instance de Saint Etienne a déjà précédemment écartée la demande en nullité dudit nantissement ; que la réitération de cette demande se heurterait à l'autorité de la chose jugée ; mais attendu que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; qu'il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, entre les mêmes parties, en la même qualité ; que, en l'espèce, le jugement en date du 20 avril 1994 du tribunal de grande instance de Saint Etienne, qui a débouté le mari de sa demande de nullité du nantissement, fondée sur l'erreur et le dol, et l'épouse de sa demande en nullité fondée sur les articles 1422 et 1427 du code civil, n'a pas l'autorité de la chose jugée sur la présente instance, dans laquelle l'exception de nullité, soulevée pour non respect de l'article 1415 du code civil, est fondée sur une autre cause ; attendu que, en application de ce texte, chacun des époux ne peut

engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n'aient été contractés avec le consentement exprès de l'autre conjoint ; qu'il ne peut s'induire de la lecture de l'article 1415 du code civil que ce dernier ne concerne que la protection des biens propres ; que chacun des époux ne peut engager les biens de la communauté, par un cautionnement ou un emprunt, sans l'accord de l'autre époux ; attendu que le nantissement est un contrat par lequel un débiteur remet une chose à son créancier pour sûreté de sa dette ; que les dispositions de l'article 1415 du code civil s'appliquent à la caution réelle qu'est le nantissement de titres ou de valeurs ; attendu, en l'espèce, qu'il est constant que Monsieur Jean X... Y..., par acte du 3 février 1992, a consenti à la société Lyonnaise de banque, sur le compte commun des époux mariés sous le régime légal de la communauté réduite aux acquêts, un nantissement sur la somme de 100.000 francs en garantie de toute somme que lui-même ou la société Adatec pourrait devoir à la banque ; que la somme objet du nantissement, prélevée sur le compte commun des époux Y..., a été déposée sur deux comptes à terme, ouverts au nom de Monsieur et Madame Y... ; que l'épouse n'a pas donné son consentement pour un tel nantissement ; qu'elle est fondée à solliciter la nullité de ce nantissement donné par son mari sans son accord ; qu'il convient, dès lors, à la suite de l'intervention dans la procédure de Madame Jocelyne Y... qui seule est titulaire de l'action en nullité, de confirmer le jugement entrepris et de débouter la société Lyonnaise de banque de l'ensemble de ses prétentions ; attendu que la société Lyonnaise de banque, qui est déboutée de son recours, doit en supporter les dépens ; que, en équité, il n'y a pas lieu de faire droit, dans le cas d'espèce, aux demandes d'indemnités au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, émanant des parties ; qu'il y a lieu de débouter chacune

de ces dernières de ses prétentions plus amples ou contraires ; PAR CES MOTIFS : La cour, Constatant que la procédure est régularisée par l'intervention de Madame Jocelyne Y..., seule titulaire de l'action en nullité, Confirme la décision entreprise. Y ajoutant, Déboute chacune des parties du surplus de ses demandes. Condamne la société Lyonnaise de banque aux dépens d'appel et autorise l'avoué de ses adversaires à recouvrer directement contre elle les dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision.

* Cet arrêt a été prononcé publiquement par le président, en présence du greffier, et a été signé par eux. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2000/07355
Date de la décision : 27/06/2002

Analyses

CAUTIONNEMENT - Cautionnement réel

Les dispositions de l'article 1415 du Code civil s'appliquent à la caution réelle qu'est le nantissement de titres ou de valeurs.Dès lors l'épouse qui n'a pas donné son consentement pour un nantissement portant sur une somme d'argent prélevées sur le compte commun des époux et qui a été déposée sur deux comptes à terme ouverts au nom des deux époux, est fondée à solliciter la nullité du nantissement donné par son mari sans son accord


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2002-06-27;2000.07355 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award