COUR D'APPEL DE LYON lère Chambre ARRET du 16 MAI 2002 Décision déférée JUGEMENT du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de SAINT-ETIENNE en date du 17 Octobre 2000
(RG :199900387 - Ch 4ème Ch) N' RG Cmir 2000!0094 Code affaire : 661 Avoués :
Parties - ME DE FOURCROY MADAME X... Suzanne demeurant : 38 Rue de la Libération 83390 PUGET VILLE Avocat:
Maître MARFAING Jean Marc APPELANTE - ---------------SCP BAUFUME-SOURBE SOCIETE LOGIS DES CADRES dont le siège social est : 15 Boulevard Albert l er 42000 SAINT-ETIENNE Représentée par ses dirigeants légaux Avocat: Maître DEALBERTI
INTIMEE --------------- INSTRUCTION CLOTUREE le 27 Février 2002 DEBATS : en audience publique du 28 Février 2002 La première chambre de la cour d'appel de Lyon, composée, lors des débats et du délibéré, de Monsieur JACQUET, président, Monsieur ROUX, conseiller, Monsieur GOURD, conseiller, en présence, lors des débats en audience publique, de Madame KROLAK, greffier, a rendu l'arrêt contradictoire suivant, EXPOSE DU LITIGE: Madame veuve X..., décédée le 24 avril 1998, avait donné à bail à la société clinique chirurgicale de la Jomayère, un tènement immobilier situé à Saint Etienne, 23 rue Jomayère, selon bail notarié du 17 novembre 1970, conclu pour une durée de 9 ans renouvelable. Ce bail stipulait l'autorisation donnée par la bailleresse à la société locataire de faire édifier une construction élevée d'un seul niveau d'une superficie de 168 m2 environ, Madame X... devenant propriétaire, par accession, àpartir de la 25ème année, de cette nouvelle construction. Un nouveau bail notarié a été établi le 17 janvier 1984 pour une durée de 9 ans à compter du 1 er septembre 1982, date de la dernière révision. Ce bail prévoyait que les constructions neuves ou les transformations seraient considérées
comme amortissables sur une durée de 25 ans à compter du 1 er janvier 1977, pour les constructions édifiées en 1976, et, à compter du ler janvier 1982, pour les constructions ou transformations effectuées en 1981, et donneraient lieu, à partir de la 25ème année (1 er janvier 2002 et 1 er janvier 2007) à un rehaussement du montant des loyers en cas de poursuite du bail. Madame X... avait, dans l'intervalle, par acte du 1 er janvier 1976, donné mandat à la société Logis des cadres de gérer ces tènements immobiliers. Reprochant à la société mandataire d'avoir établi un bail en date du 18 juillet 1994 pour une durée de neuf ans à compter du ler juin 1991, qui ne prévoit pas de compter les loyers du bâtiment C devenu la propriété de la bailleresse par voie d'accession à compter de 1995 et l'incidence juridique et financière d'une construction réalisée, par le preneur, en 1989, Madame Suzanne X... agissant tant à titre personnel qu'en qualité d'héritière de Madame Veuve X... née Jeanne Y... a fait assigner le 29 janvier 1999 la société Logis des cadres en responsabilité et à lui payer la somme de 1.057.730 francs, avec intérêts de droit à compter de l'assignation et la somme de 10.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société Logis des cadres s'est opposée à ces prétentions. Par jugement du 17 octobre 2000, le tribunal de grande instance de Saint Etienne a: - débouté Suzanne X... de sa demande, - condamné celle-ci à payer à la société Logis des cadres 3.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, outre les entiers dépens. Madame Suzanne X... a relevé appel de cette décision. Elle demande d'infirmer le jugement entrepris, de constater la faute contractuelle de la société Logis des cadres dans l'exercice de son mandat et de la condamner à lui payer la somme de 193.499 euros 88 en réparation de son préjudice et celle de 3.100 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure
civile, outre les entiers dépens. Elle fait valoir que le mandataire répond des fautes qu'il commet dans sa gestion ; que, en l'espèce, la société Logis des cadres avait mission de signer tous baux et accords ; que le mandataire n'a pas effectué à l'échéance de 25 ans les démarches nécessaires pour, d'une part, voir transférer la propriété des constructions réalisées par la société Clinique de la Jomayère en 1970 et, d'autre part, pour modifier le montant du loyer commercial afin de tenir compte de cet élément ; qu'elle a ainsi manqué à son obligation contractuelle ; qu'il convient de se rappeler que la bailleresse était âgée de 96 ans à cette époque. Elle précise, également, que le mandataire, contrairement à ce qu'il prétend, ne rapporte pas la preuve d'un accord intervenu entre les parties, au terme duquel la bailleresse devait contacter le notaire afin que ce dernier fasse le nécessaire. Elle ajoute que son préjudice peut être évalué à un manque à gagner correspondant à un loyer de 374.400 francs par an au lieu de 162.854 francs. La SA Logis des cadres demande de confirmer la décision entreprise sauf à condamner son adversaire à lui payer 762 euros 25 de dommages et intérêts pour procédure abusive et à pareille somme en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, outre les entiers dépens. Elle fait valoir que la demanderesse ne rapporte pas la preuve d'une faute imputable au mandataire ; que, par lettre recommandée du 3 janvier 1995, Madame Veuve X... avait retiré du mandat qu'elle lui avait confié l'établissement du bail, indiquant que cette tache serait confiée au notaire ; qu'elle a d'ailleurs par le passé toujours fait établir les baux par notaire ; que c'est en l'absence d'un nouveau bail notarié qu'elle-même a, le 18 juillet 1994, rédigé un contrat de location commerciale ; que Madame X... a alors exprimé le souhait que le nouveau bail soit notarié et enregistré ; que, à la suite d'une rencontre, elle a écrit à son mandant indiquant que
conformément à leur accord, la bailleresse devrait contacter son notaire afin que celui-ci fasse le nécessaire ; que Madame Suzanne X... a, elle-même, écrit en ce sens à son notaire ; que, en réalité, aucun nouveau bail n'a été rédigé et que Madame Veuve X... a été placée sous tutelle. Elle précise qu'aucune faute ne peut lui être reproché. Elle ajoute, enfin, que le préjudice dont se prévaut la demanderesse n'est pas démontré et que la clause d'accession aurait du prendre effet à compter du 1 er juin 1995 et non pas à compter du ler juin 1991, date d'effets du bail. MOTIFS DE LA DECISION Attendu que le mandataire répond non seulement du dol mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion,, que la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu'à celui qui reçoit un salaire ;que la société Logis des cadres est, en l'espèce, un mandataire salarié ; qu'il résulte du mandat d'administration de biens du 1 er janvier 1976 que la société Logis des cadres devait "gérer le bien, le louer soit par écrit soit verbalement aux prix, charges et conditions que le mandant jugera àpropos, donner ou accepter tous congés, faire dresser les états des lieux, signer tous baux et accords" ; qu'il incombait également au mandataire de "représenter le mandant devant toutes les administrations publiques ou privées, déposer et signer toutes pièces, engagements et contrats, solliciter la délivrance dé tous certificats ou autres, relatifs au bien géré" ; jIo qu'il est reproché au mandataire de ne pas avoir effectué, à l'échéance de 25 ans, les démarches nécessaires pour, d'une part, voir transférer la propriété des constructions réalisées par la société Clinique de la Jomayère en 1970 et, d'autre part, pour modifier le montant du loyer commercial afin de tenir compte de cet élément ; qu'elle aurait ainsi manqué à son obligation contractuelle ; que des constructions de bureaux, autorisées par le bail de 1970,
ont été réalisées en 1970 sur deux niveaux, en extension des bâtiments existants, au dessus des dépôts entre les bâtiments A et B ; que d'autres constructions ont été réalisées, par la suite, par le preneur, en 1976, en 1981, puis en 1989 ; que Madame X... est devenue propriétaire en 1995 des premières constructions de bureau réalisées en 1970 et pouvait obtenir un loyer supérieur à partir de cette date ; que le bail de 1994, établi par la société Logis des cadres et antérieur à cette date, n'avait pas à tenir compte de cette situation future ; mais attendu que la demanderesse fait valoir que le mandataire aurait dû, comme elle le lui demandait par courrier du 3 janvier 1995, réitérer depuis ce bail, en précisant que Madame Jeanne X... était devenue propriétaire des constructions faites en 1970 et en tenant compte de celles-ci, lors de la fixation du loyer àvenir ; qu'il résulte, cependant, du courrier en réponse de la société Logis des cadres adressé àMadame Suzanne X..., en date du 27 janvier 1995, qu'il "avait été convenu que. cette dernière devait contacter son notaire pour qu'il établisse soit un nouveau bail soit un avenant concernant plus particulièrement le fait que Madame Jeanne X... devenait propriétaire le 1 er juin 1995 de la construction édifiée en 1970" ; que ce courrier est confirmé par la lettre écrite le 30 juin 1995 par Madame Suzanne X... à M° Valancogne par laquelle elle demandait elle-même au notaire de "bien vouloir rédiger le renouvellement du bail de la clinique chirurgicale de la Jomayère en mentionnant que le premier juin 1995, Madame Jeanne X... sera propriétaire de la construction édifiée en 1970 sur les terrains de la clinique de la Jomayère" ; que Madame Suzanne X... précisait également, dans ce même courrier, qu'elle verrait ce notaire le lendemain 31 janvier à midi et qu'elle reviendrait fin février, espérant que le bail serait prêt à signer par le notaire, par elle-même et par le PDG de la clinique ; que l'établissement du
bail, demandé directement au notaire par Madame Suzanne X..., était ainsi retiré du mandat confié à la société Logis des cadres ; qu'il ne peut donc pas être reproché à cette dernière de ne pas avoir fait établir ce nouveau bail ; qu'aucune faute contractuelle n'est démontrée à l'encontre de la société Logis des cadres; qu'il convient, dès lors, de confirmer le jugement entrepris ; attendu que l'abus par l'appelant de son droit d'agir n'est pas, en l'espèce, démontré ; qu'il y a lieu, en équité, de condamner Madame Suzanne X... à payer à la société Logis des cadres 500 euros, en application de l'article 700 du NCPC, pour la procédure d'appel ; que la partie, qui est déboutée de son recours, doit en supporter les dépens ; qu'il y a lieu de débouter chacune des parties de ses prétentions plus amples ou contraires ; .. PAR CES MOTIFS La cour, Confirme la décision entreprise. Y ajoutant, Condamne Madame Suzanne X... à payer à la société Logis des cadres 500 euros, en application de l'article 700 du NCPC, pour la procédure d'appel. Déboute chacune des parties du surplus de ses demandes. Condamne Suzanne X... aux dépens d'appel et autorise l'avoué de son adversaire àrecouvrer directement contre lui les dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision. Cet arrêt a été prononcé publiquement par le président, en présence du greffier, et a été signé par eux. LE GREFFI fR,
LE PRESIDENT,