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07/12/2001 | FRANCE | N°1999/06589

France | France, Cour d'appel de Lyon, 07 décembre 2001, 1999/06589


COUR D'APPEL DE LYON

3ème Chambre ARRET du 07/12/2001 Décision déférée JUGEMENT du TRIBUNAL DE COMMERCE de LYON en date du 28 Septembre 1999

(RG :1998/02753) N° RG Cour: 1999/06589 Nature du recours : APPEL Code affaire : 533 Avoués - SCP BRONDEL-TUDELA - SCP JUNILLON-WICKY Parties SOCIETE BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS, anciennement dénommée BANQUE POPULAIRE DE LYON dont le siège social est : 141 rue Garibaldi BP 3152 69211 LYON CEDEX 03 Avocat: Maître CHAINE APPELANTE SOCIETE MEDIA OVERSEAS, anciennement dénommée HAVAS OVERSEAS, Venant aux droits de la socié

té HAVAS MARTINIQUE dont le siège social est :

83 rue du Château 92100 B...

COUR D'APPEL DE LYON

3ème Chambre ARRET du 07/12/2001 Décision déférée JUGEMENT du TRIBUNAL DE COMMERCE de LYON en date du 28 Septembre 1999

(RG :1998/02753) N° RG Cour: 1999/06589 Nature du recours : APPEL Code affaire : 533 Avoués - SCP BRONDEL-TUDELA - SCP JUNILLON-WICKY Parties SOCIETE BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS, anciennement dénommée BANQUE POPULAIRE DE LYON dont le siège social est : 141 rue Garibaldi BP 3152 69211 LYON CEDEX 03 Avocat: Maître CHAINE APPELANTE SOCIETE MEDIA OVERSEAS, anciennement dénommée HAVAS OVERSEAS, Venant aux droits de la société HAVAS MARTINIQUE dont le siège social est :

83 rue du Château 92100 BOULOGNE BILLANCOURT Avocat: Maître MARRAUD DES GROTTES

INTIMEE INSTRUCTION CLOTUREE le 25 Septembre 2001 AUDIENCE DE PLAIDOIRIES du 10 Octobre 2001 COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré Monsieur SIMON, Conseiller, désigné par ordonnance du 2 Juillet 2001 pour présider la Chambre Commerciale, en remplacement du Président légitimement empêché Monsieur SANTELLI., Conseiller Madame MIRET, Conseiller GREFFIER: Madame X..., lors des débats seulement, ARRET : CONTRADICTOIRE, prononcé à l'audience publique du 07 DEC, 2001 par Monsieur SIMON qui a signé la minute avec le Greffier. EXPOSE DU LITIGE - PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES La société HAVAS MARTINIQUE, établissement secondaire de la société HAVAS OVERSEAS a effectué de juin 1996 à janvier 1997 diverses prestations à la demande pour le compte de la société ALDAE consistant en des ventes d'espaces publicitaires sur RFO TELEVISION, en contrepartie de quoi la société ALDAE a émis un certain nombre de chèques et de lettres de change en paiement pour un montant de 865.271,89 francs pour la période de juin 1996 à avril 1997. Pour la période du 30 juin 1996 au 30 novembre 1996 la société HAVAS a encaissé au moyen de lettres de change relevé (LCR) la somme de

162.265,50 francs. Ces lettre de change ont été présentées à l'encaissement à la BANQUE POPULAIRE DE LYON ayant fait l'objet d'un paiement. Elles portaient toutes le numéro du compte figurant sur le relevé d'identité bancaire de la société ALDAE, soit le numéro 00205469056-87. A compter du 1 er décembre 1996 les lettres de change relevé sont toutes revenues impayées qu'elles aient été présentées sous le numéro du compte qui vient d'être indiqué ou sous celui :

04205469056-52 qui correspondait au numéro porté sur les chèques donnés en garantie par la société ALDAE. Ces lettres de change rejetées comportaient la mention "coordonnées erronées" ou "compte soldé" ou "RIB erroné". Cette situation a perduré quel que soit le numéro de compte utilisé. En avril 1997, un chèque de garantie d'un montant de 94.826,87 francs remis à la BANQUE NATIONALE DE PARIS le 15 avril 1997 a été présenté à la BANQUE POPULAIRE DE LYON qui l'a retourné à la société HAVAS MARTINIQUE avec la mention "défaut de provision suffisante". La société HAVAS MARTINIQUE a alors adressé plusieurs mises en demeure à la société ALDAE qui sont restées vaines. Par acte du 11 juin 1998 la société HAVAS OVERSEAS a fait citer devant le Tribunal de Commerce de LYON la BANQUE POPULAIRE DE LYON estimant qu'elle avait commis des fautes à son égard en retournant des effets de commerce sous prétexte de coordonnées erronées, que les erreurs commises ont eu pour effet de masquer la situation irrémédiablement compromise de la société ALDAE alors qu'elle poursuivait avec elle des relations commerciales aggravant ainsi la dette de la société ALDAE, que les erreurs de la BANQUE POPULAIRE DE LYON ont entraîné une perte de chance pour elle de recouvrer sa créance. Elle réclamait ainsi à la BANQUE POPULAIRE DE LYON la somme de 703.006,39 francs correspondant aux impayés de la société ALDAE. Par jugement du 28 septembre 1999 le Tribunal de Commerce de LYON a : -jugé que la BANQUE POPULAIRE DE LYON avait agi

avec légèreté et avait manqué à ses devoirs de surveillance et de contrôle, - jugé qu'elle avait commis une faute qui avait entraîné la perte d'une chance pour la société HAVAS de minimiser sa créance et de la recouvrer, - condamné la BANQUE POPULAIRE DE LYON à payer à la société HAVAS OVERSEAS la somme de 703.006,39 francs, montant des impayés de la société ALDAE outre intérêts au taux légal àcompter de l'assignation ainsi que celle de 20.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Par déclaration du 19 octobre 1999 la BANQUE POPULAIRE DE LYON a relevé appel de cette décision. Elle expose : - que c'est à tort que le premier juge. lui a fait grief d'avoir rejeté les effets sans contrôler la concordance entre le nom du bénéficiaire des effets comme des chèques et le numéro de compte quel que soit le mode de transmission, - qu'en effet, la procédure de traitement informatisée des lettres de change relevé et tout autre puisqu'il appartient au créancier de reproduire sur l'ordre remis à son propre banquier les coordonnées bancaires du tiré figurant sur le RIB du débiteur, lesquelles sont reportées sur le support informatique par la banque du tireur après vérification des références du tireur et du tiré avant de transiter par le sit SIP, - que le destinataire est identifié que par son code RIB, - que seul le tireur ou sa banque en cas d'erreur est tenu pour responsable de la mention des références erronées, la banque domiciliataire qui effectue qu'un contrôle de concordance n'a pas à effectuer de recherche en cas d'erreur, - qu'en cas d'erreur l'effet est rejeté, - que la société ALDAE n'était titulaire à la BANQUE POPULAIRE DE LYON que d'un seul compte, numéro 00205469056-87, - que la société HAVAS ainsi que son banquier connaissaient parfaitement ce numéro de compte puisque des effets ont été payés en l'utilisant, - qu'il est incompréhensible que la société HAVAS OVERSEAS ait utilisé un autre compte, - qu'elle-même n'a donc commis aucune faute, - que la société

HAVAS OVERSEAS ainsi que son banquier auraient dû prendre l'initiative pour rectifier les erreurs d'identification du destinataire, ce qu'ils n'ont pas fait commettant ainsi des négligences critiquables, - que le premier juge lui a fait grief aussi d'avoir manqué à ses devoirs de surveillance et de contrôle en ne fournissant pas à la société HAVAS des indications suffisantes, ce qui constituraient une faute au sens de l'article 1382 du Code Civil, - que cependant le banquier n'a pas à s'immiscer dans les affaires de son client, - qu'il appartient à celui qui entend engager la responsabilité du banquier de rapporter la preuve des erreurs qu'il a commises au détriment de ses intérêts en toute connaissance de cause de l'état irrémédiable de cessation de paiement de son client, - que la cessation des paiements de la société ALDAE qui est invoquée ne doit pas se confondre avec des difficultés de trésorerie même graves et prolongées, - qu'ainsi la cessation de paiement de la société ALDAE en juin 1996 ne démontrait pas pour autant qu'elle n'était pas en mesure de payer ses créanciers et qu'elle a dû avoir besoin d'un concours bancaire pour faire face à ses difficultés, - que le banquier est soumis au secret professionnel et ne peut divulguer les renseignements sur ses clients à des tiers, - qu'il lui incombait de se renseigner sur la solvabilité de cette nouvelle société, - que la société HAVAS ou son banquier en avaient la possibilité, - que la société HAVAS a fait preuve d'absence de précaution dans la conduite de ses affaires, - qu'elle n'avait pas à connaître les difficultés financières de la société ALDAE survenues dès décembre 1996 alors que les factures ont été émises antérieurement, - que le préjudice invoqué par la société HAVAS est discutable, - qu'en effet, elle n'a jamais produit les bons de commande relatif aux prestations réalisées comme elle en a été sommée, - qu'elle ne peut obtenir des dommages et intérêts équivalents à la totalité des impayés alors qu'ellemême

considère qu'elle n'a perdu qu'une chance de minimiser sa créance et de la recouvrer sans évaluer cette perte de chance qui ne peut être égale à la totalité de la créance, - que si la société ALDAE était en état de cessation des paiements depuis sa création le rejet des lettres de change n'avaient aucun incidence sur le recouvrement de ces créances, - que si au contraire elle ne l'était que depuis décembre 1996 elle ne peut reprocher à la banque d'avoir voulu lui masquer une situation qui n'existait pas encore, - que la société HAVAS OVERSEAS n'a pas justifié de l'admission de sa créance, - qu'en conclusion, elle n'a subi aucun préjudice, - que l'exécution provisoire était abusive, - qu'elle a imposé de payer la somme de 759.369,20 francs le 29 octobre 1999, - qu'elle sollicite ainsi la restitution de cette somme avec les intérêts à compter du paiement effectué sous la contrainte. Elle réclame en conséquence que le jugement déféré soit réformé, la société HAVAS OVERSEAS étant débouté de toutes ses demandes et condamner à lui verser la somme qu'elle a versée indûment. Elle sollicite que lui soit attribuée la somme de 100.000 francs à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et pour compenser le préjudice qu'elle a subi de ce fait. Elle demande enfin que lui soit allouée la somme de 50.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. XXX La société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, venant aux droits de la société HAVAS MARTINIQUE réplique et expose - que pendant les six premiers mois les lettres de change relevé présentés à l'encaissement ont été honorés sous le numéro de compte 00205469056-87, - qu'il appartenait à la banque de contrôler la concordance entre les mains du bénéficiaire des effets comme des chèques et le numéro de compte quel que soit le mode de transmission, - qu'ainsi, le traitement informatisé des lettres de change relevé s'effectuant de banque à banque, la banque domiciliataire des lettes

de change relevé de sa cliente, la société ALDAE a commis une faute en rejetant lesdites lettres de change, - qu'il appartenait à la banque du tireur, en espèce la BANQUE NATIONALE DE PARIS, banque de la société HAVAS de procéder à la saisie informatique des données inscrites sur les lettres de change, - que la mention du numéro de banque ne figure pas parmi les mentions obligatoires que le créancier doit apposer, - que la vérification des noms du tireur comme du tiré par la banque du tireur, la BANQUE NATIONALE DE PARIS, a donc été correctement effectuée, - que la BANQUE POPULAIRE DE LYON a commis une faute en rejetant les effets qui portaient un bon numéro de compte, - que la BANQUE POPULAIRE DE LYON a manqué à ses devoirs de surveillance et de contrôle en ne fournissant pas à la société HAVAS MARTINIQUE les indications précises dont elle avait besoin, - qu'en effet la BANQUE POPULAIRE DE LYON ne pouvait ignorer les difficultés de la société ALDAE, - qu'elle a en outre masqué la situation irrémédiablement compromise de la société ALDAE au détriment des intérêts de la société HAVAS, - que les premiers juges l'ont ainsi constaté, - que la date de cessation des paiements est du 17 juin 1996, - que la société ALDAE connaissait déjà les difficultés qui l'ont amenées à ne plus faire face à son passif exigible avec son actif disponible, - qu'ainsi la situation de la société ALDAE était désespérée, - que la banque a commis une faute en conséquence, - que la banque doit mesurer ces concours pour qu'ils soient compatibles avec le fonds de roulement de l'entreprise ainsi qu'avec ses fonds propres et l'évolution du chiffre d'affaires, - qu'il appartient à la banque et non au créancier de s'assurer avant toute intervention qu'elle est àmême de prouver la solvabilité de sa cliente, - qu'ainsi les manquements antérieurs au rejet des lettres de change de la société ALDAE ont été connus, - que la banque a rejeté les lettres de change à plusieurs reprises pour coordonnées erronées et non pour

défaut de provision, ce qui a eu pour objet de masquer la situation irrémédiablement compromise de la société ALDAE aux yeux de la société HAVAS, - qu'ainsi la société HAVAS ne pouvait se douter de l'insolvabilité de la société ALDAE et en conséquence ne pouvait mettre un terme à leurs relations commerciales, - que le jugement de liquidation judiciaire du 17 juin 1997 est devenu définitif, - qu'en juin 1996 la BANQUE POPULAIRE DE LYON a payé pour le compte de la société HAVAS des lettres de change pour 170.265 francs, - que le fait d'honorer les premières traites ne signifient pas que la cessation des paiements de la société ALDAE n'était pas établie à cette date, - qu'ainsi la banque a soutenu artificiellement la société ALDAE la laissant croire comme solvable, - qu ainsi la société HAVAS MARTINIQUE a subi un très lourd préjudice à raison du rejet des lettres de change relevé émises à la suite de ces impayés rejetés abusivement, - que ce préjudice a été aggravé par le fait que la banque avait préalablement accepté de payer lesdits effets émis par la société ALDAE qui était pourtant à cette époque en état de cessation des paiements, - que la banque ne peut se retrancher derrière le secret professionnel alors qu'elle avait une obligation d'information, - que lorsqu'elle est interrogée sur la solvabilité de son client, elle engage sa responsabilité si elle ne respecte pas son devoir de prudence en ne fournissant pas les indications suffisamment précises, - que la faute de la banque lui a fait perdre toute chance de se faire payer sa créance puisqu'elle n'a pu engager en temps utile le recouvrement des sommes dues, - qu'elle n'aurait pas continué à accepter devoir émettre des lettres de change relevé de la part de la banque ALDAE en paiement si elle avait connu la véritable situation et si ces lettres avaient été rejetées pour défaut de provision, - que le fait que la créance soit admise au passif de la société ALDAE n'a aucune incidence sur l'existence du préjudice. Elle

demande en conséquence que le jugement déféré soit confirmé en toutes ses dispositions et que la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS soit déboutée de toutes ses demandes. Elle réclame que la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS soit condamnée à lui payer la somme de 50.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. XXX L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 septembre 2001 MOTIFS ET DECISION Attendu que la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, venant aux droits de la société HAVAS MARTINIQUE, entend engager la responsabilité de la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS, banque de la société ALDAE avec laquelle elle entretenait des relations d'affaires, sur le fondement délictuel de l'article 1382 du Code Civil au motif qu'elle est doublement fautive, d'une part pour avoir rejeté les lettres de change relevé que la société ALDAE lui avait remises en paiement de prestations qu'elle avait exécutées pour son compte, à raison du caractère erroné du numéro de compte du tiré, alors qu'il lui appartenait, selon elle, en tant que banque domiciliataire de vérifier la conformité du numéro avec le nom du tiré et d'autre part en ne communiquant pas aux tiers, et notamment à elle-même en sa qualité de créancière de la société ALDAE, les informations qu'elle détenait sur la solvabilité de cette dernière, ce qui lui aurait évité, si elles les avaient connues, de commettre l'erreur de poursuivre des relations contractuelles avec elle et d'aggraver de la sorte son préjudice à raison du rejet de ses lettres de change relevé restées impayées ; I/ Sur les rejets par la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS des lettres de change relevé remis par HAVAS MARTINIQUE en paiment et acceptés par la société ALDAE Attendu que les lettres de change prennent la dénomination de lettres de change relevé - LCR -lorsqu'elles sont établies par procédé informatique ; Attendu qu'il appartient à la banque du tireur, en l'occurrence la BANQUE NATIONALE DE PARIS, de procéder, lorsque son

client lui remet la lettre de change relevé, à la saisie informatique des données inscrites sur le titre papier, qui comporte les mentions obligatoires du titre cambiaire tel que défini àl'article L 511-1 du Code de Commerce (ancien article 110), après avoir vérifié les références du tireur ainsi que celles du tiré ; Attendu qu'il lui est en effet indispensable d'obtenir du débiteur par le relevé d'identité bancaire remis àcette occasion toutes les informations utiles à l'identification bancaire du débiteur (le tiré), notamment sa domiciliation bancaire ; Attendu que ce sont ces indications qui sont reportées, selon un formalisme rigoureux, sur le support informatique, avant d'être transmis par la banque du créancier au moyen du système interbancaire de télécompensation, SIT, au centre de traitement des banques pour qu'il le remette ensuite à la banque du débiteur (banque domiciliataire) aux fins d'en effectuer le paiement ; Attendu que les mentions obligatoires du titre au sens du droit cambiaire ainsi que celles du RIB sont ainsi indispendables à l'accès du circuit informatique, à défaut de quoi le titre est rejeté ; Attendu qu'il résulte des pièces (N° 1, 8,10 et 19) produites par la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS que la BANQUE NATIONALE DE PARIS a porté sur l'effet le numéro 0420546905687, alors que le numéro de compte figurant. sur le RIB .de la société ALDAE était le numéro 00205469056-87 ; Attendu que la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS en portant sur les lettres de change relevé qui ont été rejetées l'indication "coordonnées erronées" faisait ainsi clairement connaître à la société HAVAS MARTINIQUE la raison du refus de l'effet, qui trouvait sa cause dans une inexactitude des mentions qui devaient y figurer, rendant impossible l'identification du tiré, Attendu qu'en effet le contrôle de la banque domiciliataire se limite à vérifier la concordance entre les mentions portées sur la lettre de change relevé et le destinataire de l'effet qui ne peut être

identifié que par le code figurant sur le RIB, après que la banque du tireur eut procédé à la dématérialisation de l'effet ; Attendu qu'il incombait en conséquence à la société HAVAS MARTINIQUE de rechercher auprès de sa banque si les énonciations du RIB transmis par la société ALDAE avaient été correctement reproduites sur le support informatique et pour le cas où elles l'auraient été de rapporter la preuve que la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS, banque domiciliataire, aurait commis elle-même une faute en rejetant sans motif légitime les effets qui, selon elle, avaient été correctement renseignés ; Attendu que force est de constater que la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, ne démontre pas la faute de la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS alors qu'il lui appartenait dès qu'elle en a eu connaissance de rectifier l'erreur d'identification de la société ALDAE, sa négligence à le faire lui étant imputable et à tout le moins sa banque, la BANQUE NATIONALE DE PARIS; Attendu qu'il convient dans ces conditions de rejeter le moyen avancé à ce titre par la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS ; II/ Sur le défaut d'information de la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS Attendu qu'il n'appartenait pas à la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS d'informer la société HAVAS MARTINIQUE de la situation de la société ALDAE autrement que par les motifs des rejets qui étaient portés sur les lettres de change relevé ; Attendu que le banquier n'a pas en effet à s'immiscer dans les affaires de son client ; Attendu qu'il incombe à la société HAVAS OVERSEAS, devenue la société MEDIA OVERSEAS, de prouver que la société ALDAE était dans un état irrémédiable de cessation des paiements au moment où elle a rejeté les effets qui lui étaient transmis pour paiement et qui à cette époque la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS en avait connaissance, Attendu que le seul fait que la société ALDAE ait été mise en liquidation judiciaire le 17 juin 1997 par un jugement rendu par le

Tribunal mixte de Commerce de FORT DE FRANCE ne saurait y suffire, la date de cessation de paiement résultant de l'extrait K BIS du registre du Commerce et des Sociétés de la société ALDAE y figurant à la date du 10 juin 1997, de sorte que cette dernière doit seule être retenue àdéfaut de celle du 17 juin 1996 mentionnée dans le jugement, puisque la société ALDAE n'ayant été immatriculé au registre du Commerce et des Sociétés que le 13 mai 1996 n'a pu à cette dernière date être en état de cessation des paiements un mois seulement s'étant écoulé depuis son début d'activité ; Attendu qu'à supposer même qu'elle ait connu les difficultés financières dans lesquelles se trouvait sa cliente, la société ALDAE, la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS ne pouvait divulguer pour autant à des tiers, la société HAVAS MARTINIQUE en était, les renseignements qu'elle détenait sur la situation de sa cliente, la société ALDAE, étant elle-même tenue au secret professionnel ; Attendu que la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS, domiciliataire des lettres de change relevé, ne peut avoir commis une faute pour avoir rejeté ces effets, dès lors qu'ils comportaient des mentions erronées ou incomplètes ne permettant pas l'identification du tiré, puisque la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, ne démontre pas que la mention "coordonnées erronées" serait contraire à la réalité du motif de rejet invoqué, mais n'aurait été portée que dans le seul dessein de le tromper sciemment sur la situation véritable de la société ALDAE en lui dissimulant l'état d'insolvabilité caractérisée dans laquelle, selon elle, elle était; Attendu que la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, ne peut en tirer en conséquence aucun argument en faveur de ses allégations ; Attendu qu'il incombait à la société dénommée à l'époque HAVAS MARTINIQUE de se renseigner sur l'état financier d'une société avec laquelle elle était régulièrement en relation d'affaires, l'existence de ces relations lui donnant plus facilement

accès à l'information ; Attendu que faute de l'avoir fait, comme il appartenait à un professionnel avisé, elle ne peut rechercher en responsabilité la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS sur un fondement délictuel, aucune faute de la banque n'étant établie ; Attendu qu'il y a lieu en conséquence d'écarter ce moyen soulevé à ce titre par la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS ; Attendu que, dans ces conditions, il y a lieu de débouter la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, de toutes ses demandes formées à l'encontre de la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS en ce qu'elles sont mal fondées et de réformer en conséquence le jugement déféré ; III/ Sur la demande en restitution de la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS Attendu que du fait du rejet de toutes les prétentions de la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, il convient de faire droit à la demande en restitution formée par la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS qui a dû payer au titre de l'exécution provisoire du jugement entrepris, la somme de 759.369,20 francs à la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, et de condamner en conséquence la société MEDIA OVERSEAS au paiement de cette somme à la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS; Attendu que cette somme a été versée à l'huissier de justice chargé de l'exécution le 29 octobre 1999 ; Attendu que cependant en application de l'article 1153 du Code Civil, les intérêts au taux légal s'appliqueront sur le montant de la condamnation à compter de la signification du présent arrêt ordonnant la restitution de la somme versée au titre de l'exécution provisoire de la décision entreprise ; IV/ Sur les autres demandes Attendu que la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS ne démontre pas que par cette procédure la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, ait porté atteinte à son crédit; Attendu qu'elle doit être en conséquence déboutée de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts ; Attendu que l'équité commande d'allouer à la BANQUE POPULAIRE LOIRE

ET LYONNAIS la somme de 10.000 francs pour l'indemniser des frais irrépétibles qu'elle a dû engager-, Attendu que la société MEDIA OVERSEAS, qui succombe, doit supporter les dépens; PAR CES MOTIFS LA COUR, Réforme le jugement déféré ; Et statuant à nouveau Déclare mal fondée la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, dans ses demandes formées à l'encontre de la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS et l'en déboute ; Condamne en conséquence la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, à payer àla BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS la somme de 759.369,20 francs qu'elle lui a versée au titre de l'exécution provisoire dont était assorti le jugement querellé ; Dit que les intérêts au taux légal s'appliqueront sur cette somme à compter de la signification du présent arrêt ; Déboute la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS de sa demande en dommages et intérêts formée contre la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS ; Condamne la société HAVAS OVERSEAS, devenue MEDIA OVERSEAS, à payer à la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS la somme de 10.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que les dépens qui seront recouvrés p CP BRONDEL etamp; TUDELA, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 u Nouve u Code de Procédure Civile. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 1999/06589
Date de la décision : 07/12/2001

Analyses

BANQUE - Responsabilité - Effets de commerce - Lettre de change - Lettre de change-relevé - Paiement

En matière de lettres de change relevé, lesquelles sont établies par informa- tique, il appartient à la banque du tireur de procéder à la saisie informatique des données inscrites sur le titre papier, en reportant les informations utiles à l'identification bancaire du débiteur, le tiré, notamment sa dénomination bancaire portée sur le R.I.B. remis à cette occasion, à défaut de laquelle le tiré ne peut pas être identifié par la banque domiciliataire, et donc le titre est rejeté.Une fois que la banque du tireur a procédé à la dématérialisation de l'effet, le contrôle de la banque domiciliataire ne peut se limiter qu'à la vérification de concordance entre les mentions portées sur la lettre de change relevé et le destinataire de l'effet, lequel ne peut plus être identifié que par le seul code figurant sur le RIB. Ainsi, en présence d'inexactitudes portées sur le titre par la banque du tireur, il appartient à celui-ci de rectifier l'erreur d'identification dès qu'il en a eu connaissance, dès-lors que la banque domiciliataire en portant sur les lettres de change-relevé rejetés, la mentions "coordonnées erronées" fait clairement connaître au tireur les raisons du refus de l'effet


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2001-12-07;1999.06589 ?
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